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09/07/2020 | FRANCE | N°19-13568

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 09 juillet 2020, 19-13568


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 9 juillet 2020

Cassation partielle

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 221 FS-D

Pourvoi n° R 19-13.568

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 9 JUILLET 2020

Mme N... M..., domiciliée [...] , a formé le pourvoi nÂ

° R 19-13.568 contre l'arrêt rendu le 18 décembre 2018 par la cour d'appel de Montpellier (1re chambre A), dans le litige l'opposant à la société...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 9 juillet 2020

Cassation partielle

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 221 FS-D

Pourvoi n° R 19-13.568

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 9 JUILLET 2020

Mme N... M..., domiciliée [...] , a formé le pourvoi n° R 19-13.568 contre l'arrêt rendu le 18 décembre 2018 par la cour d'appel de Montpellier (1re chambre A), dans le litige l'opposant à la société Les Mutuelles du Mans IARD, société anonyme, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Nivôse, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Munier-Apaire, avocat de Mme M..., de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Les Mutuelles du Mans IARD, et l'avis de Mme Vassallo, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 11 février 2020, où étaient présents M. Chauvin, président, M. Nivôse, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, Mmes Farrenq-Nési, Greff-Bohnert, MM. Jacques, Bech, Boyer, conseillers, Mmes Guillaudier, Georget, Renard, Djikpa, conseillers référendaires, Mme Vassallo, premier avocat général, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 18 décembre 2018), Mme M... a confié des travaux de pose de carrelage avec treillis soudé sur sa terrasse à la société Occitane de carrelage, assurée auprès de la société Les Mutuelles du Mans IARD (la société MMA).

2. Mme M..., se plaignant de désordres liés à l'affaissement de sa terrasse, a reçu une proposition d'indemnisation de la société MMA qui a refusé de prendre en charge les travaux de chape et de treillis soudé. Après expertise, elle a assigné les sociétés Occitane de carrelage et MMA en paiement des travaux de reprise.

Examen du moyen

Sur le moyen unique, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. Mme N... M... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande contre la société MMA, alors « que la garantie de l'assureur responsabilité décennale doit couvrir tous les désordres résultant d'une mauvaise exécution des activités professionnelles déclarées par le constructeur à l'assureur ; qu'en l'espèce, il résultait de l'attestation d'assurance décennale que la société Occitane de carrelage avait notamment déclaré au titre de ses activités professionnelles les « revêtements de murs et sols (extérieurs, intérieurs) en parements durs (carrelage, faïence, pierre, marbrerie, etc.) » et des propres constatations de la cour d'appel que, selon l'expert, l'origine des désordres était à rechercher dans la pose du carrelage, sans réalisation d'un treillis soudé, de sorte que cette pose était totalement non conforme aux règles élémentaires en l'absence de préparation de l'assise du terrain et en l'absence de véritable support, ce dont il résultait que les désordres étaient la conséquence de l'exercice, par la société Occitane de carrelage, de son activité déclarée de revêtement de sols extérieurs en carrelage ; que dès lors, pour considérer que la garantie de la MMA n'était pas due, la cour d'appel, qui a énoncé que les désordres affectant les travaux proviennent de la non-réalisation ou de la mauvaise réalisation d'ouvrages non inclus dans l'activité déclarée de « revêtements de sols », n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations et a violé les articles L. 243-8 et A. 243-1 du code des assurances. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 243-8 et A. 243-1 du code des assurances :

4. Selon le premier de ces textes, tout contrat d'assurance souscrit par une personne assujettie à l'obligation d'assurance est, nonobstant toute clause contraire, réputé comporter des garanties au moins équivalentes à celles figurant dans les clauses types prévues par le second de ces textes.

5. Pour rejeter la demande de Mme M..., l'arrêt retient que l'activité de revêtements de murs et sols comprend les travaux de pose, sur les parties intérieures ou extérieures des bâtiments ou sur d'autres ouvrages, et de revêtements muraux ou de carrelage ou d'autres revêtements de sols sans réalisation des ouvrages de support, de sorte que cette activité exclut la réalisation d'une chape de support et, a fortiori, d'un dallage béton armé de treillis soudé.

6. En statuant ainsi, en excluant la garantie de l'assureur, alors qu'il résultait de ses propres constatations que les désordres avaient pour origine non pas la réalisation du support, mais une pose du carrelage non conforme aux règles de l'art et sur un support inadapté, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de Mme M..., dirigée contre la société MMA, l'arrêt rendu le 18 décembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;

Condamne la société Les Mutuelles du Mans IARD aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Les Mutuelles du Mans IARD et la condamne à payer la somme de 3 000 euros à Mme M... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf juillet deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SARL Cabinet Munier-Apaire, avocat aux Conseils, pour Mme M...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement attaqué en ce qu'il a débouté Mme M... de sa demande dirigée contre la société MMA ;

AUX MOTIFS QUE N... M... conclut à l'infirmation du jugement en ce qu'il a rejeté sa demande d'indemnisation des désordres de nature décennale dirigée contre la société MMA en retenant que cet assureur ne couvrait pas les travaux de chape et de treillis soudés réalisés par la société Occitane de Carrelage ; qu'il ressort de la facture émise le 20 juin 2003 par la société Occitane de Carrelage que les travaux qui lui ont été confiés consistaient en la pose d'un carrelage avec treillis soudé sur une surface de 91 m² et la pose de faïence sur 5 m² ; or, selon l'expert, l'entreprise n'a pas réalisé le treillis soudé ni de véritable dallage du sol ce qui est à l'origine de la désintégration de la terrasse qui présente de nombreux désordres et, notamment, un décollement généralisé des carreaux par la poussée des racines de la végétation, ce qui la rend impropre à sa destination et affecte sa solidité ; que l'expert a également noté l'absence de joint de dilatation conforme au DTU ainsi que l'absence de plinthe en liaison avec les maçonneries de la maison ce qui favorise l'infiltration d'eau et la dégradation de l'ouvrage ; que pour procéder aux travaux de reprise de cette terrasse extérieure, l'expert préconise de procéder à la préparation de l'assise du terrain et au coulage des dalles béton armées d'un treillis soudé avant de poser le carrelage ; que la nature décennale des désordres n'est pas contestée par la société MMA, contrairement à ce que soutient N... M..., mais cet assureur refuse sa garantie en faisant valoir que l'activité de gros oeuvre (chape et treillis soudé) ne fait pas partie des activités déclarées par son assuré au moment de la souscription de la police d'assurance ; que l'attestation d'assurance responsabilité civile décennale établie par la société MMA mentionne que la Sarl Occitane de Carrelage est couverte pour la période du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2003 pour les activités suivantes : plâtrerie - cloisons sèches ; revêtements de murs et sols (extérieurs, intérieurs) en parements durs (carrelage, faïence, pierre, marbrerie, etc.) ; Peinture intérieure et extérieure, papiers peints, vitrerie (vitrage extérieur colle exclu) ; que la question est de savoir si les travaux de treillis soudé facturés par la Sarl Occitane de Carrelage relevaient de l'activité couverte par le contrat d'assurance de responsabilité civile décennale ; que l'activité de revêtements de murs et sols comprend les travaux de pose, sur les parties intérieures ou extérieures des bâtiments ou sur d'autres ouvrages, de revêtements muraux ou de carrelage ou d'autres revêtements de sols sans réalisation des ouvrages de support ; qu'ainsi, cette activité exclut la réalisation d'une chape de support et, a fortiori, d'un dallage béton armé de treillis soudé ; que dès lors que les désordres affectant les travaux proviennent de la non-réalisation ou de la mauvaise réalisation par la Sarl Occitane de Carrelage d'ouvrages non inclus dans l'activité déclarée de « revêtements de sols », la société MMA ne doit pas sa garantie ; qu'il convient donc de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté N... M... de toutes ses demandes dirigées contre cet assureur ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'il résulte de l'expertise judiciaire que les désordres sont les suivants : « Nous constatons d'une manière générale l'affaissement de surfaces entières de carrelage créant des zones de cassures et de déstabilisation (
) Les carreaux se désolidarisent du support, l'herbe pousse entre les carreaux au droit du joint qui se disloque lui-même (
) Il n'existe pas de treillis soudé et le mortier existant, très maigre, peu épais, se confond dorénavant avec la terre (
) L'absence de plinthe en liaison avec les maçonneries de la maison favorise l'infiltration d'eau et al dégradation de l'ouvrage (
) En résumé nous sommes en présence d'un ouvrage totalement déstructuré sur l'ensemble des quatre côtés de la maison » ; que l'expert précise que l'origine des désordres et à rechercher dans la pose du carrelage non conforme au devis en l'absence de treillis soudé et par extension d'un véritable dallage étant précisé que cette absence a été constatée pour la partie d'ouvrage sondée ; il ajoute que la pose du carrelage est totalement non conforme aux règles élémentaires en l'absence de préparation de l'assise du terrain et en l'absence de véritable support au carrelage (
) ; sur la garantie de l'assureur : il est admis en jurisprudence que si le contrat d'assurance responsabilité obligatoire que doit souscrire tout constructeur, ne peut comporter des clauses d'exclusion autres que celles prévues à l'article A. 243-1 du code des assurances, la garantie de l'assureur ne couvre que le secteur d'activité professionnelle déclaré par le constructeur ; qu'il est justifié en l'espèce d'une attestation d'assurance décennale concernant les activités suivantes : - plâtrerie – cloisons sèches ; - revêtements de murs et sols (extérieurs, intérieurs) en parements durs (carrelage, faïence, pierre, marbrerie, etc.) ; - peinture intérieure et extérieure, papiers peints ; que force est de constater que la création d'une terrasse sur un terrain herbeux nécessite des travaux de gros oeuvre qui sont manifestement déficients en l'espèce et ne sont pas couverts par l'assurance étant précisé que Madame N... M... pouvait s'en convaincre à la seule lecture de l'attestation d'assurance responsabilité décennale versée aux débats ; que dans la mesure où les désordres relèvent de la responsabilité décennale, la responsabilité contractuelle de droit commun est exclue et Mme N... M... ne peut s'en prévaloir pour solliciter la condamnation de l'assureur ;

1./ ALORS QUE la garantie de l'assureur responsabilité décennale doit couvrir tous les désordres résultant d'une mauvaise exécution des activités professionnelles déclarées par le constructeur à l'assureur ; qu'en l'espèce, il résultait de l'attestation d'assurance décennale que la société Occitane de Carrelage avait notamment déclaré au titre de ses activités professionnelles les « revêtements de murs et sols (extérieurs, intérieurs) en parements durs (carrelage, faïence, pierre, marbrerie, etc.) » et des propres constatations de la cour d'appel ; que selon l'expert l'origine des désordres était à rechercher dans la pose du carrelage, sans réalisation d'un treillis soudé, de sorte que cette pose était totalement non conforme aux règles élémentaires en l'absence de préparation de l'assise du terrain et en l'absence de véritable support, ce dont il résultait que les désordres étaient la conséquence de l'exercice, par la société Occitane de Carrelage, de son activité déclarée de revêtement de sols extérieurs en carrelage ; que dès lors, pour considérer que la garantie de la MMA n'était pas due, la cour d'appel, qui a énoncé que les désordres affectant les travaux proviennent de la non-réalisation ou de la mauvaise réalisation d'ouvrages non inclus dans l'activité déclarée de « revêtements de sols », n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations, et a violé les articles L. 243-8 et A. 243-1 du code des assurances ;

2./ ALORS, subsidiairement, QUE, d'une part, il résultait du rapport d'expertise judiciaire que les désordres affectant la terrasse provenaient, non seulement de l'absence de treillis soudé et de dalle, mais également d'une pose non conforme aux règles de l'art du carrelage en l'absence de joints de dilatation et de plinthes en liaison avec les maçonneries de la maison et en raison d'un mortier trop fin ; que, d'autre part, dans ses conclusions d'appel, Mme M... faisait valoir, que quand bien même le support de la terrasse constituerait un ouvrage de gros oeuvre, les désordres affectant le carrelage posé devaient être couverts par la garantie ; et qu'enfin, dans son courrier du 30 mars 2012, la société MMA avait accepté une prise en charge à hauteur de 4 594,47 €, ne refusant d'indemniser que la reconstruction des terrasse, seul dommage relevant du gros-oeuvre, que dès lors en retenant, pour considérer que les désordres n'étaient pas couverts par l'assurance de la MMA, que l'activité de gros oeuvre, nécessaire à la réalisation du treillis soudé et de la dalle, n'avaient pas été déclarées, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les désordres ne trouvaient pas, pour partie au moins, leur cause dans des manquements relevant de l'activité déclarée de pose de carrelage, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 243-8 et A. 243-1 du code des assurances ;

3./ ALORS, au demeurant, QUE dans ses conclusions d'appel, Mme M... faisait valoir que, quand bien même le support de la terrasse constituerait un ouvrage de gros oeuvre, les désordres affectant le carrelage posé, et relevant donc de l'activité déclarée par la société Occitane de Carrelage, devaient être couverts par la garantie ; que dès lors, en énonçant, pour écarter la garantie de la MMA, que la question était uniquement de savoir si les travaux de treillis soudés facturés par la société Occitane de Carrelage relevaient de l'activité couverte par le contrat d'assurance, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes du litige, a méconnu les articles 4 et 5 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 19-13568
Date de la décision : 09/07/2020
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 18 décembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 09 jui. 2020, pourvoi n°19-13568


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SARL Cabinet Munier-Apaire, SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.13568
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