LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à la société Parot VI du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre l'association Comité Aquitaine de cyclisme et la société Aquitaine véhicules industriels ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 30 novembre 2007, la société Gap VI, devenue société Parot VI, a vendu à l'association Lescar Vélo Sprint un véhicule de marque Iveco destiné au transport d'une équipe de cyclistes et de leur matériel, après avoir fait procéder à son aménagement par la société Carrosserie G... (la société G...), assurée auprès de la société MMA IARD (l'assureur) ; que, le 26 février 2010, l'association Lescar Vélo Sprint (l'association Lescar) l'a revendu à l'association Comité Aquitaine de cyclisme (l'association Comité Aquitaine) ; que, le châssis du véhicule s'étant rompu le 15 avril 2012, cette dernière a assigné en résolution de la vente pour vice caché l'association Lescar, qui a appelé en intervention forcée la société Gap VI, la société G..., l'assureur et la société Aquitaine véhicules industriels ;
Sur le second moyen, pris en ses troisième et quatrième branches, ci-après annexé :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le premier moyen, pris en sa seconde branche :
Vu l'article 1644 du code civil ;
Attendu qu'après avoir prononcé la résolution de la vente conclue entre l'association Lescar et l'association Comité Aquitaine et condamné la première à en restituer le prix, l'arrêt condamne la société Gap VI à garantir l'association Lescar pour l'exécution de sa condamnation à restitution ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'association Lescar ne pouvait obtenir la garantie d'un prix auquel, du fait de la résolution de la vente, elle n'avait plus droit, et dont la restitution ne constituait pas pour elle un préjudice indemnisable, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et attendu que la cassation prononcée sur le premier moyen rend sans portée le second moyen, pris en ses première et deuxième branches, qui critique le rejet de la demande de garantie formée par la société Gap VI contre l'assureur ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du premier moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Gap VI à garantir l'association Lescar Vélo Sprint pour l'exécution de sa condamnation à restituer la somme de 29 500 euros à l'association Comité Aquitaine de cyclisme, l'arrêt rendu le 9 mai 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Pau, autrement composée ;
Condamne l'association Lescar Vélo Sprint aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze septembre deux mille dix-neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour la société Parot VI.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société Gap VI, devenue Parot VI, à garantir l'association Lescar Vélo Sprint pour l'exécution de sa condamnation à restituer la somme de 29.500 € au Comité Aquitaine de cyclisme ;
AUX MOTIFS QUE la SAS Parot VI - alors Gap VI - a été condamnée par le tribunal : à garantir l'association Lescar Vélo Sprint de l'exécution de sa condamnation à restituer la somme de 29.500 € à l'association Comité Aquitaine de cyclisme (arrêt, p. 6 § 5) ;
1) ALORS QUE le juge est tenu de motiver sa décision ; qu'en condamnant la société Gap VI, devenue Parot VI, à garantir l'association Lescar Vélo Sprint pour l'exécution de sa condamnation à restituer la somme de 29.500 € au Comité Aquitaine de cyclisme, sans assortir cette condamnation à garantie du moindre motif, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2) ALORS, en toute hypothèse, QUE le vendeur intermédiaire, tenu envers l'acquéreur à restitution du prix de vente, consécutivement à l'exercice par l'acquéreur de l'action rédhibitoire, ne peut obtenir du vendeur initial la garantie de ce prix auquel, du fait de la résolution de la vente et de la remise consécutive de la chose, il n'a plus droit, et dont la restitution ne constitue donc pas, pour lui, un préjudice indemnisable ; qu'en en condamnant la société Gap VI, devenue Parot VI, à garantir l'association Lescar Vélo Sprint pour l'exécution de sa condamnation à restituer la somme de 29.500 € au Comité Aquitaine de cyclisme, cette somme correspondant au prix de vente acquitté par ce dernier, tandis que ce prix ne constituait pas un préjudice réparable pour l'association Lescar Vélo Sprint, puisqu'elle n'y avait plus droit en raison de la résolution de la vente, la cour d'appel a violé l'article 1644 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué de n'AVOIR condamné la compagnie MMA Iard, ès qualités d'assureur de la Sarl Carrosserie G..., qu'à relever et garantir indemne la SAS Parot VI, des condamnations à payer à l'association Comité Aquitaine de cyclisme la somme de 5.973,98 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi, et de la condamnation à payer à l'association Comité Aquitaine de cyclisme, l'association Lescar Vélo Sprint, M. B... G... et la compagnie MMA, la somme de 1.000 euros chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens et d'AVOIR rejeté toutes les autres demandes plus amples ou contraires ;
AUX MOTIFS QUE la SAS Parot VI produit les pièces attestant de ce qu'elle a commandé à la SARL Carrosserie G..., la modification du fourgon Iveco pour adapter ce véhicule à la commande passée par l'association Lescar Vélo Sprint : le devis établi par la SARL Carrosserie G... le 11 avril 2008 mentionne la pose d'une capucine et différents autres travaux. Une facture d'un montant de 11362 € correspondant à ces travaux, a été émise le 30 mai 2008 ; que le 22 mai 2008, la SARL Carrosserie G... a dressé un certificat de carrossage, document permettant l'immatriculation du véhicule, mentionnant ses caractéristiques : - poids total autorisé en charge PTAC : 3500 kg, - poids à vide 2760 kg,- passagers et conducteur 525 kg, - autre chargement 235 kg ; Que le certificat d'immatriculation du véhicule qui a été équipé pour transporter 7 personnes et du matériel (7 x 75 kg = 525), reprend le PTAC et le poids à vide mentionnés au certificat de carrossage ; que l'expertise effectuée par M. H... (SARL L... H... Expertises), au contradictoire de toutes les parties, montre que le certificat de carrossage établi par la SARL Carrosserie G... présente une erreur substantielle de calcul du poids du véhicule équipé conformément à la demande de la SAS Parot VI ; que le véhicule équipé par la SARL Carrosserie G... et vendu par la SAS Parot VI à l'association Lescar Vélo Sprint présentait en réalité un poids vide de 3260 kg et non de 2760 kg comme indiqué sur le certificat de carrossage, de sorte qu'il n'était pas conforme à l'usage auquel il était destiné, à savoir le transport d'une équipe de cyclistes et son matériel, puisque cette charge additionnée au poids à vide véritable, était trop importante pour le châssis du fourgon ; que l'expert explique concrètement, que dans cette configuration, à partir du troisième passager, le véhicule est déjà en surcharge alors que les vélos n'ont pas encore été chargés ; que c'est donc la faute du carrossier ayant fourni des indications erronées sur le poids du véhicule et donc sur la charge utile possible, qui est à l'origine de la rupture du châssis car, ignorant le poids réel du véhicule, ses acquéreurs successifs l'ont utilisé avec une charge supplémentaire dépassant ses capacités techniques réelles ; que la SAS Parot VI dont rien n'établit qu'elle aurait pu elle-même relever l'erreur, et qui a confié l'équipement du véhicule à un garagiste professionnel, était donc de bonne foi lors de la vente consentie à l'association Lescar Vélo Sprint ; qu'elle est donc fondée à réclamer la garantie de la SARL Carrosserie G... dont la faute a induit le procès qui lui a été fait et les condamnations prononcées à son encontre ; que cependant, dans ses conclusions, l'appelante ne demande pas à la cour de condamner la SARL Carrosserie G... mais de la déclarer seule responsable des dommages, et sollicite la condamnation de la compagnie MMA IARD ès qualités d'assureur de la SARL Carrosserie G... à la relever et garantir indemne des condamnations prononcées par le premier juge ; que la SAS Parot VI - alors Gap VI - a été condamnée par le tribunal : -à garantir l'association Lescar Vélo Sprint de l'exécution de sa condamnation à restituer la somme de 29500 € à l'association Comité Aquitaine de cyclisme, - à payer à l'association Comité Aquitaine de cyclisme une somme de 5973,98 € à titre de dommages-intérêts au titre du préjudice de jouissance, - à payer à l'association Comité Aquitaine de cyclisme, l'association Lescar Vélo Sprint et B... G..., une indemnité de procédure de 1000 € chacun ; qu'il est patent que la SARL Carrosserie G... ne pourrait être tenue de relever la SAS Parot VI de sa condamnation à garantir la restitution du prix d'achat du véhicule car du fait de la résiliation de la vente, la SAS Parot VI n'a plus aucun droit à percevoir ce prix ; que la garantie de la SARL Carrosserie G... doit être, en revanche, retenue au bénéfice de la SAS Parot VI en ce qui concerne les dommages-intérêts dus à l'association Comité Aquitaine de cyclisme et au titre de l'article 700 du code de procédure civile, car sa faute contractuelle à l'égard de la SAS Parot VI a privé cette dernière d'une chance de ne pas vendre à l'association Lescar Vélo Sprint un véhicule ne répondant pas à ses attentes et donc de ne pas se trouver engagée dans un procès ; que pour sa part, la MMA IARD dénie sa garantie en faisant valoir que le sinistre dont la garantie lui est réclamée, n'entre pas dans le champ d'application de la police d'assurance souscrite par la SARL Carrosserie G... ; que, ceci étant, le contrat d'assurance produit aux débats qui couvre notamment la responsabilité civile de la SARL Carrosserie G..., démontre que la faute de l'assurée a bien causé un sinistre dans le cadre de l'activité couverte de « Carrosserie/peinture » et dans le cadre de la prestation contractuelle commandée par la SAS Parot VI ; que dès lors, la compagnie MMA IARD devra relever et garantir indemne, la SAS Parot VI des condamnations prononcées au titre des dommages-intérêts dus à l'association Comité Aquitaine de cyclisme et des indemnités de procédure mises à la charge de l'appelante par le premier juge (arrêt, p. 5 et 6) ;
1) ALORS QUE le juge doit réparer le préjudice sans qu'il en résulte, pour le lésé, ni perte ni profit ; que si la restitution du prix au titre de l'action rédhibitoire ne constitue pas par elle-même un préjudice réparable, il en est autrement des sommes que le vendeur initial est condamné à garantir au profit d'un vendeur intermédiaire, lui-même condamné à restituer le prix qu'il a perçu à l'acquéreur final ; qu'en ce cas, le vendeur initial est admis à solliciter la garantie du fabricant auquel le vice caché est imputable, y compris celle correspondant au prix remboursé par le vendeur intermédiaire à son acquéreur ; qu'en l'espèce, pour débouter la société Parot VI de sa demande de garantie à l'encontre de la société MMA, assureur de la société Carrosserie G..., au titre de la restitution du prix de vente à laquelle elle avait été condamnée au profit de l'association Lescar Vélo Sprint, vendeur intermédiaire, la cour d'appel a jugé que « du fait de la résiliation de la vente, la SAS Parot VI n'a plus aucun droit à percevoir ce prix » (arrêt, p. 6 § 8) ; qu'en se prononçant ainsi, tandis que seule la résolution de la vente conclue entre le Comité Aquitaine de cyclisme et l'association Lescar Vélo Sprint avait été prononcée, de sorte que le prix de 29.500 € auquel cette association avait été condamnée à restitution, sous la garantie de la société Parot VI, constituait pour cette dernière un préjudice indemnisable, aucune restitution du véhicule n'ayant été ordonnée à son égard, la cour d'appel a violé les articles 1147 ancien (devenu 1231-1) et 1644 du code civil ;
2) ALORS subsidiairement QUE le juge doit réparer le préjudice sans qu'il en résulte, pour le lésé, ni perte ni profit ; que, si la restitution du prix au titre de l'action rédhibitoire ne constitue pas par elle-même un préjudice réparable, le vendeur peut en revanche réclamer au fabricant à qui le vice est imputable l'indemnisation de la perte de valeur de la chose restituée, laquelle peut être équivalente au prix de vente lorsque la chose, du fait du vice, a perdu toute valeur marchande ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le certificat de carrossage établi par la société Carrosserie G... présentait une erreur substantielle de calcul du poids du véhicule « de sorte qu'il n'était pas conforme à l'usage auquel il était destiné, à savoir le transport d'une équipe de cyclistes et son matériel », cette non-conformité étant, au surplus, « à l'origine de la rupture du châssis » (arrêt, p. 5 dernier § et p. 6 § 1) ; que, pour débouter la société Parot VI de sa demande de garantie à l'encontre de la société MMA, assureur de la société Carrosserie G..., au titre de la restitution du prix de vente à laquelle elle avait été condamnée, la cour d'appel a jugé que « du fait de la résiliation de la vente, la SAS Parot VI n'a plus aucun droit à percevoir ce prix » (arrêt, p. 6 8) ; qu'en se prononçant ainsi, tandis qu'il résultait de ses constatations que le vice affectant la chose vendue, imputable à faute à la société Carrosserie G..., avait fait perdre toute valeur marchande à ce véhicule, impropre à sa destination, d'où il résultait que le préjudice de la société Parot VI ne se résumait pas à la seule obligation de défendre à un procès et d'indemniser le sous-acquéreur de son trouble de jouissance, mais consistait, en outre, à la perte de valeur marchande du véhicule, la cour d'appel a violé les articles 1147 ancien (devenu 1231-1) et 1644 du code civil ;
3) ALORS subsidiairement QUE le juge doit respecter et faire respecter le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que la faute commise par la société Carrosserie Huart avait privé la société Parot VI d'une chance de ne pas vendre à l'association Lescar Vélo Sprint un véhicule ne répondant pas à ses attentes (arrêt, p. 6 § 9) ; qu'en décidant ainsi, de sa propre initiative, que le préjudice subi par la société Parot VI devait s'analyser en une telle perte de chance, sans inviter au préalable les parties à s'expliquer sur ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile et le principe de la contradiction ;
4) ALORS, en toute hypothèse QUE le juge du fond ne peut laisser sans réparation un préjudice dont il a constaté l'existence ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que la faute commise par la société Carrosserie Huart avait privé la société Parot VI d'une chance de ne pas vendre à l'association Lescar Vélo Sprint un véhicule ne répondant pas à ses attentes (arrêt, p. 6 § 9) ; qu'en se bornant à réparer le préjudice lié au procès engagé à l'encontre de la société Parot VI, sans indemniser le préjudice distinct lié à cette perte de chance, la cour d'appel a violé l'article 4 du code civil.