La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/11/2019 | FRANCE | N°18-18202

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 14 novembre 2019, 18-18202


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 15 mars 2018), que M. K... O..., propriétaire de terres données à bail rural à la société Domaine Z... et fils, lui a délivré congé pour reprise au profit de ses enfants ; qu'après avoir quitté les lieux, cette société, invoquant le caractère illicite de la reprise, a sollicité la condamnation de M. K... O..., de M. R... O... et de Mme H... (les consorts O...) à lui payer l'indemnité due au preneur sortant, ainsi que des dommages-intérêts ;

Sur

le premier moyen du pourvoi incident, ci-après annexé :

Attendu que, les consorts...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 15 mars 2018), que M. K... O..., propriétaire de terres données à bail rural à la société Domaine Z... et fils, lui a délivré congé pour reprise au profit de ses enfants ; qu'après avoir quitté les lieux, cette société, invoquant le caractère illicite de la reprise, a sollicité la condamnation de M. K... O..., de M. R... O... et de Mme H... (les consorts O...) à lui payer l'indemnité due au preneur sortant, ainsi que des dommages-intérêts ;

Sur le premier moyen du pourvoi incident, ci-après annexé :

Attendu que, les consorts O... font grief à l'arrêt d'accueillir la demande d'indemnisation du preneur sortant ;

Mais attendu qu'ayant relevé que les consorts O... avaient fait une proposition d'indemnisation à la société Domaine Z... et fils et mis en oeuvre une mesure d'expertise amiable, qui avait donné lieu au dépôt d'un rapport le 25 janvier 2014, la cour d'appel en a souverainement déduit que les consorts O... ne pouvaient se prévaloir de la prescription, peu important que la proposition d'indemnisation n'ait pas été acceptée à la suite de l'expertise ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le moyen unique du pourvoi principal :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu que, pour rejeter la demande de dommages-intérêts, l'arrêt retient, d'une part, que la société Domaine Z... et fils n'a pas contesté le congé dans le délai légal et, d'autre part, que, si un contrôle a posteriori est possible, cette société n'a saisi le tribunal que d'une action tendant au contrôle a priori de la validité du congé dans les quatre mois de sa délivrance ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui s'est contredite, n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

Et sur le second moyen du pourvoi incident :

Vu l'article 1719 4° du code civil ;

Attendu que le bailleur est obligé par la nature du contrat, et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière, d'assurer la permanence et la qualité des plantations ;

Attendu qu'après avoir admis le principe d'une indemnisation de la société Z... et fils, l'arrêt ordonne une mesure d'expertise en donnant mission à l'expert de déterminer le montant de l'indemnité conformément aux dispositions de l'article L. 411-71 du code rural et de la pêche maritime ;

Qu'en statuant ainsi, alors que les frais de replantation ne constituent pas une amélioration mais l'obligation du bailleur d'assurer la permanence et la qualité des plantations, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que les repreneurs, Mme H... et M. R... O..., ayant respecté les articles L. 411-58 à L. 411-63 du code rural et de la pêche maritime aucun manquement générateur d'un préjudice ne peut être retenu à l'encontre des consorts O... et dit que l'expert devra déterminer le montant de l'indemnité due au preneur sortant dans le cadre de la reprise ayant donné lieu à congé conformément aux dispositions de l'article L. 411-71 du code rural et de la pêche maritime, l'arrêt rendu le 15 mars 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur les points cassés, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze novembre deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyen produit, au pourvoi principal, par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour la société Domaine Z... et fils

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir, infirmant le jugement entrepris en ce qu'il avait constaté le non-respect par les repreneurs des conditions prévues aux articles L 411-58 à L 411-63 du code rural et de la pêche maritime et dit qu'un tel manquement était générateur d'un préjudice pour la société Domaine de Z... qu'il a demandé à l'expert judiciaire de chiffrer, dit que les repreneurs, Mme Q... H... et M. R... O..., ayant respecté les articles L. 411-58 à L. 411-63 du code rural et de la pêche maritime, aucun manquement générateur d'un préjudice ne pouvait être retenu à l'encontre des consorts O..., et d'avoir, en conséquence, modifié la mission confiée à l'expert judiciaire afin qu'il détermine le seul montant de l'indemnité due au preneur sortant conformément aux dispositions de l'article L. 411-71 du code rural et de la pêche maritime ;

AUX MOTIFS QUE

« S'agissant des autorisations d'exploiter, dès lors que le preneur n'a pas contesté le congé dans le délai légal, ce qui est le cas en l'espèce, le repreneur n'était pas tenu de justifier avoir obtenu ou sollicité l'autorisation en application des dispositions du titre III du livre III du code rural et de la pêche maritime.

Dans une telle hypothèse, le droit positif considère que le preneur ne peut se prévaloir du défaut d'autorisation d'exploiter à la date de la reprise pour faire échec à cette dernière.

Certes, cette forclusion ne dispense pas le repreneur de respecter la réglementation des structures, mais elle n'ouvre, en cas de défaut de conformation à cette obligation, qu'une action pour reprise illicite conformément à l'article L. 411-66 du code rural et de la pêche maritime.

Le repreneur ayant ici obtenu l'autorisation préfectorale d'exploiter, postérieurement à leur entrée dans les lieux, cette action ne lui est pas ouverte.

Demeure uniquement la possibilité d'un contrôle a posteriori qui ne vise à sanctionner que les faits vérifiables entre la date de délivrance du congé et les quatre mois laissés au preneur pour contester sa validité, la régularité de la situation s'appréciant à la date à laquelle la juridiction statue.

A cet égard, la société Domaine Z... et Fils n'a saisi le tribunal que d'une action tendant au contrôle a priori de la validité du congé dans les quatre mois de sa délivrance.

Il est par ailleurs constant que Mme Q... H... et de M. R... O... ont chacun obtenu, le 9 février 2016, l'autorisation d'exploiter les biens repris.

Le moyen soulevé par la société Domaine Z... et Fils est donc inopérant et le jugement doit être réformé de chef.

Par ailleurs, s'agissant du manquement allégué aux articles L. 411-59 et L. 411-66 du code rural et de la pêche maritime, contrairement aux allégations de la société domaine Z... et Fils, il apparaît, comme l'a justement estimé le tribunal, que le recours aux services d'un tâcheron salarié, au demeurant utilisé auparavant par la société Domaine Z... et Fils, doit être assimilé à une exploitation personnelle » (arrêt p. 4) ;

1) ALORS QUE l'action pour reprise illicite est réservée au preneur évincé, le repreneur ne pouvant pas l'exercer ; qu'en affirmant que le repreneur, ayant ici obtenu l'autorisation préfectorale d'exploiter, postérieurement à son entrée dans les lieux, l'action pour reprise illicite ne lui était pas ouverte, la cour d'appel a violé l'article L. 411-66 du code rural et de la pêche maritime ;

2) ALORS QUE, à titre subsidiaire, la contradiction de motifs équivaut à une absence de motifs ; que l'action pour reprise illicite ouverte au preneur relève du contrôle a posteriori ; qu'en constatant tout à la fois que le repreneur ayant ici obtenu l'autorisation préfectorale d'exploiter postérieurement à son entrée dans les lieux, l'action pour reprise illicite n'était pas ouverte au preneur, et qu'il demeurait uniquement la possibilité d'un contrôle a posteriori pour le preneur, la cour d'appel s'est contredite en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

3°) ALORS QUE le contrôle a posteriori sanctionne uniquement le non-respect par le repreneur de ses obligations après reprise ; qu'en énonçant que le contrôle a posteriori ne vise à sanctionner que les faits vérifiables entre la date de délivrance du congé et les quatre mois laissés au preneur pour contester sa validité, la régularité de la situation s'appréciant à la date à laquelle la juridiction statue, la cour d'appel a violé l'article L. 411-66 du code rural et de la pêche maritime ;

4°) ALORS QUE la contradiction de motifs équivaut à une absence de motifs ; qu'en relevant que la société Domaine Z... et Fils n'avait saisi le tribunal que d'une action tendant au contrôle a priori de la validité du congé dans les quatre mois de sa délivrance, tout en constatant que le preneur n'avait pas contesté le congé dans le délai légal, la cour d'appel s'est contredite en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

5°) ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; que, dans ses conclusions d'appel, la société Domaine Z... et Fils reconnaissait ne pas avoir contesté les congés dans le délai de 4 mois de leur délivrance (conclusions p. 7) et demandait la confirmation du jugement qui indiquait qu'elle n'avait pas contesté les congés pour reprise en date du 19 mars 2012 dans les termes de l'article L. 411-54 du code rural (conclusions p. 9) ; qu'en affirmant que la société Domaine Z... et Fils n'avait saisi le tribunal que d'une action tendant au contrôle a priori de la validité du congé dans les quatre mois de sa délivrance, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

6°) ALORS QUE les juges ne peuvent dénaturer, que ce soit par commission ou par omission, les pièces claires et précises régulièrement produites aux débats ; qu'en jugeant qu'il était constant que Mme Q... H... et de M. R... O... avaient chacun obtenu, le 9 février 2016, l'autorisation d'exploiter les biens repris quand l'autorisation mentionnait que « la demande présentée par l'EARL [...] à [...] est acceptée », de sorte qu'elle avait été délivrée non pas à Mme Q... H... mais à l'EARL [...], la cour d'appel a dénaturé ladite autorisation d'exploiter et violé le principe qui interdit au juge de dénaturer les pièces du litige ;

7°) ALORS QUE les juges sont tenus de répondre aux conclusions des parties ; que le bénéficiaire de la reprise doit exploiter personnellement le fonds repris ; que la société Domaine Z... et Fils soutenait, dans ses conclusions (p. 8 et p. 9), que les terres reprises n'étaient pas exploitées personnellement par M. O... car il ressortait de l'attestation de M. B... annexée au constat d'huissier, établi le 15 mars 2016 et versé aux débats, que M. O... ne travaillait pas lui-même sur les terres concernées par la reprise, ayant recours à un prestataire de service, l'entreprise Prestavigne ; qu'en ne répondant pas à ce moyen péremptoire, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. Moyens produits, au pourvoi incident, par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour les consorts O...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR retenu le principe de l'indemnisation du preneur sortant, la société Domaine Z... et Fils et d'AVOIR déclaré la société Domaine Z... et Fils bien fondée en sa demande d'indemnité due au preneur sortant ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE l'article L. 411-69 du code rural et de la pêche maritime accorde au preneur sortant une indemnisation par le bailleur des améliorations qu'il a apportées au fonds loué ; que bien que la proposition d'indemnisation faite par les consorts O... n'ait pas été acceptée, compte tenu des améliorations culturales apportées à des terres louées nues, qui sont de nature à améliorer durablement l'exploitation, le principe même de l'indemnité retenue par [le] premier juge doit être confirmé ; que les consorts O... ne sauraient en effet, en arguant du refus de la société Domaine Z... et Fils de se prévaloir d'une prescription alors qu'ils ont eux-mêmes initiés un rapport d'expertise amiable déposé le 25 janvier 2014 prenant en compte tant le principe de l'indemnisation que celui de la prise en charge des complants ; que dans ces conditions, c'est donc à bon droit que le jugement a retenu, en application de l'article 1719 du code civil, que le remplacement des ceps dépéris en cours de bail à la charge du bailleur alors même que le travaux avaient été supportés par le preneur ; que le principe même de l'expertise doit être confirmé en présence d'un rapport non contradictoire et d'éléments insuffisants pour chiffrer l'indemnité, c'est en revanche sur le fondement de l'article L. 411-71 du code rural et de la pêche maritime et non celui de l'article L. 411-66 du même code, que cette mesure doit être réalisée ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE sur l'indemnité due au preneur sortant ; qu'il ressort des dispositions de l'article L 411-69 du code rural que le preneur qui a, par son travail ou par ses investissements apporté des améliorations au fonds loué a droit, à l'expiration du bail, à une indemnité due par le bailleur quelle que soit la cause qui a mis fin au bail ; que cette indemnité est fixée conformément aux termes de l'article L 411-70 et L 411-71 du code rural ; que la proposition d'indemnisation à hauteur de 13.745 € par les consorts O... sur la base du rapport de M. I... du 25.01.2014 n'a plus cours dans la mesure où celle-ci n'a pas été acceptée ; cependant même si le chiffre ainsi retenu ne peut plus servir de base de demande il n'en demeure pas moins que le rapport lui-même constitue un élément du dossier ; que depuis la reprise du 10.01.2014 aucune indemnité n'a été versée ; que compte tenu des améliorations culturales apportées, résultant d'actes de culture de nature à améliorer durablement l'exploitation, le principe même de l'indemnité ne peut être remis en cause, a fortiori s'agissant de terres louées nues, ce que ne contestent ni l'expert I..., ni l'expert P... ; que les consorts O... ne peuvent prétendre se prévaloir de la prescription à ce titre, dans la mesure où M. K... O... a lui-même initié le rapport de l'expert I... du 25.01.2014 prenant en compte tant le principe de l'indemnisation que celui de la prise en charge des complants, même si la proposition qui en a découlé s'est soldée par un refus ; qu'il convient de faire application de l'article 1719 du code civil selon lequel, la charge du remplacement des ceps dépéris en cours de bail est à la charge du bailleur, alors même qu'en l'espèce ces travaux ont été supportés par le preneur ; que pour permettre : d'estimer les travaux de valorisation réalisés par le domaine Z... et fixer l'indemnité due au preneur sortant ; de chiffrer le montant du préjudice prévu à L. 411-66 du code rural ; qu'il convient de : désigner M. U... G... en qualité d'Expert, avec pour mission, de se rendre sur place si nécessaire, de déterminer le montant de l'indemnité due au preneur sortant dans le cadre de la reprise ayant donné lieu à congé, de chiffrer le montant du préjudice prévu à l'article L 411-66 du code rural, de se faire communiquer tous les documents qu'il estimera utile pour remplir sa mission, dresser un rapport circonstancié dans le délai de quatre mois du jour où il sera avisé du dépôt de la consignation par le greffe et en adressera une copie à chacune des parties ; fixer le montant de la provision à valoir sur la rémunération de l'expert à 3 000 € (trois mille euros) que le demandeur devra consigner au greffe dans le mois du prononcé du présent jugement ; rappeler qu'à défaut de consignation dans ce délai, la désignation de l'expert sera caduque ; dire que s'il estime la provision insuffisante, il pourra solliciter que soit ordonné le versement d'une consignation complémentaire ; dire qu'en cas d'empêchement ou de refus, l'expert sera remplacé ; dire que l'affaire sera rappelée à la diligence du greffe à l'issue du dépôt du rapport d'expertise ;

ALORS QUE la proposition d'une indemnité au titre des travaux effectués en cours de bail lorsqu'elle est rejetée par le preneur ne vaut pas renonciation du bailleur à invoquer la prescription de la créance du preneur ; qu'il en va de même de la commande par le bailleur d'un rapport d'expertise amiable devant servir de base à la formulation de cette proposition ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que par lettre du 5 décembre 2013, M. et Mme O... ont confirmé à la société Z... etamp; Fils l'exercice de leur droit de reprise, tout en lui proposant une indemnité pour amélioration à chiffrer à dire d'expert ; que la société Domaine Z... et Fils a contesté les conclusions du rapport d'expertise amiable et rejeté la proposition formulée par M. et Mme O... sur la base de celui-ci ; qu'en retenant que les consorts O... ne pouvaient, arguant du refus de la société Domaine Z... et Fils d'accepter leur proposition d'indemnisation, se prévaloir de la prescription de la créance de cette dernière, dès lors qu'ils avaient eux-mêmes initié le rapport d'expertise amiable ayant servi de base à cette proposition, la cour d'appel a violé les articles 2224, 2250 et 2251 du code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR retenu le principe de l'indemnisation du preneur sortant, la société Domaine Z... et Fils, d'AVOIR déclaré la société Domaine Z... et Fils bien fondée en sa demande d'indemnité due au preneur sortant, d'AVOIR dit que M. K... O... supportera la charge des complants et d'AVOIR donné pour mission à l'expert de déterminer le montant de l'indemnité due au preneur sortant dans le cadre de la reprise ayant donné lieu à congé conformément aux dispositions de l'article L. 411-71 du code rural et de la pêche maritime ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE l'article L. 411-69 du code rural et de la pêche maritime accorde au preneur sortant une indemnisation par le bailleur des améliorations qu'il a apportées au fonds loué ; que bien que la proposition d'indemnisation faite par les consorts O... n'ait pas été acceptée, compte tenu des améliorations culturales apportées à des terres louées nues, qui sont de nature à améliorer durablement l'exploitation, le principe même de l'indemnité retenue par [le] premier juge doit être confirmé ; que les consorts O... ne sauraient en effet, en arguant du refus de la société Domaine Z... et Fils de se prévaloir d'une prescription alors qu'ils ont eux-mêmes initiés un rapport d'expertise amiable déposé le 25 janvier 2014 prenant en compte tant le principe de l'indemnisation que celui de la prise en charge des complants ; que dans ces conditions, c'est donc à bon droit que le jugement a retenu, en application de l'article 1719 du code civil, que le remplacement des ceps dépéris en cours de bail à la charge du bailleur alors même que le travaux avaient été supportés par le preneur ; que le principe même de l'expertise doit être confirmé en présence d'un rapport non contradictoire et d'éléments insuffisants pour chiffrer l'indemnité, c'est en revanche sur le fondement de l'article L. 411-71 du code rural et de la pêche maritime et non celui de l'article L. 411-66 du même code, que cette mesure doit être réalisée ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE sur l'indemnité due au preneur sortant ; qu'il ressort des dispositions de l'article L 411-69 du code rural que le preneur qui a, par son travail ou par ses investissements apporté des améliorations au fonds loué a droit, à l'expiration du bail, à une indemnité due par le bailleur quelle que soit la cause qui a mis fin au bail ; que cette indemnité est fixée conformément aux termes de l'article L 411-70 et L 411-71 du code rural ; que la proposition d'indemnisation à hauteur de 13.745 € par les consorts O... sur la base du rapport de M. I... du 25.01.2014 n'a plus cours dans la mesure où celle-ci n'a pas été acceptée ; cependant même si le chiffre ainsi retenu ne peut plus servir de base de demande il n'en demeure pas moins que le rapport lui-même constitue un élément du dossier ; que depuis la reprise du 10.01.2014 aucune indemnité n'a été versée ; que compte tenu des améliorations culturales apportées, résultant d'actes de culture de nature à améliorer durablement l'exploitation, le principe même de l'indemnité ne peut être remis en cause, a fortiori s'agissant de terres louées nues, ce que ne contestent ni l'expert I..., ni l'expert P... ; que les consorts O... ne peuvent prétendre se prévaloir de la prescription à ce titre, dans la mesure où M. K... O... a lui-même initié le rapport de l'expert I... du 25.01.2014 prenant en compte tant le principe de l'indemnisation que celui de la prise en charge des complants, même si la proposition qui en a découlé s'est soldée par un refus ; qu'il convient de faire application de l'article 1719 du code civil selon lequel, la charge du remplacement des ceps dépéris en cours de bail est à la charge du bailleur, alors même qu'en l'espèce ces travaux ont été supportés par le preneur ; que pour permettre : d'estimer les travaux de valorisation réalisés par le domaine Z... et fixer l'indemnité due au preneur sortant ; de chiffrer le montant du préjudice prévu à L. 411-66 du code rural ; qu'il convient de : désigner M. U... G... en qualité d'Expert, avec pour mission, de se rendre sur place si nécessaire, de déterminer le montant de l'indemnité due au preneur sortant dans le cadre de la reprise ayant donné lieu à congé, de chiffrer le montant du préjudice prévu à l'article L 411-66 du code rural, de se faire communiquer tous les documents qu'il estimera utile pour remplir sa mission, dresser un rapport circonstancié dans le délai de quatre mois du jour où il sera avisé du dépôt de la consignation par le greffe et en adressera une copie à chacune des parties ; fixer le montant de la provision à valoir sur la rémunération de l'expert à 3 000 € (trois mille euros) que le demandeur devra consigner au greffe dans le mois du prononcé du présent jugement ; rappeler qu'à défaut de consignation dans ce délai, la désignation de l'expert sera caduque ; dire que s'il estime la provision insuffisante, il pourra solliciter que soit ordonné le versement d'une consignation complémentaire ; dire qu'en cas d'empêchement ou de refus, l'expert sera remplacé ; dire que l'affaire sera rappelée à la diligence du greffe à l'issue du dépôt du rapport d'expertise ;

ALORS QUE les frais de complantation ou racottage ne constituent pas une amélioration du fonds loué mais l'obligation du bailleur d'assurer la permanence et la qualité des plantations ; qu'en décidant que K... O... est redevable d'une indemnité pour les travaux de remplacement des ceps dépéris en cours de bail supportés par la société Domaine de Z... et Fils, à fixer selon les règles applicables aux améliorations du fonds, la cour d'appel a violé l'article 1719 du code civil ensemble les articles L. 411-71 et L. 415-8 du code rural et de la pêche maritime.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 18-18202
Date de la décision : 14/11/2019
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 15 mars 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 14 nov. 2019, pourvoi n°18-18202


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.18202
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award