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20/01/2021 | FRANCE | N°19-20680

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 20 janvier 2021, 19-20680


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 20 janvier 2021

Rejet

Mme BATUT, président

Arrêt n° 75 F-P

Pourvoi n° W 19-20.680

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 20 JANVIER 2021

1°/ M. M... D...,

2°/ Mme N... X..., épouse D...,

domic

iliés tous deux [...],

ont formé le pourvoi n° W 19-20.680 contre l'arrêt rendu le 17 mai 2019 par la cour d'appel de Rennes (2e chambre), dans le litige le...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 20 janvier 2021

Rejet

Mme BATUT, président

Arrêt n° 75 F-P

Pourvoi n° W 19-20.680

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 20 JANVIER 2021

1°/ M. M... D...,

2°/ Mme N... X..., épouse D...,

domiciliés tous deux [...],

ont formé le pourvoi n° W 19-20.680 contre l'arrêt rendu le 17 mai 2019 par la cour d'appel de Rennes (2e chambre), dans le litige les opposant à la société Banque populaire grand Ouest, société coopérative de banque populaire, dont le siège est [...] , venant aux droits de la société Crédit maritime Bretagne Normandie, défenderesse à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les six moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Serrier, conseiller référendaire, les observations de la SCP Richard, avocat de M. et Mme D..., de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Banque populaire grand Ouest, et l'avis de M. Chaumont, avocat général, après débats en l'audience publique du 24 novembre 2020 où étaient présents Mme Batut, président, M. Serrier, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Randouin, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 17 mai 2019), suivant acte sous seing privé du 24 décembre 2008, la société Crédit maritime Bretagne Normandie, aux droits de laquelle se trouve la société Banque populaire grand Ouest (la banque), a consenti à M. et Mme D... (les emprunteurs) un prêt d'un montant de 114 000 euros remboursable en sept échéances annuelles.

2. A la suite d'impayés, la banque a, par lettre recommandée du 24 mars 2014 mis en demeure les emprunteurs de payer la somme de 123 481,26 euros et, par acte du 16 mai 2014, assignés ceux-ci en paiement de cette somme. Les emprunteurs ont formé différentes demandes qui ont été écartées.

Examen des moyens

Sur les premier, deuxième, troisième, quatrième et cinquième moyens, ci-après annexés

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le sixième moyen

Enoncé du moyen

4. Les emprunteurs font grief à l'arrêt d'accueillir la demande de la banque, alors « que la mise en demeure, faite par voie de lettre recommandée avec demande d'avis de réception, est réputée faite à personne lorsque l'avis de réception est signé par son destinataire ; que la date de réception d'une notification par lettre recommandée avec avis de réception est celle qui est apposée par le service de la poste lors de la remise de la lettre à son destinataire ; qu'en affirmant néanmoins, pour condamner les emprunteurs à payer à la banque la somme de 123 481,26 euros, outre les intérêts contractuels, que celle-ci avait valablement adressé des lettres de mises en demeure, respectivement aux deux emprunteurs, exigeant le paiement d'une telle somme, après avoir pourtant constaté que les lettres en cause, adressées en la forme recommandée avec demande d'avis de réception, étaient revenues à l'expéditeur avec la mention « non réclamé », ce dont il résultait qu'elles ne pouvaient être considérées comme parvenues à leur destinataire, la cour d'appel a violé les articles 669 et 670 du code de procédure civile, ensemble les articles 1146 et 1153 du code civil, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

5. La mise en demeure que le créancier doit adresser au débiteur en application de l'article 1146 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, n'étant pas de nature contentieuse, les dispositions des articles 665 à 670-3 du code de procédure civile ne sont pas applicables et le défaut de réception effective par le débiteur de la mise en demeure, adressée par lettre recommandée, n'affecte pas sa validité.

6. Ayant constaté que la banque avait adressé aux emprunteurs une mise en demeure de régler la somme restant due, par une lettre recommandée qu'ils s'étaient abstenus de réclamer aux services postaux, la cour d'appel n'a pu qu'en déduire que l'action de la banque avait été régulièrement mise en oeuvre.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. et Mme D... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt janvier deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Richard, avocat aux Conseils, pour M. et Mme D....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur et Madame D... de leur demande tendant à voir juger que l'action en paiement formée à leur encontre par la Société CREDIT MARITIME BRETAGNE NORMANDIE, aux droits de laquelle vient la Société BANQUE POPULAIRE GRAND OUEST, était prescrite ;

AUX MOTIFS QUE, sur la fin de non-recevoir, Monsieur et Madame D... soutiennent que par application de l'article L. 218-2 du Code de la consommation, l'action en paiement de la banque est prescrite concernant les échéances des 10 mai 2011, 10 mai 2012 et 10 mai 2013 ; que la BANQUE POPULAIRE GRAND OUEST objecte justement que le texte susvisé, selon lequel l'action des professionnels, pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans, n'est pas applicable au prêt litigieux dès lors que cette opération était destinée à financer l'acquisition de parts sociales, ce qui exclut que les emprunteurs puissent être considérés comme des consommateurs ; que, comme énoncé exactement par l'intimée, sa demande est soumise à la prescription quinquennale de L. 110-4 du Code de commerce dont le point de départ doit être fixé à la date de la déchéance du terme, de sorte que cette déchéance étant intervenue par courrier du 17 janvier 2014 et l'assignation en paiement ayant été délivrée le 16 mai 2014, la prescription n'est pas acquise ; que la fin de non-recevoir sera par conséquent écartée ;

ALORS QUE l'action en paiement d'une banque pour un crédit consenti à un consommateur se prescrit par deux ans ; que doit être qualifié de consommateur, l'emprunteur qui souscrit un prêt à des fins étrangères à son activité professionnelle ; qu'en se bornant à affirmer, pour décider que Monsieur et Madame D... ne pouvaient se prévaloir de la prescription biennale à l'encontre du CREDIT MARITIME et que l'action en paiement, formée par ce dernier à leur encontre au titre du prêt, n'était pas prescrite, que l'opération litigieuse était destinée à financer l'acquisition de parts sociales, de sorte que Monsieur et Madame D... n'auraient pas la qualité de consommateur, bien que la seule circonstance que le prêt ait pour objet l'acquisition de parts sociales ne soit pas de nature à exclure que les emprunteurs aient eu la qualité de consommateur, la Cour d'appel, qui s'est prononcée par un motif inopérant, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 137-2 ancien du Code de la consommation.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable comme prescrite la demande formée par Monsieur M... D... et Madame N... X... épouse D... tendant à voir prononcer la nullité de la stipulation des intérêts conventionnels, mentionnée dans l'acte de prêt du 24 décembre 2008, ainsi qu'à voir ordonner la substitution du taux légal au taux conventionnel ;

AUX MOTIFS QUE, sur la fin de non-recevoir, Monsieur et Madame D... soutiennent que par application de l'article L. 218-2 du Code de la consommation, l'action en paiement de la banque est prescrite concernant les échéances des 10 mai 2011, 10 mai 2012 et 10 mai 2013 ; que la BANQUE POPULAIRE GRAND OUEST objecte justement que le texte susvisé, selon lequel l'action des professionnels, pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans, n'est pas applicable au prêt litigieux dès lors que cette opération était destinée à financer l'acquisition de parts sociales, ce qui exclut que les emprunteurs puissent être considérés comme des consommateurs ; que, comme énoncé exactement par l'intimée, sa demande est soumise à la prescription quinquennale de L. 110-4 du Code de commerce dont le point de départ doit être fixé à la date de la déchéance du terme, de sorte que cette déchéance étant intervenue par courrier du 17 janvier 2014 et l'assignation en paiement ayant été délivrée le 16 mai 2014, la prescription n'est pas acquise ; que la fin de non-recevoir sera par conséquent écartée ;

ET AUX MOTIFS QUE, sur la demande en nullité de la stipulation des intérêts conventionnels, sur le fondement des articles 1907 du Code civil et R. 313-1 du Code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue du décret du 29 juin 2016, Monsieur et Madame D... font valoir que le taux de l'intérêt conventionnel mentionné dans l'acte de prêt ainsi que le taux effectif global doivent être calculés sur la base d'une année civile de 365 jours, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, le taux des intérêts contractuels ayant été calculé sur la base de l'année lombarde, soit 360 jours ; que, pour s'opposer à cette prétention, la BANQUE POPULAIRE GRAND OUEST invoque à titre principal son irrecevabilité compte tenu de la prescription ; qu'il est de principe, en effet, que la demande tendant à l'annulation de la stipulation de l'intérêt conventionnel est soumise à la prescription quinquennale de l'article 1304 du Code civil, dans sa rédaction applicable au litige, et que le point de départ de ce délai doit être fixé, s'agissant d'un prêt professionnel, à la date de la convention ; que le prêt consenti aux époux D... ayant été conclu le 24 décembre 2008, le délai de prescription a commencé à courir à compter de cette date, de sorte que la demande d'annulation de la stipulation d'intérêts formée dans le cadre de l'instance engagée par le CREDIT MARITIME suivant assignation du 16 mai 2014 est irrecevable ; qu'il s'ensuit que la fin de non-recevoir invoquée par la BANQUE POPULAIRE GRAND OUEST sera accueillie et le jugement entrepris infirmé sur ce point ;

ALORS QU'en cas d'octroi d'un crédit à un consommateur ou à un non-professionnel, la prescription quinquennale de la demande tendant à voir constater la nullité de la stipulation de l'intérêt conventionnel, en raison d'une erreur affectant le calcul du taux d'intérêt, ne court à compter de la date de la convention que lorsque l'examen de sa teneur permet à l'emprunteur de constater l'erreur ; que doit être qualifié de consommateur, l'emprunteur qui souscrit un prêt à des fins étrangères à son activité professionnelle, et ce, quelle que soit la qualification conférée au contrat de prêt par les parties ; qu'en se bornant néanmoins à affirmer, pour décider que la demande de Monsieur et Madame D... tendant à voir constater la nullité de la stipulation des intérêts conventionnels était prescrite, que l'opération litigieuse était qualifiée par les parties de « prêt professionnel » et était destinée à financer l'acquisition de parts sociales, pour en déduire que Monsieur et Madame D... n'avaient pas la qualité de consommateurs, de sorte qu'ils n'étaient pas fondés à soutenir que le délai de prescription n'avait commencé à courir que le jour où ils avaient été en mesure de déceler l'erreur affectant le calcul du taux d'intérêt, bien que la seule circonstance que les parties aient qualifié le prêt de professionnel et que ce dernier ait eu pour objet l'acquisition de parts sociales n'ait pas été pas de nature à exclure que les emprunteurs aient eu la qualité de consommateur, la Cour d'appel, qui s'est prononcée par un motif inopérant, a privé sa décision de base légale au regard des articles 1304, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, 1907 du Code civil, ensemble les articles L. 313-1, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, R. 313-1, dans sa rédaction antérieur au décret n° 2011-135 du 1er février 2011 et L. 313-2 dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 du Code de la consommation.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur et Madame D... de leur demande tendant à voir constater que le prêt qu'ils avaient souscrit auprès de la Société CREDIT MARITIME BRETAGNE NORMANDIE, aux droits de laquelle vient la Société BANQUE POPULAIRE GRAND OUEST, était disproportionné au regard de leurs biens et revenus, de sorte que la banque ne pouvait se prévaloir du prêt litigieux à leur encontre, puis de les avoir condamnés à payer à la Société BANQUE POPULAIRE GRAND OUEST la sommes de 123.481,26 euros, avec intérêts aux taux de 5,60 % à compter du 19 mars 2014 ;

AUX MOTIFS QUE, sur la disproportion du prêt, Monsieur et Madame D... font valoir que la banque ne justifie pas s'être acquittée de l'obligation de vérification de la solvabilité des emprunteurs prévue par l'article L. 312-16 du Code de la consommation ; qu'ils ajoutent que compte tenu de leurs engagements antérieurs, de leurs revenus et de l'absence de patrimoine, le prêt était disproportionné et doit, par conséquent, leur être déclaré inopposable ; que, contrairement à ce que soutient la BANQUE POPULAIRE GRAND OUEST, cette demande ne constitue pas une prétention nouvelle, et comme telle irrecevable en application de l'article 564 du Code de procédure civile, dès lors qu'elle tend uniquement à faire écarter la demande en paiement formée par la partie adverse ; que, sur le fond, il sera relevé que les dispositions de l'article L. 312-16 du Code de la consommation visées par les époux D... sont issues de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 (article L. 311-9 ancien) et ne sont pas applicables aux contrats souscrits antérieurement à l'entrée en vigueur de ladite loi ; que, par ailleurs, les appelants ne précisent pas le fondement juridique sur lequel ils s'appuient pour conclure à l'inopposabilité du prêt, motif pris de sa disproportion au regard de leur situation financière, étant précisé que si l'article L. 341-4 du Code de la consommation, dans sa rédaction applicable au litige, prévoit une telle sanction, elle ne concerne toutefois que le contrat de cautionnement ; que cette prétention ne peut donc qu'être rejetée ;

1°) ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut, à ce titre, relever un moyen d'office sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en relevant néanmoins d'office le moyen tiré de ce que les dispositions de l'article L. 311-9, devenu l'article L. 312-16, du Code de la consommation, invoquées par Monsieur et Madame D..., n'étaient pas applicables aux contrats souscrits antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, de sorte qu'elles ne pouvaient s'appliquer au contrat de prêt litigieux souscrit le 24 décembre 2008, sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations sur ce moyen, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut, à ce titre, relever un moyen d'office sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en relevant néanmoins d'office le moyen tiré de ce que l'inopposabilité constitue une sanction propre au caractère disproportionné d'un contrat de cautionnement, et non au contrat de prêt, pour en déduire que Monsieur et Madame D... ne pouvaient valablement s'en prévaloir, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur et Madame D... de leur demande tendant à voir constater que la Société CREDIT MARITIME BRETAGNE NORMANDIE, aux droits de laquelle vient la Société BANQUE POPULAIRE GRAND OUEST, n'avait pas respecté son obligation de consultation du Fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP), et à voir, en conséquence, prononcer la déchéance de l'ensemble des intérêts échus depuis la date de conclusion du prêt le 24 décembre 2008 ;

AUX MOTIFS QUE, sur la fin de non-recevoir, Monsieur et Madame D... soutiennent que par application de l'article L. 218-2 du Code de la consommation, l'action en paiement de la banque est prescrite concernant les échéances des 10 mai 2011, 10 mai 2012 et 10 mai 2013 ; que la BANQUE POPULAIRE GRAND OUEST objecte justement que le texte susvisé, selon lequel l'action des professionnels, pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans, n'est pas applicable au prêt litigieux dès lors que cette opération était destinée à financer l'acquisition de parts sociales, ce qui exclut que les emprunteurs puissent être considérés comme des consommateurs ; que, comme énoncé exactement par l'intimée, sa demande est soumise à la prescription quinquennale de L. 110-4 du Code de commerce dont le point de départ doit être fixé à la date de la déchéance du terme, de sorte que cette déchéance étant intervenue par courrier du 17 janvier 2014 et l'assignation en paiement ayant été délivrée le 16 mai 2014, la prescription n'est pas acquise ; que la fin de non-recevoir sera par conséquent écartée ;

ET AUX MOTIFS QUE, sur la demande en nullité de la stipulation des intérêts conventionnels, sur le fondement des articles 1907 du Code civil et R. 313-1 du Code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue du décret du 29 juin 2016, Monsieur et Madame D... font valoir que le taux de l'intérêt conventionnel mentionné dans l'acte de prêt ainsi que le taux effectif global doivent être calculés sur la base d'une année civile de 365 jours, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, le taux des intérêts contractuels ayant été calculé sur la base de l'année lombarde, soit 360 jours ; que, pour s'opposer à cette prétention, la BANQUE POPULAIRE GRAND OUEST invoque à titre principal son irrecevabilité compte tenu de la prescription ; qu'il est de principe, en effet, que la demande tendant à l'annulation de la stipulation de l'intérêt conventionnel est soumise à la prescription quinquennale de l'article 1304 du Code civil, dans sa rédaction applicable au litige, et que le point de départ de ce délai doit être fixé, s'agissant d'un prêt professionnel, à la date de la convention ; que le prêt consenti aux époux D... ayant été conclu le 24 décembre 2008, le délai de prescription a commencé à courir à compter de cette date, de sorte que la demande d'annulation de la stipulation d'intérêts formée dans le cadre de l'instance engagée par le CREDIT MARITIME suivant assignation du 16 mai 2014 est irrecevable ; qu'il s'ensuit que la fin de non-recevoir invoquée par la BANQUE POPULAIRE GRAND OUEST sera accueillie et le jugement entrepris infirmé sur ce point ;

ET AUX MOTIFS ENCORE QUE, sur la consultation du FICP, pour solliciter à l'encontre de la banque la déchéance de son droit aux intérêts conventionnels ainsi que le rejet de sa demande au titre des intérêts pénalités et intérêts de retard, Monsieur et Madame D... invoquent à nouveau les dispositions de l'article L. 312-16, anciennement L. 311-9, du Code de la consommation, en ce qu'elles prévoient l'obligation pour le prêteur de consulter le fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP) avant de conclure le contrat ; que, comme indiqué précédemment, l'article L. 311-9 devenu L. 312-16 du Code de la consommation a été créé par la loi du 1er juillet 2010 et n'est donc pas applicable au contrat litigieux, souscrit antérieurement à l'entrée en vigueur de cette loi ; qu'au surplus et ainsi que le fait valoir justement la BANQUE POPULAIRE GRAND OUEST, le texte précité est inséré dans les dispositions relatives au crédit à la consommation dont les époux D... ne peuvent se prévaloir au regard de la nature professionnelle du prêt qu'ils ont souscrit ;

1°) ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut, à ce titre, relever un moyen d'office sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en relevant néanmoins d'office le moyen tiré de ce que les dispositions de l'article L. 311-9, devenu l'article L. 312-16, du Code de la consommation, invoquées par Monsieur et Madame D..., n'étaient pas applicables aux contrats souscrits antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, de sorte qu'elles ne pouvaient s'appliquer au contrat de prêt litigieux souscrit le 24 décembre 2008, sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations sur ce moyen, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile ;

2°) ALORS QU'il résulte des termes de l'article L. 311-9, du Code de la consommation, devenu L. 312-16 dudit code, que le prêteur est tenu, avant de conclure un contrat de prêt avec un consommateur, de vérifier la solvabilité de ce dernier, en consultant, notamment, le fichier national recensant les incidents de paiements ; que doit être qualifié de consommateur, l'emprunteur qui souscrit un prêt à des fins étrangères à son activité professionnelle, et ce, quelle que soit la qualification conférée au contrat de prêt par les parties ; qu'en bornant néanmoins à affirmer, pour décider que Monsieur et Madame D... ne pouvaient valablement se prévaloir des dispositions de l'article L. 311-9 ancien du Code de la consommation, que l'opération litigieuse était qualifiée par les parties de « prêt professionnel » et était destinée à financer l'acquisition de parts sociales, pour en déduire que Monsieur et Madame D... n'avaient pas la qualité de consommateur, bien que la seule circonstance que les parties aient qualifié le prêt de professionnel et que ce dernier ait eu pour objet l'acquisition de parts sociales n'ait pas été de nature à exclure que les emprunteurs aient eu la qualité de consommateur, la Cour d'appel, qui s'est prononcée par un motif inopérant, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 311-9, L. 311-48 ancien du Code de la consommation et L. 333-4 du Code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2009-866 du 15 juillet 2009.

CINQUIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur et Madame de leur demande tendant à voir constater que la Société CREDIT MARITIME BRETAGNE NORMANDIE, aux droits de laquelle vient la Société BANQUE POPULAIRE GRAND OUEST, a manqué à son obligation de mise en garde à leur égard et, en conséquence, à la voir condamnée à leur payer la somme de 60.000 euros à titre de dommages-intérêts ;

AUX MOTIFS QUE, sur le manquement au devoir de mise en garde, pour la première fois en cause d'appel, Monsieur et Madame D... forment une demande reconventionnelle tendant à obtenir, en l'état de leurs dernières conclusions, le paiement d'une somme de 60.000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement au devoir de mise en garde ; que la fin de non-recevoir opposée par la BANQUE POPULAIRE GRAND OUEST sur le fondement de l'article 564 du Code de procédure civile doit être rejetée dans la mesure où la prétention des époux D..., qui répond à la demande en paiement de la banque, est susceptible d'emporter compensation entre les créances réciproques des parties si elle est admise ; qu'en revanche, l'intimée fait Valoir à juste titre que la demande indemnitaire des époux D..., est irrecevable en raison de la prescription ; qu'en effet, l'action en responsabilité exercée par les emprunteurs contre la banque est soumise à la prescription quinquennale de l'article L. 110-4 du Code de commerce dont le point de départ court à compter du dommage ou de la date à laquelle il a été révélé à la victime, c'est à dire, s'agissant du dommage résultant d'un manquement de la banque à son devoir de mise en garde, lequel consiste dans une perte de chance de ne pas contracter qui se manifeste dès l'octroi du prêt, à compter de la conclusion de celui-ci ; que le prêt litigieux ayant été souscrit le 24 décembre 2008, la prescription était acquise lorsque la demande reconventionnelle en paiement de dommages et intérêts a été formée devant la cour, par conclusions du 17 mai 2016 ;

ALORS QUE le délai de prescription d'une action en responsabilité ne court qu'à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime, si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance ; que le délai de prescription de l'action en responsabilité exercée par un emprunteur contre un établissement de crédit pour manquement à son obligation de mise en garde commence à courir le jour où l'emprunteur a eu connaissance des risques de l'opération qui ne lui ont pas été révélés lors de sa conclusion ; qu'en déclarant néanmoins irrecevable comme prescrite l'action en responsabilité diligentée, par conclusions en date 17 mai 2019, par Monsieur et Madame D... à l'encontre du CREDIT MARITIME, motif pris que le dommage allégué, constituant le point de départ de la prescription quinquennale, s'était manifesté au jour de la conclusion du prêt, soit le 24 décembre 2008, bien que l'existence du devoir de mise en garde pesant sur le banquier suppose que l'emprunteur ne soit pas apte à prendre seul connaissance des risques nés de l'octroi du prêt au jour où celui-ci est conclu, de sorte que le délai de prescription de l'action ne commence à courir qu'à la date à laquelle l'emprunteur a eu connaissance de ces risques, la Cour d'appel a violé les article L 110-4 du Code de commerce et 2224 du Code civil.

SIXIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné solidairement Monsieur et Madame D... à payer à la BANQUE POPULAIRE GRAND OUEST, venant aux droits de la Société CREDIT MARITIME BRETAGNE NORMANDIE, la somme de 123.481,26 euros, avec intérêts au taux de 5,60 % à compter du 19 mars 2014 ;

AUX MOTIFS QUE, sur le montant des sommes dues, le tribunal a fait droit à la demande en paiement de la banque au titre du solde du prêt, en limitant toutefois la créance à la somme de 114 609,80 euros avec intérêts au taux de 5,60 % à compter du 16 mai 2014, après avoir relevé que le CREDIT MARITIME ne justifiait pas de l'envoi d'une mise en demeure aux époux D... avant la délivrance de l'assignation ; que devant la cour, la BANQUE POPULAIRE GRAND OUEST reprend sa demande initiale, chiffrée à 123 481,26 euros, outre les intérêts contractuels au taux de 5,60 % à compter du 18 mars 2014, en faisant valoir que le tribunal n'a pas tenu compte de la mise en demeure adressée à Monsieur et Madame D... le 24 mars 2014 ; qu'il résulte des pièces produites par la BANQUE POPULAIRE GRAND OUEST que par courriers séparés datés du 24 mars 2014, le CREDIT MARITIME, représenté par son conseil, a mis en demeure Monsieur et Madame D... de lui régler la somme de 123.481,26 euros arrêtée au 18 mars 2014 au titre du prêt n° [...] ; que les deux lettres, adressées en la forme recommandée avec avis de réception, sont revenues avec la mention "non réclamé" ; qu'au regard de ces éléments ainsi que du décompte de créance établi le 18 mars 2014 et des décomptes détaillés des intérêts de retard, il convient de faire droit à la demande sauf à fixer le point de départ des intérêts contractuels au 19 mars 2014 et non au 18 mars 2014 ;

ALORS QUE la mise en demeure, faite par voie de lettre recommandée avec demande d'avis de réception, est réputée faite à personne lorsque l'avis de réception est signé par son destinataire ; que la date de réception d'une notification par lettre recommandée avec avis de réception est celle qui est apposée par le service de la poste lors de la remise de la lettre à son destinataire ; qu'en affirmant néanmoins, pour condamner Monsieur et Madame D... à payer à la BANQUE POPULAIRE GRAND OUEST, venant aux droits du CREDIT MARITIME, la somme de 123.481,26 euros, outre les intérêts contractuels, que celui-ci avait valablement adressé des lettres de mises en demeure, respectivement à Monsieur et Madame D..., exigeant le paiement d'une telle somme, après avoir pourtant constaté que les lettres en cause, adressées en la forme recommandée avec demande d'avis de réception, étaient revenues à l'expéditeur avec la mention « non réclamé », ce dont il résultait qu'elles ne pouvaient être considérées comme parvenues à leur destinataire, la Cour d'appel a violé les articles 669 et 670 du Code de procédure civile, ensemble les articles 1146 et 1153 du Code civil, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 19-20680
Date de la décision : 20/01/2021
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

PROCEDURE CIVILE - Notification - Notification en la forme ordinaire - Articles 665 à 670-3 du code procédure civile - Domaine d'application - Exclusion - Cas - Mise en demeure

CONTRATS ET OBLIGATIONS CONVENTIONNELLES - Exécution - Mise en demeure - Validité - Défaut de réception effective par le débiteur - Absence d'influence

La mise en demeure que le créancier doit adresser au débiteur en application de l'article 1146 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, n'étant pas de nature contentieuse, les dispositions des articles 665 à 670-3 du code de procédure civile ne sont pas applicables et le défaut de réception effective par le débiteur de la mise en demeure, adressée par lettre recommandée, n'affecte pas sa validité


Références :

Article 1146 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016

articles 665 à 670-3 du code procédure civile.

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 17 mai 2019

En matière de sécurité sociale, à rapprocher : Ass. plén., 7 avril 2006, pourvoi n° 04-30353, Bull. 2006, Ass. plén., n° 4 (rejet), et les arrêts cités.


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 20 jan. 2021, pourvoi n°19-20680, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : Mme Batut
Avocat(s) : SCP Richard, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 26/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.20680
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