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04/06/2020 | FRANCE | N°18-21224

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 04 juin 2020, 18-21224


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 4 juin 2020

Rejet

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 501 F-D

Pourvoi n° S 18-21.224

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 4 JUIN 2020

La société Continental Investments and Management, société anonyme, dont le

siège est [...], a formé le pourvoi n° S 18-21.224 contre l'arrêt rendu le 12 avril 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 9), dans l...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 4 juin 2020

Rejet

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 501 F-D

Pourvoi n° S 18-21.224

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 4 JUIN 2020

La société Continental Investments and Management, société anonyme, dont le siège est [...], a formé le pourvoi n° S 18-21.224 contre l'arrêt rendu le 12 avril 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 9), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. O... D..., domicilié [...] ,

2°/ à la société Bayard Montaigne, société civile, dont le siège est [...] ,

3°/ à la société Arcade investissements conseil, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Kermina, conseiller, les observations de la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la société Continental Investments and Management, de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de M. D... et des sociétés Bayard Montaigne et Arcade investissements conseil, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 11 mars 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Kermina, conseiller rapporteur, M. Fulchiron, conseiller, M. Aparisi, avocat général référendaire, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 avril 2018), la société Continental Investments and Management (la société CIM) a interjeté appel du jugement d'un tribunal de commerce du 28 avril 2012 l'ayant condamnée à payer une certaine somme à titre principal à la société Bayard Montaigne (la société Bayard), M. D... et la société Arcade investissements conseil (la société Arcade) en exécution forcée, à leur profit, de la cession de 45 % des parts sociales de la société Compagnie européenne d'hôtellerie.

2. L'affaire a été radiée en application de l'article 526 du code de procédure civile par ordonnance du conseiller de la mise en état du 28 février 2013, son rétablissement au rôle ayant été soumis à l'autorisation du magistrat de la mise en état et à la justification du règlement parfait ou à parfaire du principal.

3. La société CIM a sollicité le rétablissement de l'affaire au rôle par conclusions du 29 janvier 2015, qui a été rejeté par ordonnance du conseiller de la mise en état du 9 avril 2015.

4. La société CIM ayant à nouveau demandé le rétablissement de l'affaire, la société Bayard, M. D... et la société Arcade ont soulevé, le 15 septembre 2016, la péremption de l'instance.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche, et sur le second moyen, pris en sa troisième branche, ci-après annexés

2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen, pris en ses première et deuxième branches

Enoncé du moyen

3. La société CIM fait grief à l'arrêt de déclarer recevable la demande de péremption d'instance, alors :

« 1°/ que la péremption doit, à peine d'irrecevabilité, relevée d'office s'il y a lieu, être demandée ou opposée avant tout autre moyen ; que la demande de rétablissement de l'instance, consécutive à sa radiation, s'analyse non comme l'introduction d'une nouvelle instance mais comme une demande de reprise de l'instance initiale ; que la cour d'appel a écarté la fin de non-recevoir opposée par la société CIM, appelante, à la péremption de l'instance d'appel opposée par les intimés en raison de sa tardiveté, au motif inopérant que ce moyen de péremption ayant été soulevé avant tout autre dans le cadre de la nouvelle instance enrôlée sous le numéro 16/10361, il importait peu qu'il ne l'ait pas été préalablement lors de la première demande de rétablissement, enrôlée sous le numéro 15/2116 ; qu'en statuant ainsi, tandis que les demandes successives de rétablissement de l'affaire n'avaient pas eu pour effet d'introduire de nouvelles instances distinctes, peu important à cet égard l'attribution de numéros de rôle distincts, de sorte que, faute d'avoir été soulevé dès la première demande de rétablissement au rôle, dans les conclusions des intimés du 10 mars 2015, soit à une date où selon les propres constatations de l'arrêt, la péremption aurait déjà été acquise, le moyen tiré de cette péremption avait été soulevé tardivement, la cour d'appel a méconnu les articles 388 et 526 du code de procédure civile ;

2°/ qu'en l'espèce, la société CIM, appelante, faisait notamment valoir que le moyen de péremption présenté par les intimés par conclusions du 12 septembre 2016 était irrecevable pour ne pas avoir été opposé dès la première demande de rétablissement de l'affaire que la société CIM avait sollicitée ; qu'en se bornant à lui opposer que, lors de l'examen de cette première demande de rétablissement de l'affaire, ayant donné lieu à l'ordonnance du 9 avril 2015, la question de la péremption n'avait pas été examinée, cependant que, précisément, il était reproché aux intimés de n'avoir pas opposé, dès cette date, le moyen de péremption, la cour d'appel, qui s'est prononcée par un motif impropre à justifier son refus de retenir l'irrecevabilité du moyen de péremption, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 388 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

4. Ayant constaté que lors des débats ayant précédé l'ordonnance du 9 avril 2015, la discussion entre les parties n'avait porté que sur le rétablissement de l'affaire au rôle, la cour d'appel, devant laquelle il n'était pas allégué que les intimés aient alors conclu au fond ni opposé à la société CIM un moyen de défense, de sorte qu'aucun moyen, au sens de l'article 388 du code de procédure civile, n'avait, à cette occasion, été invoqué, en a exactement déduit, abstraction faite du motif erroné, mais surabondant, tiré de l'existence d'enrôlements successifs des demandes de rétablissement de l'affaire devant le conseiller de la mise en état, que l'incident de péremption était recevable.

5. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

Sur le second moyen, pris en ses première, deuxième, quatrième et cinquième branches

Enoncé du moyen

La société CIM fait grief à l'arrêt de dire bien fondée la demande tendant à voir juger l'instance périmée et de dire l'instance éteinte par la péremption, alors :

« 1°/ qu'est interruptive du délai de péremption la demande de rétablissement de l'affaire, radiée sur le fondement de l'article 526 du code de procédure civile, accompagnée des justificatifs de la volonté non équivoque de l'appelant d'accomplir les formalités auxquelles est conditionné le rétablissement au rôle ; qu'en retenant en l'espèce que les conclusions du 29 janvier 2015 tendant au rétablissement de l'appel n'avaient pas eu pour effet d'interrompre le délai de péremption pour cette raison inopérante que la société CIM y formulait des offres de paiement échelonné non suivies d'effet, sans rechercher, comme elle y était invitée, si, au regard des termes de l'ordonnance de radiation du 28 février 2013, qui n'avait conditionné le rétablissement de l'appel qu'à la justification, notamment, d'un accord des parties sur le règlement du solde restant dû sur la somme de 2 835 900 euros, l'offre réelle de paiement contenue dans les conclusions du 29 janvier, confirmée en des termes plus engageants encore dans celles du 25 mars 2015 suivant, manifestait la volonté sans équivoque de la société CIM de satisfaire à la condition fixée pour le rétablissement de l'affaire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 526, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, 383 et 386 du code de procédure civile ;

2°/ que les actes accomplis par le débiteur dans le cadre d'une instance tendant à l'obtention de délais de paiement sont interruptifs du délai de péremption de l'instance radiée, dès lors qu'ils caractérisent sa volonté non équivoque d'exécuter la condamnation à laquelle le rétablissement de l'affaire au rôle a été conditionné ; qu'en déclarant l'instance éteinte par péremption depuis le 6 mars 2015, cependant que la société CIM avait saisi, le 17 septembre 2012, le juge de l'exécution d'une demande de délais de paiement du solde de la condamnation, interruptive du délai de péremption et que cette procédure ne s'était achevée que le 22 septembre 2016, en suite d'un arrêt rendu par la Cour de cassation dans cette instance, la cour d'appel a violé les articles 526, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, 383 et 386 du code de procédure civile ;

3°/ que la péremption de l'instance radiée sur le fondement de l'article 526 du code de procédure civile, qui prive définitivement le justiciable de son droit d'accès au juge d'appel, méconnaît les exigences du procès équitable lorsque l'appelant est dans l'impossibilité d'accomplir, dans le délai requis, une diligence interruptive de la péremption ; que tel est le cas lorsque l'accomplissement de la diligence interruptive de péremption, conditionné à l'accord des parties, est rendu impossible par l'opposition injustifiée de l'une d'elle ; qu'en l'espèce, en déclarant l'instance éteinte par péremption depuis le 6 mars 2015, cependant que le rétablissement au rôle était conditionné à un paiement ou à un accord des parties sur le paiement échelonné de la somme de 2 835 900 euros à laquelle la société CIM a été condamnée par le jugement dont elle avait interjeté appel et que l'accomplissement des diligences interruptives de péremption était tributaire de la volonté des intimés qui s'y étaient, à dessein, opposés, la cour d'appel a violé l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

4°/ qu'en disant l'instance d'appel éteinte par la péremption, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si les consorts D... s'étaient, systématiquement et à dessein, opposés aux aménagements du règlement de leur créance qui leur étaient proposés, dans le seul but de conférer, par l'effet de la péremption, un caractère définitif au jugement de première instance, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 526, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, et 386 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

6. D'une part, en l'état des dispositions de l'article 526 du code de procédure civile, alors applicables au litige, les paiements partiels intervenus après l'ordonnance de radiation étant insusceptibles d'interrompre le délai de péremption, la cour d'appel, qui n'a pas méconnu les dispositions de l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, n'avait pas à procéder aux recherches prétendument omises.

7. D'autre part, la cour d'appel a retenu que le délai de péremption courait, postérieurement à la demande de délai présentée au juge de l'exécution, à compter du 6 mars 2013.

8. Le moyen, inopérant en sa deuxième branche et non fondé pour le surplus, doit dès lors, être rejeté.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Continental Investments and Management aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Continental Investments and Management et la condamne à payer à la société Bayard Montaigne, M. D... et la société Arcade investissements conseil la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du quatre juin deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat aux Conseils, pour la société Continental Investments and Management

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré recevable la demande de péremption d'instance formée par les consorts D... ;

Aux motifs que « aux termes de l'article 386 du code de procédure civile, la péremption est encourue dès lors qu'aucune diligence de nature à faire progresser l'affaire n'a été accomplie par les parties pendant deux ans ; qu'à titre liminaire, l'appelante soutient que les intimés ont été tardifs à lui opposer la péremption ; que si dans l'instance n° 15/2116 ayant donné lieu à un rejet de la demande de rétablissement selon ordonnance du 9 avril 2015, la question de la péremption n'a pas été débattue puisqu'il s'agissait alors d'examiner la demande de rétablissement de l'affaire, il reste en tout état de cause que dans la nouvelle instance enrôlée sous le numéro 16/10361 ayant donné lieu à l'ordonnance déférée du 30 mars 2017, le moyen de péremption a bien été soulevé avant tout autre moyen, conformément à l'article 388 du code de procédure civile ; que la demande des intimés tendant à voir constater la péremption est dès lors recevable » (arrêt, pp. 4 § 5 – 5 § 2) ;

1°) Alors que la péremption doit, à peine d'irrecevabilité, relevée d'office s'il y a lieu, être demandée ou opposée avant tout autre moyen ; que la demande de rétablissement de l'instance, consécutive à sa radiation, s'analyse non comme l'introduction d'une nouvelle instance mais comme une demande de reprise de l'instance initiale ; que la cour d'appel a écarté la fin de non-recevoir opposée par la société CIM, appelante, à la péremption de l'instance d'appel opposée par les intimés en raison de sa tardiveté, au motif inopérant que ce moyen de péremption ayant été soulevé avant tout autre dans le cadre de la nouvelle instance enrôlée sous le numéro 16/10361, il importait peu qu'il ne l'ait pas été préalablement lors de la première demande de rétablissement, enrôlée sous le numéro 15/2116 ; qu'en statuant ainsi, tandis que les demandes successives de rétablissement de l'affaire n'avaient pas eu pour effet d'introduire de nouvelles instances distinctes, peu important à cet égard l'attribution de numéros de rôle distincts, de sorte que, faute d'avoir été soulevé dès la première demande de rétablissement au rôle, dans les conclusions des intimés du 10 mars 2015, soit à une date où selon les propres constatations de l'arrêt, la péremption aurait déjà été acquise, le moyen tiré de cette péremption avait été soulevé tardivement, la cour d'appel a méconnu les articles 388 et 526 du code de procédure civile ;

2°) Alors que, en outre, en l'espèce, la société CIM, appelante, faisait notamment valoir que le moyen de péremption présenté par les intimés par conclusions du 12 septembre 2016 était irrecevable pour ne pas avoir été opposé dès la première demande de rétablissement de l'affaire que la société CIM avait sollicitée ; qu'en se bornant à lui opposer que, lors de l'examen de cette première demande de rétablissement de l'affaire, ayant donné lieu à l'ordonnance du 9 avril 2015, la question de la péremption n'avait pas été examinée, cependant que, précisément, il était reproché aux intimés de n'avoir pas opposé, dès cette date, le moyen de péremption, la cour d'appel, qui s'est prononcée par un motif impropre à justifier son refus de retenir l'irrecevabilité du moyen de péremption, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 388 du code de procédure civile ;

3°) Alors que, en toute hypothèse, pour déclarer recevable le moyen de péremption formé par les intimés par conclusions du 12 septembre 2016, la cour d'appel s'est bornée à relever que ce moyen avait été soulevé avant tout autre moyen dans le cadre de la seconde demande de rétablissement de l'affaire ; qu'en statuant ainsi, sans répondre au moyen par lequel la société CIM faisait valoir que les intimés avaient, par les correspondances officielles de leur conseil des 25 avril et 7 juin 2016, puis lors de l'audience du 16 juin 2016, renoncé à invoquer la péremption en acceptant de recevoir le solde de leur créance et un renvoi à une audience ultérieure en vue d'une médiation (concl. d'appel de la société CIM, p. 7 §§ 5-6 et p. 8), la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir dit bien-fondée la demande tendant à voir juger l'instance périmée et d'avoir dit l'instance éteinte par la péremption ;

Aux motifs propres que « l'appelante prétend que le délai de péremption aurait commencé à courir à compter de l'ordonnance rendue le 28 février 2013 par laquelle le conseiller de la mise en état a prononcé la radiation de l'appel pour défaut d'exécution du jugement attaqué assorti de l'exécution provisoire ; qu'il est cependant constant que l'ordonnance prononçant la radiation de l'appel en application de l'article 526 du code de procédure civile, comme sa notification, n'ont pas pour effet d'interrompre le délai de péremption ; qu'il convient donc de rechercher les diligences accomplies par les parties de nature à interrompre le délai à compter des dernières conclusions de l'appelante du 12 février 2013 ; que postérieurement au 12 février 2013, il ressort des pièces produites que seules deux démarches ont été accomplies par les parties, ainsi, le 6 mars 2013, la remise d'un chèque Carpa d'une valeur de 500.000 euros aux intimés, et, le 29 janvier 2015, la notification des conclusions d'incident aux fins de remise au rôle par l'appelante, auxquelles les intimés ont répondu selon conclusions du 10 mars 2015 ; que s'agissant de la remise du chèque, cette diligence a permis de faire progresser l'affaire en ce que la réinscription au rôle de l'appel a été conditionnée par le conseiller de la mise en état, dans son ordonnance rendue le 23 février 2013, au paiement de la somme de 2.835.900 euros, correspondant au montant de la condamnation prononcée en première instance ; qu'en conséquence, un nouveau délai de deux années a couru à la date de la remise du chèque aux intimés, soit le 6 mars 2013 ; que s'agissant des conclusions d'incident aux fins de rétablissement de l'affaire notifiées le 29 janvier 2015 par l'appelante, il est constant que de telles conclusions peuvent être considérées comme une diligence de nature à faire progresser l'affaire au sens de l'article 386 du code de procédure civile dès lors qu'elles ne tendent pas exclusivement à interrompre la péremption ; qu'il ressort cependant desdites conclusions du 29 janvier 2015 que l'appelante y formule des offres de paiement échelonnées non suivies alors d'un règlement effectif ; que ces conclusions du 29 janvier 2015 ne peuvent dès lors avoir eu pour effet d'interrompre le délai de péremption ; que les seuls paiements dont il sera justifié seront postérieurs à la date du 6 mars 2015, soit alors que la péremption était acquise ; qu'enfin, l'accord des intimés à la mise en oeuvre de la mesure de médiation n'a pas pu emporter renonciation au moyen de péremption antérieurement soulevé ; qu'il importe peu qu'il n'y ait pas eu de décision constatant la fin de la mesure de médiation, puisqu'il est constant que celle-ci avait échouée ; qu'en conséquence, il sera fait droit à la demande de péremption sollicitée par les intimés, et acquise dès le 6 mars 2015, étant rappelé que les paiements substantiels intervenus postérieurement à cette date ne sauraient faire revivre le délai de péremption ; qu'enfin, la Cour jugera que l'ordonnance déférée a répondu à tout moyen utile développé par l'appelante, la demande en annulation de cette dernière devant être rejetée » (p. 5 § 4 – 6 § 2) ;

Et aux motifs à les supposer adoptés que « L'article 386 du code de procédure civile dispose que : "l'instance est périmée lorsque aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans" ; que l'article 383 du code de procédure civile prévoit que " la radiation et le retrait du rôle sont des mesures d'administration judiciaire. A moins que la péremption d'instance ne soit acquise, l'affaire est rétablie, en cas de radiation, sur justification de l'accomplissement des diligences dont le défaut avait entraîné celle-ci ou en cas de retrait du rôle, à la demande de l'une des parties." ; qu'il résulte des dispositions combinées de ces textes que les seules diligences susceptibles d'interrompre la péremption consistent en des actes des parties se rapportant à l'instance et qui traduisent de leur part, la volonté manifeste de faire avancer celle-ci et correspondent à une véritable impulsion processuelle et donc en l'espèce qui consistent en la demande de remise au rôle de l'affaire après règlement de la somme de 2.835.900 € ; qu'il est constant que sont dépourvues d'effet interruptif de prescription les ordonnances du conseiller de la mise en état prononçant la radiation de l'instance ou refusant son rétablissement, de sorte que les ordonnances des 28 février 2013 et 9 avril 2015 n'ont pu valablement venir interrompre le délai de péremption de deux ans et que le dernier acte interruptif de prescription accompli par la société CIM est constitué par ses écritures procédurales signifiées le 12 février 2013 ; que d'autre part, les demandes successives de réinscription au rôle ne sont pas en elles même interruptives de prescription en ce qu'elles ne constituent pas des diligences procédurales de nature à faire progresser l'affaire si elles ne contiennent pas la justification de l'accomplissement des diligences dont le défaut a justifié la radiation ; qu'en l'espèce, la société CIM ne justifie pas avoir accompli une diligence interruptive de péremption dans le délai de 2 ans ; qu'en effet les conclusions du 29 janvier 2015, qui seules sont intervenues dans le délai de deux ans, peuvent d'autant moins avoir interrompu le délai de péremption que le magistrat de la mise en état a, par ordonnance du 9 avril 2015, refusé la réinscription au rôle en constant l'absence de paiement de la somme de 2.835.900 € ; qu'il s'ensuit que l'instance est éteinte par la péremption » (pp. 2 dernier § - 3 § 7) ;

1°) Alors qu'est interruptive du délai de péremption la demande de rétablissement de l'affaire, radiée sur le fondement de l'article 526 du code de procédure civile, accompagnée des justificatifs de la volonté non équivoque de l'appelant d'accomplir les formalités auxquelles est conditionné le rétablissement au rôle ; qu'en retenant en l'espèce que les conclusions du 29 janvier 2015 tendant au rétablissement de l'appel n'avaient pas eu pour effet d'interrompre le délai de péremption pour cette raison inopérante que la société CIM y formulait des offres de paiement échelonné non suivies d'effet, sans rechercher, comme elle y était invitée (concl. d'appel de la société CIM pp. 11-15) si, au regard des termes de l'ordonnance de radiation du 28 février 2013, qui n'avait conditionné le rétablissement de l'appel qu'à la justification, notamment, d'un accord des parties sur le règlement du solde restant dû sur la somme de 2 835 900 euros, l'offre réelle de paiement contenue dans les conclusions du 29 janvier, confirmée en des termes plus engageants encore dans celles du 25 mars 2015 suivant, manifestait la volonté sans équivoque de la société CIM de satisfaire à la condition fixée pour le rétablissement de l'affaire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 526, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, 383 et 386 du code de procédure civile ;

2°) Alors que, par ailleurs, les actes accomplis par le débiteur dans le cadre d'une instance tendant à l'obtention de délais de paiement sont interruptifs du délai de péremption de l'instance radiée, dès lors qu'ils caractérisent sa volonté non équivoque d'exécuter la condamnation à laquelle le rétablissement de l'affaire au rôle a été conditionné ; qu'en déclarant l'instance éteinte par péremption depuis le 6 mars 2015, cependant que la société CIM avait saisi, le 17 septembre 2012, le juge de l'exécution d'une demande de délais de paiement du solde de la condamnation, interruptive du délai de péremption et que cette procédure ne s'était achevée que le 22 septembre 2016, en suite d'un arrêt rendu par la Cour de cassation dans cette instance, la cour d'appel a violé les articles 526, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, 383 et 386 du code de procédure civile ;

3°) Alors que, subsidiairement, le plaideur qui renonce à se prévaloir de la péremption acquise n'est plus fondé à s'en prévaloir et fait courir un nouveau délai de péremption ; qu'en se bornant, pour dire l'instance éteinte, à relever que la péremption était acquise depuis le 6 mars 2015 et que les paiements substantiels intervenus postérieurement à cette date n'avaient pu faire revivre le délai de péremption, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée (concl. d'appel de la société CIM, p. 5 § 3, 6 § 7, 27 § 4, 28 §§ 2-3, 39 § 3), si, en acceptant de recevoir le paiement proposé par l'appelante par les correspondances officielles de leur conseil en date des 25 avril et 7 juin 2016, puis à l'audience du 16 juin 2016, les intimés avaient renoncé à la péremption résultant d'un défaut de diligence de l'appelant depuis le 6 mars 2013, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 526, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, et 386 du code de procédure civile ;

4°) Alors que, encore subsidiairement, la péremption de l'instance radiée sur le fondement de l'article 526 du code de procédure civile, qui prive définitivement le justiciable de son droit d'accès au juge d'appel, méconnaît les exigences du procès équitable lorsque l'appelant est dans l'impossibilité d'accomplir, dans le délai requis, une diligence interruptive de la péremption ; que tel est le cas lorsque l'accomplissement de la diligence interruptive de péremption, conditionné à l'accord des parties, est rendu impossible par l'opposition injustifiée de l'une d'elle ; qu'en l'espèce, en déclarant l'instance éteinte par péremption depuis le 6 mars 2015, cependant que le rétablissement au rôle était conditionné à un paiement ou à un accord des parties sur le paiement échelonné de la somme de 2 835 900 euros à laquelle la société CIM a été condamnée par le jugement dont elle avait interjeté appel et que l'accomplissement des diligences interruptives de péremption était tributaire de la volonté des intimés qui s'y étaient, à dessein, opposés, la cour d'appel a violé l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

5°) Alors que, en tout hypothèse, en disant l'instance d'appel éteinte par la péremption, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée (conclusions d'appel, p. 3 dernier §), si les consorts D... s'étaient, systématiquement et à dessein, opposés aux aménagements du règlement de leur créance qui leur étaient proposés, dans le seul but de conférer, par l'effet de la péremption, un caractère définitif au jugement de première instance, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 526, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, et 386 du code de procédure civile.
Le greffier de chambre


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 18-21224
Date de la décision : 04/06/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 12 avril 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 04 jui. 2020, pourvoi n°18-21224


Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre (président)
Avocat(s) : SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:18.21224
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