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16/03/2021 | FRANCE | N°20-87141

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 16 mars 2021, 20-87141


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° H 20-87.141 F-P

N° 00469

GM
16 MARS 2021

CASSATION

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 16 MARS 2021

Le procureur général près la cour d'appel de Douai a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de ladite cour d'appel, en date du 18 décembre 2020,

qui, dans l'information suivie contre M. C... R... des chefs de direction et organisation d'un groupement ayant pour objet une...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° H 20-87.141 F-P

N° 00469

GM
16 MARS 2021

CASSATION

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 16 MARS 2021

Le procureur général près la cour d'appel de Douai a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de ladite cour d'appel, en date du 18 décembre 2020, qui, dans l'information suivie contre M. C... R... des chefs de direction et organisation d'un groupement ayant pour objet une activité illicite liée aux stupéfiants en récidive, complicité de blanchiment et association de malfaiteurs en récidive, a infirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention prolongeant sa détention provisoire et l'a placé sous contrôle judiciaire.

Des mémoires, en demande et en défense, ainsi que des observations complémentaires ont été produits.

Sur le rapport de Mme Thomas, conseiller, les observations de la SCP Spinosi, avocat de M. C... R..., et les conclusions de M. Croizier, avocat général, après débats en l'audience publique du 16 mars 2021 où étaient présents M. Soulard, président, Mme Thomas, conseiller rapporteur, M. Bonnal, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. Mis en examen des chefs des crimes et délits précités le 6 juin 2019, M. R... a fait l'objet d'une incarcération provisoire le même jour puis a été placé en détention provisoire le 11 juin 2019.

3. Par ordonnance du 3 juin 2020, le juge des libertés et de la détention a prolongé sa détention pour une durée de quatre mois.

4. Le 4 juin 2020, ce magistrat a adressé à l'établissement pénitentiaire détenant M. R... une note pour indiquer que s'agissant d'un mandat de dépôt criminel, la durée de quatre mois indiquée par erreur dans l'ordonnance devait être remplacée par celle de six mois.

5. Par ordonnance du 26 novembre 2020, le juge des libertés et de la détention a ordonné une nouvelle prolongation de la détention provisoire de M. R....

6. Celui-ci a relevé appel de cette décision.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

7. Le moyen, pris de la violation des articles 145-2 et 591 du code de procédure pénale, critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré irrégulière l'ordonnance de prolongation de la détention provisoire en date du 26 novembre 2020, alors que, lorsque le juge des libertés et de la détention ordonne le placement en détention provisoire, il ne tient d'aucune disposition légale le pouvoir de fixer à l'avance une durée de détention inférieure à celle prévue par la loi, qu'il en va de même en matière de prolongation de la détention provisoire, l'article 145-2 ne conférant pas de pouvoir plus étendu à ce magistrat en la matière et qu'en l'espèce, la prolongation, intervenant en matière criminelle, était nécessairement ordonnée pour la durée de six mois fixée par la loi.

Réponse de la Cour

Vu l'article 145-2 du code de procédure pénale :

8. Il se déduit de ce texte que le juge des libertés et de la détention qui ordonne, en matière criminelle, la prolongation de la détention provisoire d'une personne ne peut, sans excéder ses pouvoirs, limiter à l'avance cette mesure à une durée inférieure à celle de six mois prévue par cette disposition.

9. Pour constater que le titre de détention de M. R... est venu à expiration le 6 octobre 2020, ordonner sa mise en liberté et le placer sous contrôle judiciaire, l'arrêt attaqué énonce que si, lors d'un placement en détention provisoire, le juge des libertés et de la détention ne peut fixer à l'avance une durée de détention inférieure à celle prévue par la loi, l'examen d'un dossier instruit depuis plusieurs mois permet à ce magistrat de disposer d'éléments d'appréciation et de fixer la durée de la prolongation en fonction de sa propre analyse, sans qu'aucune disposition du code de procédure pénale ne lui interdise de prévoir, en matière criminelle, une durée de prolongation inférieure à six mois.

10. Les juges ajoutent que la mention dans l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du 3 juin 2020 d'une prolongation de la détention pour une durée de quatre mois ne peut dès lors être analysée comme une erreur matérielle et que l'information communiquée à l'établissement pénitentiaire n'a ni valeur juridique ni effet sur l'ordonnance.

11. Ils en concluent que le titre de détention de M. R... est venu à expiration le 6 octobre 2020 et que la seconde ordonnance de prolongation du 26 novembre 2020, qui concerne un titre de détention inexistant, est dès lors entachée de nullité.

12. En statuant ainsi, la chambre de l'instruction a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé.

13. En effet, la prolongation de la détention provisoire criminelle étant nécessairement de six mois, sans préjudice d'une mise en liberté avant l'expiration de cette durée, la mention, dans l'ordonnance du juge des libertés et de la détention, d'une telle prolongation pour une durée de quatre mois était inopérante et insusceptible de produire des effets.

14. La cassation est par conséquent encourue.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Douai, en date du 18 décembre 2020, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;

RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Douai, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil.

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Douai et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé.

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le seize mars deux mille vingt et un.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 20-87141
Date de la décision : 16/03/2021
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

DETENTION PROVISOIRE - Ordonnances - Ordonnance du juge des libertés et de la détention - Ordonnance de prolongation de la détention provisoire - Durée de la détention - Pouvoirs du juge des libertés et de la détention

Il se déduit de l'article 145-2 du code de procédure pénale que le juge des libertés et de la détention qui ordonne, en matière criminelle, la prolongation de la détention provisoire d'une personne mise en examen ne peut, sans excéder ses pouvoirs, limiter à l'avance cette mesure à une durée inférieure à celle de six mois prévue par cette disposition. De ce fait, la mention, dans l'ordonnance du juge des libertés et de la détention, d'une telle prolongation pour une durée de quatre mois est inopérante et insusceptible de produire des effets. Encourt en conséquence la censure l'arrêt d'une chambre de l'instruction qui affirme que l'ordonnance prolongeant une nouvelle fois la détention provisoire à compter de l'expiration du délai de six mois est entachée de nullité comme concernant un titre de détention inexistant, expiré à l'issue de la période de quatre mois fixée par la précédente prolongation, et ordonne la mise en liberté de la personne ainsi que son placement sous contrôle judiciaire


Références :

article 145-2 du code de procédure pénale.

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Douai, 18 décembre 2020

A rapprocher :Crim., 21 novembre 2006, pourvoi n° 06-86937, Bull. crim. 2006, n° 291 (rejet)

arrêt cité ;Crim., 7 février 2017, pourvoi n° 16-86761, Bull. crim. 2017, n° 36 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 16 mar. 2021, pourvoi n°20-87141, Bull. crim.
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle

Composition du Tribunal
Président : M. Soulard
Avocat(s) : SCP Spinosi

Origine de la décision
Date de l'import : 23/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:20.87141
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