LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
COUR DE CASSATION
JL
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QUESTION PRIORITAIRE
de
CONSTITUTIONNALITÉ
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Audience publique du 1er avril 2021
RENVOI
M. CHAUVIN, président
Arrêt n° 404 FS-P
Affaire n° S 21-40.004
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 1ER AVRIL 2021
La cour d'appel d'Angers a transmis à la Cour de cassation, suite à l'arrêt rendu le 12 janvier 2021, la question prioritaire de constitutionnalité, reçue le 15 janvier 2021, dans l'instance mettant en cause :
D'une part,
1°/ M. A... T..., domicilié [...] ,
2°/ Mme D... T..., épouse O..., domiciliée [...] ,
3°/ Mme R... T..., épouse F..., domiciliée [...] ,
4°/ Mme H... T..., épouse N..., domiciliée [...] ,
5°/ Mme X... E..., veuve T..., domiciliée [...] ,
D'autre part,
la société Alter public, dont le siège est [...] ,
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Djikpa, conseiller référendaire, les observations orales de la SCP Didier et Pinet, avocat des consorts T..., de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Alter public, et l'avis de M. Burgaud, avocat général référendaire, auquel les parties, invitées à le faire, n'ont pas souhaité répliquer, après débats en l'audience publique du 30 mars 2021 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Djikpa, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, M. Nivôse, Mme Greff-Bohnert, MM. Jacques, Boyer, Mme Abgrall, conseillers, Mmes Georget, Renard, M. Zedda, conseillers référendaires, M. Burgaud, avocat général référendaire, et Mme Besse, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. La société Alter public a saisi le juge de l'expropriation d'une demande de fixation des indemnités revenant à M. A... T... et Mmes D..., R..., H... et X... T..., à la suite de l'expropriation de plusieurs parcelles leur appartenant.
Enoncé de la question prioritaire de constitutionnalité
2. Par arrêt du 12 janvier 2021, la cour d'appel d'Angers a transmis une question prioritaire de constitutionnalité ainsi rédigée :
« L'article L. 322-2 [anciennement L13-15 I] du code de l'expropriation porte-t-il une atteinte injustifiée au droit de propriété, garanti par les articles 2 et 17 de la Déclaration de 1789, et qui exige une juste et préalable indemnisation de l'exproprié, en tant qu'il ne permet pas le bénéfice d'une indemnité accessoire, dans l'hypothèse de l'expropriation d'un bien, qui serait indivisible de sa revente ultérieure par l'expropriant ? »
Examen de la question prioritaire de constitutionnalité
3. La disposition contestée est applicable au litige.
4. Elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.
5. La question posée présente un caractère sérieux.
6. En effet, la règle d'évaluation des biens expropriés selon leur usage effectif à la date de référence et sans prise en compte des changements de valeur intervenus depuis cette date, lorsqu'elle est appliquée à l'évaluation d'un bien destiné à être revendu par l'expropriant dans des conditions déjà déterminées et lui permettant de bénéficier d'une plus-value certaine, est de nature à créer un déséquilibre entre les intérêts de l'exproprié et de l'expropriant, celui-ci étant protégé de la spéculation foncière qui aurait pu bénéficier à l'exproprié, tout en étant assuré d'en tirer lui-même profit.
7. Ces dispositions sont donc susceptibles, en l'absence d'une indemnisation spécifique dans une telle hypothèse, de porter atteinte à l'exigence selon laquelle nul ne peut être privé de sa propriété que sous la condition d'une juste et préalable indemnité.
9. En conséquence, il y a lieu de renvoyer la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
RENVOIE au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier avril deux mille vingt et un.