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12/02/2020 | FRANCE | N°19-10044

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 12 février 2020, 19-10044


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

CM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 12 février 2020

Rejet

Mme BATUT, président

Arrêt n° 134 F-D

Pourvoi n° K 19-10.044

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 12 FÉVRIER 2020

Mme D... V..., domiciliée [...] , les Erables, [...] , a formé le po

urvoi n° K 19-10.044 contre l'arrêt rendu le 21 février 2018 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (6e chambre civile D), dans le litige l'opposan...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

CM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 12 février 2020

Rejet

Mme BATUT, président

Arrêt n° 134 F-D

Pourvoi n° K 19-10.044

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 12 FÉVRIER 2020

Mme D... V..., domiciliée [...] , les Erables, [...] , a formé le pourvoi n° K 19-10.044 contre l'arrêt rendu le 21 février 2018 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (6e chambre civile D), dans le litige l'opposant à M. T... U..., domicilié le [...] , pris en qualité de mandataire liquidateur des biens de Mme D... V..., défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Poinseaux, conseiller, les observations de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de Mme V..., et après débats en l'audience publique du 14 janvier 2020 où étaient présentes Mme Batut, président, Mme Poinseaux, conseiller rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Berthomier, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 21 février 2018), R... V... et C... M..., son épouse, sont respectivement décédés les 27 novembre 1990 et 20 octobre 1992, laissant pour leur succéder leur fille J.... Le 28 juillet 2003, une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte à l'encontre de Mme V..., M. U... étant désigné en qualité de mandataire liquidateur. Le 4 juillet 2014, Mme V... a renoncé aux successions de ses parents.

2. M. U..., ès qualités, a assigné Mme V... pour voir déclarer sa renonciation aux successions inopposable à la liquidation judiciaire et être autorisé à les accepter en ses lieu et place à concurrence des créances qu'il représente.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. Mme V... fait grief à l'arrêt d'accueillir les demandes de M. U..., ès qualités, alors :

« 1°/ que l'autorisation prévue par l'article 788 du code civil ne peut être donnée qu'à la condition que le juge caractérise, outre l'existence d'un acte d'appauvrissement, l'intention frauduleuse du débiteur, laquelle s'entend de la conscience de léser les droits des créanciers ; qu'en autorisant le liquidateur à accepter la succession des parents de Mme V..., aux seuls motifs que cette dernière « n'apport(ait) aucun élément permettant de remettre en cause le fait que, par son acte de renonciation, elle a(vait) accompli un acte d'appauvrissement au préjudice de ses créanciers », sans nullement caractériser l'intention frauduleuse du débiteur, la cour d'appel a violé l'article 788 du code civil, dans sa version applicable à l'époque des faits ;

2°/ que, à titre subsidiaire, c'est à l'auteur de l'action prévue par l'article 788 du code civil de rapporter la preuve de l'intention frauduleuse du débiteur ; qu'en jugeant que le liquidateur pouvait valablement accepter la succession des parents de Mme V..., aux motifs que cette dernière « n'apport(ait) aucun élément permettant de remettre en cause le fait que, par son acte de renonciation, elle a(vait) accompli un acte d'appauvrissement au préjudice de ses créanciers », la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve de l'intention frauduleuse, a violé l'article 788 du code civil, dans sa version applicable à l'époque des faits. »

Réponse de la Cour

4. Ayant soutenu, dans ses conclusions d'appel, que le seul actif immobilier possible à réaliser aurait été un bien immobilier figurant à la succession de ses parents, faisant ainsi ressortir qu'elle avait eu conscience du préjudice causé à ses créanciers par sa renonciation à la dite succession, Mme V... n'est pas recevable à présenter devant la Cour de cassation un moyen contraire à ses propres écritures.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme V... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme V... ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze février deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour Mme V...

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué D'AVOIR dit que la renonciation de madame D... V... à la succession de ses parents indiquée comme étant intervenue selon déclaration du 4 juillet 2014 (qui, en vérité, est du 3 juin 2014) enregistrée le 29 juillet 2014 au 4ème bureau du service de la publicité foncière de Marseille est inopposable aux créanciers, dont Maître T... U..., D'AVOIR autorisé Maître T... U..., ès qualités, à accepter la succession du chef de madame D... V... à concurrence des créances qu'il représente, D'AVOIR dit que le jugement sera publié au 4ème bureau du service de la publicité foncière de Marseille, D'AVOIR condamné madame D... V... à verser à Maître T... U... ès qualités une indemnité de 1 500 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

AUX MOTIFS QUE « sur l'action du liquidateur sur la succession des parents de madame D... V..., les premiers juges ont fait une juste analyse des textes et faits d la cause, appliqué au cas d'espèce les dispositions antérieures à la loi du 23 juin 2006, les époux V... étant décédés respectivement en 1990 et 1992 et l'action ayant été engagée le 6 novembre 2014 ; que ce sont donc bien les dispositions de l'article 788 ancien du code civil qui trouvent à s'appliquer ; que ce texte permet aux créanciers de celui qui renonce à la succession de se faire autoriser en justice à accepter la succession du chef de leur débiteur et ses lieux et place (sic.) ; que la renonciation n'est alors annulée qu'en faveur des créanciers et jusqu'à concurrence de leurs créances ; que le liquidateur a le droit d'exercer une action assimilable à l'action paulienne pour se faire autoriser à accepter une succession jusqu'à concurrence du montant des créances ; qu'en l'espèce, il n'est pas contesté que madame D... V... a valablement renoncé à la succession de ses parents ; qu'il est établi en outre que Maître T... U... es qualités à engager la présente action contre madame V... aux fins de se faire autoriser à accepter la succession des parents de cette dernière à concurrence des créances qu'il représente et aux fins de désintéresser non un groupe de créanciers mais l'ensemble des créanciers de la liquidation ; que sa demande est donc recevable ; qu'enfin l'appelante n'apporte aucun élément permettant de remettre en cause le fait que, par son acte de renonciation, elle a accompli un acte d'appauvrissement au préjudice de ses créanciers, la succession dont s'agit étant bénéficiaire comme comportant un ensemble de lots dans un bien immobilier sis à Marseille [...] ; qu'en ce qu'ils ont fait droit à la demande de Maître T... U... ès qualités, les premiers juges ont donc fait une juste analyse des éléments de fait et de droit de l'espèce ; que le jugement sera donc confirmé ; qu'il n'est pas inéquitable de condamner madame V... à verser à Maître T... U... ès qualités une indemnité de 1 500 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ».

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « en vertu de l'article 47 II de la loi du 23 juin 2006 portant réforme des successions et des libéralités, les dispositions des articles 2, 3, 4, 7 et 8 de la présente loi ainsi que les articles 116, 466, 515-6 et 813 et 814-1 du code civil, tels qu'ils résultent de la présente loi, sont applicables, dès l'entrée en vigueur de la présente loi, aux indivisions existantes et aux successions ouvertes non encore partagées à cette date ; que par dérogation à l'alinéa précédent, lorsque l'instance a été introduite avant l'entrée en vigueur de la présente loi, l'action est poursuivie et jugée conformément à la loi ancienne ; que monsieur R... V... étant décédé le 27 novembre 1990 et madame C... M... veuve V... le 20 octobre 1992 doivent recevoir application les dispositions antérieure à la loi du 23 juin 2006 s'agissant de la renonciation aux successions ; que l'ancien article 788 du code civil disposait que « Les créanciers de celui qui renonce au préjudice de leurs droits, peuvent se faire autoriser en justice à accepter la succession du chef de leur débiteur, en son lieu et place. Dans ce cas, la renonciation n'est annulée qu'en faveur des créanciers, et jusqu'à concurrence seulement de leurs créances : elle ne l'est pas au profit de l'héritier qui a renoncé » ; que les parties s'accordent pour considérer que la mention contenue dans l'attestation établie par Maître I... le 17 juin 1991 selon laquelle madame D... V... aurait accepté purement et simplement la succession de son père ne vaut pas acceptation de cette succession puisqu'elle n'était pas partie à cet acte ; que le litige est donc fixé en l'état de la renonciation à la succession de ses parents effectuée par madame D... V... le 4 juillet 2014 (sic.) par déclaration au greffe ; que s la faculté d'accepter une succession ou d'y renoncer est un droit attaché à la personne, que le débiteur en liquidation judiciaire exerce seul, le liquidateur a la possibilité, en sa qualité de représentant des créanciers, de mettre en oeuvre l'action prévue par l'article 788 du code civil. ; qu'il n'est pas contesté que la succession des parents de madame D... V... était bénéficiaire ; que dès lors madame D... V..., qui est devenue propriétaire des biens successoraux dès le décès de ses parents, réalise un acte d'appauvrissement en renonçant à leurs successions, qui préjudicie aux intérêts de ses créanciers en les privant de la possibilité de recouvrer leurs droits sur ces biens ; qu'il y a donc lieu de faire droit à l'action paulienne fondée sur l'article 788 du code civil exercée par Maître T... U... en sa qualité de représentant des créanciers ».

1°/ ALORS QUE l'autorisation prévue par l'article 788 du code civil ne peut être donnée qu'à la condition que le juge caractérise, outre l'existence d'un acte d'appauvrissement, l'intention frauduleuse du débiteur, laquelle s'entend de la conscience de léser les droits des créanciers ; qu'en autorisant le liquidateur à accepter la succession des parents de Mme V..., aux seuls motifs que cette dernière « n'apport(ait) aucun élément permettant de remettre en cause le fait que, par son acte de renonciation, elle a(vait) accompli un acte d'appauvrissement au préjudice de ses créanciers » (arrêt attaqué, p. 5 ; jgt, p. 4, §6), sans nullement caractériser l'intention frauduleuse du débiteur, la cour d'appel a violé l'article du code civil, dans sa version applicable à l'époque des faits.

2°/ ALORS QUE, à titre subsidiaire, c'est à l'auteur de l'action prévue par l'article 788 du code civil de rapporter la preuve de l'intention frauduleuse du débiteur ; qu'en jugeant que le liquidateur pouvait valablement accepter la succession des parents de Mme V..., aux motifs que cette dernière « n'apport(ait) aucun élément permettant de remettre en cause le fait que, par son acte de renonciation, elle a(vait) accompli un acte d'appauvrissement au préjudice de ses créanciers » (arrêt attaqué, p. 5 ; jgt, p. 4, §6), la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve de l'intention frauduleuse, a violé l'article 788 du code civil, dans sa version applicable à l'époque des faits.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 19-10044
Date de la décision : 12/02/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 21 février 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 12 fév. 2020, pourvoi n°19-10044


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.10044
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