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10/10/2019 | FRANCE | N°18-20178

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 10 octobre 2019, 18-20178


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la société Travaux du Midi Var du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le ministre chargé de la sécurité sociale ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'à la suite d'un contrôle de la société Campenon Bernard Var, aux droits de laquelle vient la société Travaux du Midi Var (la société), portant sur les années 2012 et 2013, l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur (l'URSSAF) lui a notifié une lettre d'observations concernant huit chefs de redressement suivie, l

e 2 juin 2015, d'une mise en demeure ; que la société a saisi d'un recours une jur...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la société Travaux du Midi Var du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le ministre chargé de la sécurité sociale ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'à la suite d'un contrôle de la société Campenon Bernard Var, aux droits de laquelle vient la société Travaux du Midi Var (la société), portant sur les années 2012 et 2013, l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur (l'URSSAF) lui a notifié une lettre d'observations concernant huit chefs de redressement suivie, le 2 juin 2015, d'une mise en demeure ; que la société a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;

Sur le second moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le second moyen annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu les articles L. 242-1 du code de la sécurité sociale et 80 duodecies du code général des impôts, dans leur rédaction applicable à la date d'exigibilité des cotisations litigieuses ;

Attendu que pour valider le redressement relatif aux cotisations dues au titre de la rupture conventionnelle du contrat de travail de M. T..., l'arrêt relève que ce salarié a quitté la société le 2 juin 2012 alors qu'il était âgé de 60 ans révolus, que l'âge légal de sa retraite se situait quelques mois plus tard dès lors qu'il était né [...] , et que la société n'est pas en mesure de justifier que ce salarié n'a pas pris sa retraite mais poursuivi une activité professionnelle, alors qu'elle avait entendu faire bénéficier l'indemnité de 51 000 euros nette qu'elle lui avait versée du régime social de l'article 80 duodecies du code général des impôts ;

Qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser la nature des sommes litigieuses au regard de la règle d'assiette, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre branche du premier moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'elle a déclaré l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur fondée en son appel et dit qu'est justifiée la réintégration dans l'assiette des cotisations de l'indemnité de rupture conventionnelle de M. T..., l'arrêt rendu le 30 mai 2018, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales Provence-Alpes-Côte d'Azur aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales Provence-Alpes-Côte d'Azur et la condamne à payer à la société Travaux du Midi Var la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix octobre deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour la société Travaux du Midi Var

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit justifiée la réintégration dans l'assiette des cotisations sociales dues par la SAS Campenon Bernard Var de l'indemnité de rupture conventionnelle versée à M. T... ; condamné la SAS Campenon Bernard Var à verser à l'urssaf PACA la somme de 177 900 € au titre de la mise en demeure contrôle n° 61237326, outre celle de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE "L'inspecteur en charge du contrôle a constaté que W... T... a quitté la SAS Campenon Bernard Var le 2 juin 2012 alors qu'il était âgé de 60 ans révolus, que l'âge légal de sa retraite se situait quelques mois plus tard dès lors qu'il était né [...] et que la SAS Campenon Bernard Var n'était pas en mesure de justifier que ce salarié n'avait pas pris sa retraite mais poursuivi une activité professionnelle, alors qu'elle avait entendu faire bénéficier l'indemnité de 51 000 euros nette qu'elle lui avait versée du régime social de l'article 80 duodecies du code général des impôts ;

QUE le Tribunal a fait droit à la demande d'exonération de la SAS Campenon Bernard Var en observant qu'il appartenait à l'Union de Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales PACA de rapporter la preuve que le salarié dont s'agit n'avait pas pris sa retraite ;

QUE force est d'observer toutefois que le Tribunal des affaires de sécurité sociale a ainsi renversé la charge de la preuve en faisant peser sur l'organisme social le soin de rapporter une preuve qui ne lui incombait pas, alors même que c'est l'employeur qui entend bénéficier du régime dérogatoire de l'article 80 duodecies de rapporter la preuve qu'il ouvre droit à l'allègement du régime de ses cotisations et afin de ne pas voir les sommes versées au salarié soumises à cotisations et contributions dès le premier euro qui constitue le régime de droit commun à l'égard du salarié en droit de bénéficier d'une pension de retraite d'un régime légalement obligatoire à la date de la rupture effective du contrat de travail ;

QUE la SAS Campenon Bernard Var n'ayant pas été en mesure de présenter du chef de W... T..., salarié âgé de plus de 55 ans, ainsi qu'il lui incombait, un document relatif à sa situation au regard de ses droits à la retraite de base, l'indemnité versée par elle à ce dernier ne pouvait être exonérée de cotisation, les dispositions de l'article L.114-9 du code de la sécurité sociale ne pouvant suppléer la carence dont a fait preuve la SAS Campenon Bernard Var dans l'administration de la preuve qui lui incombait ;

QUE c'est dès lors à bon droit que les inspecteurs du recouvrement ont réintégré dans l'assiette des cotisations et contributions sociales, l'indemnité de rupture conventionnelle versée par la SAS Campenon Bernard Var à W... T... ;

QUE le jugement sera réformé sur ce point et il sera fait droit à la demande de l'Union de Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales PACA (
)" (arrêt p.4 alinéas 1 à 6) ;

1°) ALORS QU'aux termes de l'article L.242-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige, est exclue de l'assiette des cotisations sociales, dans la limite d'un montant fixé à trois fois la valeur annuelle du PASS, la part des indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail qui n'est pas imposable en application de l'article 80 duodecies du code général des impôts ; que selon ce dernier texte, ne constitue pas une rémunération imposable la fraction ainsi plafonnée des indemnités prévues à l'article L. 1237-13 du code du travail versées à l'occasion de la rupture conventionnelle du contrat de travail d'un salarié "lorsqu'il n'est pas en droit de bénéficier d'une pension de retraite d'un régime légalement obligatoire" ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué que le redressement contesté a été opéré au titre de la rupture conventionnelle du contrat de travail de M. W... T... qui "
a quitté la SAS Campenon Bernard Var le 2 juin 2012 alors qu'il était âgé de 60 ans révolus, que l'âge légal de sa retraite se situait quelques mois plus tard dès lors qu'il était né [...] " ; qu'en validant cependant le redressement opéré de ce chef quand il ressortait de ses propres constatations que le salarié bénéficiaire de l'indemnité de rupture conventionnelle n'était pas en droit de bénéficier d'une pension de retraite d'un régime légalement obligatoire, de sorte qu'étaient remplies les conditions légales de l'exonération, la cour d'appel a violé les articles L. 242-1 et L.161-17-2 du code de la sécurité sociale, L.80 duodecies du code général des impôts ;

2°) ALORS en outre QUE le juge tranche le litige conformément aux règles de droit applicables ; qu'en subordonnant l'exonération sollicitée à la démonstration, par l'employeur, de ce "que ce salarié n'avait pas pris sa retraite mais poursuivi une activité professionnelle (
)" postérieurement à la rupture, quand l'article 80 duodecies du code général des impôts permet cette exonération lorsque le salarié "
n'est pas en droit de bénéficier d'une pension de retraite d'un régime légalement obligatoire", et en substituant ainsi la preuve d'une situation de fait distincte de celle, prévue par la loi, d'une situation de droit qui ressortait de ses propres constatations, la cour d'appel a violé derechef les textes susvisés, ensemble l'article 12 du code de procédure civile ;

3°) ALORS enfin QUE le juge tranche le litige conformément aux règles de droit applicables ; que les circulaires administratives sont dépourvues de portée normative ; qu'en subordonnant l'exonération de l'indemnité de rupture conventionnelle à la preuve par l'employeur "que ce salarié n'avait pas pris sa retraite mais poursuivi une activité professionnelle (
)" et en validant le redressement de ce chef, motif pris que l'employeur "n'avait pas été en mesure de présenter du chef de W... T..., salarié âgé de plus de 55 ans, ainsi qu'il lui incombait, un document relatif à sa situation au regard de ses droits à la retraite de base (
)" la cour d'appel, qui a exigé de l'employeur une preuve prévue non par la loi mais par des circulaires et instructions administratives dépourvues de portée normative invoquées par l'urssaf – circ. DSS/DGPD/SD5B, n° 2009-210, 10 juillet 2009, circ. DSS/SD5B/2011/145 du 14 avril 2011, instruction ACOSS n° 2014-0000005 du 6 mai 2014 –, a violé l'article 12 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit justifiée la réintégration dans l'assiette des cotisations sociales dues par la SAS Campenon Bernard Var des indemnités des indemnités intitulées "voyages détente ou périodiques" servies à certains salariés ; condamné la SAS Campenon Bernard Var à verser à l'urssaf PACA la somme de 177 900 € au titre de la mise en demeure contrôle n° 61237326, outre celle de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE "L'inspecteur en charge du contrôle a constaté que certains salariés cumulent le bénéfice des indemnités de grands déplacements au taux de 52,14 euros en 2012 et de 53 euros en 2013 par jour de grands déplacements, et des indemnités intitulées « voyages détentes ou périodiques » accompagnées de sommes versées forfaitairement tous les vendredis de la période concernée qui n'ont pas été soumises aux cotisations et contributions de sécurité sociale ;

QUE la SAS Campenon Bernard Var conteste ce redressement en se fondant sur les dispositions de l'arrêté du 26 mai 1975 lequel n'impose pas la fourniture de justificatif et la circulaire d'application ACOSS du 13 juin 1988 ;

QUE la Cour observe que l'arrêté du 26 mai 1975 a été abrogé par les dispositions de l'arrêté du 20 décembre 2002 relatif aux frais professionnels déductibles pour le calcul des cotisations de sécurité sociale publié au JORF du 27 décembre 2002, ce qui prive de toute effectivité la prétention développée par l'intimée selon laquelle elle aurait respecté le circulaire d'application de 1988 ;

QU'aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 25 juillet 2005 modifiant l'article 5 de l'arrêté du 20 décembre 2002, le travailleur salarié ou assimilé est présumé empêché de regagner sa résidence lorsque la distance séparant le lieu de résidence du lieu de déplacement est au moins égale à 50 kilomètres (trajet aller) et que les transports en commun ne permettent pas de parcourir cette distance dans un temps inférieur à une heure trente (trajet aller) ;

QUE les dépenses engagées doivent être rendues nécessaires par l'accomplissement de la mission imposée par l'employeur et ne pas résulter du choix personnel notamment s'agissant de l'éloignement pouvant exister entre la résidence habituelle et le lieu de travail ;

QUE le grand déplacement résulte de l'envoi du salarié en mission dans un lieu différent du lieu habituel de travail et éloigné de la résidence du salarié de telle sorte qu'il ne peut regagner celle-ci chaque soir ;

QUE ces allocations sont réputées être utilisées conformément à leur objet si elles ne dépassent pas les limites fixées par arrêté et que l'employeur justifie que le salarié ne peut regagner chaque jour sa résidence et que de ce fait il engage des frais de double résidence ;

QU'au-delà de ces limites, il appartient à l'employeur de justifier de l'utilisation effective des indemnités conformément à leur objet ;

QU'en l'espèce, la SAS Campenon Bernard Var n'a pas été en mesure de justifier que l'intitulé « voyage de détente ou périodique » correspondait dans les faits aux retours professionnels des salariés à leur résidence déclarée, ni que les salariés qui étaient indemnisés au titre d'un grand déplacement aient effectivement exposé des frais supplémentaires de transport repas ou hébergement en l'absence des justifications de la preuve des frais engagés que sollicitait l'organisme de recouvrement ;

QUE le redressement sera dès lors validé et le jugement sera réformé de ce chef (
)" (arrêt p.6 in fine, p.7) ;

ALORS QUE lorsqu'un salarié se trouve en situation de grand déplacement au sens de l'article 5 de l'arrêté du 20 décembre 2002 modifié, les indemnités de transport qu'il reçoit à l'occasion des voyages de début et de fin de chantier et celles servies en application des dispositions de la convention collective au titre des "voyages de détente" périodiques lui permettant de regagner son domicile en fin de semaine, qui constituent des frais professionnels se rapportant directement à la situation de grand déplacement, sont présumées utilisées conformément à leur objet sans qu'il soit besoin de fournir un justificatif ; que la prise en charge de ces frais par l'employeur doit donc être exonérée de cotisations dès lors qu'il est démontré que le salarié bénéficiaire est en situation de grand déplacement, au même titre que les indemnités de nourriture et de logement ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L.242-1 et L. 243-6-2 du code de la sécurité sociale, 5-1° de l'arrêté ministériel du 20 décembre 2002 modifié, tel qu'interprété par l'article 50 de la circulaire ministérielle DSS/SDFSS/5B n° 2005/389 du 19 août 2005.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 18-20178
Date de la décision : 10/10/2019
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 30 mai 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 10 oct. 2019, pourvoi n°18-20178


Composition du Tribunal
Président : M. Prétot (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.20178
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