LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 4 septembre 2017), que la société Somaf (la Somaf) a commercialisé des cigarettes et du tabac en Guadeloupe et s'est acquittée, entre le 1er janvier 2001 et le 20 octobre 2010, des droits à la consommation sur les tabacs manufacturés prévus par l'article 268 du code des douanes ; qu'estimant ne pas être redevable de ces droits, elle a demandé à l'administration des douanes le remboursement des sommes versées à ce titre ; qu'après rejet de sa demande, elle a assigné, à la même fin, l'administration des douanes devant le tribunal de grande instance ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la Somaf fait grief à l'arrêt de se déclarer incompétent pour connaître de sa demande tendant à la réparation de la faute commise par le service des douanes dans le recouvrement du droit de consommation sur les tabacs manufacturés alors, selon le moyen, qu'il n'appartient qu'aux juridictions de l'ordre judiciaire de déterminer si le recouvrement par le service des douanes de taxes et impôts est de nature à engager la responsabilité de l'Etat vis-à-vis d'une personne privée ; qu'en retenant le contraire, la cour d'appel a violé la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Mais attendu qu'après avoir rappelé qu'il résultait de l'article 357 bis du code des douanes que les tribunaux de l'ordre judiciaire sont compétents pour connaître de toutes les contestations concernant l'assiette et le recouvrement des droits de douane et, en particulier, des contestations relatives à la validité des actes accomplis par les agents de l'administration des douanes à l'occasion de l'assiette et de la perception de ces droits, à l'exception de celles qui se rapportent aux activités du service des douanes qui ne concernent pas la détermination des droits de douane ou qui sont détachables de cette détermination, c'est à bon droit que la cour d'appel, par motifs propres et adoptés, et abstraction faite de celui, erroné mais surabondant, par lequel elle a énoncé qu'il n'appartenait pas aux juridictions de l'ordre judiciaire de déterminer si le recouvrement par le service des douanes est de nature à engager la responsabilité de l'Etat, a retenu que les juridictions judiciaires étaient compétentes pour connaître des demandes de la Somaf tendant à la restitution des sommes qu'elle estimait avoir indûment versées au titre des droits de consommation sur les tabacs manufacturés mais que seules les juridictions administratives étaient compétentes pour statuer sur les demandes de cette société tendant à voir l'Etat condamné à lui verser des dommages-intérêts en réparation d'une éventuelle faute liée au non-respect, par le Conseil général de la Guadeloupe, dans le cadre de son activité normative, des directives communautaires, puis en a déduit qu'elle n'était pas compétente pour apprécier la licéité du droit fixé par délibération du Conseil général de la Guadeloupe au regard des directives européennes ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen :
Attendu que la Somaf fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande tendant à la condamnation de l'administration des douanes à lui payer certaines sommes en remboursement du droit de consommation sur le tabac, de la TVA incidente et des intérêts au taux légal capitalisés sur ce droit et à l'indemniser de son préjudice alors, selon le moyen, que la directive 95/59/CE du Conseil du 27 novembre 1995 concernant les impôts autres que les taxes sur le chiffre d'affaires frappant la consommation des tabacs manufacturés, est une directive autonome applicable aux départements d'outre-mer, dès lors que ceux-ci ne sont pas expressément exclus de son champ d'application ; qu'en jugeant que cette directive 95/59/CE n'était pas applicable au département de la Guadeloupe, dès lors qu'elle était une directive d'application de la directive 92/12/CEE du 25 février 1992 relative à la détention, à la circulation et au contrôle des produits soumis à accise, laquelle excluait expressément les départements d'outre-mer de son champ d'application, quand la directive 95/59/CE ne fait nullement référence à cette directive 92/12/CEE, de sorte qu'elle n'en est pas une directive d'application, la cour d'appel a violé les dispositions de la directive 95/59/CE du 27 novembre 1997 ;
Mais attendu que la directive 92/12/CEE du Conseil du 25 février 1992 réglemente le régime général, la détention, la circulation et les contrôles des produits soumis à accise ; qu'elle dispose dans son préambule qu'elle a pour objet de définir le territoire sur lequel la présente directive ainsi que les directives portant sur les taux et les structures des droits des produits soumis à accise s'appliquent ; que l'article 2 de cette directive exclut de son champ d'application, notamment, les départements d'outre-mer ; qu'ayant, par motifs propres et adoptés, retenu que la directive 95/59/CE du Conseil du 27 novembre 1995 relative aux impôts autres que les taxes sur le chiffre d'affaires frappant la consommation des tabacs manufacturés s'inscrit dans le cadre général défini par la directive précitée du 25 février 1992, et relevé que la directive 2008/118/CE du Conseil du 16 décembre 2008 relative au régime général d'accise, qui a abrogé la directive 92/12/CEE, se réfère expressément à la directive 95/59/CE et exclut de son champ d'application les départements d'outre-mer, la cour d'appel en a exactement déduit que la directive 95/59/CE du Conseil du 27 novembre 1995 ne trouve pas application dans les départements d'outre-mer ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Somaf aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la direction régionale des douanes et droits indirects de Guadeloupe la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du six novembre deux mille dix-neuf, signé par lui et Mme Labat, greffier de chambre, qui a assisté au prononcé de l'arrêt.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Somaf
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué de s'être déclaré incompétent pour connaître de la demande de la société Somaf tendant à la réparation de la faute commise par le service des douanes dans le recouvrement du droit de consommation sur les tabacs manufacturés ;
Aux motifs propres que « Et la réparation d'une faute qui aurait été commise par l'Etat, en ce que le service des douanes aurait omis de respecter le droit européen ne relève pas de la compétence du juge judiciaire puisqu'il n'appartient pas aux juridictions de l'ordre judiciaire de déterminer si le recouvrement par le service des douanes est de nature à engager la responsabilité de l'Etat (Tribunal des conflits, 1er juillet 2002 ; N° de pourvoi : 02-03294) » (arrêt attaqué, p. 3, §5) ;
Et aux motifs adoptés que « la demande de la société Somaf vise à obtenir la condamnation de l'administration des douanes au versement notamment de sommes au titre des droits de consommation qu'elle considère comme indûment payées depuis 2001 et au titre de l'incidence de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé le droit de consommation litigieux ; que l'article 268 du Code des Douanes précité prévoit que « le droit de consommation est recouvré comme en matière de Droit de Douane, les infractions sont constatées et réprimées et les instances instruites et jugées conformément aux dispositions du Code des Douanes » ; que l'article 357bis dudit code donne compétence depuis le 1er janvier 2013 aux Tribunaux de Grande Instance, antérieurement aux Tribunaux d'Instance, pour connaître des contestations concernant le paiement, la garantie ou le remboursement des créances de toute nature recouvrées par l'administration des douanes et des autres affaires de douane n'entrant pas dans la compétence des juridictions répressives ; que si la demande de remboursement des sommes considérées comme indûment payées au titre du droit de consommation relève de la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire, tel n'est pas le cas des demandes en paiement correspondant à l'incidence de la taxe sur la valeur ajoutée et en réparation des préjudices résultant de la privation des fonds et de ‘éventuelle défaillance de l'administration des douanes ; que de telles demandes formulées au motif de l'illicéité du droit de consommation fixé par délibération du Conseil Général de la Guadeloupe au regard des normes européennes et en particulier des directives communautaires, relèvent du régime de responsabilité des collectivités territoriales du fait de leur activité réglementaire et ressortissent à la compétence de la juridiction administrative ; que la juridiction se déclarera en conséquence incompétente pour connaître des demandes en réparation des préjudices et au titre de l'incidence de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé le droit de consommation ».
Alors qu'il n'appartient qu'aux juridictions de l'ordre judiciaire de déterminer si le recouvrement par le service des douanes de taxes et impôts est de nature à engager la responsabilité de l'Etat vis-à-vis d'une personne privée ; qu'en retenant le contraire, la cour d'appel a violé la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt partiellement confirmatif attaqué d'avoir débouté la société Somaf de sa demande tendant à la condamnation de la Direction régionale des douanes de Guadeloupe à lui payer la somme de 32 034 119,01 € en remboursement du droit de consommation sur le tabac payé depuis 2001, de la somme de 2 510 204,62 € correspondant à la TVA incidente et de la somme de 6 842 843,84 € correspondant aux intérêts au taux légal capitalisés sur ce droit de consommation, d'avoir débouté la société Somaf de sa demande tendant à la condamnation de la Direction régionale des douanes de Guadeloupe à lui payer une somme de 18 850 472,87 € en indemnisation de son préjudice, et de l'avoir débouté de sa demande tendant au paiement d'une somme de 10 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Aux motifs propres que « la SOMAF soutient que le droit de consommation dans les Départements d'outre-mer contrevient aux directives européennes applicables ; qu'elle soutient précisément (page 19 de ses écritures) que jusqu'au 1er avril 2010, la directive 95/59 CE s'appliquait dans les départements d'Outre-mer où le droit de la consommation n'était pas conforme au droit communautaire et, qu'à compter du 1er avril 2010, comme la France s'était engagée à ne pas appliquer le droit communautaire dans ces départements, elle ne pouvait l'appliquer indirectement sans contrevenir à l'article 1 de la directive 2008/118/CE ; qu'elle ajoute que la directive 2011/64/UE a abrogé la directive 95/59/CE et un nouveau système applicable dans les départements d'outre-mer a été instauré qui prévoit que le prix est librement déterminé par les opérateurs et que le droit de consommation comporte une partie fixe et un élément variable ; qu'or, la directive 92/12/CEE relative à la détention, à la circulation et au contrôle des produits soumis à accise exclut de son champ d'application en son article 2 les départements d'outre-mer de la République française ; qu'elle prévoit, toutefois, que la République française peut notifier par déclaration que les directives s'appliqueront à son territoire sous réserves des mesures d'adaptation à la situation de ces territoires ; que c'est justement que tribunal a considéré que c'est dans ce cadre que sont intervenues des directives spécifiques dont la directive 95/59/CE du 27 novembre 1995 relative aux impôts autres que les taxes sur le chiffre d'affaires frappant la consommation de tabacs manufacturés, laquelle n'est pas autonome et ne s'applique donc pas aux départements d'outre-mer ; que la directive 9212/CCE a été abrogée par la directive 2008/118/CE du 16 décembre 2008 ; qu'elle vise dans son champ d'application les tabacs manufacturés relevant de la directive 95/59/CE et précise en son article 5 qu'elle n'est pas applicable aux départements français d'outre-mer, sauf déclaration ; qu'enfin, la directive 2011/64/UE du 21 juin 2011 a codifié les directives 95/59/CE, 92/79/CEE et 92/80/CEE et 95/59/CE et ne trouve donc pas à s'appliquer aux départements d'outre-mer ; qu'il en résulte que l'ensemble des directives précitées ne sont pas applicables aux départements d'outre-mer dont la Guadeloupe, de sorte que la SOMAF ne saurait se prévaloir de leur application et à bon droit demander la restitution de sommes au motif de la violation des directives européennes ; que c'est, à cet égard, avec pertinence que l'Administration des douanes conclut que, dès lors que les départements d'outre-mer sont exclus de l'acte d'harmonisation communautaire, les États demeurent libres de réglementer dans les limites prescrites par la traité du fonctionnement de l'Union européenne ; qu'à cet égard, la SOMAF ne saurait arguer de l'application l'article 113 du traité relative aux dispositions touchant à l'harmonisation des législations des États membres en matière de fiscalité indirecte pour se prévaloir de l'application des directives excluant de leur champ d'application les départements d'outre-mer ; que de fait, la réglementation relative au droit de consommation outre-mer ressort de la seule application des dispositions de l'article 268 du code des douanes français ; que la requérante invoque le caractère illicite de celles-ci, en ce qu'elles violeraient le principe de la liberté d'entreprendre ; que ce principe à valeur constitutionnelle découle de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ; que la cour relève que la taxation du tabac aux fins notamment de réduction de la consommation dans un but de santé public est licite ; qu'en effet, le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 25 janvier 2013 , a considéré « qu'en permettant que soit fixé un minimum de prix de vente des produits du tabac et en encadrant la détermination de ce minimum par les conseils généraux, le législateur a assuré une conciliation, qui n'est pas manifestement déséquilibrée, entre l'exercice de la liberté d'entreprendre et les exigences du onzième alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 relatives à « la protection de la santé » ; que sur la rupture d'égalité devant la loi et les charges publiques qui découlerait de la législation spécifique aux départements d'outre-mer et sur la différence de taxation des tabacs selon qu'ils sont ou non homologués en France métropolitaine qui en engendrerait une discrimination entre les opérateurs, en premier lieu, " le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport avec l'objet de la loi. » ; qu'en second lieu, l'article 73 de la constitution prévoit que « dans les départements et les régions d'outre-mer, les lois et règlements sont applicables de plein droit. Ils peuvent faire l'objet d'adaptations tenant aux caractéristiques et contraintes particulières des collectivités » ; que l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, qui dispose que « la loi doit être la même pour tous », n'impose pas une taxation ou un prix unique du tabac sur le territoire de la République ; que le Conseil constitutionnel a considéré, dans la décision précitée, que la faiblesse des ressources, notamment fiscales des départements d'outre-mer et les écarts de prix du tabac entre ces territoires et la France continentale constituaient, au sens de l'article 73 de la Constitution, des « caractéristiques et contraintes particulières » de nature à permettre au législateur de confier aux conseils généraux de ces quatre départements les modalités de détermination de l'assiette et du taux du droit de consommation sur les tabacs ainsi que d'en affecter le produit au budget de ces collectivités et qu'en adoptant les dispositions de l'article 269, « le législateur a entendu accroître les ressources de ces collectivités départementales et permettre le rapprochement entre les prix du tabac dans ces départements et ceux applicables en France continentale. » ; qu'il a précisé que le législateur a également entendu, par les dispositions prévues par les troisième et quatrième alinéas du 1 de l'article 268 du code des douanes, limiter les différences entre les montants du droit de consommation selon qu'il s'applique à des produits homologués ou non en se fondant sur un critère objectif et rationnel en lien direct avec l'objectif qu'il s'est assigné, de sorte ces dispositions n'entraînent pas de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques ; qu'enfin, il est constant que la différence de traitement invoquée ne ressort manifestement pas de l'application de l'article 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui proscrit les discriminations en ces termes : « La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation. » ; qu'il en découle que les griefs tirés de l'atteinte à la liberté d'entreprendre, à l'égalité devant la loi et les charges publiques et à la prohibition des discriminations ne sauraient fonder une action en restitution des droits de consommation ; que les demandes de la SOMAF seront en conséquence rejetées » (arrêt attaqué, p. 4, 5 et 6) ;
Et aux motifs adoptés que « la société Somaf sollicite le remboursement du droit de consommation affectant les tabacs destinés à être consommés dans les Départements d'Outre- Mer, sur le fondement de la directive 95/59/CE du 27 novembre 1995, au motif que cette taxe n'est conforme ni au Droit Européen ni à la jurisprudence communautaire, en ce que son assiette est illégale, le Conseil Général de la Guadeloupe pouvant imposer un prix minimum, exogène au marché local ; qu'elle soutient que la directive 95/59/CE n'a pas cessé de s'appliquer jusqu'à son abrogation avec effet au 1er janvier 2011 par la directive 2011/64/UE ; que le régime des accises dans l'Union Européenne a été défini par la directive 92/12/CEE du Conseil du 25 février 1992, laquelle réglemente le régime général, la détention, la circulation et les contrôles des produits soumis à accise ; qu'elle dispose en son article 1 :
« 1. La présente directive fixe le régime des produits soumis à accise et autres impositions indirectes frappant directement ou indirectement la consommation de ces produits, à l'exclusion de la taxe sur la valeur ajoutée et des impositions établies par la Communauté.
« 2. Les dispositions particulières portant sur les structures et les taux des droits des produits soumis à accise figurent dans des directives spécifiques»
« Qu'en son article 2, il est indiqué au paragraphe 1 : « La présente directive, ainsi que les directives mentionnées à l'article 1 paragraphe 2, sont d'application sur le territoire de la Communauté tel qu'il est défini, pour chaque Etat membre, par le traité instituant la Communauté économique européenne et en particulier son article 227 [...] » et en son paragraphe 3 « Par dérogation au paragraphe 1, la présente directive ainsi que les directives mentionnées à l'article 1 paragraphe 2 ne s'appliquent pas aux Départements d'Outre-Mer de la République Française » ; que c'est dans le cadre général ainsi défini par la directive 92/12/CEE, et en particulier en application de l'article 1 paragraphe 2 de ladite directive que sont intervenues des directives spécifiques, et notamment les directives, 92/79 CE du 19 octobre 1992, 92/80 CE du 19 octobre 1992, ayant trait au rapprochement des taxes frappant les cigarettes, d'une part et les tabacs manufacturés autres que les cigarettes, d'autre part, et la directive 95/59/CE du Conseil du 27 novembre 1995, relative aux impôts autres que les taxes sur le chiffre d'affaires frappant la consommation des tabacs manufacturés, revendiquée à tort comme étant autonome par la société demanderesse ; que constatant que la directive 92/12/CEE du 25 février 1992 a été modifiée à plusieurs reprises et de façon substantielle, le Conseil de l'Union Européenne a adopté, le 16 décembre 2008 dans un souci de clarification, la directive 2008/118/CE relative au régime général d'accise, abrogeant la précédente ; qu'elle mentionne en son préambule qu' « il y a lieu de préciser les produits soumis à accise auxquels elle s'applique et de se référer à cette fin aux directives 92/79 ... 92/80... et 95/59 du conseil » ; qu'en son article 1c, il est indiqué « La présente directive établit le régime général des droits d'accise frappant directement ou indirectement la consommation des produits suivants, ci-après dénommés « produits soumis à accise :
« - les tabacs manufacturés relevant des directives 95/59/CE, 92/79 CEE et 92/80/CEE » ;
« Qu'en son article 5, il est précisé :
« 1. La présente directive et la directives visées à l'article 1 (ci-avant) s'appliquent au territoire de la Communauté.
« 2. La présente directive et les directives visées à l'article 1 ne s'appliquent pas aux territoires suivants faisant partie du territoire douanier de la Communauté :
« a) les iles Canaries,
« b) les Départements français d'Outre-Mer
« c) les iles Aland
« d) les iles Anglo-Normandes,
« ...
« 5. La France peut notifier, par une déclaration, que la présente directive et les directives visées à l'article 1 s'appliquent aux Départements Français d'Outre-Mer sous réserve de mesures d'adaptation à la situation d'ultrapériphéricité de ces territoires – pour l'ensemble ou certains des produits soumis à accise visés à l'article 1, à partir du premier jour du deuxième mois suivant le dépôt de cette déclaration » ;
« Que poursuivant son oeuvre unificatrice, le Conseil de l'Union Européenne a rassemblé les directives 95/59/CE, 92/79/CEE et 92/80/CEE en un acte unique le 21 juin 2011, la directive 2011/64/UE se substituant aux précédentes, toute référence à ces dernières valant référence à la nouvelle directive 2011/64/UE ; qu'il résulte des dispositions précitées, sans que cela puisse être sérieusement discuté, que la directive 95/59/CE n'est pas applicable aux Département d'Outre-Mer ; que la société Somaf qui fondent son action sur la violation du droit communautaire et en particulier, des principes posés par la directive 95/59/CE, ne peut qu'être déboutée de l'intégralité de ses demandes ;
Alors que la directive 95/59/CE du Conseil du 27 novembre 1995 concernant les impôts autres que les taxes sur le chiffre d'affaires frappant la consommation des tabacs manufacturés, est une directive autonome applicable aux départements d'outre-mer, dès lors que ceux-ci ne sont pas expressément exclus de son champ d'application ; qu'en jugeant que cette directive 95/59/CE n'était pas applicable au département de la Guadeloupe, dès lors qu'elle était une directive d'application de la directive 92/12/CEE du 25 février 1992 relative à la détention, à la circulation et au contrôle des produits soumis à accise, laquelle excluait expressément les départements d'outre-mer de son champ d'application, quand la directive 95/59/CE ne fait nullement référence à cette directive 92/12/CEE, de sorte qu'elle n'en est pas une directive d'application, la cour d'appel a violé les dispositions de la directive 95/59/CE du 27 novembre 1997.