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14/04/2021 | FRANCE | N°19-19066

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 14 avril 2021, 19-19066


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

JL

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 14 avril 2021

Cassation partielle

Mme BATUT, président

Arrêt n° 321 F-D

Pourvoi n° S 19-19.066

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 14 AVRIL 2021

Mme [J] [Y], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi

n° S 19-19.066 contre l'arrêt rendu le 9 mai 2019 par la cour d'appel de Versailles (2e chambre, 2e section), dans le litige l'opposant à M. [B]...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

JL

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 14 avril 2021

Cassation partielle

Mme BATUT, président

Arrêt n° 321 F-D

Pourvoi n° S 19-19.066

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 14 AVRIL 2021

Mme [J] [Y], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° S 19-19.066 contre l'arrêt rendu le 9 mai 2019 par la cour d'appel de Versailles (2e chambre, 2e section), dans le litige l'opposant à M. [B] [H], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Buat-Ménard, conseiller référendaire, les observations de la SCP Spinosi, avocat de Mme [Y], et l'avis de Mme Marilly, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 2 mars 2021 où étaient présents Mme Batut, président, M. Buat-Ménard, conseiller référendaire rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Berthomier, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 9 mai 2019), un jugement a prononcé le divorce de M. [H] et de Mme [Y], mariés sous le régime de la communauté légale. Des difficultés se sont élevées lors des opérations de liquidation et partage de leurs intérêts patrimoniaux.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses première et troisième branches, ci-après annexé

2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

3. Mme [Y] fait grief à l'arrêt de la condamner à payer la somme de 38 000 euros à M. [H] au titre du détournement d'actifs appartenant à la communauté, alors « que le recel de communauté suppose une intention frauduleuse de l'époux qui tente de rompre à son profit l'égalité du partage ; qu'en l'espèce, pour dire que Mme [Y] avait détourné des actifs appartenant à la communauté et la condamner, en conséquence, à verser la somme de 38 000 euros à M. [H], la cour d'appel s'est bornée à constater que les relevés bancaires de Mme [Y] révélaient, au 3 juin 2013, un solde d'épargne d'un montant de 41 296,03 euros et, au 19 juin 2013, un solde d'épargne d'un montant de 769,03 euros, et que Mme [Y] avait procédé à des virements pour un montant total de 38 000 euros les 10, 16 et 17 juin 2013, sans nullement caractériser l'intention frauduleuse de Mme [Y] ; qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1477 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1477 du code civil :

4. Il résulte de ce texte que la sanction du recel de communauté suppose l'intention frauduleuse de rompre l'égalité du partage.

5. Pour constater que Mme [Y] a détourné des actifs provenant de la communauté et lui faire application des sanctions du recel de communauté, l'arrêt retient, d'abord, qu'elle a procédé, peu de temps avant le dépôt de sa requête en divorce, à des virements pour un montant total de 38 000 euros, ensuite, que tout en alléguant le remboursement de dettes familiales et de dettes communes, elle ne justifie d'aucun début de preuve tendant à rapporter la sincérité de ses affirmations, enfin, que M. [H] a ainsi été privé de sa part de communauté.

6. En statuant ainsi, sans caractériser l'élément intentionnel du recel allégué, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne Mme [Y] à payer la somme de 38 000 euros à M. [H] au titre du détournement d'actifs appartenant à la communauté, l'arrêt rendu le 9 mai 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;

Condamne M. [H] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze avril deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Spinosi, avocat aux Conseils, pour Mme [Y]

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir, en partie, infirmé le jugement déféré et d'avoir condamné Mme [Y] à payer la somme de 38 000 euros à M. [H] au titre du détournement d'actifs appartenant à la communauté ;

Aux motifs que « Pour justifier du détournement d'actif commun ayant existé avant la date du dépôt de la requête en divorce de Mme [Y] (19 juin 2013), M. [H] produit des relevés bancaires de la Caisse d'Épargne Île-de-France au nom de "Mme [H]", dont il ressort que celle-ci disposait des sommes suivantes à la date du 3 juin 2013 :
- comptes courants : 2.554,79 €
- épargne liquide :
* livret développement durable : 12.063,13 €
* livret A : 19.195,83 €
* livret grand format : 3.707,87 €
soit à ce titre, un solde de 41.296,03 €.

Le relevé à la date du 19 juin 2013 mentionne :
- comptes courants : 1.966,97 € (-587,82 €)
- épargne liquide :
* livret développement durable : 63,13 € (-12.000 €)
* livret A : 195,83 € (-19.000 €)
* livret grand format : 207,87 € (-3.500 €)
soit à ce titre, un solde de 769,03 € (-34.500 € au titre de l'épargne liquide).

Le compte de Mme [Y] fait ressortir qu'elle a procédé à divers virements "PAR INT" (par Internet), soit 4 virements de 5.000 € les 10 juin, 16 et 17 juin 2013 et à un virement de 18.000 € "virement LIV B Maman" le 4 juin 2013 (soit 38.000 €).

Par ailleurs, M. [H] justifie au vu des relevés bancaires versés (relevés patrimoniaux d'épargne salariale de son employeur, la société HSBC), qu'il détenait la somme de 2.920,65 € au 31 décembre 2011, celle de 2.929,50 € au 31 décembre 2013 et celle de 869,70 € au 1er mai 2014 au titre de son épargne entreprise Natixis, son précédent employeur étant la société Consort.

Par ailleurs, selon son relevé de Caisse d'Épargne, il détenait en ses livres à la date du 1er novembre 2013 la somme de 6.265,79 €.

Tout en alléguant le remboursement de dettes familiales et de dettes communes, Mme [Y] ne justifie d'aucun début de preuve tendant à rapporter la sincérité de ses affirmations, n'ayant produit que des pièces de procédure au soutien de ses intérêts.

S'agissant d'un litige portant sur la liquidation du régime matrimonial des ex-époux, la circonstance que le jugement de divorce ait fixé les effets du divorce dans les rapports entre les époux, en ce qui concerne leurs biens, à la date du prononcé de l'ordonnance de non-conciliation, soit le 24 octobre 2013, est inopérant.

Les époux étant mariés sous le régime de la communauté et ayant tous deux une activité professionnelle selon l'acte de mariage (informaticien /consultante), ils sont présumés avoir participé l'un et l'autre à l'actif de communauté, qui avait vocation à être partagé par parts égales entre eux.

M. [H] ayant été privé de sa part de communauté et le divorce étant devenu définitif, il convient de faire application des règles du recel de communauté prévoyant à titre de sanction en son article 1477 alinéa 1er du code civil, que celui des deux époux qui aurait détourné ou recelé quelques effets de la communauté, est privé de sa portion dans lesdits effets.

En conséquence, il convient de constater que Mme [Y] a détourné des actifs appartenant à la communauté, de dire que le montant de ces actifs déterminés au vu des documents bancaires versés aux débats à la somme de 38.000 €, reviendra en totalité à M. [H] et de condamner Mme [Y] à verser cette somme de 38.000 € à M. [H] » ;

Alors, d'une part, que le recel de communauté suppose que l'époux qui tente de rompre à son profit l'égalité du partage s'approprie une valeur de la communauté ; qu'en l'espèce, pour dire que Mme [Y] avait détourné des actifs appartenant à la communauté et la condamner, en conséquence, à verser la somme de 38 000 euros à M. [H], la cour d'appel s'est bornée à constater que les relevés bancaires de Mme [Y] révélaient qu'elle avait procédé à quatre virements par Internet de 5 000 euros les 10, 16 et 17 juin 2013 et à un virement de 18 000 euros intitulé « virement LIV B Maman » le 4 juin 2013, sans rechercher qui était le destinataire des quatre virements de 5 000 euros et sans donc constater que Mme [Y] s'était approprié, même indirectement, ces sommes ; qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1477 du code civil ;

Alors, d'autre part, que le recel de communauté suppose une intention frauduleuse de l'époux qui tente de rompre à son profit l'égalité du partage ; qu'en l'espèce, pour dire que Mme [Y] avait détourné des actifs appartenant à la communauté et la condamner, en conséquence, à verser la somme de 38 000 euros à M. [H], la cour d'appel s'est bornée à constater que les relevés bancaires de Mme [Y] révélaient, au 3 juin 2013, un solde d'épargne d'un montant de 41 296,03 euros et, au 19 juin 2013, un solde d'épargne d'un montant de 769,03 euros, et que Mme [Y] avait procédé à des virements pour un montant total de 38 000 euros les 10, 16 et 17 juin 2013, sans nullement caractériser l'intention frauduleuse de Mme [Y] ; qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1477 du code civil ;

Alors, enfin, que la contradiction entre les motifs et le dispositif équivaut à un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a dit que Mme [Y] avait détourné des actifs appartenant à la communauté et l'a condamnée, en conséquence, à verser à M. [H] la somme de 38 000 euros, après pourtant avoir constaté que la différence entre le solde de l'épargne liquide de Mme [Y] le 3 juin 2013 et le solde de cette épargne le 19 juin 2013 auprès de la Caisse d'Épargne s'élevait à -34 500 euros ; qu'en se contredisant de la sorte, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 19-19066
Date de la décision : 14/04/2021
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 09 mai 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 14 avr. 2021, pourvoi n°19-19066


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Spinosi

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.19066
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