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26/09/2019 | FRANCE | N°18-21402;18-23165

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 26 septembre 2019, 18-21402 et suivant


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° K 18-21.402 et B 18-23.165 ;

Donne acte à la société civile professionnelle V... Z..., H... S..., J... K..., O... Q..., F... G..., C... N... et Y... B... du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la Caisse de crédit mutuel de Dijon Darcy ;

Donne acte à la société Cincinnatus assurance du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la Caisse de crédit mutuel de Dijon Darcy ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué,

que M. P..., désireux de réaliser un investissement immobilier dans un but de défiscalis...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° K 18-21.402 et B 18-23.165 ;

Donne acte à la société civile professionnelle V... Z..., H... S..., J... K..., O... Q..., F... G..., C... N... et Y... B... du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la Caisse de crédit mutuel de Dijon Darcy ;

Donne acte à la société Cincinnatus assurance du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la Caisse de crédit mutuel de Dijon Darcy ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. P..., désireux de réaliser un investissement immobilier dans un but de défiscalisation, est entré en relation avec la société Cincinnatus assurance (la société Cincinnatus), conseiller en gestion de patrimoine, qui, au terme d'une étude personnalisée, lui a conseillé d'investir dans un programme immobilier Château d'Abondant, développé sous l'égide de la société Financière Barbatre (le promoteur-constructeur), et présenté comme éligible au dispositif de défiscalisation institué par la loi n° 62-903 du 4 août 1962 sur les monuments historiques ; que, par acte du 1er mars 2003, M. P... et son épouse ont constitué la société civile immobilière Aviva MH (l'acquéreur) ; que, suivant acte du 10 décembre 2003, l'acquéreur a donné procuration à « tout clerc » de la société civile professionnelle A... I..., L... U..., V... Z..., H... S..., J... K..., O... Q..., F... G... et C... N..., devenue la SCP V... Z..., H... S..., J... K..., O... Q..., F... G..., C... N... et Y... B... (la SCP notariale), aux fins d'acquérir et emprunter pour son compte une somme auprès d'une banque, en vue de financer l'achat d'un lot dans l'ensemble immobilier ainsi que les travaux de réhabilitation ; que, le 27 décembre 2003, la SCP notariale a reçu l'acte authentique d'acquisition ; que le promoteur-vendeur et ses filiales chargées de la réalisation des travaux et de l'exploitation de la future résidence hôtelière ont été placés en redressement judiciaire, puis en liquidation judiciaire avant la réalisation des travaux de réhabilitation ; que, soutenant que le lot acquis avait perdu toute valeur, M. P... et l'acquéreur ont assigné la société Cincinnatus et la SCP notariale en responsabilité et indemnisation ;

Sur le moyen unique du pourvoi n° B 18-23.165 :

Attendu que la société Cincinnatus fait grief à l'arrêt de la condamner, in solidum avec la SCP notariale, à payer à l'acquéreur la somme de 320 449 euros, alors, selon le moyen :

1°/ que l'obligation de renseignement, de conseil et de mise en garde incombant au conseil en gestion de patrimoine ne s'étend pas aux aléas juridiques ou financiers susceptibles de survenir pendant le cours normal de l'investissement qu'il a proposé à son client, lorsque ces aléas ne présentent aucune spécificité et sont de la connaissance de tous ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que la société Cincinnatus ne pouvait s'exonérer de son défaut d'information sur les risques et aléas du projet par l'affirmation péremptoire selon laquelle l'aléa est inhérent à un tel programme d'investissement et connu de tous, tandis que cet aléa avait été exclu « de sa proposition totalement sécurisée » ; qu'en se prononçant ainsi, tandis que la société Cincinnatus n'était pas tenue de mettre en garde M. P... sur le fait que toute opération d'investissement immobilier aux fins de défiscalisation est susceptible d'échouer en cas de défaillance ultérieure de l'un des participants au projet de construction, risque inhérent à toute opération immobilière et de la connaissance de tous, et qui ne présentait aucune spécificité au regard du placement proposé, la cour d'appel a violé les articles 1147 du code civil, devenu l'article 1231 du même code en ce qui concerne M. P..., et 1382 du code civil, devenu l'article 1240 du même code en ce qui concerne la SCI Aviva MH ;

2°/ que l'obligation de renseignement, de conseil et de mise en garde incombant au conseil en gestion de patrimoine ne s'étend pas aux aléas juridiques ou financiers susceptibles de survenir pendant le cours de l'investissement qu'il a proposé à son client, dès lors qu'à la date à laquelle il a conseillé ce placement, il ne disposait d'aucun élément de nature à l'alerter sur le risque d'un échec prévisible de l'opération d'investissement ; qu'en l'espèce, la société Cincinnatus faisait valoir que, lorsque le placement litigieux avait été proposé à M. P... en 2003, elle avait préalablement procédé à des investigations sur la santé financière des sociétés du groupe Barbatre et sur l'état d'avancement du projet, sans disposer de la moindre information permettant de douter du succès de l'opération projetée, qui répondait notamment à l'ensemble des critères permettant de bénéficier des dispositions défiscalisantes de la loi Malraux ; que la cour d'appel a néanmoins retenu que la société Cincinnatus avait manqué à son devoir de conseil et de mise en garde envers M. P..., dans la mesure où la commercialisation du programme à plus de 70 % ne suffisait pas en soi à garantir le succès de l'opération, qu'une proposition de livraison du bien en janvier 2005 tandis qu'il n'était pas contesté que le permis de construire n'était pas encore délivré, était irréaliste, et que la remise de la documentation commerciale afférente au programme et aux statuts de l'ASL ne pouvait valoir fourniture d'un conseil adapté compte tenu de la complexité des mécanismes proposés ; qu'en se prononçant ainsi par des motifs impropres à caractériser en quoi la société Cincinnatus, qui n'est pas un professionnel de la construction immobilière, avait pu identifier le moindre élément révélant un risque d'échec de l'opération à la date de la décision d'investir de M. P..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 du code civil, devenu l'article 1231 du même code en ce qui concerne M. P..., et 1382 du code civil, devenu l'article 1240 du même code en ce qui concerne la SCI Aviva MH ;

3°/ que l'obligation de renseignement, de conseil et de mise en garde incombant au conseil en gestion de patrimoine ne s'étend pas aux aléas juridiques ou financiers susceptibles de survenir pendant le cours de l'investissement qu'il a proposé à son client, dès lors qu'à la date à laquelle il a conseillé ce placement, il ne disposait d'aucun élément de nature à l'alerter sur le risque d'un échec prévisible de l'opération d'investissement ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté, par motifs propres comme adoptés, que la faisabilité de l'opération n'avait pas été mise en péril avant le mois de janvier 2004, date à laquelle M. P... avait déchargé la société Cincinnatus de toutes ses obligations ; qu'en décidant néanmoins que la société Cincinnatus avait manqué à son devoir de conseil envers M. P... pour ne pas l'avoir alerté sur les risques d'échec de l'investissement immobilier proposé, après avoir constaté que de tels risques n'étaient pas caractérisés à la date à laquelle M. P... avait décidé d'investir ni même à la date à laquelle il avait déchargé la société Cincinnatus de son mandat, la cour d'appel a violé les articles 1147 du code civil, devenu l'article 1231 du même code en ce qui concerne M. P..., et 1382 du code civil, devenu l'article 1240 du même code en ce qui concerne la SCI Aviva MH ;

Mais attendu qu'après avoir constaté que la présentation de l'opération conseillée se conclut ainsi : « votre montage sera totalement sécurisé » et que la société Cincinnatus n'a émis aucune réserve sur l'existence d'un éventuel aléa, l'arrêt retient que la présentation ne comporte aucune explication sur l'opération de restauration immobilière, qu'il n'existe aucune mention relative aux obligations de l'investisseur, telle que celle tenant à la réalisation des travaux, aléa qui conditionnait pourtant la défiscalisation recherchée, et que ne figure aucune indication sur les risques encourus en cas de retard dans le démarrage des travaux ou d'inexécution de ceux-ci, alors qu'une date de fin de chantier est expressément indiquée, que ces risques n'étaient pas de la "connaissance de tous" et que cette information lui était due, même s'il pouvait être admis que la société Cincinnatus n'avait pas de raison de douter de la fiabilité des entreprises du promoteur-constructeur ; que la cour d'appel a ainsi caractérisé les manquements de la société Cincinnatus à son obligation de conseil et d'information à l'égard de l'acquéreur sur l'aléa essentiel de l'opération de défiscalisation ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le moyen unique du pourvoi n° K 18-21.402 :

Vu l'article 1382, devenu 1240 du code civil ;

Attendu que, pour condamner la SCP notariale, in solidum avec la société Cincinnatus, à payer à l'acquéreur la somme de 320 449 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de ses préjudices, l'arrêt retient que la SCP notariale aurait dû attirer l'attention de l'acquéreur sur l'aléa essentiel de cette opération que représentait l'absence de garantie de bonne fin des travaux, dont le succès était économiquement subordonné à la réhabilitation complète de l'immeuble ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le notaire, qui n'est pas soumis à une obligation de conseil et de mise en garde concernant la solvabilité des parties ou l'opportunité économique d'une opération en l'absence d'éléments d'appréciation qu'il n'a pas à rechercher, n'était pas tenu d'informer l'acquéreur du risque d'échec du programme immobilier, qu'il ne pouvait suspecter au jour de la signature de la vente, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et attendu qu'en application des articles L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire et 1015 du code de procédure civile, la Cour de cassation est en mesure de statuer au fond, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la SCP V... Z..., H... S..., J... K..., O... Q..., F... G..., C... N... et Y... B..., in solidum avec la société Cincinnatus, à payer à la SCI Aviva MH la somme de 320 449 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice, l'arrêt n° RG : 16/05750 rendu le 15 juin 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Rejette les demandes formées par la SCI Aviva MH contre la SCP V... Z..., H... S..., J... K..., O... Q..., F... G..., C... N... et Y... B... ;

Condamne la société Cincinnatus assurance aux dépens comprenant ceux exposés devant les juges du fond ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six septembre deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyen produit au pourvoi n° K 18-12.402 par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour la société V... Z..., H... S..., J... K..., O... Q..., C... N..., F... G... et Y... B...

Il est fait grief à l'arrêt d'AVOIR condamné la SCP X..., S..., K..., Q...- G..., N... et B..., in solidum avec la société Cincinnatus à payer à la SCI Aviva MH la somme de 320 449 euros en réparation de son préjudice ;

AUX MOTIFS PROPRES QU'au titre du devoir de conseil dont il est débiteur, le notaire doit " éclairer les parties et s'assurer de la validité et de l'efficacité des actes rédigés par lui " ; qu'il ne peut s'exonérer de cette obligation au motif que son bénéficiaire aurait été assisté par un conseil en gestion de patrimoine ; qu'il est donc tenu d'informer et d'éclairer les parties sur la portée et les effets ainsi que sur les risques de l'acte auquel il prête son concours et le cas échéant de le leur déconseiller ; que cette obligation doit prendre en considération les mobiles des parties, extérieurs à l'acte, lorsque le notaire en a eu précisément connaissance ; Considérant que la promesse de vente stipulait que « le bénéficiaire accepte la présente promesse de vente en tant que promesse, se réservant la faculté d'en demander la réalisation selon qu'il avisera » ; que la SCI Aviva MH n'était donc nullement contrainte d'acquérir le bien étant précisé, en outre, qu'aucune indemnité d'immobilisation n'avait été fixée ; que la Scp notariale ne peut dès lors utilement prétendre que la bénéficiaire de la promesse était tenue par cet acte d'acquérir ou que la convention était parfaite et qu'il « n'y avait plus de place pour l'exercice du devoir de conseil » ; que Maître S..., membre de la SCP notariale intimée, a établi l'acte de vente par la Sarl Saint Victor de l'ensemble immobilier à la Sarl Financière Barbatre le 26 décembre 2002, puis, le même jour, le règlement de copropriété ; qu'elle a reçu, le 27 décembre 2003, l'acte de vente du lot au profit de la SCI Aviva MH ; que Maître S... a encore, le 10 décembre 2003, reçu la procuration de M. P... agissant en qualité d'associé, de caution et de gérant de la SCI Aviva MH, au nom de celle-ci, au terme de laquelle il a instauré pour mandataire, tout clerc de l'étude à l'effet d'acquérir le lot n°5 dépendant du château d'Abondant et d' emprunter la somme de 564 400 euros et en son nom personnel et pour le compte de la SCI Aviva MH de se rendre et se porter caution et répondant solidaire ; que l'acte de prêt a été régularisé par ladite SCP ; qu'ainsi, la SCP notariale a procédé à tous les actes permettant la réalisation par la société Financière Barbatre de l'opération et à ceux permettant à la SCI Aviva MH constituée par M. P... d'acquérir le lot promis y compris d'emprunter les fonds nécessaires à l'opération ; qu'elle a donc eu à connaître de tous les aspects de l'opération immobilière dite du Château d'Abondant et de l'acquisition par la SCI susvisée de son lot ; qu'il ne peut lui être fait grief de ne pas avoir conseillé à la SCI Aviva MH d'acquérir les biens sous le régime de la vente en l'état futur d'achèvement ou de la vente d'immeubles à rénover qui ne lui aurait pas permis de bénéficier des avantages fiscaux ; que si le notaire n'est pas tenu de procéder à des recherches particulières sur l'opportunité économique de l'opération envisagée et sur la solvabilité des parties, en l'absence d'éléments d'appréciation qu'il n'a pas à rechercher, il doit, à tout le moins, informer les parties des risques dont il a connaissance ; qu'ayant connaissance de tous les aspects de l'opération immobilière, la SCP savait qu'il s'agissait d'une opération particulière imposant, notamment, aux acquéreurs de réaliser les travaux de réhabilitation pour pouvoir profiter de la défiscalisation ; qu'elle savait également que l'opération correspondait à un montage indivisible ; qu'elle ne peut donc utilement prétendre que la SCI Aviva MH était dans la même situation que celle de n'importe quel propriétaire désireux d'entreprendre des travaux dans le bien qu'il acquérait ;
Considérant que, concernant la SCI Aviva MH, elle savait que la somme empruntée était destinée à hauteur d'environ 80 % au financement des travaux ; qu'elle n'ignorait pas l'absence de toute garantie de la bonne exécution des travaux de réhabilitation ; que le succès de l'opération supposait que l'ensemble de l'immeuble soit effectivement réhabilité, ce qui nécessitait des apports de fonds et la vente future de lots dans une mesure suffisante ; que le notaire se devait donc d'attirer l'attention de M. P... et de la SCI Aviva MH sur l'aléa essentiel de cet investissement immobilier de défiscalisation que représentait l'absence de toute garantie de bonne fin desdits travaux, ce que la SCP X..., S..., K..., Q..., G..., N... et B... n'établit pas avoir fait ; que dans ces conditions elle a manqué à son devoir de conseil et commis une faute susceptible d'engager sa responsabilité délictuelle ;

ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE le notaire est tenu d'un devoir de conseil ; qu'à ce titre, il doit " éclairer les parties et s'assurer de la validité et de l'efficacité des actes rédigés par lui " ; que M. P... et la SCI Aviva MH soutiennent qu'il appartenait an notaire, qui était en charge de la totalité de l'opération de vente des lots du Château d'Abondant, de prévoir, compte tenu de la spécificité de cette opération à but de défiscalisation, que les acomptes sur travaux ne pourraient être payés qu'après vérification du bon accomplissement de chaque étape du processus de réhabilitation de l'ensemble immobilier ou, à tout le moins, d'informer les investisseurs du risque qu'ils prenaient en l'absence de garantie de la bonne utilisation des fonds ; qu'en l'espèce, il est établi que la SCP V... Z...-H... S...-J... K...-O... Q...-F... G...-C... N... etamp; Y... B..., notaires associés, a eu à connaître de tous les aspects de l'opération immobilière dite du Château d'Abondant puisque Maitre S... a établi les actes de vente de l'ensemble immobilier (de la SARL Saint Victor a la SARL Financière Barbatre) du 26 décembre 2002, et du lot n°5 de la copropriété (de la SARL Barbatre a la SCI Aviva MIH) du 27 décembre 2003, après avoir établi le règlement de copropriété, ainsi que le prêt consenti à la SCI Aviva MH par la Caisse de Crédit mutuel de Dijon Darcy, toutes les parties auxdits actes ayant donné procuration à des clercs de l'étude notariale située à Nice ; que les termes de la procuration notariée donnée par M. P... en qualité d'associé, de gérant et de caution de la SCI Aviva MH a " tout clerc de la SCP " pour acquérir et emprunter confirment que le notaire avait une connaissance parfaite de l'opération ; que le notaire ne saurait utilement soutenir qu'il n'y avait plus place à son devoir de conseil des lors que la convention était déjà parfaite au moment où il est intervenu, la promesse de vente valant vente, alors qu'il ressort clairement de l'acte du 5 décembre 2003 que les parties ont expressément prévu que " le transfert de propriété de l'immeuble aura lieu le jour de la signature de l'acte authentique qui constatera la réalisation de la vente " ; que l'acte mentionnant ensuite le " prix de la vente éventuelle" et ont donc fait de la réitération par acte notarié un élément constitutif de leur consentement ; que si, compte tenu de l'intervention du notaire, ni dans l'acte de vente du lot de copropriété a la SC1 Aviva MH ni dans l'acte de prêt une clause relative à l'exécution des travaux ne pouvait trouver place, il lui appartenait, s' agissant d'une opération particulière imposant des obligations aux acquéreurs quant à la réalisation des travaux de réhabilitation pour pouvoir profiter de la défiscalisation, d'alerter ceux-ci, comme la SCI Aviva MH, de l'absence de garantie quant à la bonne exécution des travaux de réhabilitation en temps utile, la fin de chantier étant fixée au 1er janvier 2005, l'initiative des travaux appartenant aux copropriétaires réunis en Association syndicale libre ; qu'en revanche, les demandeurs ne peuvent, comme ils le font pour les autres parties à l'instance, faire grief au notaire, rédacteur des actes, de ne pas avoir vérifié la solidité des entreprises du Groupe Barbatre et de ne pas avoir assuré le suivi du chantier, étant précisé que le règlement des travaux a été réalisé en dehors de la comptabilité du notaire ; qu'en omettant d'informer la SCI Aviva MH que l'acquisition conseillée ne lui garantissait pas la bonne fin de l'opération dont le succès était économiquement subordonnée à la commercialisation et à la réhabilitation complète de l'immeuble, ce qui constituait un aléa essentiel de cet investissement de défiscalisation, le notaire a manqué à son devoir de conseil ;

1°) ALORS QU'un notaire n'a pas à attirer l'attention de ses clients sur les risques inhérents à l'application d'un dispositif légal, dès lors que les conditions en sont réunies ; qu'en relevant pour imputer une faute à la SCP Z...-S..., que la « somme empruntée était destinée à hauteur d'environ 80% au financement des travaux » et que, devant « informer les parties des risques dont [elle] a[vait] connaissance », la SCP Z...-S... aurait dû « attirer l'attention de M. P... et de la SCI MH sur l'aléa essentiel de cet investissement immobilier de défiscalisation que représentait l'absence de toute garantie de bonne fin desdits travaux » (arrêt page 18, antépénultième, pénultième et dernier al. se poursuivant page 19) quand le dispositif de la loi Malraux prévoyait précisément une déduction fiscale, souhaitée par la SCI Aviva MH et M. P..., à la mesure des travaux envisagés sans que le législateur ait prévu de garantie de bonne fin de sorte qu'en l'absence de risque avéré d'impécuniosité du constructeur, le notaire n'avait pas à délivrer de conseil particulier sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu 1240, du code civil ;

2°) ALORS QUE l'obligation de conseil et de mise en garde incombant au notaire ne porte pas sur la solvabilité des parties ou l'opportunité économique d'une opération en l'absence d'éléments, qu'il n'a pas à rechercher, lui faisant apparaître un déséquilibre ou un danger manifeste ; qu'en reprochant à la SCP Z...-S... d'avoir omis d'informer les acquéreurs des risques dont il avait connaissance (arrêt page 18, al. 10) dès lors que « que le succès de l'opération supposait que l'ensemble de l'immeuble soit effectivement réhabilité, ce qui nécessitait des apports de fonds et la vente future des lots dans une mesure suffisante » (arrêt page 19, al. 1er ), sans relever d'éléments révélateurs d'un risque économique manifeste au jour de la vente quand l'officier ministériel n'avait pas à délivrer un conseil particulier sur l'opportunité économique de l'opération, en l'absence de tels éléments, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382, devenu 1240 du code civil ;

3°) ALORS QU'en toute hypothèse, le devoir de conseil du notaire ne s'exerce que dans les limites du mandat qui lui est confié pour la réalisation de l'opération à laquelle il prête son concours ; qu'en imputant à faute à la SCP Z...-S..., qui savait que 80% des sommes empruntées par les acquéreurs devait servir à la réalisation des travaux, de ne pas les avoir alertés sur « l'absence de toute garantie de bonne fin desdits travaux » (arrêt, page 18, dernier al. se poursuivant page 19), quand, ayant instrumenté la seule vente du terrain, elle n'avait pas à conseiller les parties sur les stipulations du marché de travaux qu'elle n'était pas chargée d'établir, la cour d'appel a derechef violé l'article 1382, devenu 1240, du code civil. Moyen produit au pourvoi n° B 18-23.165 par la de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de la société Cincinnatus assurance

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Cincinnatus, in solidum avec la SCP de notaires X... – S... – K... – Q... – N... – G... – B... à payer à la SCI Aviva MH la somme de 320.449 € ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE les objectifs poursuivis par M. P... avaient été portés à la connaissance de la société Cincinnatus puisqu'ils sont mentionnés sur l'étude personnalisée réalisée par cette société ; que M. P... souhaitait optimiser sa fiscalité au titre de l'impôt sur le revenu et de l'impôt sur la fortune, de la transmission de patrimoine, disposer de revenus ou de capitaux à court terme en cas de besoin, et préparer sa retraite dans une stratégie à long terme ; que l'opération qualifiée par la société Cincinnatus de "montage totalement sécurisé" devait assurer à M. P..., conformément aux objectifs poursuivis par ce dernier, la constitution d'un patrimoine immobilier assorti d'importants avantages fiscaux, en toute sécurité, lui fournissant en outre un complément pour sa retraite, prévue à échéance de 9 ans ; que la faisabilité et la pérennité de l'investissement proposé à M. P... reposaient sur la réhabilitation du lot acquis et de l'ensemble immobilier dont il fait partie, inscrit à l'inventaire supplémentaire des Monuments historiques et sur la mise en location de cet ensemble, dans le cadre de l'exploitation d'une résidence hôtelière ; que lorsque le conseil en défiscalisation immobilière oriente les choix de l'investisseur, comme cela a été le cas en l'espèce, puisque les propositions d'investissement soumises à M. P... relevaient du même type d'opérations dépendant toutes du même promoteur et du même groupe financier, il lui incombe de recommander un investissement adapté à ses objectifs et de l'informer sur les caractéristiques essentielles, y compris les moins favorables, du placement proposé ainsi que sur les risques qui lui sont associés et peuvent être le corollaire des avantages annoncés ; qu'ainsi il doit l'avertir des aléas non seulement fiscaux mais encore constructifs qui sont de nature à en compromettre la réalisation ou les résultats ; qu'il incombe à la société Cincinnatus de démontrer qu'elle a rempli son devoir d'information et de conseil envers M. P... ; que c'est à juste titre que, par motifs adoptés, le jugement déféré relève que si le bilan effectué le 3 janvier 2003, comporte un volet complet quant aux avantages fiscaux et à l'engagement financier de l'offre faite à M. P... il présente de manière générale l'investissement immobilier commercialisé par la société Vestalis, sans plus de renseignements sur les sociétés intervenantes que leur dénomination sur la brochure de présentation du programme et se conclut par la mention : « votre montage sera totalement sécurisé ... » ; que la cour ajoute qu'ayant l'ambition de proposer à son client un montage revêtant ce qualificatif, la société Cincinnatus devait s'imposer une rigueur et une vigilance toute particulière sur les tenants et les aboutissants de celui-ci ; qu'il ressort de l'étude réalisée le 5 décembre 2002 réactualisée le 3 janvier 2003, que l'ensemble de la stratégie proposée à M. P... va lui permettre "en toute sécurité et sans aucun souci de gestion, de répondre à l'ensemble de ses objectifs patrimoniaux en optimisant toutes les niches fiscales actuelles et qu'il est ajouté que ses revenus complémentaires à la retraite seront très élevés et non fiscalisés" ; que la présentation de l'investissement proposé à M. P... dans l'étude du 2 décembre 2003, ne comporte aucune explication sur l'opération de restauration immobilière ; que le projet mentionne en conclusion que l'investisseur va "disposer d'une sécurité totale sur son investissement ; que le bail lui apportera un revenu net de toutes charges de 6 % indexé annuellement ; que ce taux est largement supérieur, situé en région parisienne, à ceux des investissements de même catégorie ; qu'il ne supportera aucun délai puisque le bail débutera obligatoirement au 1er janvier 2005 ; que le montage est totalement sécurisé ; qu'en cas de litige avec l'administration, le cabinet IBL sera chargé de répondre à l'administration fiscale ; qu'en cas de revente le preneur exercera son pacte de préférence"; le tribunal a exactement relevé qu'il n'existait aucune mention au titre des obligations de l'investisseur telle celle tenant à la réalisation des travaux qui conditionnait pourtant la défiscalisation recherchée ; qu'il est tout aussi exact, qu'il n'existe aucune indication concernant les risques encourus en cas de retard dans le démarrage des travaux ou de leur inexécution, alors qu'une date de fin de chantier est au contraire expressément indiquée dans la proposition faite par la société Cincinnatus ; qu'ainsi, la perception des loyers était garantie à compter du 1er janvier 2005, date de la livraison prévue du bien pour un montant annuel de 29 285,88 euros HT et avant de 10 %, soit 2 928,59 euros HT ; qu'il importe peu, dans ces circonstances, qu'il y ait eu ou non des signaux d'alerte concernant la santé financière du groupe Barbatre ; que si la société Cincinnatus prétend qu'elle disposait d'un canal d'information régulier mis en place avec les sociétés du groupe Barbatre afin de suivre le développement des programmes, encore convenait-t-il qu'elle recueille effectivement les informations qui permettaient de s'assurer de la bonne fin des travaux, compte tenu de la présentation totalement sécurisée des programme et montages financiers proposés ; que la circonstance que le programme ait été commercialisé à plus de 70 % ne suffisait pas en soi à garantir le succès de l'opération qui était tributaire de la bonne fin des travaux ; qu'une proposition de livraison du bien en janvier 2005 alors qu'elle ne conteste pas que le permis de construire n'était pas délivré à la date de signature de l'acte de vente, un an plus tôt, était irréaliste compte tenu de l'ampleur des travaux à effectuer dans ce type de réhabilitation et compte tenu de l'état du Château dont les lots ont été vendus ; que l'équilibre de l'investissement était soumis à la perception des loyers alors qu'il n'est pas contesté que ceux-ci ont été réglés par le locataire sur les fonds qui étaient destinés à la réalisation des travaux ; que si la société Cincinnatus ajoute encore que certains travaux pouvaient être réalisés sans nécessiter l'obtention d'un permis de construire, force est de constater qu'elle n'indique pas lesquels et qu'elle n'en justifie pas alors que l'investissement dans un programme de monuments historiques implique au contraire des sujétions particulières tenant notamment aux différentes autorisations requises des autorités de tutelle et à l'agrément de l'architecte des bâtiments de France ; qu'en outre, si l'opération immobilière était de nature à répondre aux objectifs recherchés par M. P... et en adéquation avec ses moyens financiers, encore convenait-t-il que toutes les garanties soient prises pour qu'ils puissent être atteints ; que la seule remise de la documentation commerciale afférente au programme du Château d'Abondant et des statuts de l'ASL devant être à l'initiative des travaux ne saurait valoir fourniture d'un conseil adapté à l'investisseur profane en la matière, celui-ci devant en effet recevoir les explications nécessaires sur les mécanismes complexes qui lui étaient proposés ; que la société Cincinnatus ne peut s'exonérer de son défaut d'information sur les risques et aléas du projet par l'affirmation péremptoire selon laquelle l'aléa est inhérent à un tel programme d'investissement et "connu de tous" alors que celui-ci était exclu de sa proposition, totalement sécurisée, comme cela a été précédemment dit ; qu'au contraire, la sécurisation des travaux était d'autant plus nécessaire qu'elle conditionnait l'avantage fiscal dont il n'est pas contesté qu'il a été remis en cause sur le constat, par l'administration fiscale, que les travaux n'avaient pas été réalisés ; que c'est donc à tort que la société Cincinnatus prétend qu'il n'était pas illégitime de considérer en 2003 que le schéma bénéficiait d'une sécurité non négligeable au-delà des risques attachés à toutes opérations de réhabilitation immobilière ; que l'investissement proposé comportait des risques qui n'ont pas été mentionnés ni expliqués à l'investisseur, qui pouvait non seulement s'ils se réalisaient, ne pas lui permettre d'atteindre l'objectif de défiscalisation poursuivi, ce qui s'est avéré mais aussi mettre en péril le placement effectué, ce qui s'est également réalisé ; qu'en ce qui concerne les griefs faits à la société Cincinnatus quant à son attitude postérieure à la signature de l'acte de vente, ils sont inopérants pour ce qui est de la vérification de l'avancement des travaux de réhabilitation du château d'Abondant alors que la faisabilité de l'opération n'a pas été mise en péril avant le mois de janvier 2004 et que par courrier du 24 janvier 2004, M. P... a déchargé la société Cincinnatus de toutes ses obligations, souhaitant suivre son interlocuteur M. D..., au sein de la nouvelle structure de celui-ci ; que ce n'est qu'en octobre 2007 que les sociétés du groupe Barbatre ont été placées en redressement judiciaire ; que par ailleurs les circonstances dans lesquelles la SCI Aviva MH a été amenée à donner son accord pour le déblocage au profit de la Sogecif, d'une somme de 442.560 €, soit la quasi-totalité des travaux, à une date qui n'est pas mentionnée sur la pièce nº11 portant la signature de M. P... mais dont il n'est pas contesté qu'elle était proche de la date de la vente, sont indéterminées ; qu'en tout cas la pièce produite ne permet pas d'affirmer que l'accord de M. P... a été donné sur le conseil de la société Cincinnatus ; qu'il ne peut donc être reproché à celle-ci un manquement à cet égard, d'autant qu'il ne résulte d'aucune pièce contractuelle qu'elle devait fournir un conseil à M. P... sur l'opportunité du déblocage des fonds en vue des travaux ; que par ailleurs c'est à juste titre que le tribunal a retenu que la circonstance selon laquelle la société Cincinnatus avait conseillé à M. P... la constitution de la SCI Aviva MH, ce qui résulte notamment de l'étude personnalisée du 2 décembre 2003, n'établissait nullement l'existence d'un lien contractuel entre cette SCI et la société Cincinnatus ; que, néanmoins comme l'a retenu le tribunal, le manquement de la société Cincinnatus à ses obligations contractuelles à l'égard de M. P... a causé un préjudice à la SCI Aviva MH qui a procédé à l'investissement et aux emprunts bancaires concomitants et préconisés par le montage juridique et financier proposé par la société Cincinnatus dans le projet susvisé ; que ce manquement constitue donc une faute de nature à engager la responsabilité délictuelle de la société Cincinnatus vis-à-vis de la SCI Aviva MH sur le fondement de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction applicable au présent litige ; qu'en définitive, la société Cincinnatus a commis une faute de nature à engager tant sa responsabilité contractuelle vis-à-vis de M. P... que sa responsabilité délictuelle vis-à-vis de la SCI Aviva MH ; que le jugement déféré sera confirmé sur ce point (arrêt, p. 12 à 15)

ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE tenu d'une obligation de conseil et d'information à l'égard de son client, le conseil en gestion de patrimoine doit informer ce dernier des conditions auxquelles le succès de l'opération financière projetée est subordonné et des risques qui découlent du défaut de réalisation de ces conditions ; que si le bilan effectué par la société de conseil en gestion de patrimoine le 3 janvier 2003 et concernant notamment le projet Château La Grange le Roy, comporte un volet complet quant aux avantages fiscaux et à l'engagement financier de l'offre faite à M. P..., présentant avec clarté la ventilation entre le coût du bien acquis en l'état et le coût des travaux, dont il ressort avec évidence qu'ils constituent l'essentiel du prix, et présentant une simulation des déblocages de fonds notamment quant aux travaux, il présente de manière générale l'investissement immobilier commercialisé par la société Vestalis, sans plus de renseignements sur les sociétés intervenantes que leur dénomination sur la brochure de présentation du programme et se conclut par la mention: "Votre montage sera totalement sécurisé..." ; qu'il convient en outre de relever que la présentation de l'investissement proposé à M. P..., dans les pages 46 à 56 du bilan précité, insistant sur l'attrait de cette opération en raison du "montant des travaux à défiscaliser qui est exceptionnellement important (77% TTC) soit un gain d'impôt maximum" ne comporte aucune explication sur l'opération de restauration immobilière elle-même, notamment les conditions nécessaires à l'exécution des travaux, comme la formation d'une ASL regroupant les copropriétaires, habilitée à solliciter l'obtention du permis de construire ; qu'il n'existe aucune mention au titre des obligations de l'investisseur telles celles tenant à la réalisation des travaux qui est pourtant la condition indispensable à la défiscalisation recherchée par l'investisseur auquel est présenté un investissement "clé en main" sécurisé, ni sur les conditions exigées par l'administration fiscale quant à la présentation des appels de fonds afférents aux travaux de réhabilitation, ni sur les risques encourus en cas de retard dans le démarrage des travaux ou de l'inexécution de ceux-ci, alors qu'une date de fin de chantier est expressément indiquée dans la proposition faite par la société Cincinnatus et que la perception des loyers apparaît comme garantie à compter du 01/07/2004 date de la livraison du bien pour un montant de 40.452,20 euros HT ; qu'en ce qui concerne les griefs fait à la société Cincinnatus quant à son attitude postérieurement à la signature des actes, celle-ci verse aux débats des compte-rendus de chantier ainsi qu'un courrier établissant qu'elle ne s'est nullement désintéressée de l'avancement des travaux de réhabilitation du Château La Grange le Roy dans le courant de l'année 2003 et il n'est produit aucun élément de nature à établir que la faisabilité de l'opération a été mise en péril avant le mois de janvier 2004, date à laquelle la société Cincinnatus a été déchargée de toute obligation vis à vis de M. P..., celui-ci ayant confié ses intérêts à M. D... au sein de la société Orbeator ; qu'il convient de rappeler que ce n'est qu'en octobre 2007 que les sociétés du groupe Barbatre ont été placées en redressement judiciaire. Le demandeur ne peut, en conséquence, reprocher à la société Cincinnatus, et bien que les appels de fonds aient transité par cette dernière les 15 mai puis le 25 novembre 2003 étant remarqué que ces appels de fonds étaient destinés à la SCI Aviva MH avec laquelle aucun lien contractuel n'est établi comme il va être démontré, de ne l'avoir pas informé des difficultés non avérées rencontrées par le promoteur immobilier et de ne pas lui avoir conseillé de cesser de donner son accord à sa banque pour le paiement des acomptes sur travaux ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que, s'il peut être admis que la société Cincinnatus, conseil en gestion de patrimoine, n'avait pas de raison de douter de la fiabilité des entreprises du groupe Barbatre en 2002, elle a manqué à son obligation d'information et à son devoir de conseil à l'égard de M. P... préalablement à l'investissement effectué par celui-ci via la SCI Aviva MH ; que s'agissant de la SCI Aviva MH, aucun lien contractuel n'est établi entre la société Cincinnatus et cette dernière qui a été constituée le 1 mars 2003 soit postérieurement aux contrats précités ; que la circonstance selon laquelle la société Cincinnatus aurait conseillé à M. P... la constitution de la SCI Aviva MH ce qui ressort de l'étude du 3 janvier 2003, n'établit nullement l'existence d'un lien contractuel entre cette société civile immobilière et la société Cincinnatus ; qu'elle sera en conséquence déboutée de ses demandes à ce titre ; que les demandeurs fondent également leur action sur le fondement de l'article 1147 du code civil ; que le tiers à un contrat peut invoquer sur le fondement de la responsabilité délictuelle un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage ; que les manquements de la société Cicinnatus à ses obligations contractuelles à l'égard de M. P... ont causé un préjudice à la SCI Aviva MH qui a procédé à l'investissement mis en avant par la société Cincinnatus et à l'emprunt bancaire concomitant, ce conformément au montage juridique que la société Cincinnatus avait d'ailleurs préconisé et qui s'est révélé défaillant ; que la responsabilité délictuelle de la société Cincinnatus à l'égard de la SCI Aviva MH est donc établie (jugement, p. 9 et 10) ;

1°) ALORS QUE l'obligation de renseignement, de conseil et de mise en garde incombant au conseil en gestion de patrimoine ne s'étend pas aux aléas juridiques ou financiers susceptibles de survenir pendant le cours normal de l'investissement qu'il a proposé à son client, lorsque ces aléas ne présentent aucune spécificité et sont de la connaissance de tous ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que la société Cincinnatus ne pouvait s'exonérer de son défaut d'information sur les risques et aléas du projet par l'affirmation péremptoire selon laquelle l'aléa est inhérent à un tel programme d'investissement et connu de tous, tandis que cet aléa avait été exclu « de sa proposition totalement sécurisée » (arrêt, p. 14 § 2) ; qu'en se prononçant ainsi, tandis que la société Cincinnatus n'était pas tenue de mettre en garde M. P... sur le fait que toute opération d'investissement immobilier aux fins de défiscalisation est susceptible d'échouer en cas de défaillance ultérieure de l'un des participants au projet de construction, risque inhérent à toute opération immobilière et de la connaissance de tous, et qui ne présentait aucune spécificité au regard du placement proposé, la cour d'appel a violé les articles 1147 du code civil, devenu l'article 1231 du même code en ce qui concerne M. P..., et 1382 du code civil, devenu l'article 1240 du même code en ce qui concerne la SCI Aviva MH ;

2°) ALORS QUE l'obligation de renseignement, de conseil et de mise en garde incombant au conseil en gestion de patrimoine ne s'étend pas aux aléas juridiques ou financiers susceptibles de survenir pendant le cours de l'investissement qu'il a proposé à son client, dès lors qu'à la date à laquelle il a conseillé ce placement, il ne disposait d'aucun élément de nature à l'alerter sur le risque d'un échec prévisible de l'opération d'investissement ; qu'en l'espèce, la société Cincinnatus faisait valoir que, lorsque le placement litigieux avait été proposé à M. P... en 2003, elle avait préalablement procédé à des investigations sur la santé financière des sociétés du groupe Barbatre et sur l'état d'avancement du projet, sans disposer de la moindre information permettant de douter du succès de l'opération projetée, qui répondait notamment à l'ensemble des critères permettant de bénéficier des dispositions défiscalisantes de la loi Malraux (concl., p. 19 et 20) ; que la cour d'appel a néanmoins retenu que la société Cincinnatus avait manqué à son devoir de conseil et de mise en garde envers M. P..., dans la mesure où la commercialisation du programme à plus de 70% ne suffisait pas en soi à garantir le succès de l'opération, qu'une proposition de livraison du bien en janvier 2005 tandis qu'il n'était pas contesté que le permis de construire n'était pas encore délivré, était irréaliste, et que la remise de la documentation commerciale afférente au programme et aux statuts de l'ASL ne pouvait valoir fourniture d'un conseil adapté compte tenu de la complexité des mécanismes proposés (arrêt, p. 14 § 1) ; qu'en se prononçant ainsi par des motifs impropres à caractériser en quoi la société Cincinnatus, qui n'est pas un professionnel de la construction immobilière, avait pu identifier le moindre élément révélant un risque d'échec de l'opération à la date de la décision d'investir de M. P..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 du code civil, devenu l'article 1231 du même code en ce qui concerne M. P..., et 1382 du code civil, devenu l'article 1240 du même code en ce qui concerne la SCI Aviva MH ;

3°) ALORS QUE l'obligation de renseignement, de conseil et de mise en garde incombant au conseil en gestion de patrimoine ne s'étend pas aux aléas juridiques ou financiers susceptibles de survenir pendant le cours de l'investissement qu'il a proposé à son client, dès lors qu'à la date à laquelle il a conseillé ce placement, il ne disposait d'aucun élément de nature à l'alerter sur le risque d'un échec prévisible de l'opération d'investissement ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté, par motifs propres comme adoptés, que la faisabilité de l'opération n'avait pas été mise en péril avant le mois de janvier 2004, date à laquelle M. P... avait déchargé la société Cincinnatus de toutes ses obligations (arrêt, p. 14 § 3 et jugement, p. 9 § 5) ; qu'en décidant néanmoins que la société Cincinnatus avait manqué à son devoir de conseil envers M. P... pour ne pas l'avoir alerté sur les risques d'échec de l'investissement immobilier proposé, après avoir constaté que de tels risques n'étaient pas caractérisés à la date à laquelle M. P... avait décidé d'investir ni même à la date à laquelle il avait déchargé la société Cincinnatus de son mandat, la cour d'appel a violé les articles 1147 du code civil, devenu l'article 1231 du même code en ce qui concerne M. P..., et 1382 du code civil, devenu l'article 1240 du même code en ce qui concerne la SCI Aviva MH.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 18-21402;18-23165
Date de la décision : 26/09/2019
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 15 juin 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 26 sep. 2019, pourvoi n°18-21402;18-23165


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.21402
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