LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
IK
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 22 janvier 2020
Rejet
Mme MOUILLARD, président
Arrêt n° 49 F-D
Pourvoi n° K 17-26.228
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 22 JANVIER 2020
M. G... X..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° K 17-26.228 contre l'arrêt rendu le 15 juin 2017 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (8e chambre B), dans le litige l'opposant à la société CM-CIC Factor, société anonyme, dont le siège est [...] , venant aux droits de la société CM-CIC La Violette financement, défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Vaissette, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. X..., de Me Le Prado, avocat de la société CM-CIC Factor, l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 26 novembre 2019 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Vaissette, conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 15 juin 2017), que M. X... s'est rendu caution solidaire des engagements de la société S2P envers la société CM-CIC Factor (la société CM-CIC), pour une durée de cinq ans courant à compter de la signature de l'acte intervenue le 30 juin 2005 ; que la société S2P a été mise en sauvegarde le 5 novembre 2009 ; que la société CM-CIC a déclaré sa créance le 9 décembre 2009 ; que le plan de sauvegarde de la société S2P a été arrêté le 1er décembre 2010 ; que la société S2P a été mise en redressement judiciaire le 3 juin 2013, la société CM-CIC déclarant de nouveau sa créance le 22 juillet 2013 ; que le redressement a été converti en liquidation judiciaire par un jugement du 16 juin 2014 ; que le 12 juin 2014, la société CM-CIC avait assigné la caution en paiement ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes fondées sur l'expiration de son engagement de caution et de le condamner à payer la somme de 33 089,45 euros alors, selon le moyen :
1°/ que la déclaration de créance faite par le créancier au passif de la procédure collective du débiteur principal n'interrompt pas le délai de forclusion à l'égard de la caution solidaire ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 1134 ancien, 2241 et 2246 du code civil ;
2°/ que les causes d'interruption de la forclusion énumérées dans l'article 2241 du code civil ne s'appliquent pas aux forclusions contractuelles ; qu'en jugeant le contraire, et en admettant que la déclaration de créance faite au passif du débiteur avait pu interrompre le délai contractuel pour agir contre la caution, alors qu'il ressortait de ses propres constatations que la forclusion litigieuse était contractuelle, la cour d'appel a violé le texte susvisé et l'article 1134 ancien du code civil ;
3°/ que la règle « contra non valentem agere non currit praescriptio » ne s'applique pas aux forclusions contractuelles ; qu'en jugeant le contraire, par motifs éventuellement adoptés, alors qu'il ressortait de ses propres constatations que la forclusion litigieuse était contractuelle, la cour d'appel a violé les articles 1134 ancien et 2220 du code civil ainsi que la règle susvisée ;
4°/ que la règle « contra non valentem agere non currit praescriptio » ne s'applique pas au délai de forclusion de l'action du créancier contre la caution d'un débiteur principal faisant l'objet d'une procédure collective ; qu'en jugeant le contraire, par motifs éventuellement adoptés, la cour d'appel a violé les articles L. 622-28 et L.631-14 du Code de commerce et la règle susvisée ;
5°/ que la règle « contra non valentem agere non currit praescriptio » ne s'applique pas à la partie qui pourrait agir d'une façon qui interrompe le délai de prescription ; qu'en vertu de l'article L. 622-28 du Code de commerce, le créancier d'un débiteur faisant l'objet d'une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire peut assigner la caution après avoir pris des mesures conservatoires ; qu'en jugeant, par motifs éventuellement adoptés, qu'il était impossible au créancier d'agir contre la caution, la cour d'appel a violé le texte et la règles susvisés ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'il ne résulte ni de l'arrêt, ni de ses conclusions que M. X... ait contesté devant la cour d'appel l'application qu'avait faite le tribunal de la règle, selon laquelle un délai ne peut courir contre celui qui se trouve dans l'impossibilité d'agir, au délai de forclusion stipulé dans l'acte de cautionnement ; que le moyen est donc nouveau et mélangé de fait et de droit et, comme tel, irrecevable ;
Et attendu que la décision se trouvant justifiée par les motifs vainement critiqués par les troisième, quatrième et cinquième branches, les griefs des première et deuxième branches, qui critiquent des motifs surabondants, sont inopérants ;
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. X... et le condamne à payer à la société CM-CIC Factor la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux janvier deux mille vingt.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. X...
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté les demandes de M. X... fondées sur l'expiration de son engagement de caution et sur l'absence de justification de la créance de la S.A. CM-CIC Factor ainsi que toutes ses autres demandes et de l'avoir condamné, en qualité caution de la SARL S.2.P , à payer à la SA CM-CIC Factor la somme de 33 089,45 € ;
AUX MOTIFS QUE « Sur la forclusion opposée par M. X...
L'acte de cautionnement du 30 juin 2005 stipule qu'il cessera à l'issue d'un délai de 5 ans courant à compter de sa signature.
M. X... et la société CM – CIC Factor considèrent que cette clause n'a pas pour effet de déterminer la période au cours de laquelle les obligations garanties doivent être nées, mais de limiter dans le temps le droit de poursuite du créancier.
La clause qui fixe un terme au droit d'agir institue un délai conventionnel de forclusion, lequel est susceptible d'être interrompu, en vertu de l'article 2241 du code civil, par la demande en justice, même en référé.
La déclaration d'une créance au passif d'une procédure collective équivaut à une demande en justice et l'effet interruptif qui en résulte s'étend à la caution solidaire.
Il s'ensuit que le délai de forclusion de l'action en paiement dirigée à l'encontre de M. X... a été interrompu le 9 décembre 2009, par la déclaration de la créance au passif de la procédure de sauvegarde de la société S2P, puis, de nouveau, le 22 juillet 2013, par la déclaration de cette même créance au passif du redressement judiciaire.
Dès lors, la forclusion, qui a commencé à courir le 30 juin 2005, n'était pas acquise à la date de l'assignation en justice du 12 juin 2014 puisqu'elle avait été interrompue les 9 décembre 2009 et 22 juillet 2013, sans qu'un délai supérieur à 5 ans ne se soit écoulé entre chaque acte interruptif.
Le moyen tiré de la forclusion est mal fondé » (arrêt attaqué, p. 4 § 7 à 14) ;
1°) ALORS QUE la déclaration de créance faite par le créancier au passif de la procédure collective du débiteur principal n'interrompt pas le délai de forclusion à l'égard de la caution solidaire ; qu'en jugeant le contraire, la Cour d'appel a violé les articles 1134 ancien, 2241 et 2246 du Code civil ;
2°) ALORS QUE les causes d'interruption de la forclusion énumérées dans l'article 2241 du Code civil ne s'appliquent pas aux forclusions contractuelles ; qu'en jugeant le contraire, et en admettant que la déclaration de créance faite au passif du débiteur avait pu interrompre le délai contractuel pour agir contre la caution, alors qu'il ressortait de ses propres constatations que la forclusion litigieuse était contractuelle, la Cour d'appel a violé le texte susvisé et l'article 1134 ancien du Code civil ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « Sur l'expiration de l'engagement de caution
Attendu que Monsieur G... X... ne conteste pas s'être porté caution solidaire de la société S.2.P dont il était le gérant, mais soutient que son engagement, souscrit le 30 juin 2005 pour une durée de cinq ans, a expiré le 30 juin 2010 ;
Attendu que Monsieur G... X..., en sa qualité de caution de la société S.2.P, a été mis en demeure par CM-CIC le 6 avril 2010, d'avoir à lui payer la somme de 62.948,02 euros ;
Attendu que cette mise en demeure a été faite avant la date d'expiration de l'engagement de caution consenti par Monsieur G... X... ;
Attendu que Monsieur G... X... a répondu à cette mise ne demeure en déclarant que la société S.2.P étant en procédure de sauvegarde depuis le 5 novembre 2009, il ne pouvait, conformément à l'article L. 622-28 du Code de commerce, être poursuivi en sa qualité de caution ;
Attendu que ledit article L.622-28, applicable en cas de procédure de sauvegarde, suspend « jusqu'au jugement arrêtant le plan ou prononçant la liquidation », les actions « contre les personnes physiques coobligées ou ayant consenti un cautionnement » ;
Attendu qu'un plan de sauvegarde a été arrêté par jugement du 30 novembre 2010 et que les dispositions de l'article L.626-11 du Code de commerce ont trouvé à s'appliquer à compter de cette date, dispositions selon lesquelles « Le jugement qui arrête le plan en rend les dispositions opposables à tous, les personnes ayant consenti une sûreté personnelle
peuvent s'en prévaloir » ;
Attendu que la société S.2.P après avoir bénéficié d'une procédure de sauvegarde s'est vue placée en redressement judiciaire et que, dans le cadre de cette procédure, l'article L.631-14 dit que les dispositions de l'article L.622-28 relatives à la suspension des actions à l'encontre des cautions personnes physiques sont applicables ;
Attendu que CM-CIC s'est trouvée dans l'impossibilité d'agir à l'encontre de Monsieur G... X... jusqu'à la date de conversion de la procédure de redressement judiciaire de la société S.2.P en liquidation judiciaire par jugement en date du 16 juin 2014 ;
Attendu que le principe selon lequel « contra non valentem agere non currit praescriptio » (« la prescription ne court pas contre qui se trouve dans l'impossibilité d'agir ») doit, en l'espèce, trouver à s'appliquer ;
Attendu que CM-CIC a mis en demeure Monsieur G... X..., pris en sa qualité de caution de S.2.P, par courrier 6 avril 2010 antérieur à l'expiration de son engagement de caution et attendu que CM-CIC a ensuite été, jusqu'au prononcé de la liquidation judiciaire de S.2.P, dans l'impossibilité d'agir à l'encontre de Monsieur G... X... du fait des dispositions sus-évoquées des articles L. 622-28, L.626-11 et L.631-14 du Code de commerce ;
Attendu qu'il convient en conséquence de rejeter la demande de Monsieur G... X... fondée sur l'expiration de son engagement de caution » (jugement, p. 4 6ème § en partant de la fin à p. 5 § 6) ;
3°) ALORS QUE la règle « contra non valentem agere non currit praescriptio » ne s'applique pas aux forclusions contractuelles ; qu'en jugeant le contraire, par motifs éventuellement adoptés, alors qu'il ressortait de ses propres constatations que la forclusion litigieuse était contractuelle, la Cour d'appel a violé les articles 1134 ancien et 2220 du Code civil ainsi que la règle susvisée ;
4°) ALORS QUE la règle « contra non valentem agere non currit praescriptio » ne s'applique pas au délai de forclusion de l'action du créancier contre la caution d'un débiteur principal faisant l'objet d'une procédure collective ; qu'en jugeant le contraire, par motifs éventuellement adoptés, la Cour d'appel a violé les articles L. 622-28 et L.631-14 du Code de commerce et la règle susvisée ;
5°) ALORS QUE la règle « contra non valentem agere non currit praescriptio » ne s'applique pas à la partie qui pourrait agir d'une façon qui interrompe le délai de prescription ; qu'en vertu de l'article L. 622-28 du Code de commerce, le créancier d'un débiteur faisant l'objet d'une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire peut assigner la caution après avoir pris des mesures conservatoires ; qu'en jugeant, par motifs éventuellement adoptés, qu'il était impossible au créancier d'agir contre la caution, la Cour d'appel a violé le texte et la règles susvisés.