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16/10/2019 | FRANCE | N°18-17309

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 16 octobre 2019, 18-17309


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu que la cour d'appel qui, après avoir relevé que la demande du salarié ne portait que sur le paiement de ses heures de présence durant la nuit, entre 22 heures et 6 heures, qu'il qualifiait de temps de travail effectif, a souverainement retenu que durant ces temps de présence entre la fin du service le soir et le début du service du matin, l'intéressé n'était pas à la disposition permanente de l'employeur et que ses tâches ne correspondaient pas à celles

d'un veilleur de nuit a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa déci...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu que la cour d'appel qui, après avoir relevé que la demande du salarié ne portait que sur le paiement de ses heures de présence durant la nuit, entre 22 heures et 6 heures, qu'il qualifiait de temps de travail effectif, a souverainement retenu que durant ces temps de présence entre la fin du service le soir et le début du service du matin, l'intéressé n'était pas à la disposition permanente de l'employeur et que ses tâches ne correspondaient pas à celles d'un veilleur de nuit a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize octobre deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Le Bret-Desaché, avocat aux Conseils, pour M. X...

- IL EST FAIT GRIEF A l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté M. X... de ses demandes en paiement au titre des heures de travail jusqu'à 35 heures et heures supplémentaires, de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé et au titre des repos compensatoires obligatoires

- AU MOTIF QUE selon le contrat de travail, M. X... était engagé à temps partiel à raison de 130 heures par mois avec la possibilité d'effectuer des heures complémentaires dans la limite de 1/10ème des heures contractuelles par mois. Il était prévu les horaires suivants : le soir du mardi au dimanche inclus, de 19 h à 22 h et de 18h à 22h le dimanche le matin :

les lundi, mercredi, jeudi et vendredi de 6h à 7h

les samedi et dimanche de 7h à 8 h

Le jour de repos était fixé du lundi matin 7h30 au mardi soir 19h.

Il y était également précisé que : "Ces horaires peuvent être modifiés pour tenir compte des spécificités de service. Vous serez logé sur place les jours travaillés. La partie privative mise à disposition est utilisée durant les jours travaillés. Vous vous engagez à entretenir régulièrement cette partie privative ainsi que toutes les installations mises à votre disposition pour vos besoins personnels."

La demande de M. X... tend à lui payer l'intégralité des heures de nuit entre 22h et 6h, passées à l'hôtel alors qu'il y était logé. Les parties conviennent toutes deux que le temps entre 22h et 6h n'était pas du temps d'astreinte, M. X... soutenant qu'il s'agissait de travail effectif et la SARL Across qu'il n'y avait pas de travail pendant cette période. La demande du salarié fondée sur le fait qu'il était mis à la disposition permanente de l'employeur pendant cette période de temps, que la société devait avoir un veilleur de nuit et que l'employeur n'avait pas de système d'enregistrement des horaires de travail conduit à considérer que sa demande en paiement est à la fois une demande de requalification de son contrat de travail à temps partiel en un contrat à temps plein, une demande tendant à dire qu'il exécute un travail effectif de veilleur de nuit et un litige relatif à l'existence du au nombre d'heures de travail accomplies. Dès lors que le contrat de travail mentionne les horaires de travail de M. X..., la présomption de temps plein ne s'applique pas et il lui appartient de prouver qu'il était à la disposition permanente de l'employeur. En l'occurrence, M. X... a été engagé comme réceptionniste avec la tâche annexe de préparer la mise en place du buffet des petits déjeuners en fonction des heures d'ouverture. II n'était aucunement engagé comme veilleur de nuit. Il ne saurait s'induire de la mention "vous serez logé sur place les jours travaillés" que le salarié avait l'obligation de dormir à l'hôtel, étant précisé qu'il est constant qu'il était domicilié à [...], à 45 km de son lieu de travail situé à Cognac, Par ailleurs, contrairement à ce que M. X... prétend, il est établi que le numéro de téléphone "310" indiqué aux clients pour joindre de leur chambre la réception après fermeture, effectuait un renvoi d'appel sur le numéro de téléphone personnel de la gérante, puisque de l'extérieur il leur était demandé de composer le numéro [...] correspondant au numéro de téléphone personnel de la gérante de l'hôtel, Par ailleurs, l'attestation de M. Y... qui indique qu'une nuit entre 23h et 23h30 n'ayant pas la clé avec lui pour revenir dans sa chambre, il avait appelé au téléphone M. X... ne permet pas d'établir que M. X... pouvait être joint à tout moment de la nuit par le 310. En effet, il s'induit seulement de cette attestation que M. Y... disposait du numéro de téléphone personnel de M. X..., puisqu'il l'avait joint de l'extérieur, que ce dernier avait dû lui donner puisque que l'indicatif mentionné dans la notice à destination des clients ne correspond pas à un téléphone fixe sur Cognac ou à un téléphone portable. L'attestation de Mme K..., réceptionniste dans cet hôtel depuis janvier 2010 aux termes de laquelle elle indique que "M. X... étant employé comme veilleur de nuit depuis le 16 octobre 2009, dort dans une pièce située au sous-sol de l'hôtel six jours sur sept pour faire acte de présence et répondre à d'éventuels problèmes dans l'hôtel", est générale et insuffisamment précise pour établir que M. X... avait l'obligation de dormir à l'hôtel et effectuait les tâches d'un veilleur de nuit. Par ailleurs, M. X... n'établit pas que la SARL Across contrevenait aux dispositions de l'article MS 52 de l'arrêté du 25 juin 1980 portant approbation des dispositions générales de sécurité contre les risques d'incendie et de panique dans les établissements recevant du public. Ainsi M. X... ne justifie pas effectuer les tâches d'un veilleur de nuit de sorte qu'il ne saurait prétendre à l'exécution d'un travail effectif pendant la nuit et il ne justifie pas plus avoir été à la disposition permanente de son employeur, le seul fait d'être logé la nuit sur le lieu de son emploi n'est pas suffisant pour l'établir. Ainsi sa demande en paiement des heures de nuit ne saurait prospérer sur ces fondements. En application des dispositions des articles 1315 du code civil, 6 et 9 du code de procédure civile et L. 3171-4 du code du travail, la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties. Si l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier des horaires effectivement réalisés par le salarié, il incombe à ce dernier qui demande le paiement d'heures supplémentaires de fournir préalablement des éléments de nature à étayer sa demande, suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments. Il est admis que le salarié n'étaye pas sa demande lorsqu'il produit seulement un décompte récapitulatif établi mois par mois du nombre d'heures qu'il affirme avoir réalisé et un tableau ne laissant pas apparaître pour chaque jour précis, de chaque semaine précise, les horaires de travail accomplis. M. X... produit aux débats un décompte de ses heures de travail établi jour par jour depuis le mois de décembre 2009 jusqu'à la rupture effective du contrat de travail le 4 septembre 2010 précisant les trois périodes : heures de préparation de petit déjeuner et réception, accueil à la réception et obligation de présence sur le lieu de travail pour la sécurité des clients précisant les heures de début et de fin de période du matin ainsi que celles du soir. Ce relevé horaire peut être considéré comme suffisamment précis en ce qui concerne les heures du soir et du matin correspondant aux plages horaires telles que définies au contrat. L'employeur ne justifie pas d'un décompte de la durée du travail tel que prévu au sein de la convention collective nationale des HCR. Toutefois pour ce qui est des heures entre la fin du service du soir et le début du service du matin, il est établi que M. X... n'était pas à la disposition permanente de l'employeur et que ses tâches ne correspondent pas à celle d'un veilleur de nuit, de sorte que ne pourraient être retenues que les heures complémentaires encadrant les plages horaires du soir et du matin. Aucun bulletin de salaire n'est versé aux débats. Dès lors que l'inspecteur du travail a noté dans son courrier du 17 août 2010 que M. X... effectuait des heures complémentaires, c'est qu'il a dû le constater au travers des bulletins de salaire qui lui ont été remis et l'absence de décompte subsidiaire du salarié permet de considérer qu'il en a été réglé. Il s'ensuit que M. X... sera débouté de sa demande en paiement d'heures complémentaires et heures supplémentaires ainsi que de ses demandes subséquentes en paiement au titre des repos compensatoires et d'indemnité de travail dissimulé. Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté M. X... de sa demande en paiement au titre des heures de travail jusqu'à 35 heures et heures supplémentaires et de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé. Il y sera ajouté le rejet de sa demande au titre des repos compensatoires obligatoires.

- ALORS QUE D'UNE PART constitue un travail effectif le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; que constitue au contraire une astreinte la période pendant laquelle le salarié, sans être à la disposition permanente et immédiate de l'employeur, a l'obligation de demeurer à son domicile ou à proximité afin d'être en mesure d'intervenir pour effectuer un travail au service de l'entreprise, la durée de cette intervention étant considérée comme un temps de travail effectif ; qu'en se bornant à énoncer que M. X... ne justifiait pas effectuer les tâches d'un veilleur de nuit et ne saurait prétendre à l'exécution d'un travail effectif pendant la nuit et ne justifiait pas avoir été à la disposition permanente de son employeur, sans rechercher si les permanences effectuées par le salarié dont elle a constaté qu'il disposait d'un logement de fonction et dont le contrat de travail stipulait « vous serez logé sur place les jours travaillés » ne correspondaient pas à tout le moins des périodes d'astreinte, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle au regard des articles L. 3121-1 et L. 3121-5 du code du travail ;

- ALORS QUE D'AUTRE PART en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; qu'en l'espèce, pour débouter M. X... de sa demande de rappels d'heures supplémentaires, la cour a relevé qu'il versait un décompte de ses heures de travail établi jour par jour depuis le mois de décembre 2009 jusqu'à la rupture effective du contrat de travail le 4 septembre 2010 précisant les trois périodes : heures de préparation de petit déjeuner et réception, accueil à la réception et obligation de présence sur le lieu de travail pour la sécurité des clients précisant les heures de début et de fin de période du matin ainsi que celles du soir et que ce relevé horaire pouvait être considéré comme suffisamment précis en ce qui concerne les heures du soir et du matin correspondant aux plages horaires telles que définies au contrat ; qu'elle a constaté cependant que l'employeur ne justifiait pas d'un décompte de la durée du travail tel que prévu au sein de la convention collective nationale des HCR ; que dès lors en statuant comme elle l'a fait alors qu'il résultait de ses propres constatations que le salarié avait produit un décompte précis des heures qu'il prétendait avoir réalisées, auquel l'employeur n'avait pas répondu, la Cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 3171-4 du Code du travail ;

- ALORS QUE DE TROISIEME PART le juge ne saurait, sans méconnaître son office, admettre le principe de l'existence d'heures supplémentaires et complémentaires, pour finalement débouter le salarié qui ne serait pas en mesure d'établir précisément le nombre d'heures travaillées et d'heures complémentaires ; qu'en déboutant M. X... de ses demandes motifs pris qu'une partie des heures sollicitées ne seraient pas du travail effectif, que les bulletins de salaire n'étaient pas produis et que l'inspecteur du travail avait constaté dans son courrier du 17 août 2010 que le salarié effectuait des heures complémentaires, ce qui permettrait de considérer en l'absence de décompte subsidiaire du salarié que ces heures complémentaires auraient été payés, tout en admettant que la demande du salarié était étayée par des éléments précis et que l'employeur ne produisait aucun élément justificatif, alors même qu'il avait l'obligation en vertu de la convention collective d'établir un décompte, la Cour d'appel, à qui il appartenait de déterminer le nombre d'heures supplémentaires et complémentaires effectuées par le salarié, le cas échéant en recourant à une expertise, a violé les articles L. 3171-4, L 3123-17 et L 3121-22 du code du travail, ensemble 4 du code civil ;

- ALORS QUE DE QUATRIEME PART le motif hypothétique équivaut à un défaut de motif ; qu'en déboutant le salarié de sa demande d'heures complémentaires, motifs pris que les bulletins de salaire n'étaient pas produits et que dès lors que l'inspecteur du travail avait noté dans son courrier du 17 août 2010 que M. X... effectuait des heures complémentaires, c'est qu'il avait dû le constater au travers des bulletins de salaire qui lui ont été remis et que l'absence de décompte subsidiaire du salarié permet de considérer qu'il en a été réglé, la Cour d'appel a statué par des motifs hypothétiques en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS QU'ENFIN en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation des chefs de dispositif relatifs aux heures supplémentaires et heures complémentaires, entraînera, par voie de conséquence, la cassation des dispositions de l'arrêt rejetant la demande en paiement d'une indemnité pour travail dissimulé.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18-17309
Date de la décision : 16/10/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 19 janvier 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 16 oct. 2019, pourvoi n°18-17309


Composition du Tribunal
Président : M. Schamber (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Ghestin, SCP Le Bret-Desaché

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.17309
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