LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
CF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 9 décembre 2020
Cassation partielle
Mme BATUT, président
Arrêt n° 698 FS-P+I
Pourvoi n° T 19-21.390
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 DÉCEMBRE 2020
1°/ M. U... P... , domicilié [...] ,
2°/ la société P... U..., société civile d'exploitation viticole, dont le siège est [...] ,
ont formé le pourvoi n° T 19-21.390 contre l'arrêt rendu le 18 juin 2019 par la cour d'appel de Reims (chambre civile, 1re section), dans le litige les opposant :
1°/ à la société Mafroco, société à responsabilité limitée, dont le siège est 17 rue des Tilleuls, 51130 Pierre Morains,
2°/ à la société Gan assurances, dont le siège est 8-10 rue d'Astorg, 75008 Paris,
défenderesses à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Mornet, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. P... et de la société P... U..., de la SCP Marc Lévis, avocat des sociétés Mafroco et Gan assurances, l'avis écrit de M. Sudre, avocat général, et l'avis oral de M. Lavigne, avocat général, après débats en l'audience publique du 20 octobre 2020 où étaient présents Mme Batut, président, M. Mornet, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, Mme Teiller, MM. Avel, Chevalier, Mmes Kerner-Menay, Darret-Courgeon, conseillers, M. Vitse, Mmes Dazzan, Le Gall, Kloda, M. Serrier, Mmes Champ, Comte, Robin-Raschel, conseillers référendaires, M. Lavigne, avocat général, et Mme Randouin, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Reims, 18 juin 2019), la société Mafroco a vendu à la société civile d'exploitation viticole P... U... (la société P...) un matériel agricole servant au travail des vignes, dont la livraison est intervenue le 22 août 2011.
2. Le lendemain, M. P... , gérant de la société P..., a été victime d'un accident corporel lors de l'utilisation de ce matériel et a subi une intervention chirurgicale.
3. Après avoir sollicité deux expertises en référé aux fins d'examen du matériel litigieux et d'évaluation du préjudice corporel subi par M. P... , ce dernier et la société P... ont assigné la société Mafroco en responsabilité et indemnisation, en sollicitant, d'une part, la réparation de différents préjudices sur le fondement des articles 1386-1 et suivants, devenus 1245 et suivants du code civil, d'autre part, la résolution judiciaire du contrat de vente au titre d'un défaut de conformité du matériel.
4. La société Mafroco a été déclarée responsable du préjudice subi par M. P... à hauteur de la moitié, sur le fondement des textes précités, et condamnée à lui payer différentes sommes à ce titre.
Examen des moyens
Sur le deuxième moyen et le troisième moyen, pris en sa première branche, ci-après annexés
5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le troisième moyen, pris en sa seconde branche, et sur le quatrième moyen, réunis
Enoncé du moyen
6. Par son troisième moyen, pris en sa seconde branche, la société P... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande au titre de la perte d'exploitation fondée sur la responsabilité du fait des produits défectueux, alors « que le producteur est responsable du dommage causé par un défaut de son produit ; qu'en jugeant par motifs adoptés, pour débouter la société P... de sa demande de réparation au titre de la perte d'exploitation, que cette demande concernerait un « préjudice économique consécutif à l'atteinte à la machine litigieuse », la cour d'appel a violé l'article 1386-1, devenu 1245, du code civil, et par fausse application son article 1386-2, devenu 1245-1. »
7. Par son quatrième moyen, la société P... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande au titre de l'absence de fourniture d'une machine de remplacement fondée sur la responsabilité du fait des produits défectueux, alors « que le producteur est responsable du dommage causé par un défaut de son produit ; que, pour justifier sa demande d'indemnisation au titre des préjudices subis au titre de l'immobilisation de la machine achetée, la société P... rappelait que la société Mafroco ne lui avait « jamais proposé (
) une machine en remplacement du Trimovigne non-conforme et qui a connu onze avaries notables (
) entre la date d'achat et janvier 2013 (
), date à laquelle M. P... a ramené le Trimovigne en panne afin d'en demander le remboursement », et qu'elle avait dû en conséquence « recourir le 16 novembre 2012 à l'acquisition d'un chenillard « Rotair R70 1 Must Diesel Kubota » aux performances très inférieures, ainsi qu'à l'embauche d'un ouvrier qualifié, M. D... E... pour obtenir un résultat malgré tout inférieur à ce qu'elle était en droit d'attendre du Trimovigne » ; qu'en jugeant par motifs propres et adoptés, pour débouter la société P... de sa demande de réparation au titre du préjudice subi du fait de l'absence de fourniture d'une machine de remplacement, que cette demande concernerait un « préjudice économique consécutif à l'atteinte à la machine litigieuse », la cour d'appel a violé l'article 1386-1, devenu 1245, du code civil, et par fausse application son article 1386-2, devenu 1245-1. »
Réponse de la Cour
8. Selon l'article 1386-2, devenu 1245-1 du code civil, issu de la loi n° 98-389 du 19 mai 1998, les dispositions relatives à la responsabilité du fait des produits défectueux s'appliquent à la réparation du dommage qui résulte d'une atteinte à la personne et du dommage supérieur à un montant déterminé par décret, qui résulte d'une atteinte à un bien autre que le produit défectueux lui-même.
9. Après avoir énoncé, à bon droit, que ce régime de responsabilité ne s'applique pas à la réparation du dommage qui résulte d'une atteinte au produit défectueux lui-même et aux préjudices économiques découlant de cette atteinte, la cour d'appel en a exactement déduit que la perte d'exploitation et l'absence de fourniture de machine de remplacement invoquées par la société P... étaient consécutives à l'atteinte au matériel en cause et n'étaient pas indemnisables sur le fondement des articles 1386-1 et suivants, devenus 1245 et suivants du code civil.
10. Les moyens ne sont donc pas fondés.
Mais sur le premier moyen, pris en sa seconde branche
Enoncé du moyen
11. La société P... fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable son action en résolution de la vente fondée sur le défaut de conformité du produit, alors « que la demande en résolution pour défaut de conformité de la chose vendue ne présuppose pas des dommages causés par cette chose mais uniquement sa non-conformité à ce que l'acheteur était en droit d'en attendre au regard de l'objet du contrat ; qu'en jugeant « qu'en tout état de cause, il convient d'observer que le défaut de conformité allégué, tenant à la sécurité du produit ne comporte aucun lien de causalité avec les dommages dont la société P... poursuit la réparation, en lien avec les avaries ci-dessus énumérées », la cour d'appel a violé l'article 1184 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, ensemble l'article 1604 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 1386-2, devenu 1245-1, 1604 et 1184 du code civil, ce dernier dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :
12. Selon le premier de ces textes, les dispositions relatives à la responsabilité du fait des produits défectueux s'appliquent à la réparation du dommage qui résulte d'une atteinte à la personne et du dommage supérieur à un montant déterminé par décret, qui résulte d'une atteinte à un bien autre que le produit défectueux lui-même. En application des deuxième et troisième, l'acquéreur d'un bien peut agir en résolution de la vente en cas de manquement du vendeur à son obligation contractuelle de délivrance d'un bien conforme.
13. Cette action en résolution ne tendant pas à la réparation d'un dommage qui résulte d'une atteinte à la personne causée par un produit défectueux ou à un bien autre que ce produit, elle se trouve hors du champ de la directive 85/374/CEE du 25 juillet 1985 et de la loi du 19 mai 1998 qui l'a transposée, et n'est donc soumise à aucune de leurs dispositions.
14. Pour déclarer irrecevable l'action en résolution de la vente du matériel agricole pour non-conformité, l'arrêt retient que, si le régime de responsabilité du fait des produits défectueux n'exclut pas l'application d'autres régimes de responsabilité contractuelle ou extracontractuelle, c'est à la condition que ceux-ci reposent sur des fondements différents de celui tiré d'un défaut de sécurité du produit litigieux et que, sous le couvert d'une non-conformité du matériel acquis, la société P... reproche à la société Mafroco sa défectuosité résultant du défaut de sa sécurité.
15. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du premier moyen, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare irrecevable l'action en résolution de la vente de la société civile d'exploitation viticole P... U... fondée sur le défaut de conformité du produit, l'arrêt rendu le 18 juin 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ;
Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condamne la société Mafroco et la société Gan assurances aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Mafroco et la société Gan assurances, et les condamne à payer à M. P... et la société civile d'exploitation viticole P... U... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf décembre deux mille vingt.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. P... et la société P... U...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré irrecevable l'action en résolution de la société civile d'exploitation viticole P... U... fondée sur le défaut de conformité du produit ;
AUX MOTIFS QUE, aux termes de l'arrêt attaqué, « les appelants présentent une demande pour défaut de conformité du matériel vendu, en demandant notamment la résolution de la vente ; qu'ils réclament toutefois toujours la conformation du jugement en ce qu'il a accueilli leur action en responsabilité du fait des produits défectueux ; que le premier juge avait exactement rappelé que si le régime de la responsabilité du fait des produits défectueux n'excluait pas l'application d'autres régimes de responsabilité contractuelle ou extracontractuelle, c'était à la condition que ceux-ci reposent sur des fondements différents de celui tiré d'un défaut de sécurité du produit litigieux ; qu'or, pour se prévaloir à hauteur de cour de cette action, les appelants indiquent eux-mêmes que l'engin Trimovigne vendu n'était pas conforme aux normes de sécurité obligatoires qui lui étaient applicables ; qu'ils citent à cet égard exclusivement le rapport d'expertise judiciaire duquel il résulte que : - la nature de l'engin (tracteur enjambeur) devait imposer l'observation d'une procédure de demande d'homologation nationale, - la société Mafroco n'a pas respecté cette obligation, faute d'avoir fourni un dossier technique à l'organisme chargé de l'homologation, se contenant sur ce point d'une auto certification, de surcroît en se référant à ces (sic) textes obsolètes, abrogés ou annulés, ou à un rapport de l'organisme d'homologation concernant un engin d'un autre type, - la procédure d'auto certification de la société Mafroco n'a pas été accomplie selon les prescriptions réglementaires, notamment en ce qui concerne la constitution d'un dossier technique et le respect des règles essentielles de sécurité lors de la conception, - selon l'appréciation de l'organisme homologateur, qu'ils reprennent à leur compte, l'engin présente une non-conformité réglementaire et des points de non-conformité aux règles techniques de santé et de sécurité au travail résultant : du défaut d'information et de prescription de sécurité dans la notice d'instruction, du défaut d'accès au poste de conduite, de l'absence de sortie d'urgence de la cabine, du défaut de protection des éléments moteurs, - selon l'appréciation de l'organisme homologateur, qu'ils reprennent à leur compte, l'absence de preuve présentée par la société Mafroco ne permet pas formellement de statuer sur la conformité concernant : la protection en cas de renversement, le siège conducteur, le niveau sonore, le freinage, - l'absence de remise des notices d'instruction constitue également un point de non-conformité ; que sur ce dernier, il sera observé que le premier juge a exactement rappelé l'appréciation de l'expert judiciaire (pages 30 et 31 de son rapport), pour lequel le respect de consignes de sécurité mentionnées dans la notice de la rogneuse aurait permis d'éviter l'accident ; qu'il sera donc observé que sous couvert de non-conformité, les appelants viennent en réalité reprocher à la société Mafroco la défectuosité du produit résultant du défaut de sa sécurité ; qu'il conviendra donc de dire irrecevable leur demande fondée sur le défaut de conformité du produit ; qu'en tout état de cause, il convient d'observer que le défaut de conformité allégué, tenant à la sécurité du produit ne comporte aucun lien de causalité avec les dommages dont la société P... poursuit la réparation, en lien avec les avaries ci-dessus énumérées » ;
ALORS en premier lieu QUE le régime de responsabilité du fait des produits défectueux, qui ne permet pas à l'acquéreur d'un produit défectueux de demander la résolution du contrat, n'exclut pas la possibilité de demander cette dernière sur le fondement d'un défaut de conformité dudit produit, y compris au titre d'un défaut de sécurité de ce dernier ; qu'en jugeant, pour débouter la société P... U... et M. P... de leur demande en résolution de la vente pour défaut de conformité du bien vendu, fondée sur l'article 1184 du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause, que ces derniers « réclament toutefois toujours la confirmation du jugement en ce qu'il a accueilli leur action en responsabilité du fait des produits défectueux » (arrêt, p.10), de telle sorte que « sous couvert de non-conformité, les appelants viennent en réalité reprocher à la société Mafroco la défectuosité du produit résultant du défaut de sa sécurité. Il conviendra donc de dire irrecevable leur demande fondée sur le défaut de conformité du produit » (ibid. p.11), la cour d'appel a violé l'article 1386-18, devenu 1245-17, du code civil, ensemble son article 1184 dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, et son article 1604 ;
ALORS en second lieu QUE la demande en résolution pour défaut de conformité de la chose vendue ne présuppose pas des dommages causés par cette chose mais uniquement sa non-conformité à ce que l'acheteur était en droit d'en attendre au regard de l'objet du contrat ; qu'en jugeant « qu'en tout état de cause, il convient d'observer que le défaut de conformité allégué, tenant à la sécurité du produit ne comporte aucun lien de causalité avec les dommages dont la société P... poursuit la réparation, en lien avec les avaries ci-dessus énumérées » (arrêt, p.11), la cour d'appel a violé l'article 1184 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, ensemble l'article 1604 du code civil.
DEUXIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a dit que la responsabilité sera partagée par moitié entre M. P... et la SARL Mafroco et d'AVOIR en conséquence limité la condamnation allouée à M. P... aux sommes de : au titre de l'incapacité fonctionnelle temporaire totale du 23 août au 27 août 2011 : 57,50 €, au titre de l'incapacité fonctionnelle temporaire partielle du 28 août 2011 au 26 septembre 2011 inclus : 86,25 €, au titre de l'incapacité fonctionnelle temporaire partielle du 27 septembre 2011 au 22 janvier 2012 inclus : 135,70 €, au titre du déficit fonctionnel permanent : 950 €, au titre des souffrances endurées : 1.500 €, au titre du préjudice temporaire esthétique : 750 €, au titre du préjudice esthétique définitif : 1.000 €, au titre de l'aide d'une tierce personne : 112,50 €, soit la somme totale de 4.591,95 € ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE, aux termes de l'arrêt attaqué, « le nonrespect des règles élémentaires de prudence, qu'en sa qualité de professionnel de l'activité viticole, Monsieur P... ne pouvait pas ignorer, semblait constituer le facteur déterminant dans le cadre de cet accident, et ce malgré l'absence de remise de la notice d'instruction d'utilisation du produit, alléguée par son fabricant ; qu'il appartenait à cet utilisateur de stopper la rotation des couteaux pour toute intervention externe au poste de conduite ; qu'il y a donc lieu de dire que la faute de Monsieur P... dans la survenance de l'accident sera de nature à réduire de moitié son droit à indemnisation, de telle sorte que la société Mafroco, en sa qualité de fabricant du produit, sera tenue de réparer le préjudice de Monsieur P... à hauteur de moitié, sur le fondement de la responsabilité du fait des produits défectueux » ;
ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTÉS QUE, aux termes du jugement entrepris, « comme l'a relevé l'expert, le non-respect des règles élémentaires de prudence, qu'en sa qualité de prestataire de service viticole mécanisé Monsieur P... ne pouvait ignorer, semblait constituer le facteur déterminant dans le cadre de cet accident ; que l'expert précise qu'en sa qualité, il se devait de connaître les règles élémentaires de sécurité, nonobstant l'absence de remise de notice d'instruction alléguée, et de stopper la rotation des couteaux pour toute intervention externe au poste de conduite, ce qui aurait évit(é) l'accident ; que la propre responsabilité de Monsieur U... P... dans l'accident doit réduire son indemnisation à hauteur de la moitié » ;
ALORS en premier lieu QU'en jugeant que « le non-respect des règles élémentaires de prudence, qu'en sa qualité de professionnel de l'activité viticole, Monsieur P... ne pouvait pas ignorer, semblait constituer le facteur déterminant dans le cadre de cet accident, et ce malgré l'absence de remise de la notice d'instruction d'utilisation du produit » (arrêt, p. 15), pour limiter la responsabilité de la société Mafroco, la cour d'appel, qui a statué par motifs dubitatifs, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS en second lieu QU'en jugeant que selon l'expert judiciaire « le respect des consignes de sécurité mentionnées dans la notice de la rogneuse, aurait permis d'éviter l'accident » (arrêt, page 11, alinéa 2) mais que « le non-respect des règles élémentaires de prudence, qu'en sa qualité de professionnel de l'activité viticole, Monsieur P... ne pouvait pas ignorer, semblait constituer le facteur déterminant dans le cadre de cet accident, et ce malgré l'absence de remise de la notice d'instruction d'utilisation du produit » (arrêt, p.15), pour limiter la responsabilité de la société Mafroco, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l'article 1386-13, devenu devenu 1245-12, du code civil.
TROISIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société P... U... de sa demande au titre de la perte d'exploitation fondée sur la responsabilité du fait des produits défectueux ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE, aux termes de l'arrêt attaqué, « la société P... défaille à démontrer en quoi l'incapacité fonctionnelle de son gérant a fait chuter sa production pendant la période susdite, et corrélativement les deux chiffres d'affaires susdits ; que la société P... sera déboutée de sa demande à titre de perte d'exploitation sur le fondement de la responsabilité des produits défectueux » ;
ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTÉS QUE, aux termes du jugement entrepris, « il est de jurisprudence constante que le régime de la responsabilité du fait des produits défectueux ne s'applique pas à la réparation du dommage qui résulte d'une atteinte au produit défectueux lui-même, et donc par conséquent aux préjudices économiques découlant de l'atteinte au produit lui-même ; qu'il importe de distinguer les préjudices économiques consécutifs de (sic) l'atteinte à des biens qui appartiennent à la victime et sont distincts du produit qui sont réparables sur le fondement de la responsabilité du fait des produits défectueux, et les préjudices économiques découlant de l'atteinte au produit luimême, qui ne sont pas recevables au titre de cette responsabilité ; qu'en l'espèce, l'intégralité des demandes de Monsieur P... et de la SCEV P... concerne des préjudices économiques consécutifs à l'atteinte à la machine litigieuse ; qu'il en est ainsi aussi bien (
) de l'indemnisation sollicitée au titre de la perte d'exploitation » ;
ALORS en premier lieu QUE pour justifier sa demande d'indemnisation au titre des pertes d'exploitation subies, la société P... U... rappelait que « les nombreuses interventions ont entraîné l'immobilisation de la machine pendant un total de 28 jours entre le 30/03/2012 et le 31/07/2012, période pendant laquelle le TRIMOVIGNE aurait été particulièrement nécessaire pour des travaux de rognage ou de traitement qui s'étalent habituellement de mai à août (4 mois) » (conclusions, p.24), que « le TRIMOVIGNE devait encore être utilisé pour les travaux d'engrais et désherbage (1 mois en février-mars), et les travaux de propagation d'engrais « Fertilétoiles » (1 mois en avril) » (ibid. pp.24-25), que « la machine a donc été immobilisée un mois sur le six mois durant lesquels elle aurait dû pouvoir être exploitée en 2012 » (ibid. p.25), qu'« en 2012 le chiffre d'affaires de prestations viticoles s'est établi à 50.933,17 € HT (pièce n°12) », de sorte que « la perte de chiffre d'affaires pour ce motif s'établit donc à : (50.933,17 x 6/5) – 50.933,17 = 10.186,63 € » ; qu'en déboutant la société P... U... de toute indemnisation à ce titre au motif que « la société P... défaille à démontrer en quoi l'incapacité fonctionnelle de son gérant a fait chuter sa production pendant la période susdite, et corrélativement les deux chiffres d'affaires susdits » (arrêt, p.19), sans procéder à la moindre analyse des conséquences de l'immobilisation de la machine pendant six mois sur le chiffre d'affaires de la société, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS en second lieu QUE le producteur est responsable du dommage causé par un défaut de son produit ; qu'en jugeant par motifs adoptés, pour débouter la société P... U... de sa demande de réparation au titre de la perte d'exploitation, que cette demande concernerait un « préjudice économique consécutif à l'atteinte à la machine litigieuse » (jugement entrepris, p.11 ), la cour d'appel a violé l'article 1386-1, devenu 1245, du code civil, et par fausse application son article 1386-2, devenu 1245-1.
QUATRIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société P... U... de sa demande au titre de l'absence de fourniture d'une machine de remplacement fondée sur la responsabilité du fait des produits défectueux ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE, aux termes de l'arrêt attaqué, « (le jugement) a retenu à bon droit que le régime de responsabilité du fait des produits défectueux n'avait pas trait à la réparation des dommages causés au produit défectueux luimême, ni au titre des préjudices économiques découlant de l'atteinte au produit luimême ; qu'il a exactement observé que l'ensemble des réparations réclamées par la société P... concerne des préjudices économiques consécutifs à l'atteinte au produit lui-même » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE, aux termes du jugement entrepris, « il est de jurisprudence constante que le régime de la responsabilité du fait des produits défectueux ne s'applique pas à la réparation du dommage qui résulte d'une atteinte au produit défectueux lui-même, et donc par conséquent aux préjudices économiques découlant de l'atteinte au produit lui-même ; qu'il importe de distinguer les préjudices économiques consécutifs de (sic) l'atteinte à des biens qui appartiennent à la victime et sont distincts du produit qui sont réparables sur le fondement de la responsabilité du fait des produits défectueux, et les préjudices économiques découlant de l'atteinte au produit lui-même, qui ne sont pas recevables au titre de cette responsabilité ; qu'en l'espèce, l'intégralité des demandes de Monsieur P... et de la SCEV P... concerne des préjudices économiques consécutifs à l'atteinte à la machine litigieuse ; qu'il en est ainsi aussi bien (
) de l'indemnisation quant au préjudice subi du fait de l'absence de fourniture d'une machine de remplacement de celle litigieuse » ;
ALORS QUE le producteur est responsable du dommage causé par un défaut de son produit ; que pour justifier sa demande d'indemnisation au titre des préjudices subis au titre de l'immobilisation de la machine achetée, la société P... U... rappelait que la société Mafroco ne lui avait « jamais proposé (
) une machine en remplacement du TRIMOVIGNE non-conforme et qui a connu onze avaries notables (
) entre la date d'achat et janvier 2013 (
), date à laquelle Monsieur P... a ramené le TRIMOVIGNE en panne afin d'en demander le remboursement » (conclusions, p.25), et qu'elle avait dû en conséquence « recourir le 16 novembre 2012 à l'acquisition d'un chenillard « ROTAIR R70 1 MUST DIESEL KUBOTA » (pièces n°18 et 19) aux performances très inférieures, ainsi qu'à l'embauche d'un ouvrier qualifié, Monsieur D... E... (pièce n°20) pour obtenir un résultat malgré tout inférieur à ce qu'elle était en droit d'attendre du TRIMOVIGNE » (ibid.) ; qu'en jugeant par motifs propres et adoptés, pour débouter la société P... U... de sa demande de réparation au titre du préjudice subi du fait de l'absence de fourniture d'une machine de remplacement, que cette demande concernerait un « préjudice économique consécutif à l'atteinte à la machine litigieuse » (jugement entrepris, p.11 ; arrêt attaqué, p.19), la cour d'appel a violé l'article 1386-1, devenu 1245, du code civil, et par fausse application son article 1386-2, devenu 1245-1.