LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 725-3 et R. 725-6 du code rural et de la pêche maritime, dans leur rédaction applicable au litige ;
Attendu, selon ces textes, que la mise en demeure, qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d'avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti, et la contrainte délivrée à la suite de cette mise en demeure restée sans effet, doivent permettre à l'intéressé d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation ; qu'à cette fin, il importe qu'elles précisent, à peine de nullité, outre la nature et le montant des cotisations réclamées, la période à laquelle elles se rapportent, sans que soit exigée la preuve d'un préjudice ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'après lui avoir notifié deux mises en demeure en date des 17 janvier 2014 et 9 janvier 2015 de payer un certain montant en cotisations et majorations de retard au titre des années 2010 à 2014, la caisse de mutualité sociale agricole du Limousin a décerné, le 3 mars 2015, à Mme K... une contrainte, à laquelle cette dernière a formé opposition devant une juridiction de sécurité sociale ;
Attendu que pour annuler la contrainte, l'arrêt retient essentiellement que si les mises en demeure mentionnaient la nature des sommes réclamées, la période pour laquelle elles l'étaient et leurs montants, la contrainte, qui visait les années 2010 à 2014, des cotisations et des majorations de retard, ne comportait pas les mêmes précisions et ne permettait pas à l'intéressée de connaître l'étendue de ce qui lui était réclamé ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle constatait que les mises en demeure précisaient la nature et le montant des cotisations réclamées et la période à laquelle elles se rapportaient et que la contrainte, qui y faisait référence, rappelait les années concernées ainsi que le montant des cotisations et majorations de retard, de telle sorte qu'elle permettait à l'intéressée d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 juillet 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Limoges ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;
Condamne Mme K... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit novembre deux mille dix-neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour la caisse de mutualité sociale agricole du Limousin
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir annulé la contrainte du 3 mars 2015 et d'avoir débouté la CMSA du Limousin de toutes ses demandes ;
AUX MOTIFS QUE la procédure de contrainte bénéficiant aux organismes de sécurité sociale pour le recouvrement de leurs cotisations doit permettre à l'assuré – afin d'éviter l'arbitraire – de connaître avec précision le détail de ce qui lui est réclamé, soit, la nature des sommes réclamées, la période pour laquelle elles le sont et leurs montants ; que si les mises en demeure des 17 janvier 2014 et 9 janvier 2015 étaient plus précises sur ces points, la contrainte du 3 mars 2015 ne les reproduit pas et mentionne simplement qu'elle vise les années 2010, 2011, 2013 et 2014, des cotisations et des majorations de retard sans autre précision ; que par ailleurs, un précédent jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale avait statué le 29 janvier 2013 sur opposition à une contrainte du 20 mars 2012, sur des « cotisations et majorations de retard » pour les années 2010 et 2011, sans que l'on en sache davantage ; qu'il importait donc que la contrainte de 2015 soit précise et permette réellement à l'assurée de connaître l'étendue de ce qui lui était réclamé ; que ne le faisant pas, elle encourt la nullité en application combinée des dispositions des articles L. 244-2, L. 244-9 et R. 244-1 du code de la sécurité sociale ;
ALORS QU' une contrainte notifiée par une caisse de mutualité sociale agricole pour le recouvrement des cotisations, majorations et pénalités de retard dues au titre de la protection sociale agricole est valable lorsqu'elle permet au débiteur de connaître la nature, la cause et l'étendue de ses obligations ; qu'une contrainte est donc valable quand elle vise les périodes au titre desquelles les sommes sont dues, dont elle indique la nature et l'étendue, et fait référence aux mises en demeure infructueuses de payer lesdites sommes, lesquelles indiquent la nature, la cause et l'étendue des sommes réclamées ; qu'en l'espèce, pour annuler la contrainte notifiée le 3 mars 2015 par la caisse de mutualité sociale agricole du Limousin à Mme K..., pour le recouvrement de cotisations, majorations et pénalités, la cour d'appel a affirmé que cette contrainte ne permettait pas à la débitrice de connaître l'étendue de ce qui lui était réclamé (arrêt, p. 3 § 1) ; qu'en statuant ainsi, tandis que la contrainte visait les périodes au titre desquelles les sommes étaient dues, dont elle indiquait la nature et l'étendue, et faisait référence aux mises en demeure infructueuses sur lesquelles elle se fondait, qui précisaient la nature, la cause et l'étendue des obligations de Mme K..., la cour d'appel a violé les articles L. 725-3 et R. 725-6 du code rural et de la pêche maritime dans leur rédaction applicable au litige.