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12/02/2020 | FRANCE | N°17-31723

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 12 février 2020, 17-31723


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

JT

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 12 février 2020

Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 192 F-D

Pourvoi n° G 17-31.723

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 12 FÉVRIER 2020

1°/ M. D... K..., domicilié [...

] ,

2°/ le syndicat national des journalistes, dont le siège est [...] ,

ont formé le pourvoi n° G 17-31.723 contre l'arrêt rendu le 27 octobre 2...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

JT

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 12 février 2020

Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 192 F-D

Pourvoi n° G 17-31.723

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 12 FÉVRIER 2020

1°/ M. D... K..., domicilié [...] ,

2°/ le syndicat national des journalistes, dont le siège est [...] ,

ont formé le pourvoi n° G 17-31.723 contre l'arrêt rendu le 27 octobre 2017 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 1), dans le litige les opposant à la société Groupe Figaro, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Ala, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. K... et du syndicat national des journalistes, de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de la société Groupe Figaro, après débats en l'audience publique du 15 janvier 2020 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Ala, conseiller référendaire rapporteur, Mme Monge, conseiller, et Mme Lavigne, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. K... a collaboré avec la société Evène, aux droits de laquelle vient la société Groupe Figaro, dans le cadre de six contrats de commande d'une oeuvre de contribution à un programme multimédia (diffusion en ligne) du 1er août 2006 au 31 octobre 2006, du 15 octobre 2006 au 31 décembre 2006, puis du 26 mars 2007 au 30 juin 2008 ; que le 30 juin 2008, il a signé un contrat à durée indéterminée à effet au 1er juillet suivant pour exercer les fonctions de responsable éditorial ; que le contrat de travail a été rompu le 7 mai 2009 par une rupture conventionnelle ; que l'intéressé a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ; que le syndicat national des journalistes (ci-après le syndicat) est intervenu volontairement à l'instance ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu que sous le couvert de griefs non fondés de violation de la loi, de manque de base légale et de dénaturation, le moyen ne tend qu'à remettre en cause le pouvoir souverain d'appréciation par les juges du fond de la valeur et de la portée des éléments produits dont ils ont déduit que M. K... ne rapportait pas la preuve de l'existence d'un lien de subordination ;

Mais sur le deuxième moyen :

Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;

Attendu que pour débouter M. K... de sa demande tendant à ce que le statut de journaliste professionnel lui soit reconnu et des demandes en résultant, l'arrêt, après avoir rappelé les dispositions de l'article L. 7111-3 du code du travail, retient que la loi pose notamment le principe selon lequel toute personne qui entend se prévaloir du statut de journaliste doit prouver qu'elle tire de l'exercice de cette profession le principal de ses ressources, que l'intéressé produit ses avis d'imposition pour l'année 2005 dont il résulte qu'il a déclaré au titre des revenus d'activité la somme de 3 299 euros, en 2006 il a déclaré au titre des revenus d'activité la somme de 4 994 euros et en 2007 il a déclaré 1 382 euros, que ces documents fiscaux sont inopérants dans la mesure où l'intéressé ne s'explique pas sur les montants indiqués et la cour constate que les revenus déclarés sont bien inférieurs à ceux perçus de la société Evene au titre de ces trois années, qu'en conséquence, sans qu'il ne soit nécessaire de statuer sur les autres critères, la cour le déboute de sa demande tendant à le faire bénéficier du statut de journaliste ;

Qu'en statuant ainsi, alors que sur l'avis d'imposition pour l'année 2007 la somme de 12 790 euros avait été déclarée sur la ligne "BNC non prof, régime spécial", la cour d'appel, qui a dénaturé les termes clairs et précis du document produit, a violé le principe susvisé ;

Et attendu que la cassation du deuxième moyen, entraîne, en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation par voie de conséquence du chef de dispositif critiqué par le troisième moyen se rapportant à la demande de dommages-intérêts du syndicat ;

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. K... de sa demande tendant à ce que lui soit reconnu le statut de journaliste professionnel et de ses demandes de rappel de salaire, congés payés afférents et treizième mois, indemnité pour travail dissimulé et en ce qu'il déboute le syndicat des journalistes professionnels de sa demande de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 27 octobre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne la société Groupe Figaro aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Groupe Figaro à payer à M. K... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze février deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. K... et le syndicat national des journalistes

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur D... K... de sa demande tendant à ce qu'il soit jugé que la relation de travail qui le liait au Groupe FIGARO était un contrat de travail à durée indéterminée et de l'AVOIR débouté de ses demandes subséquentes ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE : « En l'absence d'écrit, le contrat de travail doit être prouvé par la partie qui entend s'en prévaloir. L'existence d'un contrat de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination de leur convention, mais des conditions dans lesquelles la prestation de travail s'est exécutée. Un contrat de travail suppose la réunion d'une prestation de travail, d'un lien de subordination et d'une rémunération.
Le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pourvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné. L'existence d'une prestation de travail et d'une rémunération n'est pas contestable en l'espèce, l'appelant versant aux débats dans son dossier, d'une part, la preuve des travaux qu'il a réalisés (quelques articles et critiques de film) et, d'autre part, la preuve qu'il a été rémunéré pour ces travaux. Sur l'existence d'un lien de subordination, l'appelant soutient que l'organisation du travail a été mise en place par la société EVENE caractérisait à l'évidence une situation dans laquelle il était dans un lien de subordination. En témoignent, selon lui, les réunions mensuelles décidées et organisées par la rédaction qui avaient un caractère obligatoire, l'attribution au cours de ces réunions de missions, la fixation de délais et d'une date de rendu imposée par la rédaction d'EVENE et les corrections et directives adressées à l'appelant par ses supérieurs hiérarchiques. Le GROUPE LE FIGARO soutient que Monsieur D... K... a fourni des notices, selon des contrats de « commande d'une oeuvre contribution à un programme multimédia » et que ses rémunérations n'ont dépendu que de la remise de ses notices. LE GROUPE LE FIGARO ajoute que Monsieur D... K... travaillait à son domicile avec son propre matériel, bénéficiait d'une très large autonomie dans l'organisation de son activité sans aucun horaire de travail, n'avait aucune obligation de consacrer la totalité de son activité professionnelle à la société EVENE qui ne lui imposait aucun emploi du temps, aucun compte rendu ni aucune instruction ou aucun objectif dans la réalisation de leur mission. En l'espèce, la cour qu'il ne justifie d'aucune contrainte particulière ; en effet, il ne produit 4 aucun élément permettant de montrer qu'il aurait subi des contraintes dans ses jours de congés ni qu'il aurait été soumis à des directives impératives dans l'exercice de son travail ; Par conséquent, il y a lieu de constater que l'appelant ne rapporte pas la preuve d'un lien /de subordination et de confirmer le jugement de première instance. De même convient-il de rejeter toutes les demandes relatives à l'exécution et à la rupture d'un contrat de travail ou aux allégations de travail dissimulé ».

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE : « Attendu que les articles L 1411-6 et L 1421-1 du code du travail disposent : « Le conseil de prud'hommes règle par voie de conciliation les différends qui peuvent s'élever à l'occasion de tout contrat de travail soumis aux dispositions du présent code entre les employeurs, ou leurs représentants, et les salariés qu'ils emploient. Il juge les litiges lorsque la conciliation n'a pas abouti. Lorsqu'un organisme se substitue habituellement aux obligations légales de l'employeur, il peut être mis en cause aux côtés de celui-ci en cas de litige entre l'employeur et les salariés qu'il emploie. Les litiges relatifs aux licenciements ainsi qu'aux ruptures du contrat relèvent de la compétence des conseils de prud'hommes. Les dispositions de l'article L. 1235-1 sont applicables à l'ensemble des litiges ; les indemnités prévues à l'article L. 1235-3 le sont également sous réserve des dispositions de l'article L.1235-5.Leur mission comme conciliateurs et comme juges s'applique également aux différends nés entre salariés à l'occasion du travail. Néanmoins, ils ne peuvent connaître les litiges dont la connaissance est attribuée à une autre juridiction par la loi et notamment par le code de la Sécurité Sociale ou par le code rural pour ce qui concerne la mutualité agricole et les accidents du travail ou par le code du travail maritime. Les conseils de prud'hommes sont compétents, quel que soit le chiffre de la demande, pour connaître des différends visés au présent article. Toute convention dérogatoire est réputée non écrite. Les personnels des services publics lorsqu'ils sont employés dans les conditions du droit privé relèvent de la compétence des conseils de prud'hommes. Attendu que trois conditions doivent être réunies pour que le conseil de prud'homme se déclare matériellement compétent : le litige doit être individuel, un contrat de travail doit exister et le litige doit être né à l'occasion du contrat de travail. Attendu qu'un contrat de travail doit exister, qu'il y a contrat de travail quand une personne physique travaille pour le compte et sous la direction d'une personne physique ou morale moyennant une rémunération ; Attendu que le contrat de travail est caractérisé, dans sa conception classique, par trois éléments : fourniture d'un travail, versement d'une rémunération et existence d'un lien de subordination; Attendu que le salaire peut être au mois ou à "heure, à la tâche ou aux pièces ou à la commission, en argent ou en nature, Attendu que l'employeur doit disposer à l'égard du salarié d'un pouvoir de direction de surveillance,' d'instruction et de commandement ; Attendu d'une part, que la partie demanderesse demande que sa relation de travail soit requalifiée en journaliste pigiste ; Attendu que l'article L 7111-3 du Code du travail dispose; Qu'est journaliste professionnel toute personne qui a pour activité principale, régulière et rétribuée, l'exercice de sa profession dans une ou plusieurs entreprises de presse, publications quotidiennes et périodiques ou agences de presse et qui en tire le principal de ses ressources. Attendu qu'en l'espèce le Conseil n'a pas les déclarations de revenu de la partie demanderesse ; Qu'elle ne démontre pas qu'elle en percevait le principal de ses ressources ; Qu'il en déduit que celle-ci, ne pouvait pas se prévaloir de la qualité de journaliste ; Attendu d'autre part, que la partie demanderesse demande à titre subsidiaire la requalification de sa prestation de travail en CDI ; Attendu que le Conseil a procédé à un examen attentif du Contrat de prestation, intitulé « Contrat de Commande d'une oeuvre contribution à un programme multimédia »; Que cette convention prévoit une rémunération forfaitaire brute hors taxes ; Que ce n'est pas le cas ipso facto en matière de salaires ; Attendu par ailleurs, que l'oeuvre de création réalisée par ce prestataire à partir de commande dans le cadre de leur activité de rédaction et de recherches personnelles dont la nécessité ne relevait que de leur propre appréciation ne s'insère pas dans le cadre du travail confié au sens des articles L 1411-1 et L 1412-2 du code du travail ; Attendu à titre surabondant que l'article 12 de ce même contrat, précise que tout litige relatif à son interprétation ou exécution relèvera de la compétence exclusive de la Cour d'Appel de Paris ; Que les litiges relatifs aux droit d'auteurs sont du ressort du Tribunal de Grande Instance ; Que la demande auprès du Conseil de Prud'hommes de PARIS ne saurait prospérer ; Attendu que, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait et de preuve qui lui sont soumis, le Conseil a retenu que la partie demanderesse ne démontre pas sa qualité de salarié ; Qu'elle sera déboutée à ce titre de l'ensemble de ses demandes ».

1) ALORS QUE l'existence d'un contrat de travail ne dépend ni de la volonté des parties ni de la dénomination que les parties ont donné à leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles l'activité est exercée ; que l'activité de création d'une oeuvre originale doit être exercée en toute indépendance et en dehors de tout lien de subordination ; qu'en l'espèce, pour écarter l'existence d'un contrat de travail, la cour d'appel a retenu que l'exposant, engagé par le biais de contrats de commande d'une oeuvre de contribution et rémunéré en droit d'auteurs pour réaliser des notices dans le domaine culturel, ne démontrait pas qu'il aurait subi des contraintes dans ses jours de congés ni qu'il aurait été soumis à des directives impératives dans l'exercice de son travail ; qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel qui a statué par des motifs impropres à exclure l'existence d'un lien de subordination, a violé l'article L.1221-1 du code du travail ;

2) ALORS EN OUTRE QUE, dans ses écritures et pièces à l'appui, l'exposant avait soutenu et démontré, sans être contesté, que depuis sa création, la Société EVENE avait toujours eu recours à des collaborateurs réguliers externes qu'elle privait de toute indépendance rédactionnelle et auxquels elle donnait des ordres et des directives, menaçait de sanction et dont elle contrôlait l'activité, ce qui ressortait déjà, de la rédaction des contrats de commande qui leur étaient imposés, ensuite, du redressement opéré par l'URSSAF à son égard, enfin et surtout, des constatations de l'inspection du travail confirmées par arrêt devenu irrévocable de la chambre correctionnelle de la cour d'appel de Paris du 17 février 2015 pour les collaborateurs réguliers externes en poste au jour du contrôle de l'inspection du travail dont il était acquis que les conditions de travail étaient exactement les mêmes que leurs prédécesseurs en sorte qu'au vu de l'ensemble de ces éléments, il était fondé, nonobstant le principe d'autorité de la chose jugée au pénal sur le civil, à solliciter la requalification de ses divers contrats de commande en contrat de travail ; qu'en se bornant, pour statuer comme elle l'a fait, à relever que l'exposant ne justifiait pas de contrainte particulière en ce qu'il ne démontrait pas qu'il aurait subi des contraintes dans ses jours de congés ni qu'il aurait été soumis à des directives impératives dans l'exercice de son travail, sans rechercher, ainsi cependant qu'elle y était invitée, quelles étaient les conditions effectives de l'activité de l'exposant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article L.1221-1 du code du travail ;

3) ALORS A TOUT LE MOINS QUE en se bornant, pour débouter l'exposant de sa demande, à affirmer péremptoirement que celui-ci ne démontrait pas qu'il aurait subi des contraintes dans ses jours de congés ni qu'il aurait été soumis à des directives impératives dans l'exercice de son travail, la cour d'appel qui n'a pas motivé sa décision et mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

4) ALORS AU SURPLUS QUE, dans ses écritures et pièces à l'appui, l'exposant avait soutenu et démontré, sans être contesté, que depuis sa création, la Société EVENE avait toujours eu recours à des collaborateurs réguliers externes qu'elle privait de toute indépendance rédactionnelle et auxquels elle donnait des ordres et des directives, menaçait de sanction et dont elle contrôlait l'activité, ce qui ressortait déjà, de la rédaction des contrats de commande qui leur étaient imposés, ensuite, du redressement opéré par l'URSSAF enfin et surtout, des constatations de l'inspection du travail confirmées par arrêt devenu irrévocable de la chambre correctionnelle de la cour d'appel de Paris du 17 février 2015 pour les collaborateurs réguliers externes en poste au jour du contrôle de l'inspection du travail dont il était acquis que les conditions de travail étaient exactement les mêmes que leurs prédécesseurs en sorte qu'au vu de l'ensemble de ces éléments, il était fondé, nonobstant le principe d'autorité de la chose jugée au pénal sur le civil, à solliciter la requalification de ses divers contrats de commande en contrat de travail ; qu'en affirmant que l'exposant ne justifiait pas de l'existence d'une contrainte et ne produisait aucun élément permettant de montrer qu'il aurait été soumis à des directives impératives, la cour d'appel, qui a dénaturé par omission les écritures et le bordereau de pièces de l'exposant, a violé l'article 4 du code de procédure civile, ensemble le principe suivant lequel il est interdit aux juges de dénaturer les écrits qui leur sont soumis ;

5) ALORS EN OUTRE QUE, en retenant, par motifs éventuellement adoptés, que l'oeuvre de création réalisée par les prestataires ne relevait que de leur propre appréciation sans jamais préciser les éléments sur lesquels elle s'était fondée pour procéder à une telle affirmation, la cour d'appel a derechef violé les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur D... K... de sa demande tendant à ce qu'il soit reconnu qu'il avait la qualité de journaliste professionnel et de l'AVOIR débouté de ses demandes subséquentes ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE : « L'article L7111-3 du Code du travail dispose que « Est journaliste professionnel toute personne qui a pour activité principale, régulière et rétribuée, l'exercice de sa profession dans une ou plusieurs entreprises de presse, publications quotidiennes et périodiques ou agences de presse et qui en tire le principal de' ses ressources. » La loi pose notamment le principe selon lequel toute personne qui entend se prévaloir du statut de journaliste doit prouver qu'elle tire de l'exercice de cette profession le principal de ses ressources. Monsieur D... K... produit ses avis d'imposition pour l'année 2005 dont il résulte qu'il a déclaré au titre des revenus d'activité la somme de 3.299 €, en 2006 il a déclaré au titre des revenus d'activité la somme de 4.994 € et pour 2007 il a déclaré 1.382 € Ces documents fiscaux, sont inopérants dans la mesure où l'appelant ne s'explique pas sur les montants indiqués et la cour constate que les revenus déclarés sont bien inférieurs à ceux perçus de la société EVENE au titre de ces trois années. Par conséquent, et sans qu'il ne soit nécessaire de statuer sur les autres critères, la Cour déboute Monsieur D... K... de sa demande tendant à faire bénéficier du statut de journaliste ».

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE : « Attendu que les articles L 1411-6 et L 1421-1 du code du travail disposent : « Le conseil de prud'hommes règle par voie de conciliation les différends qui peuvent s'élever à l'occasion de tout contrat de travail soumis aux dispositions du présent code entre les employeurs, ou leurs représentants, et les salariés qu'ils emploient. Il juge les litiges lorsque la conciliation n'a pas abouti. Lorsqu'un organisme se substitue habituellement aux obligations légales de l'employeur, il peut être mis en cause aux côtés de celui-ci en cas de litige entre l'employeur et les salariés qu'il emploie. Les litiges relatifs aux licenciements ainsi qu'aux ruptures du contrat relèvent de la compétence des conseils de prud'hommes. Les dispositions de l'article L. 1235-1 sont applicables à l'ensemble des litiges ; les indemnités prévues à l'article L. 1235-3 le sont également sous réserve des dispositions de l'article L.1235-5. Leur mission comme conciliateurs et comme juges s'applique également aux différends nés entre salariés à l'occasion du travail. Néanmoins, ils ne peuvent connaître les litiges dont la connaissance est attribuée à une autre juridiction par la loi et notamment par le code de la Sécurité Sociale ou par le code rural pour ce qui concerne la mutualité agricole et les accidents du travail ou par le code du travail maritime. Les conseils de prud'hommes sont compétents, quel que soit le chiffre de la demande, pour connaître des différends visés au présent article. Toute convention dérogatoire est réputée non écrite. Les personnels des services publics lorsqu'ils sont employés dans les conditions du droit privé relèvent de la compétence des conseils de prud'hommes. Attendu que trois conditions doivent être réunies pour que le conseil de prud'homme se déclare matériellement compétent : le litige doit être individuel, un contrat de travail doit exister et le litige doit être né à l'occasion du contrat de travail. Attendu qu'un contrat de travail doit exister, qu'il y a contrat de travail quand une personne physique travaille pour le compte et sous la direction d'une personne physique ou morale moyennant une rémunération ; Attendu que le contrat de travail est caractérisé, dans sa conception classique, par trois éléments : fourniture d'un travail, versement d'une rémunération et existence d'un lien de subordination; Attendu que le salaire peut être au mois ou à "heure, à la tâche ou aux pièces ou à la commission, en argent ou en nature, Attendu que l'employeur doit disposer à l'égard du salarié d'un pouvoir de direction de surveillance,' d'instruction et de commandement ; Attendu d'une part, que la partie demanderesse demande que sa relation de travail soit requalifiée en journaliste pigiste ; Attendu que l'article L 7111-3 du Code du travail dispose; Qu'est journaliste professionnel toute personne qui a pour activité principale, régulière et rétribuée, l'exercice de sa profession dans une ou plusieurs entreprises de presse, publications quotidiennes et périodiques ou agences de presse et qui en tire le principal de ses ressources. Attendu qu'en l'espèce le Conseil n'a pas les déclarations de revenu de la partie demanderesse ; Qu'elle ne démontre pas qu'elle en percevait le principal de ses ressources ; Qu'il en déduit que celle-ci, ne pouvait pas se prévaloir de la qualité de journaliste ; Attendu d'autre part, que la partie demanderesse demande à titre subsidiaire la requalification de sa prestation de travail en CDI ; Attendu que le Conseil a procédé à un examen attentif du Contrat de prestation, intitulé « Contrat de Commande d'une oeuvre contribution à un programme multimédia » ; Que cette convention prévoit une rémunération forfaitaire brute hors taxes ; Que ce n'est pas le cas ipso facto en matière de salaires ; Attendu par ailleurs, que l'oeuvre de création réalisée par ce prestataire à partir de commande dans le cadre de leur activité de rédaction et de recherches personnelles dont la nécessité ne relevait que de leur propre appréciation ne s'insère pas dans le cadre du travail confié au sens des articles L 1411-1 et L 1412-2 du code du travail ; Attendu à titre surabondant que l'article 12 de ce même contrat, précise que tout litige relatif à son interprétation ou exécution relèvera de la compétence exclusive de la Cour d'Appel de Paris ; Que les litiges relatifs aux droit d'auteurs sont du ressort du Tribunal de Grande Instance ; Que la demande auprès du Conseil de Prud'hommes de PARIS ne saurait prospérer ; Attendu que, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait et de preuve qui lui sont soumis, le Conseil a retenu que la partie demanderesse ne démontre pas sa qualité de salarié ; Qu'elle sera déboutée à ce titre de l'ensemble de ses demandes ».

1) ALORS QUE, à l'appui de sa demande, l'exposant, qui avait exercé en qualité de collaborateur régulier pour le compte de la Société EVENE les années 2006 à 2008 et de manière continue en 2007, avait produit, d'une part, sa déclaration sur les revenus de 2006 dont il résultait qu'il avait déclaré un revenu d'activité de 2942 euros et ce faisant, une somme légèrement supérieure aux droits d'auteur perçus de la part de la Société EVENE pour l'année 2006 à hauteur de 2180 euros conformément aux contrats conclus avec la Société EVENE et aux factures émises à son égard et régulièrement versées aux débats, d'autre part, sa déclaration sur les revenus de l'année 2007 dont il résultait que la somme de 1382 euros correspondait à l'impôt sur le revenu antérieur à déduire et qu'il avait déclaré ses droits d'auteur en Bénéfice Non Commerciaux à hauteur de 12790 euros, lesquels étaient nécessairement légèrement inférieurs aux droits d'auteur versés par la Société EVENE pour cette année et s'élevant, conformément aux contrats de commande conclus avec la Société EVENE et les factures émises à son égard, à la somme de 13 600 euros; qu'en affirmant qu'il résultait des avis d'imposition produits par l'exposant aux débats qu'il avait déclaré au titre de ses revenus d'activité pour l'année 2006, la somme de 4994 euros et pour l'année 2007, la somme de 1382 euros et que les revenus déclarés étaient bien inférieurs à ceux perçus de la Société EVENE, la cour d'appel, qui a dénaturé tout à la fois les avis d'imposition, les contrats de commande et les factures de droits d'auteur versés aux débats par l'exposant, a violé l'article 4 du code de procédure civile, ensemble le principe suivant lequel il est interdit au juge de dénaturer les éléments de la cause ;

2) ALORS A TOUT LE MOINS QUE, en affirmant que les revenus déclarés pour l'année 2006 s'élevaient à la somme de 4994 euros et en 2007 à la somme de 1382 euros et que les revenus déclarés étaient bien inférieurs à ceux perçus au titre des droits d'auteur cependant d'une part, qu'il résultait de la déclaration sur les revenus de 2006, que l'exposant avait perçu des droits d'auteur à hauteur de 2942 euros - somme légèrement supérieure au total des droits d'auteur perçus de la part de la Société EVENE et résultant des contrats de commande et factures de droits d'auteur émises à l'égard de la Société EVENE - et des pensions alimentaires, ce qui aboutissait à un total de 4994 euros lequel ne correspondait pas à ses revenus d'activité et d'autre part, qu'il résultait de la déclaration sur les revenus de 2007 que la somme de 1382 euros correspondait à l'impôt sur le revenu antérieur à déduire et que les revenus d'activité avaient été déclarés en Bénéfice non commerciaux à hauteur de 12790 euros, somme légèrement inférieure aux droits d'auteur versés par la Société EVENE l'année 2007 – tel que résultant des contrats de commande et factures émises à l'égard de la Société EVENE, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, a violé l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction alors en vigueur, ensemble l'article L.1221-1 du code du travail ;

3) ALORS AU SURPLUS QUE l'exposant avait eu soin de verser aux débats, en complément de ses factures de droit d'auteur et de ses déclarations de revenus, un courriel dans lequel il avait précisément expliqué que ses revenus d'activité pour la période 2006-2008 provenaient, hors pensions versées par ses parents qu'il convenait de déduire du total des revenus, essentiellement de la Société EVENE et qu'à compter de l'année 2007, il avait déclaré ses droits d'auteur en bénéfice non commerciaux ce dont il résultait que la somme déclarée était nécessairement un peu inférieure à celle déclarée au regard des charges déductibles ; qu'en affirmant que l'exposant ne s'expliquait aucunement sur les montants indiqués, la cour d'appel, qui n'a pas examiné cette pièce déterminante, a violé les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté le Syndicat National des Journalistes de sa demande tendant à ce que la Société FIGARO soit condamnée à lui verser la somme de 10 000 euros en raison de l'atteinte porté à l'intérêt collectif de la profession ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE: « La Cour ayant refusé d'accorder au fils de l'appelant le bénéfice du statut de journaliste, le Syndicat National des Journalistes n'a pas qualité à agir en défense de l'intérêt collectif de la profession de journaliste. La Cour juge irrecevable l'intervention volontaire à l'instance du Syndicat National des Journalistes et confirme le jugement qui a débouté le syndicat de ses demandes ».

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE : « Attendu que la partie demanderesse n'a pas la qualité de journaliste ; Que sur les 20 salariés en demande à l'audience le Conseil a retenu qu'aucun n'avait la qualité de journaliste ; Qu'il ne peut pas être reproché à la société EVENE d'avoir mis en place un système de contournement du statut de journaliste qui porte préjudice à la profession. Cette demande sera rejetée ».

ALORS QUE, par application des dispositions de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation à intervenir du chef du deuxième moyen emportera, par voie de conséquence, la censure de l'arrêt en ce qu'il a débouté le SNJ de sa demande d'indemnisation au titre de l'atteinte portée à l'intérêt collectif de la profession.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17-31723
Date de la décision : 12/02/2020
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 27 octobre 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 12 fév. 2020, pourvoi n°17-31723


Composition du Tribunal
Président : M. Schamber (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:17.31723
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