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13/01/2021 | FRANCE | N°19-16392

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 13 janvier 2021, 19-16392


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 13 janvier 2021

Cassation partielle

Mme BATUT, président

Arrêt n° 43 F-D

Pourvoi n° K 19-16.392

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 13 JANVIER 2021

M. E... M..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° K

19-16.392 contre l'arrêt rendu le 6 février 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 3, chambre 1), dans le litige l'opposant à Mme H... V..., do...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 13 janvier 2021

Cassation partielle

Mme BATUT, président

Arrêt n° 43 F-D

Pourvoi n° K 19-16.392

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 13 JANVIER 2021

M. E... M..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° K 19-16.392 contre l'arrêt rendu le 6 février 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 3, chambre 1), dans le litige l'opposant à Mme H... V..., domiciliée [...] , défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Mouty-Tardieu, conseiller référendaire, les observations de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de M. M..., de la SCP Gadiou et Chevallier, avocat de Mme V..., et l'avis de M. Sassoust, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 novembre 2020 où étaient présentes Mme Batut, président, Mme Mouty-Tardieu, conseiller référendaire rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Berthomier, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 6 février 2019), F... Y... est décédée le [...] sans héritier réservataire, en l'état de plusieurs testaments olographes successifs, dont un daté du 30 janvier 2012, désignant M. M... en qualité de légataire universel et d'un autre daté du 24 février 2013, instituant légataire universelle Mme V..., fille de son époux prédécédé.

2. Mme V... et M. M... ont été envoyés en possession de leurs legs. Par acte du 3 août 2015, Mme V... a assigné M. M... pour voir juger que le testament du 24 février 2013 annulait et révoquait celui du 30 janvier 2012.

Examen des moyens

Sur les deux premiers moyens, ci-après annexés

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

4. M. M... fait grief à l'arrêt de dire que le testament du 24 février 2013 annule le legs universel qui lui a été consenti par testament du 30 janvier 2012, alors « que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; que le testament de F... Y..., en date du 24 février 2013 indiquait : « en conséquence, après mon décès, je lui léguerai mes biens mobiliers et immobiliers qui composeront ma succession » ; que, pour juger incompatibles les dispositions des testaments de F... Y..., respectivement en date du 24 février 2013 et du 30 janvier 2012, la cour d'appel a retenu « qu'au terme du testament du 24 février 2013, F... Y... a déclaré "instituer pour (sa) légataire universelle" Mme V..., en ajoutant "en conséquence, après mon décès, je lui léguerai tous mes biens mobiliers et immobiliers qui composeront ma succession" », ce dont elle a déduit « que la précision ainsi ajoutée montr[ait] que F... Y... souhaitait que l'intimée recueille l'intégralité de ses biens mobiliers et immobiliers, ce qui exclu[ai]t nécessairement que quiconque d'autre vienne à sa succession » ; qu'en ajoutant ainsi, sous couvert d'une citation littérale du testament, l'adjectif indéfini « tous » pour en déduire l'incompatibilité des testaments litigieux, la cour d'appel a dénaturé cet écrit et violé l'article 1134 devenu 1103 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis :

5. Pour dire que le testament du 24 février 2013 annule le legs universel consenti à M. M... par testament du 30 janvier 2012, l'arrêt retient qu'au terme du second testament, F... Y... a déclaré instituer Mme V... légataire universelle en ajoutant « en conséquence, après mon décès, je lui léguerai tous mes biens mobiliers et immobiliers qui composeront ma succession ». Il en déduit que F... Y... souhaitait que Mme V... recueille l'intégralité des biens, à l'exclusion de toute autre personne.

6. En statuant ainsi, alors que dans l'acte en cause, il était écrit « En conséquence, après mon décès, je lui léguerai mes biens mobiliers et immobilier qui composeront ma succession », la cour d'appel, qui a dénaturé cet acte par adjonction du mot « tous », a violé le principe susvisé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que le testament du 24 février 2013 annule le legs universel consenti à M. M... par testament du 30 janvier 2012, l'arrêt rendu le 6 février 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne Mme V... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize janvier deux mille vingt et un.

Le conseiller referendaire rapporteur le president

Le greffier de chambre

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour M. M....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. E... M... de ses demandes de nullité des testaments olographes des 27 avril 2003, 25 octobre 2008 et 10 avril 2010 ;

AUX MOTIFS QUE sur la nullité des testaments olographes des 27 avril 2003, 25 octobre 2008, 10 avril 2010 pour date incertaine valant absence de date, se prévalant des conclusions de l'expert en écriture selon lesquelles « Les testaments des 27 avril 2003, 25 octobre 2008, 10 avril 2010 ne peuvent avoir été écrits aux dates indiquées, car l'écriture de Madame F... V... lors de ces périodes était nettement moins altérée », et de la révocation faite par F... Y... de « tout autre testament antérieur » par le testament qu'elle a établi à son profit le 30 janvier 2012, M. M... sollicite le prononcé de la nullité des trois testaments en cause ; que Mme H... V... n'a pas présenté d'observations sur cette demande ; qu'à titre liminaire la révocation de dispositions testamentaires n'est pas une cause de nullité de ces dernières, mais leur fait seulement perdre tout effet ; qu'en revanche, « la révocation de tout autre testament antérieur » vient plutôt accréditer l'antériorité contestée des trois testaments litigieux ; que ces trois testaments en cause comportent une date soit respectivement celle des 27 avril 2003, 25 octobre 2008 et 10 avril 2010 ; que, pour en arriver à la conclusion précitée, l'expert s'est fondé sur leur comparaison avec 19 écrits de F... Y... sélectionnés par M. M..., essentiellement à partir des agendas de la de cujus ; que ces documents sont tous postérieurs au 18 mars 2005, de sorte que l'expert n'a reçu aucun échantillon de l'écriture de la testatrice contemporaine du premier testament et se borne à supposer « que l'écriture durant cette période devait être très proche de celle de 2005 » ; que sur 8 spécimens correspondant à la période 2005-2010, GC1 est une photocopie tronquée de la page d'agenda des 18 et 19 mars 2005, et CG 6et CG 7, censées correspondre aux pages des 24 et 25 octobre 2008 et des 27 et 30 octobre 2008, ne sont pas reproduites dans des conditions permettant d'en vérifier l'authenticité, ce qui est pourtant d'autant plus important que les photocopies insérées par l'expert dans son rapport, ne reproduisent pas nécessairement les dates imprimées de l'agenda ;
que l'examen des agendas des années 2005, 2007, 2008, 2009 et 2010 produits par M. M... permettent en réalité de constater d'une part, que l'écriture de F... Y... n'est pas nécessairement uniforme d'un jour à l'autre, ni même d'un moment à l'autre de la journée, et qu'il existe dès 2005, de nombreux exemples d'imperfections et maladresses qui n'ont pu être pris en compte par l'expert lorsqu'il a estimé que l'écriture était à cette époque « nettement plus souple et moins altérée » ; qu'il s'ensuit que les conclusions de l'expert, qui ne disposait d'aucuns échantillons contemporains du premier testament, et à qui, nonobstant l'existence d'un matériau de comparaison très complet sur les années 2005, 2007, 2008, 2009 et 2010, n'ont été fournis que 8 spécimens, dont au surplus, 2 ne sont pas vérifiables, ne peuvent être considérées comme probantes ; que M. M..., à qui incombe la charge de la preuve, ne démontrant pas la fausseté des dates des testaments en cause, sera débouté de sa demande en nullité desdits testaments, le jugement étant donc confirmé de ce chef ;

1) ALORS QUE le juge doit trancher le litige selon les règles de droit qui lui sont applicables ; que pour demander qu'il soit dit et jugé « nuls et de nul effet » les testaments des 27 avril 2003, 25 octobre 2008 et 10 avril 2010, M. M... a soutenu que ces dispositions à cause de mort avaient été expressément révoquées Mme Y..., veuve V..., aux termes de son testament du 30 janvier 2012 (concl. p. 10) ; que pour le débouter de cette demande, la cour d'appel a retenu que « la révocation de dispositions testamentaires n'est pas une cause de nullité de ces dernières, mais leur fait seulement perdre tout effet » ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, à qui il incombait dès lors de constater, en lieu et place de la nullité, la révocation de ces testaments et leur absence d'effet, a violé l'article 12 du code de procédure civile ;

2) ALORS QUE les testaments peuvent être révoqués par un testament postérieur ; que pour demander qu'il soit dit et jugé « nuls et de nul effet » les testaments des 27 avril 2003, 25 octobre 2008 et 10 avril 2010, M. M... a soutenu que ces dispositions à cause de mort avaient été expressément révoquées Mme Y..., veuve V..., aux termes de son testament du 30 janvier 2012 (concl. p. 10) ; que pour le débouter de cette demande, après avoir relevé que le testament du 30 janvier 2012 révoquait « tout autre testament antérieur », la cour d'appel a retenu que « la révocation de dispositions testamentaires n'est pas une cause de nullité de ces dernières, mais leur fait seulement perdre tout effet » ; qu'en statuant ainsi, sans prononcer la révocation de ces testaments et leur absence d'effet, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé, par refus d'application, l'article 1035 du code civil.

DEUXIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. E... M... de ses demandes de nullité du testament olographe du 24 février 2013 ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE, sur la demande en nullité du testament du 24 février 2013, pour vice de forme, que M. M... soutient également que le testament du 24 février 2013 présente une fausse date ; qu'il fait valoir à cet effet que l'expert a souligné qu'il présentait les mêmes caractéristiques que ceux des testaments dont il a estimé qu' « ils n'ont pu être écrits aux dates indiquées » et qu'il n'y a aucune raison de penser que ce testament puisse avoir une date plus réelle que les trois autres ; qu'il en veut également pour preuve le fait que ce testament soit établi au profit de Mme H... V... avec laquelle F... Y... avait cessé toute relation depuis longtemps, et prétend qu'il a été en réalité rédigé à partir de septembre 2013, après que l'intimée soit revenue chercher sa belle-mère à Argentan pour la ramener à Paris ; que Mme H... V... répond que M. M... déforme les conclusions de l'expert qui a conclu que le testament du 24 février 2013 avait pu avoir été écrit, daté et signé entre 2012 et fin 2013 ; que la fausseté de la date des trois premiers testaments n'est pas établie ; que l'expert, requis par M. M..., n'a pas exclu que le testament du 24 février 2013 ait pu être établi à cette date ; qu'il a au contraire estimé que son écriture était compatible avec l'écriture de F... Y... sur la période comprise entre 2012 et fin 2013 ; que l'identité de la bénéficiaire ne permet pas plus à remettre en cause la date de ce testament, Mme H... V... ayant déjà été instituée légataire universelle de F... Y... par trois fois à des époques où selon M. M..., la testatrice était réputée avoir été abandonnée par les enfants de son mari ; que M. M... succombe donc à démontrer la fausseté de la date du testament ; pour insanité d'esprit, que M. M... soutient que les procurations générales et mandat de protection future que F... Y... lui avait consentis le 27 décembre 2012 et le 9 juillet 2013, et le testament qu'elle avait fait en sa faveur le 30 janvier 2012, permettent de douter de son consentement éclairé lorsqu'elle a testé en faveur de Mme H... V... le 24 février 2013 ; qu'il fait valoir que depuis le mois de juillet 2012, la de cujus avait perdu beaucoup de ses facultés intellectuelles et de mémoire à court terme, et qu'il ressort des pièce médicales établies lors de son hospitalisation à Argentan que les troubles dont elle était atteinte remontaient au moins au mois d'août 2013 ; que d'ailleurs, le procureur de la République avait dès le 24 juin 2013 saisi un médecin à l'effet de lui donner un avis sur l'opportunité d'une mesure de protection judiciaire, ce dont on pouvait déduire qu'un signalement lui était parvenu au minimum dès le début de l'année 2013 ; que l'expert en écriture avait relevé un grand nombre de « raidissements », « saccades », « tremblements » et « spasmes » trahissant un stade très avancé de la maladie d'Alzeimer, mais aussi sans doute une réticence de F... Y..., pouvant faire présumer « une main guidée » ;
qu'enfin, l'existence de 5 testaments identiques au profit d'une même personne et durant une même période faisait présumer l'insanité d'esprit de leur auteur ; que Mme H... V... souligne que M. M... se contredit en invoquant l'insanité d'esprit de F... Y... au moment de la rédaction du testament, tout en soutenant qu'elle a « en toute conscience » décidé de ne pas y révoquer les dispositions qu'elle avait prises antérieurement en sa faveur ; qu'elle ajoute que M. M... n'explique pas comment il a pu se faire consentir une procuration générale le 9 juillet 2013, soit à une date postérieure au testament dont il invoque la nullité ; que M. M... n'a pas démontré que les 5 testaments en cause avaient été rédigés à la même époque ; que F... Y... l'ayant institué seul légataire universel en révoquant toutes dispositions antérieures, et donc celles prises en faveur d'H... V..., elle ne pouvait gratifier celle-ci qu'en prenant un nouveau testament en sa faveur, de sorte que cette réitération n'est pas un signe d'insanité d'esprit ; qu'au vu des pressions exercées par M. M... sur certains témoins (cf témoignages de Mme C... K... et de Mme U... I... en pièces 12 et 14 de l'appelante) les témoignages qu'il a versés aux débats pour tenter d'accréditer sa vocation successorale et discréditer celle de Mme H... V..., seront écartés ; que le choix fait par F... Y... de désigner cette dernière comme légataire n'est nullement aberrant s'agissant de la fille de son défunt mari dont selon l'intimée, non démentie sur ce point, elle tenait l'essentiel de sa fortune ; qu'il constitue la reprise d'un voeu réitéré à plusieurs reprises, et traduit à cet égard une certaine constance, à laquelle seul le testament fait le 30 janvier 2012, est venu faire exception ; qu'il ne saurait donc en être tiré la preuve d'un manque de discernement ; qu'un signalement fait au procureur de la République en vue d'une mise sous protection judiciaire ne suffit pas à établir l'insanité d'esprit ; que les pièces médicales versées aux débats permettent seulement d'affirmer avec certitude que les troubles constatés en octobre 2013, existaient déjà au mois d'août 2013 ; que M. M... a nécessairement considéré que F... Y... était en mesure de comprendre la portée de ses actes lorsqu'elle lui a consenti un mandat de protection future et une procuration générale le 9 juillet 2013 et que le notaire instrumentaire n'a non plus émis aucune opposition à la régularisation de ces actes ; que ce n'est que dans le testament du 13 janvier 2014 (par erreur désigné comme étant du 24 février 2014) que l'expert en écriture a relevé des « indicateurs d'insanité 'esprit » ; que M. M... sur lequel repose la charge de la preuve ne démontre donc pas que F... Y... était à la date du 24 février 2013 atteinte d'une affection mentale l'empêchant d'apprécier en toute conscience la portée des dispositions testamentaires qu'elle a prises à cette date ; que l'expert en écriture s'est borné à ne pas exclure « que les testaments aient pu être écrits à main guidée », mais que rien ne vient étayer cette hypothèse, et encore moins celle d'une « main forcée », ce d'autant que M. M... qui laisse entendre que Mme H... V... pourrait être à l'origine d'une telle pression sur F... Y..., prétend que l'intimée n'a repris contact avec sa belle-mère qu'en septembre 2013 ; que M. M... doit donc être débouté de sa demande en annulation du testament du 24 février 2013 pour insanité d'esprit ;

ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE, sur la demande de nullité du testament olographe du 24 février 2013 par le défendeur, pour insanité d'esprit, l'article 503 du code civil sur lequel se fonde le défendeur est sans relation avec l'insanité d'esprit ; que l'établissement d'un mandat de protection future et d'une procuration générale le 9 juillet 2013 par la de cujus est insuffisant pour démontrer l'insanité d'esprit de la de cujus lors de la rédaction du testament litigieux, en l'absence de pièces médicales sur ce point ; qu'en outre, la rédaction, par la de cujus, de testaments identiques au profit de la même personne, à des dates différentes, ne prouve pas, en tant que telle, l'insanité d'esprit de celle-ci ; qu'au surplus, le fait, comme le prétend le défendeur, que le testament litigieux aurait été rédigé « à main guidée » voire « à main forcée » ne prouve pas l'insanité d'esprit de la de cujus ; que le défendeur sera débouté de sa demande ; pour vice de forme, [
] que le fait que les autres testaments comporteraient une date fausse ne permet pas de démontrer qu'il en serait de même du testament litigieux ; que le défendeur sera donc débouté de sa demande et de ses demandes subséquentes ;

ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions est un défaut de motif ; que, dans ses conclusions (p. 11), M. M... faisait valoir « que le testament daté du 24 février 2013 a pu être écrit en 2013 (voire possiblement en 2014) mais certainement pas au mois de février 2013, alors que Mme F... Y... ne voyait plus Mme B... V... depuis longtemps et qu'elle avait choisi et mandaté, avant et après cette date, M. M... pour s'occuper d'elle jusqu'à la fin » ; qu'en retenant néanmoins que le testament litigieux était effectivement daté du 24 février 2013, ce dont elle a en outre déduit qu'il était antérieur aux troubles affectant Mme Y... depuis le mois d'août 2013, sans répondre aux conclusions de M. M... qui faisait valoir que ce testament n'avait pu être rédigé qu'après que Mme V... eut fait sortir Mme Y... de l'hôpital en septembre 2013, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

TROISIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'AVOIR dit que le testament du 24 février 2013 annule le legs universel consenti à M. M... par testament du 30 janvier 2012 ;

AUX MOTIFS QUE, sur la compatibilité des dispositions testamentaires du 24 février 2013 et du 30 janvier 2012, [
] sur le fond, Mme H... V... fait valoir qu'on ne peut léguer successivement à deux personnes l'intégralité de ses meubles et immeubles, et que la deuxième personne désignée évince nécessairement la première ; que par le testament du. 24 février 2013, F... Y... aurait selon elle en toute connaissance de cause écarté M. M..., dont elle s'était aperçue qu'il était intéressé par son argent et aurait perpétré des faux pour le détourner à son profit, tandis que la volonté de la de cujus de l'instituer pour légataire universelle, résulterait des relations régulières qu'elles entretenaient et le fait que l'ensemble de son patrimoine venait de la succession de son défunt mari, père de l'intimée ; que M. M... répond que F... Y... connaissait l'importance de la révocation dont elle avait déjà fait usage clans le testament du 30 janvier 2012, et qu'aucune disposition du testament postérieur ne l'exclut du bénéfice du legs universel que la de cujus lui avait consenti et dont elle n'avait aucune raison de le priver, tant il avait pendant 10 ans fait preuve d'attention et de dévouement à son égard, alors qu'il était selon lui notoire qu'elle n'avait pas de lien avec ses beaux-enfants, qu'elle vivait isolée de la famille de son mari et n'éprouvait pas de sympathie pour sa belle-fille, qui ne s'occupait pas spécialement d'elle ; que, selon l'article 1036 du code civil, « les testaments postérieurs, qui ne révoqueront pas d'une manière expresse les précédents n'annuleront, dans ceux-ci, que celles des dispositions contenues qui se trouveront incompatibles avec les nouvelles ou qui seront contraires » ; qu'au terme du testament du 24 février 2013, F... Y... a déclaré « instituer pour (sa) légataire universelle » Mme H... V..., en ajoutant « en conséquence, après mon décès, je lui léguerai tous mes biens mobiliers et immobiliers qui composeront ma succession » ; que la précision ainsi ajoutée montre que F... Y... souhaitait que l'intimée recueille l'intégralité de ses biens mobiliers et immobiliers, ce qui exclut nécessairement que quiconque d'autre vienne à sa succession ; qu'il en résulte que le testament du 24 février 2013 a pour effet d'annuler le legs universel consenti à M. E... M... par testament du 30 janvier 2012 ;

ALORS QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; que le testament de Mme Y..., veuve V... en date du 24 février 2013 indiquait : « en conséquence, après mon décès, je lui léguerai mes biens mobiliers et immobiliers qui composeront ma succession » ; que, pour juger incompatibles les dispositions des testaments de Mme Y..., veuve V..., respectivement en date du 24 février 2013 et du 30 janvier 2012, la cour d'appel a retenu « qu'au terme du testament du 24 février 2013, F... Y... a déclaré "instituer pour (sa) légataire universelle" Mme H... V..., en ajoutant "en conséquence, après mon décès, je lui léguerai tous mes biens mobiliers et immobiliers qui composeront ma succession" », ce dont elle a déduit « que la précision ainsi ajoutée montr[ait] que F... Y... souhaitait que l'intimée recueille l'intégralité de ses biens mobiliers et immobiliers, ce qui exclu[ai]t nécessairement que quiconque d'autre vienne à sa succession » ; qu'en ajoutant ainsi, sous couvert d'une citation littérale du testament, l'adjectif indéfini « tous » pour en déduire l'incompatibilité des testaments litigieux, la cour d'appel a dénaturé cet écrit et violé l'article 1134 devenu 1103 du code civil.
Le greffier de chambre


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 19-16392
Date de la décision : 13/01/2021
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 06 février 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 13 jan. 2021, pourvoi n°19-16392


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Gadiou et Chevallier, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.16392
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