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06/01/2021 | FRANCE | N°19-18304

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 06 janvier 2021, 19-18304


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

CF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 6 janvier 2021

Rejet

Mme BATUT, président

Arrêt n° 14 F-D

Pourvoi n° P 19-18.304

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 6 JANVIER 2021

Mme D... J..., domiciliée [...] , a formé le pourvoi n° P 19-18.304 cont

re l'arrêt rendu le 14 mars 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 2, chambre 1 - audience solennelle), dans le litige l'opposant :

1°/ au cons...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

CF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 6 janvier 2021

Rejet

Mme BATUT, président

Arrêt n° 14 F-D

Pourvoi n° P 19-18.304

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 6 JANVIER 2021

Mme D... J..., domiciliée [...] , a formé le pourvoi n° P 19-18.304 contre l'arrêt rendu le 14 mars 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 2, chambre 1 - audience solennelle), dans le litige l'opposant :

1°/ au conseil de l'ordre des avocats au barreau de Paris,

2°/ à l'ordre des avocats au barreau de Paris,

ayant tous deux leur siège [...] ,

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Le Gall, conseiller référendaire, les observations de la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat de Mme J..., de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat du conseil de l'ordre des avocats au barreau de Paris et de l'ordre des avocats au barreau de Paris, après débats en l'audience publique du 10 novembre 2020 où étaient présentes Mme Batut, président, Mme Le Gall, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Randouin, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 14 mars 2019), Mme J... a sollicité son admission au barreau de Paris sous le bénéfice de la dispense de formation et de diplôme prévue à l'article 98, 5°, du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat, pour les juristes attachés pendant huit ans au moins à l'activité juridique d'une organisation syndicale.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

2. Mme J... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande d'inscription au barreau, alors :

« 1°/ qu'en vertu de l'article 98, 5°, du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, sont dispensés de la formation théorique et pratique et du certificat d'aptitude à la profession d'avocat, les juristes attachés pendant huit ans au moins à l'activité juridique d'une organisation syndicale ; que ce texte n'implique pas que cette activité de juriste attaché à l'activité juridique d'une organisation syndicale soit exercée à titre exclusif et strictement permanent, mais seulement de manière spécifique et continue et, soit à hauteur d'un volume horaire au moins égal à celui de la durée légale hebdomadaire du travail, soit de manière principale ou prépondérante ; que, pour confirmer la décision ayant rejeté la demande d'inscription de Mme J... au tableau de l'ordre des avocats du barreau de Paris, la cour d'appel qui énonce qu'il appartient à cette dernière « d'établir qu'elle a été attachée de manière exclusive, pendant huit ans au moins, de façon permanente et continue, à temps complet à l'activité d'une organisation syndicale » et se borne à relever qu'il ressort d'une attestation de la directrice des ressources humaines de la société qui l'emploie en qualité d'ingénieur principal que « l'importance des mandats qui lui étaient conférés (depuis 2003) occupait une partie substantielle de son temps de travail allant jusqu'à plus de 70 % selon les périodes », que, selon ses bulletins de salaire, elle occupe un poste d'ingénieur principal à temps complet au sein de l'entreprise et que son curriculum vitae fait ressortir sur les années considérées des activités effectives pour l'entreprise, notamment d'auditeur opérations qualité et environnement et de directeur relation client, a violé par fausse interprétation le texte susvisé ;

2°/ qu'en vertu de l'article 98, 5°, du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, sont dispensés de la formation théorique et pratique et du certificat d'aptitude à la profession d'avocat, les juristes attachés pendant huit ans au moins à l'activité juridique d'une organisation syndicale ; que ce texte n'implique pas que cette activité juridique soit exercée à titre exclusif et strictement permanent, mais impose au juge de vérifier que les autres activités du candidat ne l'empêchent pas d'avoir une activité spécifique et continue de juriste pour son organisation syndicale, soit à plein temps, soit de manière principale ou prépondérante ; que, pour confirmer la décision ayant rejeté la demande d'inscription de Mme J... au tableau de l'ordre des avocats du barreau de Paris, la cour d'appel, qui énonce qu'il appartient à cette dernière « d'établir qu'elle a été attachée de manière exclusive, pendant huit ans au moins, de façon permanente et continue, à temps complet à l'activité d'une organisation syndicale » et se borne à relever qu'il ressort d'une attestation de la directrice des ressources humaines de la société qui l'emploie en qualité d'ingénieur principal que « l'importance des mandats qui lui étaient conférés (depuis 2003) occupait une partie substantielle de son temps de travail allant jusqu'à plus de 70 % selon les périodes », que, selon ses bulletins de salaire, elle occupe un poste d'ingénieur principal à temps complet au sein de l'entreprise et que son curriculum vitae fait ressortir sur les années considérées des activités effectives pour l'entreprise, notamment d'auditeur opérations qualité et environnement et de directeur relation client, sans nullement rechercher si l'activité d'ingénieur accomplie par Mme J... pour son employeur, dans le cadre de l'exécution de ses fonctions pour lesquelles elle bénéficiait d'une convention de forfait jours, n'était pas résiduelle et ponctuelle et si, au contraire, son activité juridique effective et continue pour son organisation syndicale, à l'occasion notamment des différents mandats syndicaux dont elle était simultanément investie, qui comportaient des heures de délégation qui prises en cumul représentaient plus de 151,67 heures de pratique juridique, n'était pas non seulement principale ou prépondérante, mais aussi accomplie pour un volume horaire au moins égal à celui de la durée légale hebdomadaire du travail, c'est-à-dire à temps plein, n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 98, 5°, du décret du 27 novembre 1991. »

Réponse de la Cour

3. L'arrêt relève que, selon ses bulletins de salaires, Mme J... occupe un poste d'ingénieur principal à temps complet au sein de l'entreprise qui l'emploie, que son curriculum vitae fait ressortir, sur les années considérées, des activités effectives pour l'entreprise, et que, selon l'attestation du directeur des ressources humaines, les mandats syndicaux qui lui étaient conférés pouvaient occuper jusqu'à plus de 70 % de son temps de travail selon les périodes.

4. Ayant ainsi fait ressortir, abstraction faite de motifs erronés mais surabondants relatifs à l'exigence d'une exclusivité de l'activité en cause, que Mme J... n'exerçait pas une activité spécifique de juriste continue et à temps plein, la cour d'appel en a justement déduit, sans être tenue de procéder à la recherche prétendument omise, que ses constatations et appréciations rendaient inopérante, que Mme J... ne pouvait bénéficier de la dispense prévue à l'article 98, 5°, du décret du 27 novembre 1991.

5. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme J... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six janvier deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat aux Conseils, pour Mme J...

LE POURVOI REPROCHE A L'ARRÊT ATTAQUÉ D'AVOIR confirmé l'arrêté du 6 novembre 2017 du conseil de l'Ordre des avocats au barreau de Paris ayant rejeté la demande d'inscription de Madame D... J... au tableau de l'ordre des avocats ;

AUX MOTIFS QUE l'article 98-5° du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 dispose que « sont dispensés de la formation théorique et pratique et du certificat d'aptitude à la profession d'avocat : - les juristes attachés pendant huit ans au moins à l'activité juridique d'une organisation syndicale. Les personnes mentionnées aux 3°, 4°, 5°, 6° et 8° peuvent avoir exercé leurs activités dans plusieurs des fonctions visées dans ces dispositions dès lors que la durée totale de ces activités est au moins égale à huit ans. » ; que les textes dérogatoires à l'accès à une profession juridique réglementée sont d'interprétation stricte et il appartient à Mme J... d'établir qu'elle a été attachée de manière exclusive, pendant huit ans au moins, de façon permanente et continue, à temps complet à l'activité juridique d'une organisation syndicale ; qu'en l'espèce si Mme J... possède les diplômes requis, ses mérites n'étant par ailleurs pas discutés et si l'organisation syndicale dont elle se prévaut permet l'application du texte susvisé, force est de constater qu'elle ne remplit pas la condition précédemment rappelée ; qu'en effet si le président du syndicat FIECI atteste le 27 septembre 2017 que Mme J... intervient depuis 2005 comme soutien juridique pour la section syndicale Steria mais aussi pour la fédération, ses compétences juridiques ayant permis de lui attribuer diverses fonctions de haut niveau, en reconnaissance desquelles elle a été élue déléguée nationale, le directeur des ressources humaines de la société Steria qui l'emploie, Mme Y... , aux termes d'un écrit non daté, précise, en citant les missions précédemment décrites par le syndicat que le parcours syndical de Mme J... s'est réalisé à 100 % dans l'entreprise jusqu'en 2008 et, depuis 2009, à mi-temps dans l'entreprise et mi-temps hors de l'entreprise ; que dans un second écrit, elle précise encore que « soumise dans le cadre de l'exécution de ses fonctions professionnelles à un forfait-jours, (elle) a exercé les mandats électifs et désignatifs dont elle était investie en toute liberté et autonomie
l'importance des mandats qui lui étaient conférés (depuis 2003) occupait une partie substantielle de son temps de travail allant jusqu'à plus de 70 % selon les périodes » ; qu'il est établi au dossier que Mme J... occupe, selon les bulletins de salaire qu'elle verse aux débats, un poste d'ingénieur principal à temps complet au sein de l'entreprise de conseils et de services informatiques Steria et son curriculum vitae fait ressortir sur les années considérées, des activités effectives pour l'entreprise, notamment d'auditeur opérations qualité et environnement et de directeur relation-client ; qu'il résulte de ce qui précède que Mme J... qui ne satisfait pas à l'ensemble des conditions posées ne peut se voir sa demande d'inscription accueillie de sorte que l'arrêté du 6 novembre 2017 du conseil de l'ordre des avocats sera confirmé ;

ET AUX MOTIFS A LES SUPPOSER ADOPTES QUE le Conseil constate que Madame D... J... reconnaît elle-même une ambiguïté quant à l'exercice d'un travail au profit de STERIA allant même jusqu'à dire que ce travail serait en réalité fictif ; qu'elle produit une attestation de Monsieur L... démontrant qu'elle exerce toujours une activité au sein de STERIA ; que les attestations qu'elle verse aux débats démontrent qu'elle effectue d'autres missions que juridiques, ainsi ses mandats électifs d'administrateur du syndicat ou de trésorier ; que s'il apparaît évident que Madame D... J... exerce différentes activités juridiques au bénéfice d'un syndicat et qu'elle exerce différents mandats et fonctions, les pièces communiquées et ses explications ne permettent pas d'établir la preuve d'un travail à temps plein au bénéfice du syndicat en qualité de juriste ; .

ALORS D'UNE PART QU'en vertu de l'article 98 5° du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, sont dispensés de la formation théorique et pratique et du certificat d'aptitude à la profession d'avocat, les juristes attachés pendant huit ans au moins à l'activité juridique d'une organisation syndicale ; que ce texte n'implique pas que cette activité de juriste attaché à l'activité juridique d'une organisation syndicale soit exercée à titre exclusif et strictement permanent, mais seulement de manière spécifique et continue et, soit à hauteur d'un volume horaire au moins égal à celui de la durée légale hebdomadaire du travail, soit de manière principale ou prépondérante; que pour confirmer la décision ayant rejeté la demande d'inscription de l'exposante au tableau de l'Ordre des avocats du barreau de Paris, la cour d'appel qui énonce qu'il appartient à cette dernière « d'établir qu'elle a été attachée de manière exclusive, pendant huit ans au moins, de façon permanente et continue, à temps complet à l'activité d'une organisation syndicale » et se borne à relever qu'il ressort d'une attestation de la directrice des ressources humaines de la société qui l'emploie en qualité d'ingénieur principal que « l'importance des mandats qui lui étaient conférés (depuis 2003) occupait une partie substantielle de son temps de travail allant jusqu'à plus de 70 % selon les périodes », que selon ses bulletins de salaire, elle occupe un poste d'ingénieur principal à temps complet au sein de l'entreprise et que son curriculum vitae fait ressortir sur les années considérées des activités effectives pour l'entreprise, notamment d'auditeur opérations qualité et environnement et de directeur relation client, a violé par fausse interprétation le texte susvisé ;

ALORS D'AUTRE PART QU'en vertu de l'article 98 5° du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, sont dispensés de la formation théorique et pratique et du certificat d'aptitude à la profession d'avocat, les juristes attachés pendant huit ans au moins à l'activité juridique d'une organisation syndicale ; que ce texte n'implique pas que cette activité juridique soit exercée à titre exclusif et strictement permanent, mais impose au juge de vérifier que les autres activités du candidat ne l'empêchent pas d'avoir une activité spécifique et continue de juriste pour son organisation syndicale, soit à plein temps, soit de manière principale ou prépondérante ; que pour confirmer la décision ayant rejeté la demande d'inscription de l'exposante au tableau de l'Ordre des avocats du barreau de Paris, la cour d'appel qui énonce qu'il appartient à cette dernière « d'établir qu'elle a été attachée de manière exclusive, pendant huit ans au moins, de façon permanente et continue, à temps complet à l'activité d'une organisation syndicale » et se borne à relever qu'il ressort d'une attestation de la directrice des ressources humaines de la société qui l'emploie en qualité d'ingénieur principal que « l'importance des mandats qui lui étaient conférés (depuis 2003) occupait une partie substantielle de son temps de travail allant jusqu'à plus de 70 % selon les périodes », que selon ses bulletins de salaire, elle occupe un poste d'ingénieur principal à temps complet au sein de l'entreprise et que son curriculum vitae fait ressortir sur les années considérées des activités effectives pour l'entreprise, notamment d'auditeur opérations qualité et environnement et de directeur relation client, sans nullement rechercher si l'activité d'ingénieur accomplie par l'exposante pour son employeur, dans le cadre de l'exécution de ses fonctions pour lesquelles elle bénéficiait d'une convention de forfait jours, n'était pas résiduelle et ponctuelle et si, au contraire, son activité juridique effective et continue pour son organisation syndicale, à l'occasion notamment des différents mandats syndicaux dont elle était simultanément investie, qui comportaient des heures de délégation qui prises en cumul représentaient plus de 151,67 heures de pratique juridique, n'était pas non seulement principale ou prépondérante, mais aussi accomplie pour un volume horaire au moins égal à celui de la durée légale hebdomadaire du travail, c'est-à-dire à temps plein, n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 98 5° du décret du 27 novembre 1991 ;


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 19-18304
Date de la décision : 06/01/2021
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 14 mars 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 06 jan. 2021, pourvoi n°19-18304


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Bouzidi et Bouhanna

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.18304
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