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26/06/2019 | FRANCE | N°17-19240

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 26 juin 2019, 17-19240


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 24 janvier 2017), que M. E..., de nationalité danoise, a, par l'intermédiaire d'un courtier, vendu un navire de plaisance à M. S..., de nationalité américaine ; qu'un différend ayant opposé les parties, le vendeur a saisi la Circuit Court du 17e circuit judiciaire du comté de Broward, (Etat de Floride) afin d'obtenir le paiement des sommes séquestrées entre les mains du courtier ; que les parties ayant accepté de recourir à un arbitrage non contraignant, deux

sentences ont été rendues condamnant le vendeur au paiement de différ...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 24 janvier 2017), que M. E..., de nationalité danoise, a, par l'intermédiaire d'un courtier, vendu un navire de plaisance à M. S..., de nationalité américaine ; qu'un différend ayant opposé les parties, le vendeur a saisi la Circuit Court du 17e circuit judiciaire du comté de Broward, (Etat de Floride) afin d'obtenir le paiement des sommes séquestrées entre les mains du courtier ; que les parties ayant accepté de recourir à un arbitrage non contraignant, deux sentences ont été rendues condamnant le vendeur au paiement de différentes sommes ; que, par jugement du 11 février 2010, la juridiction américaine a homologué les sentences, y ajoutant les intérêts jusqu'à l'exécution du jugement et le coût de celui-ci ; que M. S... a saisi la juridiction française aux fins d'obtenir l'exequatur de la décision de la juridiction américaine, à l'exception du chef de condamnation au paiement de dommages-intérêts punitifs ;

Sur le premier moyen pris en sa seconde branche, le deuxième moyen et le troisième moyen pris en ses troisième, quatrième et cinquième branches, ci-après annexés :

Attendu qu'il n'y pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur la première branche du premier moyen et les deux premières branches du troisième moyen, réunis :

Attendu que M. E... fait grief à l'arrêt d'accueillir la demande, alors, selon le moyen :

1°/ que le demandeur à l'exequatur doit justifier qu'il a un intérêt né et actuel à solliciter la reconnaissance en France d'un jugement étranger ; que M. E... faisait valoir qu'étant ressortissant et résident danois, son patrimoine se situait au Danemark et qu'il ne disposait d'aucun actif en France, de sorte que le jugement de la « Circuit Court » du 17e circuit judiciaire, Comté de Broward en Floride, en date du 11 février 2010, dont il était demandé l'exequatur, qui le condamnait au paiement de diverses sommes au profit de M. S..., ne pouvait faire l'objet d'aucune exécution en France ; qu'en décidant que M. S... était recevable à demander l'exequatur de ce jugement en France dès lors et pour ce seul motif que « cette décision est susceptible de recevoir application sur le territoire français, sans que soit exigée la démonstration de l'existence actuelle de biens saisissables en France » sans caractériser autrement l'intérêt du demandeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 31 et 509 du code de procédure civile ;

2°/ que l'exequatur d'une décision étrangère doit être refusé en cas de contrariété à l'ordre public international de procédure, c'est-à-dire lorsque les intérêts d'une partie ont été objectivement compromis par une violation des principes fondamentaux de la procédure, tel que le principe du contradictoire ; que M. E... faisait valoir que le jugement dont il était demandé l'exequatur avait pour objet d'homologuer deux sentences rendues, après son retrait de la procédure, sur la base de seuls éléments fournis par M. S..., sans tenir compte des moyens et preuves qu'il avait lui-même développé, avant de se retirer de la procédure, en violation du principe du contradictoire ; qu'en excluant toute atteinte à l'ordre public international au seul motif que c'était par l'effet de son choix personnel que que les sentences avaient été rendues en l'absence de M. E..., sans rechercher si l'absence de prise en compte, par le juge, des éléments produits par M. E... avant son désistement de la procédure ne constituait pas une violation du principe du contradictoire constitutive d'une atteinte à l'ordre public international, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 509 du code de procédure civile ;

3°/ que l'exequatur d'une décision étrangère doit être refusé en cas de contrariété à l'ordre public international de procédure, c'est-à-dire lorsque les intérêts d'une partie ont été objectivement compromis par une violation des principes fondamentaux de la procédure, tel que le droit à un recours juridictionnel effectif ; que M. E... faisait valoir que le jugement de la « Circuit Court » du 17e circuit judiciaire, Comté de Broward en Floride, en date du 11 février 2010 dont il était demandé l'exequatur avait pour objet d'homologuer deux sentences rendues, après son retrait de la procédure, sur la base de seuls éléments fournis par M. S..., donc de manière non contradictoire, et qu'il n'avait pu empêcher cette homologation et demander la tenue de nouveaux débats contradictoires, faute de s'être vu notifié ces sentences dans des conditions régulières ; que ces sentences ne lui avaient été transmises que par un courrier électronique qu'il n'avait jamais reçu et qui, en tout état de cause, ne mentionnait pas les délais et voies de recours ; qu'en s'abstenant de rechercher elle-même, comme elle y était invitée, si M. E... avait ou non reçu ce courriel électronique et s'il constituait une notification suffisante des sentences homologuées par le jugement dont elle a ordonné l'exequatur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 509 du code de procédure civile ;

Mais attendu, d'une part, que l'intérêt à agir existe dès lors que le demandeur à l'exequatur est la partie au procès au profit de laquelle la décision étrangère a été rendue ; qu'après avoir énoncé que la demande de reconnaissance en France d'une décision étrangère n'est pas soumise à l'exigence de la détention sur le territoire français, par le débiteur de nationalité étrangère, non domicilié en France, d'actifs pouvant faire l'objet de mesures d'exécution forcée, la cour d'appel en a déduit que M. S..., bénéficiaire du jugement américain, était recevable à agir ;

Attendu, d'autre part, que l'arrêt constate, d'abord, qu'après avoir participé à la procédure d'arbitrage non contraignant, M. E... a choisi de s'en retirer ; qu'il relève, ensuite, que la lettre de mission précisait que la décision arbitrale deviendrait définitive, si une demande de nouveau procès n'était pas formée dans le délai de vingt jours suivant sa notification de sorte que M. E... était informé des voies de recours qui lui étaient ouvertes ; qu'il ajoute que la décision du 11 février 2010 qui a homologué les sentences, faute de demande d'un nouveau procès devant les juridictions étatiques, a été régulièrement signifiée à M. E... qui n'en a pas interjeté appel ; qu'il retient, enfin, qu'aux termes de la lettre de mission, la notification des sentences par envoi d'un courriel de l'arbitre aux deux adresses électroniques de M. E... dont celle qu'il avait utilisée pour leurs échanges, ne constituait qu'une présomption réfragable de la date à partir de laquelle le délai de recours de vingt jours avait commencé à courir, de sorte que l'impossibilité pour lui de demander un nouveau procès au fond n'était pas démontrée ; qu'en l'état de ces constatations et énonciations dont il résultait qu'en l'absence d'atteinte aux droits de la défense, la décision américaine ne contrevenait pas à l'ordre public international de procédure, la cour d'appel n'avait pas à procéder aux recherches prétendument omises, rendues inopérantes ;

D'où il suit qu'elle a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. E... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à M. S... la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six juin deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Gaschignard, avocat aux Conseils, pour M. E....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement entrepris et déclaré exécutoire en France la décision rendue entre les parties le 11 février 2010 par la « Circuit Court » du 17ème circuit judiciaire, Comté de Broward en Floride,

AUX MOTIFS QUE le bénéficiaire d'un jugement étranger a intérêt à agir pour en obtenir l'exequatur en France, dès lors que cette décision est susceptible de recevoir application sur le territoire français, sans que soit exigée la démonstration de l'existence actuelle de biens saisissables sur ce territoire ; que la demande de M. S... est donc recevable ;

1° ALORS QUE le demandeur à l'exequatur doit justifier qu'il a un intérêt né et actuel à solliciter la reconnaissance en France d'un jugement étranger ; que M. E... faisait valoir qu'étant ressortissant et résident danois, son patrimoine se situait au Danemark et qu'il ne disposait d'aucun actif en France, de sorte que le jugement de la "Circuit Court" du 17ème circuit judiciaire, Comté de Broward en Floride, en date du 11 février 2010, dont il était demandé l'exequatur, qui le condamnait au paiement de diverses sommes au profit de M. S..., ne pouvait faire l'objet d'aucune exécution en France ; qu'en décidant que M. S... était recevable à demander l'exequatur de ce jugement en France dès lors et pour ce seul motif que « cette décision est susceptible de recevoir application sur le territoire français, sans que soit exigée la démonstration de l'existence actuelle de biens saisissables en France » sans caractériser autrement l'intérêt du demandeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 31 et 509 du code de procédure civile ;

2° ALORS QUE M. E... faisait valoir qu'en réalité, M. S... entendait obtenir une décision d'exequatur en France dans le but de poursuivre l'exécution des décisions américaines, non pas en France, mais au Danemark, où se trouvait son patrimoine et ses biens susceptibles d'être saisis, et qu'il s'agissait ainsi de contourner les décisions rendues les juridictions danoises qui avaient, pour leur part, refusé de mettre à exécution le jugement de la "Circuit Court" du 17ème circuit judiciaire, Comté de Broward en Floride, en date du 11 février 2010 et débouté M. S... de ses demandes, de sorte que son intérêt à agir en exequatur en France n'était pas légitime (conclusions, page 8, § 6 à 11) ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
:

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement entrepris et déclaré exécutoire en France la décision rendue entre les parties le 11 février 2010 par la « Circuit Court » du 17ème circuit judiciaire, Comté de Broward en Floride,

AUX MOTIFS QU'à défaut de convention de coopération en matière judiciaire entre la République française et les Etats-Unis d'Amérique, le juge français saisi d'une demande d'exequatur doit s'assurer que trois conditions sont remplies, tenant à la compétence indirecte du juge étranger fondée sur le rattachement du litige au juge saisi, à la conformité à l'ordre public international de fond et de procédure et à l'absence de fraude à la loi ; que M. E... fait encore valoir que la demande d'exequatur procède d'une fraude à la loi et au jugement rendu par les juridictions danoises ; qu'en effet, par un arrêt du 7 juillet 2011, la cour d'appel de la Région Ouest du Danemark a confirmé la décision de première instance déboutant M. S... de sa demande d'ouverture d'une procédure collective à son encontre au motif que la créance n'était pas d'une "clarté suffisante" pour fonder une décision de cette nature; que l'intimé soutient qu'en poursuivant devant le juge français l'exequatur du jugement américain, M. S... cherche en réalité un moyen détourné d'obtenir l'exécution au Danemark en bénéficiant du mécanisme simplifié de reconnaissance et d'exécution des décisions de justice au sein de l'Union européenne ; qu'il résulte du principe suivant lequel "Exequatur sur exequatur ne vaut" qu'une décision de justice rendue dans un Etat membre, ayant pour objet de reconnaître une décision étrangère, ne bénéficie pas du mécanisme simplifié de reconnaissance et d'exequatur dans un autre Etat membre, lequel conserve son contrôle sur la décision initiale ; que le moyen n'est donc pas fondé ; qu'il résulte de ce qui précède que le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 10 décembre 2014 doit être infirmé et la décision de la "Circuit Court" du 17ème circuit judiciaire, Comté de Broward en Floride en date du 11 février 2010, revêtue de l'exequatur à l'exception du chef relatif aux dommages-intérêts punitifs ;

1° ALORS QUE l'exequatur doit être refusé si la décision pour laquelle celui-ci est demandé ou la décision d'exequatur elle-même heurte la chose jugée par un jugement étranger ayant autorité en France ; qu'en s'abstenant de rechercher si le jugement du tribunal des liquidations de Horsens du 2 mars 2011 et l'arrêt confirmatif de la cour d'appel de la Région ouest du Danemark du 7 juillet 2011, qui ont rejeté la demande de M. S... tendant à la reconnaissance de sa qualité de créancier à l'égard de M. E... et à la mise en oeuvre, contre celui-ci, d'une procédure de liquidation judiciaire, n'avaient pas autorité en France et si ces décisions ne faisaient pas obstacle à ce que le jugement de la "Circuit Court" du 17ème circuit judiciaire, Comté de Broward en Floride, en date du 11 février 2010 soit revêtu de l'exequatur, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 509 du code de procédure civile, ensemble les articles 33 et 34 du règlement n° 44/2001 du 22 décembre 2000 ;

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire) :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement entrepris et déclaré exécutoire en France la décision rendue entre les parties le 11 février 2010 par la « Circuit Court » du 17ème circuit judiciaire, Comté de Broward en Floride,

AUX MOTIFS QU'à défaut de convention de coopération en matière judiciaire entre la République française et les Etats-Unis d'Amérique, le juge français saisi d'une demande d'exequatur doit s'assurer que trois conditions sont remplies, tenant à la compétence indirecte du juge étranger fondée sur le rattachement du litige au juge saisi, à la conformité à l'ordre public international de fond et de procédure et à l'absence de fraude à la loi ; que la compétence du juge de Floride n'est pas contestée ; que M. E... soutient que la décision américaine du 11 février 2010 est contraire à l'ordre public international de procédure ; qu'il expose qu'il s'est retiré de la procédure d'arbitrage non contraignant en raison de difficultés financières et de santé ; que les sentences, qui ont été rendues en son absence, ne lui ont pas été notifiées dans les conditions prévues par la convention de La Haye du 15 novembre 1965, ni d'ailleurs dans celles prévues par le droit de Floride ; que l'arbitre a affirmé qu'il les lui avait envoyées par un courriel qu'il n'a pas reçu ; que ce défaut de notification l'a privé du droit prévu par la loi de Floride de demander dans les vingt jours un nouveau procès devant les juridictions étatiques ; que la décision dont l'exequatur est demandé est une simple homologation des sentences non contraignantes, de sorte qu'il est indifférent qu'elle lui ait été notifiée dans les conditions de la convention de La Haye, dès lors que l'appel qu'il pourrait en interjeter ne permettrait pas un rejugement du fond de l'affaire ; qu'en premier lieu, M. E... a accepté de participer à la procédure d'arbitrage non contraignant, et qu'il y a effectivement défendu avant de s'en retirer ; que s'il produit deux certificats de son médecin traitant datant de novembre 2008 et de février 2009 mentionnant un état de stress et d'anxiété affectant son sommeil et ses fonctions cognitives et contre-indiquant les voyages, il a déclaré devant la Haute Cour de l'Ouest, saisie de la procédure de liquidation judiciaire engagée contre lui au Danemark par M. S..., qu'il "voulait clore l'arbitrage parce qu‘il pensait que c‘était un gaspillage de temps et d‘argent ; qu'il s‘agissait d'un arbitrage non contraignant et il était certain que Z... S... voulait seulement retarder l‘arbitrage ; qu'il aurait été capable de se permettre de poursuivre cette procédure s‘il l'avait souhaité ; que c‘était une question de priorité" ; que c'est donc par l'effet du choix de M. E... que les sentences non contraignantes ont été rendues en son absence ; qu'en deuxième lieu, que si M. E... fait valoir que le courriel de notification qui lui aurait été envoyé par l'arbitre et qu'il soutient n'avoir pas reçu, ne mentionne pas les voies de recours, la lettre de mission précise (point 16) : "Une décision arbitrale sera définitive si une demande pour un nouveau procès n ‘est pas soumise dans les 20 jours qui suivent la notification de la décision"; que M. E... était donc suffisamment informé des voies de droit qui lui étaient ouvertes ; qu'en troisième lieu, que la décision de la "Circuit Court" du 17ème circuit judiciaire, Comté de Broward, du 11 février 2010, qui a homologué les sentences faute de demande par M. E... d'un nouveau procès devant les juridictions étatiques, a été régulièrement signifiée à l'intéressé qui n'en a pas interjeté appel ; que M. E... soutient que cet appel portant sur le jugement d'homologation des sentences, laquelle résulte automatiquement de l'absence de recours dans le délai de vingt jours, n'aurait pas permis un rejugement au fond de ses prétentions ; que la lettre de mission énonce que "la notification par l'arbitre de la décision génère une présomption réfragable en ce qui concerne la date à laquelle la décision a été notifiée"; qu'il s'en déduit que l'envoi des sentences en date du 30 décembre 2009 par un courriel expédié le 31 décembre 2009 par l'arbitre F... aux deux adresses [...] et [...] (dont la première était bien celle depuis laquelle M. E... répondait à l'arbitre le 18 décembre 2009), ne constituait qu'une présomption réfragable de notification ; que la réalité et la régularité de celle-ci, et, par conséquent, la détermination du point de départ du délai de recours, auraient pu être appréciées par le juge américain s'il avait été saisi d'un appel de la décision d'homologation, de sorte que l'impossibilité d'un nouveau procès au fond n'est pas démontrée ; qu'il résulte de ce qui précède que la méconnaissance des droits de la défense n'est pas établie ;

1° ALORS QUE l'exequatur d'une décision étrangère doit être refusé en cas de contrariété à l'ordre public international de procédure, c'est-à-dire lorsque les intérêts d'une partie ont été objectivement compromis par une violation des principes fondamentaux de la procédure, tel que le principe du contradictoire ; que M. E... faisait valoir que le jugement dont il était demandé l'exequatur avait pour objet d'homologuer deux sentences rendues, après son retrait de la procédure, sur la base de seuls éléments fournis par M. S..., sans tenir compte des moyens et preuves qu'il avait lui-même développé, avant de se retirer de la procédure, en violation du principe du contradictoire ; qu'en excluant toute atteinte à l'ordre public international au seul motif que c'était par l'effet de son choix personnel que les sentences avaient été rendues en l'absence de M. E..., sans rechercher si l'absence de prise en compte, par le juge, des éléments produits par M. E... avant son désistement de la procédure ne constituait pas une violation du principe du contradictoire constitutive d'une atteinte à l'ordre public international, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 509 du code de procédure civile ;

2° ALORS QUE l'exequatur d'une décision étrangère doit être refusé en cas de contrariété à l'ordre public international de procédure, c'est-à-dire lorsque les intérêts d'une partie ont été objectivement compromis par une violation des principes fondamentaux de la procédure, tel que le droit à un recours juridictionnel effectif ; que M. E... faisait valoir que le jugement de la "Circuit Court" du 17ème circuit judiciaire, Comté de Broward en Floride, en date du 11 février 2010 dont il était demandé l'exequatur avait pour objet d'homologuer deux sentences rendues, après son retrait de la procédure, sur la base de seuls éléments fournis par M. S..., donc de manière non contradictoire, et qu'il n'avait pu empêcher cette homologation et demander la tenue de nouveaux débats contradictoires, faute de s'être vu notifié ces sentences dans des conditions régulières ; que ces sentences ne lui avaient été transmises que par un courrier électronique qu'il n'avait jamais reçu et qui, en tout état de cause, ne mentionnait pas les délais et voies de recours ; qu'en s'abstenant de rechercher elle-même, comme elle y était invitée, si M. E... avait ou non reçu ce courriel électronique et s'il constituait une notification suffisante des sentences homologuées par le jugement dont elle a ordonné l'exequatur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 509 du code de procédure civile ;

3° ALORS QUE M. E... faisait valoir que la notification des sentences rendues par le juge américain, exigée pour faire courir le délai de vingt jours dans lequel les parties peuvent demander la tenue d'un nouveau procès, ne pouvait être faîte par un simple courrier électronique et aurait dû être réalisée dans les formes prévues par la convention de La Haye du 5 novembre 1965, applicable aux Etats-Unis et au Danemark, c'est-à-dire par le biais des autorités américaines et danoises compétentes, de sorte que le jugement de la "Circuit Court" du 17ème circuit judiciaire, Comté de Broward en Floride, en date du 11 février 2010 homologuant ces sentences, rendu à l'issue d'un délai de vingt jours suivant l'envoi d'un simple courrier électronique, avait été rendu en violation des droits de la défense (pages 13 à 15) ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

4° ALORS QUE M. E... faisait valoir que même le droit procédural de l'Etat de Floride exigeait que la notification des décisions arbitrales soit faite par écrit, c'est-à-dire par courrier, et que la notification par voie électronique n'avait été autorisée qu'en 2012, postérieurement au prononcé des sentences litigieuses, de sorte que le jugement de la "Circuit Court" du 17ème circuit judiciaire, Comté de Broward en Floride, en date du 11 février 2010 homologuant ces sentences, rendu à l'issue d'un délai de vingt jours suivant l'envoi d'un simple courrier électronique, avait été rendu en violation des droits de la défense (conclusions, pages 15 et 16) ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

5° ALORS QUE tout jugement doit être motivé ; qu'en affirmant que l'envoi des sentences par un courriel constituait une présomption réfragable de notification et qu'en cas d'appel du jugement d'homologation de ces sentences, le juge américain pouvait apprécier la réalité et la régularité de cette notification, et autoriser un nouveau procès au fond, ce qui était contesté par M. E..., la cour d'appel a statué par simple affirmation et violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 17-19240
Date de la décision : 26/06/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

CONFLIT DE JURIDICTIONS - Effets internationaux des jugements - Reconnaissance ou exequatur - Conditions - Exclusion - Détention sur le territoire français, par le débiteur de nationalité étrangère, d'actifs pouvant l'objet de mesures d'exécution forcée

La demande de reconnaissance en France d'une décision étrangère n'est pas soumise à l'exigence de la détention sur le territoire français, par le débiteur de nationalité étrangère, non domicilié en France, d'actifs pouvant faire l'objet de mesures d'exécution forcée


Références :

articles 31 et 509 du code de procédure civile

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 24 janvier 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 26 jui. 2019, pourvoi n°17-19240, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : Mme Batut
Avocat(s) : SCP Gaschignard, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 01/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:17.19240
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