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17/06/2020 | FRANCE | N°19-10207

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 17 juin 2020, 19-10207


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

JT

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 17 juin 2020

Cassation partielle

M. RÉMERY, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 290 F-D

Pourvoi n° N 19-10.207

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 17 JUIN 2020

La soc

iété Tape à l'oeil, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° N 19-10.207 contre l'arrêt rendu le 11 octobre...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

JT

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 17 juin 2020

Cassation partielle

M. RÉMERY, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 290 F-D

Pourvoi n° N 19-10.207

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 17 JUIN 2020

La société Tape à l'oeil, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° N 19-10.207 contre l'arrêt rendu le 11 octobre 2018 par la cour d'appel de Douai (chambre 2, section 1), dans le litige l'opposant à la société [...], société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Kass-Danno, conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la société Tape à l'oeil, de Me Le Prado, avocat de la société [...], après débats en l'audience publique du 25 février 2020 où étaient présents M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Kass-Danno, conseiller référendaire rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, et Mme Berthomier, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 11 octobre 2018), la société [...] a vendu dix-neuf mille cinq cent cinquante neuf paires de chaussures à la société Tape à l'oeil (la société TAO), laquelle les a réceptionnées le 12 février 2014, sans réserve, et les a commercialisées. Le 14 avril 2014, elle a informé la société [...] que des articles lui étaient retournés. Et elle a refusé de payer les factures émises par cette dernière.

2. Assignée en paiement, la société TAO a demandé la résolution du contrat de vente pour défaut de conformité et sur le fondement de la garantie des vices cachés ainsi que le paiement de dommages-intérêts.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

3. La société TAO fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en résolution de la vente pour manquement de la société [...] à son obligation de délivrance conforme de la marchandise livrée ainsi que ses demandes d'indemnisation et de la condamner à verser à la société [...] la somme de 147 866,04 euros avec intérêts de retard alors :

« 1°/ que les juges du fond sont tenus de respecter les limites du litige que tracent les parties aux termes de leurs écritures ; qu'au cas d'espèce, les juges d'appel ont constaté que cent cinquante paires de chaussures avaient été retournées ; qu'en retenant, pour écarter l'existence d'un taux de retour supérieur à 1 %, que la société TAO n'établissait pas avoir vendu quatre mille huit cent vingt-neuf paires de chaussures quand la société [...], qui contestait ce nombre, affirmait que dix mille neuf cent soixante-trois paires avaient été vendues, de sorte qu'aucune contestation n'existait, quant à la vente de dix mille neuf cent soixante-trois paires au maximum, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile ;

2°/ qu'à tout le moins, en s'abstenant de rechercher si, eu égard à la circonstance que cent cinquante paires de chaussures avaient fait l'objet d'un retour et au vu des chiffres invoqués par les parties, le taux de retour n'excédait pas 1 %, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1135 du code civil, devenus les articles 1103 et 1194 du code civil, ensemble l'article 1604 du même code. »

Réponse de la Cour

4. Après avoir constaté que la société TAO soutenait avoir vendu quatre mille huit cent vingt-neuf paires de chaussures cependant que la société [...] estimait à dix mille neuf cent soixante le nombre de ventes réalisées, ce dont il résulte que ce fait était contesté par les parties, l'arrêt retient que la société TAO ne verse aucune pièce comptable pour corroborer les chiffres qu'elle mentionne dans un tableau sur papier libre et que, cependant qu'elle soutient avoir cessé la commercialisation de ces articles, elle ne justifie pas ni même n'allègue avoir en stock les paires de chaussures restantes. Il en déduit que, faute pour la société TAO de justifier du nombre de ventes réellement réalisées, il est impossible de retenir que seules quatre mille huit cent vingt-neuf paires de chaussures ont été vendues et, par conséquent, d'évaluer avec exactitude le taux de retour des marchandises.

5. Par ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui n'a pas méconnu les termes du litige et n'avait pas à effectuer la recherche invoquée par la seconde branche, que ses constatations rendaient inopérante, a légalement justifié sa décision.

6. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le second moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

7. La société TAO fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en résolution de la vente sur le fondement de la garantie des vices cachés ainsi que ses demandes d'indemnisation et de la condamner à verser à la société [...] la somme de 147 866,04 euros avec intérêts de retard alors que « constitue un vice donnant lieu à garantie de la part du vendeur le défaut inhérent à la chose vendue rendant celle-ci impropre à l'usage auquel on la destine ; qu'au cas d'espèce, la cour d'appel a constaté qu'un délai de deux mois a séparé la vente des chaussures à la société TAO et les retours par les clients et que les chaussures ont été utilisées conformément à leur destination ; qu'en écartant l'existence d'un vice caché au motif impropre qu'il s'agissait de chaussures « enfant de bas de gamme où l'aspect marketing prédomine sur la qualité de fabrication », la cour d'appel a violé l'article 1641 du code civil. »

Réponse au moyen

Vu l'article 1641 du code civil :

8. Aux termes de ce texte, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.

9. Pour rejeter les demandes de la société TAO en résolution du contrat de vente sur le fondement des vices cachés et en paiement de dommages-intérêts et pour la condamner à payer à la société [...] une certaine somme avec intérêts de retard, l'arrêt retient qu'il n'est pas démontré l'existence d'un vice caché rendant les chaussures impropres à l'usage auquel elles étaient destinées, « soit un usage limité dans le temps d'une chaussure enfant de bas de gamme où l'aspect marketing prédomine sur la qualité de fabrication » et qu'il n'est pas rapporté la preuve d'un défaut intrinsèque de la chaussure la rendant impropre à l'usage auquel elle était destinée mais une usure conforme à l'usage qui devait en être attendu.

10. En statuant ainsi, après avoir constaté, d'un côté, que bien que les chaussures ne fussent pas vendues comme des chaussures de sport, celles-ci étaient destinées à des enfants, lesquels peuvent être amenés à pratiquer des sports dans le cadre de leurs activités et, de l'autre, que deux mois après la commercialisation des chaussures, certaines d'entre elles, présentaient un décollement de la semelle à l'avant, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déboute la société TAO de sa demande en résolution de la vente pour manquement de la société [...] à son obligation de délivrance conforme de la marchandise livrée, l'arrêt rendu le 11 octobre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ;

Remet, sur les autres points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;

Condamne la société [...] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société [...] et la condamne à payer à la société Tape à l'oeil la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept juin deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour la société Tape à l'oeil

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a débouté la société TAPE A L'OEIL de sa demande en résolution de la vente pour manquement de la société [...] à son obligation de délivrance conforme de la marchandise livrée, débouté la société TAPE A L'OEIL de ses demandes d'indemnisation et condamné la société TAPE A L'OEIL à verser à la société [...] la somme de 147 866,04 euros avec intérêts de retard au taux de 1,5 % par mois à compter du 12 avril 2014 ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « Sur le fondement des articles 1604 et suivants du code civil, le vendeur est tenu d'une obligation de délivrance de la chose, c'est-à-dire de fournir à l'acheteur un bien conforme à l'objet de la commande. Le défaut de délivrance s'entend ainsi de la remise à l'acheteur d'un bien qui ne correspond pas aux spécifications contractuelles convenues. En vertu de l'article 1134 du code civil, les conditions générales de vente ne peuvent être invoquées à l'encontre d'une partie à un contrat que si celle-ci en a eu pleine et entière connaissance et qu'elle en a accepté le contenu avant de conclure le contrat. S'agissant de relations commerciales entre professionnels, cette acceptation peut découler, suivant les circonstances, de l'existence de relations d'affaires et notamment de la réception préalable de factures comprenant les conditions générales pour des commandes antérieures sans protestation de la part du professionnel. Les parties versent aux débats trois pièces contractuelles - le cahier des charges de la société TAO - les conditions d'achat de la société TAO -les conditions de vente de la société [...]. Les bons de commande versés aux débats ne font pas mention des conditions générales de vente de la société [...], lesquelles sont transmises sur papier libre ce qui ne caractérise pas la preuve de leur communication. La société [...] verse aux débats les bons de livraison, les factures postérieures à la commande sur lesquelles apparaissent au verso les conditions générales de vente ; cependant, le client doit avoir connaissance de celles-ci au moment où il contracte soit lorsqu'il passe commande et non lors de la réception de la livraison et des factures. Il n'est pas démontré l'existence entre les deux sociétés, d'un courant d'affaires antérieur à la présente commande et de la réception de factures justifiant de la connaissance par la société TAO, des conditions générales de vente de la société [...]. En conséquence, la société [...] ne rapportant pas la preuve de la communication à la société TAO, de ses conditions générales de vente, celles-ci ne sont pas entrées dans le champ contractuel et lui sont inopposables. Quant aux conditions générales de vente en date du 30 août 2013 de la société TAO, il est versé aux débats un accusé de réception de celles-ci en date du 8 novembre 2013 par la société [...] qui déclare en avoir pris connaissance et être en possession d'un exemplaire. Ces conditions générales de vente sont opposables à la société [...]. La commande a été passée sur la base du cahier des charges établi par la société TAO. L'action en résolution étant fondée sur l'existence d'un défaut de conformité de la marchandise, il y a lieu de vérifier que les chaussures livrées correspondent aux dispositions prévues par le cahier des charges établi par le client. Il résulte de ce cahier des charges que les chaussures doivent être soumises à des tests physiques à réaliser obligatoirement pour chaque référence chaussures à montage classique. Les rapports devront être transmis systématiquement à la société TAO. Ces tests sont à la charge du fournisseur... Il est prévu les tests physiques suivants : - liaisons tige semelle -résistance fixation bally flex -abrasion semelle - déchirure. Aux termes des normes à respecter par le cahier des charges, la liaison tige-semelle des chaussures devait répondre à la norme EN 17 708 etgt;daN/cm, le résultat devant être au minimum de 3 daN/cm. Les laboratoires habilités à vérifier la conformité au cahier des charges étaient mentionnés en page 10 du cahier des charges. Des courriels ont été échangés les 20 et 30 septembre 2013 entre la société [...] et la société TAO aux termes desquels il était demandé à celle-ci de valider le modèle élaboré. Les prototypes ont été soumis à des tests de conformité par l'un des laboratoires mentionnés dans le cahier des charges, le CTC de SHANGAI., tests qui ont été communiqués à la société TAO par mail du 24 octobre 2013. Pour une valeur moyenne requise de résistance de 3 daN/cm pour la liaison tige-semelle, la valeur mesurée par ce laboratoire a été de 3,7 daN/cm, selon la norme EN ISO 17708 : 2003. La société TAO a ensuite passé commande de 19 559 paires de chaussures. Les chaussures ont été livrées au mois de février 2014, sans réserve lors de la réception. Par courrier en date du 14 avril 2014, la société TAO a fait part à la société [...] de retours produits et mécontentement de la part de sa clientèle avec la chaussure Brasil depuis sa commercialisation au sein de ses magasins. La société TAO verse aux débats un procès-verbal de constat en date du 13 août 2014 aux termes duquel l' huissier de justice a constaté le retour d'articles défectueux : -39 pour la Pologne -111 pour la France L'huissier de justice ajoute que "l'ensemble des .articles qui me sont présentés sont dégradés, essentiellement un décollement de la semelle à l'avant du pied." Il a été dressé un tableau annexé au procès-verbal reprenant le code pays, le code magasin, le jour de vente, le numéro du ticket, le code de l'article. Ce procès-verbal établit le retour de 150 paires de chaussures présentant toutes un défaut similaire. La société TAO verse aux débats trois rapports d'analyses de deux laboratoires différents, datés des 28 avril, 7 mai et 28 mai 2014. Deux séries de tests sont issus d'un laboratoire turc situé à Istanbul et un rapport émane d'un laboratoire français situé à Lyon. La société [...] oppose le fait que les laboratoires ne figurent pas dans la liste des laboratoires homologués par le cahier des charges et que la nature des tests ne correspond pas à celle imposée par le cahier des charges. Si le cahier des charges impose aux fournisseurs le recours à des laboratoires déterminés pour procéder à des tests préalables à la fabrication des chaussures, aucune obligation n'existe à ce titre pour vérifier la conformité des chaussures fabriquées ce qui permettait à la société TAO d'avoir recours à un laboratoire de son choix. Cependant compte tenu des normes mentionnées dans le cahier des charges, la conformité des chaussures fabriquées doit être évaluée par rapport aux prescriptions de celui-ci et notamment les tests doivent être réalisés selon les mêmes modalités pour évaluer la résistance de la chaussure dans des conditions similaires. Aux termes d'un mail en date du 14 février 2017, le laboratoire français chargé de contrôler la conformité des chaussures formule les observations suivantes en réponse à une demande d'explication de la société [...]. "Le rapport réalisé à CTC-S han ghaï a été réalisé suivant la norme EN ISO 17708 dont vous trouverez une explication ci-dessous: Objectif: Cet essai permet d'évaluer la tenue des assemblages par collage entre divers éléments: tige/semelle, tige/intercalaire, intercalaire/semelle. Principe: L' essai consiste à prélever un échantillon représentat if de l' assemblage à tester et à le soumettre à une traction à vitesse constante en vue de mesurer les forces de séparation. Une éprouvette en forme de fer à cheval est prélevée sur l'avant du pied et deux essais de traction sont réalisés au niveau de l'axe de flexion. Le résultat correspond à la résistance au décollement exprimée en daNJ cm. La zone testée se situe donc au niveau de la zone flexion (côté gauche et droit) pour ce rapport de tests S 3100529. Concernant le rapport de tests réalisé à CTC-Lyon et pour TAO, les informations liées à ce rapport de tests sont confidentielles puisque le rapporta été émis à TAO pour TAO. Nous pouvons cependant vous indiquer que le test réalisé est un test de résistance de la liaison tige-semelle zones suite à une demande spécifique. Pour ce test, 6 zones sur la chaussure sont testées : 2 essais au niveau de la zone de flexion (identiques à la norme EN ISO 17708) et 4 essais supplémentaires un au niveau du talon, un au niveau du bout de la chaussure (toecap) et 2 essais supplémentaires au niveau de l'arrière de la chaussure. Vous pouvez constater ces 6 zones sur les schémas du rapport de tests. Sur ce rapport de tests 1405-8214, vous pouvez constater le test de plusieurs pointures avec des résultats de liaison tige/semelle 6 zones présentant des résultats inhomogènes entre les pointures." Le seul fait que la société TAO se prévale que les tests sont réalisés selon la norme EN 17708 est insuffisant ; le recours à cette méthode n'est pas mentionné dans le test réalisé par le laboratoire français. Dans les deux rapports de tests issus de laboratoires turcs la méthode utilisée est la suivante : ISO 17708 : 2003 (page 4 des deux rapports) et est donc similaire à celle du cahier des charges. Les résultats se présentent sous les appellations suivantes dans le rapport du 28 avril 2014 (page 4) : Average margin width (daNicm) Lowest peak value (daN/cm) Highest peak value (daNkm) Average curve value (daNkm) Specified Requirement Min. 3,0 (daNkm). Dans le rapport du 28 avril 2014, les résultats Average curve value (daN/cm) sont de 1,67 ; 2,88 ; 4,2 ; 2,9. Les résultats se présentent sous les appellations suivantes dans le rapport du 28 mai 2014 (page 4) : Average margin width (mm) Lowest peak value (N mm) Highest peak value (N/nun). Average curve value (N/rnm) Specified Requirernent Min. 3,0 (daN/cm) Dans le rapport du 28 mai 2014, les résultats Average curve value (N/rnm) sont de 1,8 ; 2,3 ; 2,6 ; 2,7 Les rapports des laboratoires turcs sont rédigés en anglais ce qui ne permet pas d'obtenir un résultat certain comparable avec les prescriptions du cahier des charges. Il n'est donné aucun élément probant quant au modèle, au nombre de chaussures soumises aux différents tests. Sur le rapport du 28 avril 2014, figure une photographie d'une paire de tennis, sans référence. Sur le rapport en date du 28 mai 2014, en page cinq est reproduite la photographie de quatre chaussures et en page 1, quatre numéros de référence avec la mention des modèles baskets Brasil 1, baskets Brasil 2, baskets Brasil 3, baskets Brasil 4. Ces références reposent sur les indications du laboratoire ou de la société TAO ce qui est insuffisant pour établir l'origine des modèles testés et donc leur appartenance au lot de chaussures livrées. Seuls des tests physiques préalables à la fabrication des chaussures étaient imposés à la société [...] et soumis à la validation de la société TAO. Dès lors que celle-ci conteste la conformité des chaussures livrées, il lui appartient d'en rapporter la preuve au regard du cahier des charges qu'elle a établi pour son fournisseur. Ces rapports de tests réalisés les 28 avril, 7 mai et 28 mai 2014 qui délivrent des résultats bruts sans analyse, sans explication, et sans force probante quant aux modèles soumis au contrôle sont insuffisants pour caractériser le défaut de conformité des chaussures livrés le 12 février 2014 à la société TAO. La société TAO opposant à la société [...] que la norme sur le plan de l'insatisfaction d'un produit est caractérisée par un taux de retour inférieur à 1 % de la marchandise, la société [...] verse aux débats deux courriers aux termes desquels M. J..., délégué général de la Fédération française des entreprises de distribution, importation, exportation, chaussures, jouet, textiles indique : Aux termes du courrier en date du le' septembre 2014: Il est d'usage d'admettre dans la profession, que les livraisons ne comportant pas plus de I % d'article défectueux, sont considérées comme normales." Aux termes du courrier en date du 2 mars 2017 « Comme je vous l'ai indiqué le 1 er septembre 2014 « il est d'usage d'admettre dans la profession que les livraisons ne comportant pas plus de 1 % d'articles défectueux sont considérées comme normales ». Toutefois, ce taux de 1 % doit être compris comme un ordre de grandeur. Ce pourcentage indique que le nombre d'articles défectueux doit être très limité pour ne pas remettre en cause la validité de la vente. Il s'agit d'un usage commercial, qui se traduit souvent concrètement par des remises accordées par le vendeur, de façon à couvrir les frais de retour des produits défectueux. Cet usage commercial n'est en rien une norme technique. Pour annuler une vente, il faut connaître les causes de la défectuosité et savoir si elles relèvent bien de la responsabilité du fournisseur, ou par exemple, d'un mauvais usage du client consommateur." Ces courriers évoquent l'existence d'un usage mais non d'une norme. II est établi que 150 paires de chaussures ont été retournées et que la commande porte sur 19 559 paires de chaussures. Or, la société TAO qui fait état de la vente de 4829 paires de chaussures ne verse aucune pièce comptable pour corroborer les chiffres qu'elle mentionne dans un tableau sur papier libre. Alors que la société TAO indique avoir arrêté la vente des chaussures, elle ne justifie pas ni même allègue qu'elle a en stock les paires restantes. La société TAO ne fournissant pas d'éléments probants quant aux ventes réellement réalisées, il est impossible de retenir que seules 4829 paires de chaussures ont été vendues ce qui ne permet pas d'obtenir une évaluation exacte quant au pourcentage du taux de retour alors que le nombre de paires de chaussures livrées s'élève à 19 559. En conséquence, ni les tests effectués ni la démonstration d'un retour anormal des chaussures présentant toutes le même défaut de fabrication ne caractérisent un défaut de conformité de la marchandise livrée » ;

ALORS QUE, PREMIEREMENT, les juges du fond sont tenus de respecter les limites du litige que tracent les parties aux termes de leurs écritures ; qu'au cas d'espèce, les juges d'appel ont constaté que 150 paires de chaussures avaient été retournées ; qu'en retenant, pour écarter l'existence d'un taux de retour supérieur à 1 %, que la société TAO n'établissait pas avoir vendu 4.829 paires de chaussures quand la société [...], qui contestait ce nombre, affirmait que 10.963 paires avaient été vendues, de sorte qu'aucune contestation n'existait, quant à la vente de 10.963 paires au maximum, la Cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé les l'article 4 du Code de procédure civile ;

ET ALORS QUE, DEUXIEMEMENT, et à tout le moins, en s'abstenant de rechercher si, eu égard à la circonstance que 150 paires de chaussures avaient fait l'objet d'un retour et au vu des chiffres invoqués par les parties, le taux de retour n'excédait pas 1 %, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1135 du Code civil, devenus les articles 1103 et 1194 du Code civil, ensemble l'article 1604 du même code.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a débouté la société TAPE A L'OEIL de sa demande en résolution de la vente sur le fondement des vices cachés, débouté la société TAPE A L'OEIL de ses demandes d'indemnisation et condamné la société TAPE A L'OEIL à verser à la société [...] la somme de 147 866,04 euros avec intérêts de retard au taux de 1,5 % par mois à compter du 12 avril 2014 ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « Cette garantie régie par les articles 1641 et suivants du code civil est due en raison des vices cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus. Il incombe à l'acquéreur d'apporter la preuve du vice caché et de ses différents caractères au sens de l'article 1641 du code civil, à savoir que la chose vendue est atteinte d'un vice : - inhérent à la chose et constituant la cause technique des défectuosités, - présentant un caractère de gravité de nature à porter atteinte à l'usage attendu de la chose, - existant antérieurement à la vente, au moins en l'état de germe, - n'étant, au moment de la vente, ni apparent ni connu de lui, le vendeur n'étant pas tenu "des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même" conformément à l'article 1642 du code civil. En application de l'article 1648 du code civil, l'action résultant des vices rédhibitoires doit être intentée par l'acquéreur dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice. En l'espèce, l'article litigieux est une paire de baskets enfant achetée au prix de 6,90 euros vendue dans le cadre de la coupe du monde de football 2014. Compte tenu de ces éléments, bien que les chaussures ne soient pas vendues comme des chaussures de sport, dans la mesure où elles sont destinées à des enfants, ceux-ci peuvent être amenés à pratiquer des sports dans le cadre de leur jeux et notamment le football. Les chaussures sont dégradées à l'avant établissant qu'elle ont été utilisées pour des jeux sportifs ; il résulte des deux constats d'huissier versées aux débats que certaines d'entre elles sont usagées démontrant une utilisation intensive ce qui correspond à l'usage d'une paire de chaussures par un enfant. Au vu des éléments développés sur le fondement du défaut de conformité et repris quant au pourcentage de retour de la marchandise par la société TAO au titre de la théorie des vices cachés, il n'est pas davantage démontré l'existence d'un vice caché ayant fait obstacle à l'usage auquel étaient destinées les chaussures soit un usage limité dans le temps d'une chaussure enfant de bas de gamme où l'aspect marketing prédomine sur la qualité de fabrication. Il n'est pas rapporté la preuve d'un défaut intrinsèque de la chaussure la rendant impropre à l'usage auquel elle était destinée mais une usure conforme à l'usage qui devait en être attendue. Les éléments du débat suffisent à statuer sur le différend opposant les parties sans qu'il y ait lieu de recourir à une expertise ; la société TAO sera déboutée de sa demande de ce chef présentée subsidiairement. En conséquence, le jugement du tribunal de commerce sera infirmé et la société TAO sera déboutée de sa demande de résolution de la vente sur le fondement de la non-conformité ou des vices cachés ainsi que de ses demandes d'indemnisation » ;

ALORS QUE, PREMIEREMENT, constitue un vice donnant lieu à garantie de la part du vendeur le défaut inhérent à la chose vendue rendant celle-ci impropre à l'usage auquel on la destine ; qu'au cas d'espèce, la Cour d'appel a constaté qu'un délai de deux mois a séparé la vente des chaussures à la société TAO et les retours par les clients et que les chaussures ont été utilisées conformément à leur destination ; qu'en écartant l'existence d'un vice caché au motif impropre qu'il s'agissait de chaussures « enfant de bas de gamme où l'aspect marketing prédomine sur la qualité de fabrication », la Cour d'appel a violé l'article 1641 du Code civil ;

ET ALORS QUE, DEUXIEMEMENT, et en tout cas, en écartant l'existence d'un vice caché, alors qu'elle avait constaté que le délai séparant la vente à la société TAO et les retours était de deux mois et que les chaussures avaient été utilisées conformément à leur destination, sans s'expliquer sur la durée normale d'utilisation desdites chaussures, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1641 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 19-10207
Date de la décision : 17/06/2020
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 11 octobre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 17 jui. 2020, pourvoi n°19-10207


Composition du Tribunal
Président : M. Rémery (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Foussard et Froger

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.10207
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