LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 24 octobre 2017), que, suivant contrat du 14 mai 2010, Mme E... (l'assurée) a conclu deux prêts immobiliers avec la société Banque populaire du Massif central (la banque), garantis par une assurance de groupe souscrite par la banque auprès des sociétés Assurances Banque populaire vie et Assurances Banque populaire prévoyances, devenues BPCE vie et BPCE prévoyance (les assureurs) ; qu'elle a sollicité la mise en oeuvre de la garantie incapacité de travail du contrat d'assurance de groupe ; qu'après une expertise judiciaire destinée à apprécier son taux d'incapacité, elle a assigné les assureurs aux fins de les voir condamner à prendre en charge le remboursement des prêts à compter du 1er septembre 2013 ;
Attendu que l'assurée fait grief à l'arrêt de rejeter cette demande, alors, selon le moyen :
1°/ que les clauses des contrats proposés par les professionnels aux consommateurs ou aux non-professionnels doivent être présentées et rédigées de façon claire et compréhensible et en cas de doute, elles s'interprètent dans le sens le plus favorable aux consommateurs ou aux non-professionnels ; qu'en l'espèce, pour débouter l'assurée de sa demande tendant à voir les assureurs à prendre en charge le montant des échéances de ses prêts, la cour d'appel a énoncé que l'article 13 de la notice d'assurance relatif à la garantie incapacité de travail prévoit un taux d'incapacité globale minimum de 66 %, calculé en fonction du taux d'incapacité professionnelle combiné au taux d'incapacité fonctionnelle, tel qu'il ressort du tableau à double entrée intégré dans la notice d'assurance, que le fait que ce tableau ne mentionne pas de taux d'incapacité fonctionnelle inférieur à 60 % permet à lui seul de comprendre qu'un taux d'incapacité fonctionnelle de 50 %, peu important le taux d'incapacité professionnelle corrélatif, n'ouvre pas droit à garantie, que cet article ne pouvait laisser croire à l'assurée, même frappée d'une incapacité professionnelle de 100 %, qu'elle pouvait bénéficier d'une prise en charge et que la formule du taux d'incapacité globale n'avait pas à figurer dans le contrat, le tableau se suffisant à lui-même ; qu'en statuant ainsi, cependant que la clause litigieuse, fondée sur l'application d'un tableau à double entrée incomplet ne permettant pas à l'assurée dont l'incapacité fonctionnelle partielle et l'incapacité professionnelle étaient fixées respectivement à 50 % et à 100 % de déterminer son taux global d'incapacité, n'était pas rédigée de façon claire et compréhensible et faisait naître un doute sur sa portée, de sorte qu'elle devait être interprétée dans le sens le plus favorable à l'assurée, la cour d'appel a violé l'article L. 133-2, alinéa 2, du code de la consommation, dans sa rédaction applicable au litige ;
2°/ que les clauses des contrats proposés par les professionnels aux consommateurs ou aux non-professionnels doivent être présentées et rédigées de façon claire et compréhensible et en cas de doute, elles s'interprètent dans le sens le plus favorable aux consommateurs ou aux non-professionnels ; qu'en énonçant en substance que la simple lecture de l'article 13 de la notice d'assurance relatif à la garantie incapacité de travail et en particulier de son tableau à double entrée suffisait à comprendre les limites de la garantie, quand l'expert judiciaire désigné pour déterminer le taux d'incapacité de l'assurée et les premiers juges avaient retenu que cette clause n'était pas rédigée clairement et ne permettait pas à l'assuré d'avoir connaissance de son taux d'incapacité et partant de la possibilité ou non de prise en charge, de sorte que la clause manquait manifestement de clarté et faisait naître un doute sur sa portée, la cour d'appel a violé l'article L. 133-2 dans sa rédaction applicable au litige ;
Mais attendu qu'il ressort des productions que la clause litigieuse stipule que la mise en oeuvre de la garantie incapacité de travail suppose un taux d'incapacité de 66 %, calculé en fonction du taux d'incapacité professionnelle combiné au taux d'incapacité fonctionnelle, ainsi qu'il résulte d'un tableau à double entrée dont la simple lecture permet de comprendre qu'aucune garantie n'est due lorsque l'un quelconque des taux à combiner est inférieur à un certain seuil, de sorte qu'étant rédigée de façon claire et compréhensible, sans laisser place au doute, elle ne pouvait être interprétée par la cour d'appel, qui n'était liée ni par les conclusions de l'expert judiciaire ni par l'appréciation des juges de première instance ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme E... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf juin deux mille dix-neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat aux Conseils, pour Mme E...
Il est reproché à l'arrêt attaqué, infirmatif sur ce point, d'avoir débouté Mme F... E... de sa demande tendant à voir les sociétés BPCE vie et BPCE prévoyance condamnées à prendre en charge le montant des échéances des prêts [...] et [...] avec effet rétroactif au 1er septembre 2013 et avec intérêts au taux légal à compter du 9 avril 2015 ;
AUX MOTIFS QUE selon l'article 1134 (devenu 1103) du code civil, le contrat fait la loi des parties ; que selon l'article L.211-1 du code de la consommation, les clauses des contrats proposés par les professionnels aux consommateurs ou aux non professionnels doivent être présentés et rédigés de façon claire et compréhensible ; qu'elles s'interprètent, en cas de doute, dans le sens le plus favorable aux consommateurs ou aux non professionnels ; qu'en l'espèce, l'article 13 relatif à la garantie incapacité de travail définit l'incapacité de travail comme la situation de l'assuré qui se trouve, sur prescription médicale, par suite d'un accident ou d'une maladie survenant avant son 65ème anniversaire, contraint d'interrompre totalement son activité professionnelle et si son état de santé interdit l'exercice de toute activité professionnelle ; qu'il prévoit qu'à la date de consolidation de l'état de santé de l'assuré, et au plus tard trois ans après le début de son incapacité de travail, le médecin conseil de l'assureur fixe le taux d'incapacité permanente de l'assuré en fonction de son taux d'incapacité fonctionnelle et professionnelle par rapport à un tableau annexé à la notice ; qu'il précise, s'agissant du taux d'incapacité fonctionnelle, que celui-ci est apprécié en dehors de toute considération professionnelle et qu'il tient compte uniquement de la diminution de la capacité physique ou mentale de l'assuré suite à son accident ou à sa maladie par référence au barème d'évaluation des taux d'incapacité en droit commun (édition du concours médical la plus récente au jour de l'expertise) ; que s'agissant du taux d'incapacité professionnelle, il précise que ce taux est apprécié en fonction du degré et de la nature de l'incapacité de l'assuré par rapport à sa profession et qu'il tient compte de sa capacité à l'exercer antérieurement à la maladie ou à l'accident, des conditions d'exercice normales de sa profession et de ses possibilités d'exercice restantes, sans considération des possibilités de reclassement dans une profession différente ; que l'article 13 se poursuit, sous l'intitulé « taux d'incapacité du contrat d'assurance », par un tableau à double entrée croisant les taux d'incapacité professionnelle (de 30 à 100%) et fonctionnelle (de 60 à 100%) pour faire apparaître le taux d'incapacité résultant de chacune des combinaisons (de 48% à 100%) ; qu'il est précisé à la suite que si le taux d'incapacité fixé sur la base de ce tableau est égal ou supérieur à 66% les prestations de l'assureur sont maintenues mais que si le taux d'incapacité fixé sur la base de ce tableau est inférieur à 66%, aucune prestation n'est due par l'assureur ; qu'il en résulte sans ambigüité que la garantie incapacité de travail prévue à l'article 13 de la notice d'assurance suppose un taux d'incapacité globale minimum de 66%, calculé en fonction du taux d'incapacité professionnelle combiné au taux d'incapacité fonctionnelle, tel qu'il ressort du tableau à double entrée intégré dans la notice d'assurance ; que ces dispositions définissent les conditions de la garantie et le fait que l'incapacité inférieure à 66% ne soit pas garantie ne saurait s'analyser en une exclusion de garantie ; que selon le tableau à double entrée, le plus faible taux d'incapacité professionnelle pouvant permettre d'atteindre le taux d'incapacité de 66% est de 30%, lorsqu'il est conjugué à un taux d'incapacité fonctionnelle de 70% ; que le plus faible taux d'incapacité fonctionnelle pouvant permettre d'atteindre le taux d'incapacité requis est de 60% lorsqu'il est conjugué à un taux d'incapacité professionnelle de 80% ; que dès lors que le tableau à double entrée ne mentionne pas de taux d'incapacité fonctionnelle inférieur à 60%, sa simple lecture permet de comprendre qu'un taux d'incapacité fonctionnelle de 50%, peu important le taux d'incapacité professionnelle corrélatif, n'ouvre pas droit à garantie ; qu'il en résulte que les dispositions de l'article 13 n'ont pas pu laisser croire à Mme E... qu'elle pouvait bénéficier d'une prise en charge au titre de l'incapacité de travail postérieure à la consolidation de sorte qu'il n'y a pas lieu à interprétation du contrat en faveur de l'assuré ; qu'il ne saurait être reproché à l'assureur de ne pas préciser la formule de calcul du taux d'incapacité dès lors que le tableau se suffit à lui-même pour déterminer si le taux contractuel d'incapacité est atteint ; que de même, dès lors qu'en deçà du seuil de 66%, la garantie n'est pas mobilisable, il n'y avait pas lieu de faire figurer dans le tableau à double entrée des taux qui, combinés, ne permettent en aucun cas d'atteindre le seuil de 66% ; qu'il convient en conséquence d'infirmer le jugement déféré ;
1) ALORS QUE les clauses des contrats proposés par les professionnels aux consommateurs ou aux non professionnels doivent être présentées et rédigées de façon claire et compréhensible et en cas de doute, elles s'interprètent dans le sens le plus favorable aux consommateurs ou aux non professionnels ; qu'en l'espèce, pour débouter Mme E... de sa demande tendant à voir les SA BPCE vie et BPCE prévoyance à prendre en charge le montant des échéances de ses prêts, la cour d'appel a énoncé que l'article 13 de la notice d'assurance relatif à la garantie incapacité de travail prévoit un taux d'incapacité globale minimum de 66%, calculé en fonction du taux d'incapacité professionnelle combiné au taux d'incapacité fonctionnelle, tel qu'il ressort du tableau à double entrée intégré dans la notice d'assurance, que le fait que ce tableau ne mentionne pas de taux d'incapacité fonctionnelle inférieur à 60% permet à lui seul de comprendre qu'un taux d'incapacité fonctionnelle de 50%, peu important le taux d'incapacité professionnelle corrélatif, n'ouvre pas droit à garantie, que cet article ne pouvait laisser croire à l'assurée, même frappée d'une incapacité professionnelle de 100%, qu'elle pouvait bénéficier d'une prise en charge et que la formule du taux d'incapacité globale n'avait pas à figurer dans le contrat, le tableau se suffisant à lui-même ; qu'en statuant ainsi, cependant que la clause litigieuse, fondée sur l'application d'un tableau à double entrée incomplet ne permettant pas à Mme E... dont l'incapacité fonctionnelle partielle et l'incapacité professionnelle étaient fixées respectivement à 50% et à 100% de déterminer son taux global d'incapacité, n'était pas rédigée de façon claire et compréhensible et faisait naître un doute sur sa portée, de sorte qu'elle devait être interprétée dans le sens le plus favorable à l'assurée, la cour d'appel a violé l'article L. 133-2, alinéa 2 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable au litige;
2) ALORS QUE les clauses des contrats proposés par les professionnels aux consommateurs ou aux non professionnels doivent être présentées et rédigées de façon claire et compréhensible et en cas de doute, elles s'interprètent dans le sens le plus favorable aux consommateurs ou aux non professionnels ; qu'en énonçant en substance que la simple lecture de l'article 13 de la notice d'assurance relatif à la garantie incapacité de travail et en particulier de son tableau à double entrée suffisait à comprendre les limites de la garantie, quand l'expert judiciaire désigné pour déterminer le taux d'incapacité de l'assurée et les premiers juges avaient retenu que cette clause n'était pas rédigée clairement et ne permettait pas à l'assuré d'avoir connaissance de son taux d'incapacité et partant de la possibilité ou non de prise en charge, de sorte que la clause manquait manifestement de clarté et faisait naître un doute sur sa portée, la cour d'appel a violé l'article L. 133-2 dans sa rédaction applicable au litige.