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24/09/2020 | FRANCE | N°19-19179

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 24 septembre 2020, 19-19179


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JT

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 24 septembre 2020

Rejet

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 658 FS-P+B+I

Pourvoi n° Q 19-19.179

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 24 SEPTEMBRE 2020

1°/ M. G... S...,

2°/ Mme I... X... épouse S...,r>
domiciliés [...] ,

ont formé le pourvoi n° Q 19-19.179 contre l'arrêt rendu le 30 avril 2019 par la cour d'appel de Lyon (1re chambre civile B), dans ...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JT

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 24 septembre 2020

Rejet

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 658 FS-P+B+I

Pourvoi n° Q 19-19.179

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 24 SEPTEMBRE 2020

1°/ M. G... S...,

2°/ Mme I... X... épouse S...,

domiciliés [...] ,

ont formé le pourvoi n° Q 19-19.179 contre l'arrêt rendu le 30 avril 2019 par la cour d'appel de Lyon (1re chambre civile B), dans le litige les opposant :

1°/ à M. C... A...,

2°/ à Mme N... H... T... J... épouse A...,

domiciliés [...] ,

défendeurs à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Béghin, conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de M. et Mme S..., de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. et Mme A..., et l'avis de M. Sturlèse, avocat général, après débats en l'audience publique du 30 juin 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Béghin, conseiller référendaire rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, M. Parneix, Mme Provost-Lopin, MM. Barbieri, Jessel, conseillers, Mmes Corbel, Collomp, Schmitt, conseillers référendaires, M. Sturlèse, avocat général, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 30 avril 2019), le 30 juin 1997, M. et Mme A..., divisant leur fonds, ont vendu à M. et Mme S... une parcelle cadastrée [...] , en constituant à son bénéfice une servitude de passage sur la parcelle [...] , qu'ils ont conservée et ultérieurement divisée en deux parcelles cadastrées [...] et [...] .

2. Le 22 juillet 2010, M. et Mme A... ont consenti à M. et Mme R... une promesse de vente portant sur la parcelle [...] et contenant constitution sur celle-ci d'une servitude de passage au bénéfice de la parcelle [...] . Cette promesse n'ayant pas été réitérée, en raison notamment de l'opposition de M. et Mme S... au projet immobilier des acquéreurs, un jugement irrévocable du 8 novembre 2011, valant vente et publié le 27 mars 2012, en a ordonné l'exécution forcée.

3. Par acte des 4 et 30 juillet 2012, M. et Mme R... ont vendu leur parcelle à M. et Mme S.... Ceux-ci ont assigné M. et Mme A... en démolition d'un muret construit sur l'assiette de la servitude de passage établie le 30 juin 1997 et en dénégation de la servitude grevant la parcelle [...] au bénéfice de la parcelle [...] .

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

4. M. et Mme S... font grief à l'arrêt de constater que la servitude de passage grevant le fonds [...] au profit de la parcelle [...] est éteinte et de rejeter leurs demandes à ce titre, alors :

« 1°/ que les dispositions de l'article 685-1 du code civil ne sont applicables à une servitude ayant fait l'objet d'une convention qu'à la condition que celle-ci ait l'état d'enclave pour cause déterminante et se borne à fixer l'assiette et les modalités d'exercice du passage ; que pour déterminer si tel est le cas, il appartient aux juges du fond de rechercher la commune intention des parties d'après les termes de la convention ; qu'en se bornant à relever que l'accès à la parcelle [...] ne pouvait se faire que par le chemin du Panorama pour dire que la clause de servitude contenue dans l'acte du 30 juin 1997 avait pour cause l'enclavement, sans s'expliquer quant au libellé de ladite clause, laquelle faisait référence à une constitution de servitude et non à une simple définition de l'assiette et du mode d'exercice, sans qu'il soit jamais indiqué que le fondement de la servitude serait le fondement légal résultant de l'état d'enclave, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles 685-1 et 1134 ancien [1101 et 1103 nouveaux] du code civil ;

2°/ que la renonciation tacite postule que le titulaire du droit ait accompli des actes révélant sa volonté non équivoque d'abdiquer ce droit ; qu'en opposant à M. et Mme S... la circonstance que dans l'acte des 4 et 30 juillet 2012, aux termes duquel ils acquéraient une portion du terrain, assiette de la servitude, et auquel M. et Mme A... n'étaient pas parties, ils n'ont émis aucune réserve s'agissant du surplus de l'assiette de la servitude, subsistant sur la parcelle [...] , les juges du fond, qui n'ont pas mis en évidence la volonté dépourvue d'équivoque de M. et Mme S... de renoncer à leur droit, ont violé l'article 1134 ancien [1103 nouveau] du code civil. »

Réponse de la Cour

5. La cour d'appel a relevé que l'accès à la parcelle [...] ne pouvait se faire que par le chemin du Panorama et que la servitude établie à son bénéfice sur la parcelle [...] avait été concédée pour sa desserte, en lui permettant un accès à ce chemin.

6. Sans s'être fondée sur une renonciation des propriétaires du fonds dominant à leur droit de passage, elle en a souverainement déduit que la servitude n'avait été instituée qu'en raison de l'état d'enclave de la parcelle [...] et que, par suite de l'acquisition par M. et Mme S... de la parcelle [...] , supportant l'assiette de la servitude, l'état d'enclave avait cessé et que la servitude était en conséquence éteinte.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

8. M. et Mme S... font grief à l'arrêt de dire que la servitude de passage au profit du fonds [...] et grevant le fonds [...] , stipulée dans l'acte sous seing privé du 22 juillet 2010 passé entre M. et Mme A... et M. et Mme R..., valant vente au terme du jugement du tribunal de grande instance de Lyon en date du 8 novembre 2011, était valide et opposable à M. et Mme S..., acquéreurs du fonds servant selon acte des 4 et 30 juillet 2012, dans les termes, conditions et limites énoncés dans l'acte du 22 juillet 2010, alors :

« 1°/ qu'une servitude n'est opposable à l'acquéreur de l'immeuble grevé, hors l'hypothèse où son acte d'acquisition en fait mention, que si elle a été publiée ; qu'une servitude n'est publiée que si l'acte emportant, ou la décision valant, constitution de la servitude a été publié ; qu'en retenant, pour dire la servitude stipulée dans l'acte du 22 juillet 2010 opposable à M. et Mme S..., que le jugement du 8 novembre 2011, lequel comportait mention de la servitude, avait été publié au service de la publicité foncière, sans constater qu'il valait constitution de la servitude, les juges du fond ont violé les articles 28 et 30 du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955 ;

2°/ qu'à défaut de publicité, une servitude n'est opposable à l'acquéreur de l'immeuble grevé que si son acte d'acquisition en fait mention ; qu'en retenant, pour dire la servitude stipulée dans l'acte du 22 juillet 2010 opposable à M. et Mme S..., que l'acte des 4 et 30 juillet 2012 renvoyait au jugement du 8 novembre 2011, lequel comportait mention de la servitude, sans constater qu'il valait constitution de la servitude, les juges du fond ont violé l'article 1134 ancien [1103 nouveau] du code civil ;

3°/ que seuls les énoncés figurant au dispositif d'une décision de justice présentent un caractère décisoire ; que faute d'avoir recherché, comme ils y étaient invités, s'il n'était pas exclu de se référer au jugement du 8 novembre 2011, comme valant constitution de la servitude, dès lors que la mention de la servitude figurait dans les commémoratifs et qu'en son dispositif, il se bornait à indiquer valoir vente, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 480 du code de procédure civile ;

4°/ qu'une servitude n'est opposable à l'acquéreur de l'immeuble grevé, hors l'hypothèse où son acte d'acquisition en fait mention, que si elle a été publiée ; que la connaissance par l'acquéreur de l'immeuble grevé de l'existence de la servitude ne supplée pas le défaut de publicité ; qu'en retenant, pour dire la servitude stipulée dans l'acte du 22 juillet 2010 opposable à M. et Mme S..., que ceux-ci en avaient eu connaissance à la date d'acquisition du fonds prétendument grevé, les juges du fond ont violé les articles 28 et 30 du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955. »

Réponse de la Cour

9. En application des articles 28 et 30-1 du décret du 4 janvier 1955, une servitude est opposable à l'acquéreur de l'immeuble grevé si elle a été publiée ou si son acte d'acquisition en fait mention (3e Civ., 27 octobre 1993, pourvoi n° 91-19.874, Bull. 1993, III, n° 132). La publication n'étant pas le seul mode légal de publicité d'une servitude, celle-ci peut également être opposable à l'acquéreur de l'immeuble grevé si, au moment de la vente, il en connaissait l'existence autrement que par la mention qu'en faisait son titre (3e Civ., 16 septembre 2009, pourvoi n° 08-16.499, Bull. 2009, III, n° 195).

10. Ayant relevé que la servitude de passage grevant la parcelle [...] au bénéfice de la parcelle [...] , constituée par la promesse de vente du 22 juillet 2010, avait été reproduite dans le jugement du 8 novembre 2011, lequel avait été publié et avait été mentionné dans le titre de M. et Mme S..., la cour d'appel en a déduit, souverainement, que ceux-ci avaient eu connaissance de la servitude au moment de la vente, peu important qu'elle n'ait pas été constatée dans le dispositif du jugement, et, à bon droit, qu'elle leur était en conséquence opposable.

11. Le moyen, qui manque en fait en ses autres branches en ce que l'arrêt n'a pas retenu que la servitude avait été publiée ou mentionnée dans l'acte d'acquisition du fonds servant, n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. et Mme S... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. et Mme S... et les condamne à payer à M. et Mme A... la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre septembre deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour M. et Mme S...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU' il a constaté que la servitude de passage grevant le fonds n° [...] au profit de la parcelle [...] était éteinte et débouté de M. et Mme S... de leurs demandes à ce titre ;

AUX MOTIFS QU' « Aux termes de l'article 685-1 du code civil, « En cas de cessation de l'enclave et quelle que soit la manière dont l'assiette et le mode de la servitude ont été déterminés, le propriétaire du fonds servant peut, à tout moment, invoquer l'extinction de la servitude si la desserte du fonds dominant est assurée dans les conditions de l'article 682. A défaut d'accord amiable, cette disparition est constatée par une décision de justice. » La constitution d'une servitude de passage sur la parcelle [...] au profit de la parcelle [...] avait pour cause l'enclavement de la parcelle [...] , dont l'accès ne pouvait se faire que par le chemin du Panorama. M. et Mme S... en acquérant la parcelle [...] sont devenus propriétaires du chemin d'accès à leur fonds [...] . D'autre part, ils ne justifient pas d'une insuffisance de ce chemin qui présente une largeur' comprise entre 3.46 m et 3.75 m, et qu'ils ont utilisé sans manifester aucune doléance concernant sa largeur, pendant 14 ans. Leur fonds [...] contigu à la parcelle [...] n'est donc plus enclavé. En conséquence, la servitude subsistante sur la bande de 50 à 90 cm située entre le muret et la limite ouest de la servitude de passage telle qu'indiquée dans l'acte du 80 juin 1997/ doit être considérée comme éteinte, de qui a d'ailleurs été admis par M. et Mme K... eux-mêmes dans 'l'acte notarié des 4 et 30 juillet 2012, page 10, (acte d'acquisition par eux de la parcelle [...] aux époux R...), en ces termes «étant précisé que ces servitudes [ndlr : celles constituées dans l'acte du 30 juin 1997] deviennent à ce jour sans objets puisque M. et Mme S... se retrouvent désormais propriétaires du terrain objet de la servitude de prospect et du chemin, objet de la servitude de passage rappelée ci-dessus. » Aucune réserve n'a été faite dans cet acte pour le surplus de l'assiette de la servitude de passage subsistant sur la parcelle [...] » ;

ALORS QUE, premièrement, les dispositions de l'article 685-1 du code civil ne sont applicables à une servitude ayant fait l'objet d'une convention qu'à la condition que celle-ci ait l'état d'enclave pour cause déterminante et se borne à fixer l'assiette et les modalités d'exercice du passage ; que pour déterminer si tel est le cas, il appartient aux juges du fond de rechercher la commune intention des parties d'après les termes de la convention ; qu'en se bornant à relever que l'accès à la parcelle [...] ne pouvait se faire que par le chemin du Panorama pour dire que la clause de servitude contenue dans l'acte du 30 juin 1997 avait pour cause l'enclavement, sans s'expliquer quant au libellé de ladite clause, laquelle faisait référence à une constitution de servitude et non à une simple définition de l'assiette et du mode d'exercice, sans qu'il soit jamais indiqué que le fondement de la servitude serait le fondement légal résultant de l'état d'enclave, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles 685-1 et 1134 ancien [1101 et 1103 nouveaux] du code civil ;

ALORS QUE, deuxièmement, la renonciation tacite postule que le titulaire du droit ait accompli des actes révélant sa volonté non équivoque d'abdiquer ce droit ; qu'en opposant à M. et Mme S... la circonstance que dans l'acte des 4 et 30 juillet 2012, aux termes duquel ils acquéraient une portion du terrain, assiette de la servitude, et auquel M. et Mme A... n'étaient pas parties, ils n'ont émis aucune réserve s'agissant du surplus de l'assiette de la servitude, subsistant sur la parcelle [...] , les juges du fond, qui n'ont pas mis en évidence la volonté dépourvue d'équivoque de M. et Mme S... de renoncer à leur droit, ont violé l'article 1134 ancien [1103 nouveau] du code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU' il a, réformant le jugement, dit que la servitude de passage au profit du fonds n° [...] et grevant le fonds [...] , stipulée dans l'acte sous seing privé du 22 juillet 2010 passé entre M. et Mme A... et M. et Mme R..., valant vente au terme du jugement du Tribunal de grande instance de Lyon en date du 8 novembre 2011, est valide et opposable à M. et Mme S..., acquéreurs du fonds servant selon acte des 4 et 30 juillet 2012, dans les termes, conditions et limites énoncés dans l'acte du 22 juillet 2010 ;

AUX MOTIFS QUE « Par jugement du 8 novembre 2011, le tribunal de grande instance de Lyon a constaté le caractère parfait de la vente consentie entre M. et Mme A... et M. et Mme R.... Cette vente procède nécessairement du compromis du 22 avril 2010, lequel comporte la constitution d'une servitude de passage au profit de la parcelle [...] restant la propriété des époux A... sur le chemin desservant la parcelle [...] , désormais inclus dans la parcelle [...] , et ce pour leur permettre d'accéder à la partie nord de leur parcelle [...] . L'acte de vente pat M. et Mme R... à M. et Mme S... en date des 4 et 30 juillet 2012, mentionne dans le rappel de l'origine de propriété que les vendeurs ont acquis la parcelle [...] de M. et Mme A... aux termes d'un jugement ordonnant la réalisation forcée de la vente, « ledit jugement rendu par le tribunal de grande instance de Lyon le 8 novembre 2011 ayant été publié au premier bureau des hypothèques de Lyon le 27 mars 2012, volume 2012P n° 3480. » Or le jugement mentionne : « Suivant acte sous seing privé en date du 22 juillet 2010, M. et Mme A... se sont obligés à vendre à M. R... et Melle O... une parcelle de terrain à bâtir située à Caluire cadastrée section [...] (...) Cet acte institue une servitude de passage au profit de la parcelle [...] sur la parcelle [...] sur une bande de 3,56 à 3,75 m tel que hachuré sur un plan annexé à l'acte, rappel également que le propriétaire du fonds voisin bénéficie d'une servitude de passage sur ledit chemin hachuré sur le plan. » M. et Mme R..., acquéreurs, n'ont pas demandé au tribunal de constater la vente en excluant cette servitude qu'ils concédaient. Le jugement en constatant le caractère parfait de la vente a nécessairement homologué toutes les stipulations convenues entre les parties. Dès lors, la servitude de passage ayant été reproduite dans le jugement du tribunal de grande instance de Lyon du 8 novembre 2011, et ce jugement ayant été d'une part publié au service de la publicité foncière et d'autre part, mentionné dans l'acte de vente des 4 et 30 juillet 2012, est opposable aux époux S..., qui en ont eu connaissance à cette date. » ;

ALORS QUE, premièrement, une servitude n'est opposable à l'acquéreur de l'immeuble grevé, hors l'hypothèse où son acte d'acquisition en fait mention, que si elle a été publiée ; qu'une servitude n'est publiée que si l'acte emportant, ou la décision valant, constitution de la servitude a été publié ; qu'en retenant, pour dire la servitude stipulée dans l'acte du 22 juillet 2010 opposable à M. et Mme S..., que le jugement du 8 novembre 2011, lequel comportait mention de la servitude, avait été publié au service de la publicité foncière, sans constater qu'il valait constitution de la servitude, les juges du fond ont violé les articles 28 et 30 du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955 ;

ALORS QUE, deuxièmement, à défaut de publicité, une servitude n'est opposable à l'acquéreur de l'immeuble grevé que si son acte d'acquisition en fait mention ; qu'en retenant, pour dire la servitude stipulée dans l'acte du 22 juillet 2010 opposable à M. et Mme S..., que l'acte des 4 et 30 juillet 2012 renvoyait au jugement du 8 novembre 2011, lequel comportait mention de la servitude, sans constater qu'il valait constitution de la servitude, les juges du fond ont violé l'article 1134 ancien [1103 nouveau] du code civil ;

ALORS QUE, troisièmement, seuls les énoncés figurant au dispositif d'une décision de justice présentent un caractère décisoire ; que faute d'avoir recherché, comme ils y étaient invités, s'il n'était pas exclu de se référer au jugement du 8 novembre 2011, comme valant constitution de la servitude, dès lors que la mention de la servitude figurait dans les commémoratifs et qu'en son dispositif, il se bornait à indiquer valoir vente, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 480 du code de procédure civile ;

ALORS QUE, quatrièmement, une servitude n'est opposable à l'acquéreur de l'immeuble grevé, hors l'hypothèse où son acte d'acquisition en fait mention, que si elle a été publiée ; que la connaissance par l'acquéreur de l'immeuble grevé de l'existence de la servitude ne supplée pas le défaut de publicité ; qu'en retenant, pour dire la servitude stipulée dans l'acte du 22 juillet 2010 opposable à M. et Mme S..., que ceux-ci en avaient eu connaissance à la date d'acquisition du fonds prétendument grevé, les juges du fond ont violé les articles 28 et 30 du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 19-19179
Date de la décision : 24/09/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

SERVITUDE - Constitution - Opposabilité - Conditions - Détermination

Une servitude est opposable à l'acquéreur de l'immeuble grevé si elle a été publiée, ou si son acte d'acquisition en fait mention, ou encore s'il en connaissait l'existence au moment de l'acquisition


Références :

articles 28 et 30 du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955.

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 30 avril 2019

A rapprocher :3e Civ., 16 septembre 2009, pourvoi n° 08-16499, Bull. 2009, III, n° 195 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 24 sep. 2020, pourvoi n°19-19179, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin
Avocat(s) : SCP Foussard et Froger, SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret

Origine de la décision
Date de l'import : 16/02/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.19179
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