LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° X 18-83.858 F-P+B+I
N° 1445
SM12
10 SEPTEMBRE 2019
CASSATION PARTIELLE SANS RENVOI
M. SOULARD président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant :
CASSATION PARTIELLE SANS RENVOI sur les pourvois formés par M. V... B..., la société assurances Axa corporate solutions assurances, partie intervenante, contre l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux, chambre correctionnelle, en date du 16 mai 2018, qui, pour la contravention de blessures involontaires, a condamné le premier à 1 500 euros d'amende et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 12 juin 2019 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Bellenger, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Guichard ;
Sur le rapport de M. le conseiller BELLENGER, les observations de la société civile professionnelle POTIER DE LA VARDE, BUK-LAMENT et ROBILLOT, la société civile professionnelle THOUVENIN, COUDRAY et GRÉVY et de la société civile professionnelle ROCHETEAU et UZAN-SARANO, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général LE DIMNA ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires en demande, en défense et les observations complémentaires produits ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de la Convention de Varsovie et des articles L. 6421-4 du code des transports, 2, 3, 418, alinéa 3, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception d'incompétence ;
"alors qu'en vertu de l'article L. 6421-4 du code des transports, les dispositions de la Convention de Varsovie relatives à la responsabilité du transporteur aérien sont applicables à l'action en responsabilité exercée à la suite d'un accident survenu au cours d'un vol effectué à titre gratuit par un transporteur, que celui-ci soit un particulier ou une entreprise de transports aériens ; qu'en retenant que la Convention de Varsovie était inapplicable en l'espèce où le transport à titre gratuit a été effectué par un particulier dès lors que l'article 1er de cette Convention énonce qu'elle s'applique, s'agissant des transports par aéronef gratuits, à ceux qui sont effectués par une entreprise de transports aériens, la cour d"appel a méconnu les textes et le principe ci-dessus mentionnés" ;
Vu l'article L. 322-3 du code de l'aviation civile devenu L. 6421-4 du code des transports ;
Attendu qu'il se déduit de ce texte qu'une promenade aérienne, fût-elle effectuée par un particulier, à titre gratuit, avec un point de départ et d'arrivée identique, constitue un transport aérien soumis à la Convention de Varsovie du 12 octobre 1929 et que l'action en réparation d'un tel accident aérien échappe à la compétence matérielle des juridictions répressives ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure qu'un avion d'aéroclub piloté par M. V... B..., pilote privé, qui était parti le 3 juillet 2010 en vue d'effectuer une promenade aérienne au dessus du bassin d'Arcachon avec trois passagers emmenés à titre gratuit, s'est écrasé peu après le décollage, occasionnant des blessures au quatre occupants de l'appareil ; que, poursuivi du chef de blessures involontaires, M. B... a été déclaré coupable ; que le tribunal, après avoir ordonné le versement de provisions aux parties civiles, a renvoyé sur les intérêts civils ; que les parties civiles, le prévenu et le procureur de la République ont relevé appel de cette décision ;
Attendu que, pour rejeter l'exception d'incompétence du juge pénal pour connaître de la responsabilité civile, l'arrêt énonce que le vol a été entrepris par un particulier, qui n'est pas une entreprise de transport, et que la Convention de Varsovie n'est pas applicable ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée du texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ; qu'elle aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire ;
Par ces motifs, et sans qu'il soit besoin de statuer sur le second moyen proposé :
CASSE et ANNULE, mais en ses seules dispositions civiles, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Bordeaux, en date du 16 mai 2018, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
DIT que les juridictions répressives sont incompétentes pour connaître de l'action en responsabilité civile à la suite de l'accident aérien survenu le 3 juillet 2010 ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Bordeaux et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix septembre deux mille dix-neuf ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.