LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'en exécution d'une ordonnance d'un juge de l'exécution, la société Banque Delubac et Cie (la banque) a procédé le 8 août 2007 à un nantissement judiciaire provisoire des parts sociales détenues par Mme Q... au sein de la société Cise ; que cette sûreté provisoire a été signifiée à Mme Q... le 14 août 2007 ; que par un jugement d'un tribunal d'instance du 19 décembre 2008, Mme Q... a été condamnée à payer à la banque une certaine somme au titre du solde de son compte bancaire personnel ; que la banque a converti le nantissement provisoire en nantissement définitif, par acte signifié à la société Cise le 27 février 2009 ; qu'invoquant l'absence de dénonciation du nantissement définitif à Mme Q..., cette dernière et la société Immobilière foncière rurale et urbaine, intervenue volontairement à l'instance, en ont demandé la radiation au juge de l'exécution ;
Attendu que Mme Q... et la société Immobilière foncière rurale et urbaine font grief à l'arrêt de confirmer le jugement ayant rejeté les demandes qui tendaient à obtenir la radiation du nantissement judiciaire pris le 27 février 2009 par la banque sur les actions détenues dans la société Cise alors, selon le moyen, que le nantissement provisoire de parts sociales et de valeurs mobilières doit faire l'objet d'une dénonciation auprès du débiteur ; que la publicité définitive du nantissement de parts sociales et de valeurs mobilières est opérée dans les mêmes formes que la publicité provisoire, de sorte qu'une dénonciation au débiteur s'impose également ; qu'en jugeant l'inverse, la cour d'appel a violé les articles R. 532-5 et R. 533-3 du code des procédures civiles d'exécution ;
Mais attendu que l'article 262 du décret n° 92-755 du 31 juillet 1992, devenu R. 533-3 du code des procédures civiles d'exécution, renvoyant à la seule formalité de la publicité provisoire prévue par l'article 253 de ce décret, devenu R. 532-3 du même code, la cour d'appel en a exactement déduit que le nantissement judiciaire définitif des parts sociales n'avait pas à être dénoncé à la débitrice ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Q... et la Société immobilière foncière rurale et urbaine aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer in solidum à la société Banque Delubac et Cie la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq décembre deux mille dix-neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Spinosi et Sureau, avocat aux Conseils, pour la Société immobilière foncière rurale et urbaine et Mme Q...
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement et, partant, d'avoir rejeté les demandes de Mme Q..., lesquelles tendaient à obtenir la radiation du nantissement judiciaire pris le 27 février 2009 par la banque DELUBAC sur les actions détenues dans la société CISE ;
Aux motifs propres que « Sur l'antériorité de la saisie du Trésor public, l'appelante ne verse pas aux débats cet acte de saisie du 21 février 2001, qui est évoqué dans une lettre du Trésor public non datée et adressée à M. et Mme P..., dont la cour comprend qu'il s'agirait d'une saisie conservatoire puisqu'elle a fait l'objet d'une conversion, et qu'elle visait, selon les termes de cette lettre, M. et Mme P... : "sur les parts, comptes courants et, plus généralement, tous droits à créance découlant de la qualité d'actionnaire de Mme Q... épouse P... dans Sifru - de la Sa Cise, qu'ils détiennent". Ainsi que le relève justement la banque, lors de la signification du nantissement provisoire, la société Cise n'a pas fait état de cette saisie conservatoire antérieurement pratiquée par le Trésor public, comme elle en avait pourtant l'obligation. L'appelante ne met donc pas la cour en mesure de vérifier la réalité et l'étendue de cette saisie du 21 février 2001, alors que la banque soutient que cette saisie a porté sur les parts sociales de la société Cise détenues par M. et Mme P... et non sur les parts appartenant uniquement à l'appelante. Il ne saurait donc être prononcé la radiation ou la caducité du nantissement pour ce motif.
C'est d'une manière inopérante que la société Sifru soutient qu'il n'est pas justifié de l'envoi de la lettre prévue à l'article 658 du code de procédure civile, lors de la dénonciation du nantissement provisoire à Mme Q... épouse P..., qu'en effet la mention de l'envoi de cette lettre est reprise dans cet acte d'huissier dont il est rappelé qu'il fait foi jusqu'à inscription de faux, étant au surplus observé que cette signification a été délivrée à l'adresse inchangée de l'appelante.
Par ailleurs, c'est par des motifs pertinents que la cour adopte que le premier juge a rappelé que le nantissement judiciaire définitif n'avait pas à être dénoncé à la débitrice.
En effet, l'article 262 du décret n° 92-755 du 31 juillet 1992, applicable en l'espèce, dispose que : « La publicité définitive du nantissement des parts sociales et valeurs mobilières est opérée dans les mêmes formes que la publicité provisoire », que cela ne peut renvoyer qu'aux formalités de la publicité provisoire de la sous-section 1, soit uniquement aux dispositions de l'article 253 du décret précisant les formes de cette publicité provisoire, que cette lecture résulte d'ailleurs de la nature de la publicité définitive qui valide la publicité provisoire, du fait que le créancier a obtenu un titre exécutoire, et donne rang à la sûreté à la date de la formalité provisoire » ;
Et aux motifs éventuellement adoptés que « Sur la demande de radiation du nantissement
Il résulte de l'article 255, alinéa 1er, du décret du 31 juillet 1992, alors applicable, qu'à peine de caducité, huit jours au plus tard après le dépôt des bordereaux d'inscription ou la signification du nantissement, le débiteur en est informé par acte d'huissier de justice.
En l'espèce, il résulte de la pièce n° 1 de la banque que le nantissement provisoire signifié à la société CISE SAS le 8 août 2007 a été dénoncé à Mme Q... par acte d'huissier du 14 août 2007 selon les modalités prévues aux articles 656 et 658 du code de procédure civile.
Il en résulte que la caducité n'est pas encourue.
Selon l'article 262 du décret du 31 juillet 1992, alors applicable, devenu à droit constant l'article R. 533-3 du code des procédures civiles d'exécution :
"La publicité définitive du nantissement des parts sociales et valeurs mobilières est opérée dans les mêmes formes que la publicité provisoire. Après avoir accompli cette formalité, le créancier peut demander l'agrément du nantissement, s'il y a lieu".
Il en résulte que l'article 262 précité ne renvoie qu'à l'article 254 du décret du 31 juillet 1992, seule la signification à la société du nantissement définitif des actions étant exigé pour la validité de ce dernier, à l'exclusion de la dénonciation au débiteur, ce que confirme l'alinéa 2 de l'article 262 précité ("cette formalité").
Il en résulte que la caducité prévue pour la publicité provisoire n'est pas encourue du seul fait du défaut de dénonciation de la publicité du nantissement définitif des actions à Mme Q...
Sur la vente des actions nanties par le trésor public
Selon les pièces produites :
- le trésor public a dressé un procès-verbal de saisie conservatoire de valeurs mobilières le 21 février 2001, converti en saisie-vente le 27 novembre 2008
- la nantissement provisoire a été signifié le 8 août 2007, dénoncé le 14 août 2007, et le nantissement définitif a été signifié à la société CISE SAS le 27 février 2009.
Il n'en résulte qu'une priorité de paiement entre deux créanciers, sans influence sur la validité des mesures prises, et la saisi-vente ne peut être réputée avoir produit ses effets que par la vente des biens saisis (Com., 15 octobre 2002, n° 99-17954), ce qui n'est allégué par aucune des parties.
La demande de radiation du nantissement sera donc rejetée » ;
Alors que le nantissement provisoire de parts sociales et de valeurs mobilières doit faire l'objet d'une dénonciation auprès du débiteur ; que la publicité définitive du nantissement de parts sociales et de valeurs mobilières est opérée dans les mêmes formes que la publicité provisoire, de sorte qu'une dénonciation au débiteur s'impose également ; qu'en jugeant l'inverse, la cour d'appel a violé les articles R. 532-5 et R. 533-3 du code des procédures civiles d'exécution.