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13/06/2019 | FRANCE | N°18-15293

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 13 juin 2019, 18-15293


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 23 novembre 2017), que le maire de la commune de Villesèquelande a accordé à M. et Mme S... un permis de construire sur une parcelle leur appartenant, en leur imposant la cession gratuite d'une bande de terrain nécessaire à l'élargissement d'un chemin communal ; que, en 2010, la commune a assigné M. et Mme S... pour faire reconnaître que la parcelle [...] , correspondant à cette bande de terrain, était devenue sa propriété ;

Sur le deuxième moye

n, ci-après annexé :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décisi...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 23 novembre 2017), que le maire de la commune de Villesèquelande a accordé à M. et Mme S... un permis de construire sur une parcelle leur appartenant, en leur imposant la cession gratuite d'une bande de terrain nécessaire à l'élargissement d'un chemin communal ; que, en 2010, la commune a assigné M. et Mme S... pour faire reconnaître que la parcelle [...] , correspondant à cette bande de terrain, était devenue sa propriété ;

Sur le deuxième moyen, ci-après annexé :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature entraîner la cassation ;

Mais sur le premier moyen, qui est recevable comme étant de pur droit :

Vu l'article 62 de la Constitution ;

Attendu que, pour accueillir la demande de la commune, l'arrêt retient que l'ancien article R. 332-15 du code de l'urbanisme, en vigueur jusqu'au 1er octobre 2007, disposait que l'autorité administrative ne pouvait exiger une cession gratuite de terrain que pour, notamment, l'élargissement des voies publiques et à la condition que les surfaces cédées ne représentent pas plus que 10 % de la surface du terrain sur lequel devait être édifiée la construction projetée et qu'ainsi, la cession gratuite de terrain prévue dans le permis de construire accordé à M. et Mme S... correspondait aux prescriptions de cet article tant dans sa surface que dans sa finalité ;

Qu'en statuant ainsi, alors que, par décision n° 2010-33 QPC du 22 septembre 2010, le Conseil constitutionnel a déclaré contraire à la Constitution le e du 2° de l'article L. 332-6-1 du code de l'urbanisme et précisé que la déclaration d'inconstitutionnalité prendrait effet à compter de la publication de celle-ci et pourrait être invoquée dans les instances en cours à cette date, dont l'issue dépendait de l'application des dispositions déclarées inconstitutionnelles, et alors que cette déclaration d'inconstitutionnalité prive de base légale l'article R. 332-15 du code de l'urbanisme, qui a été pris pour la mise en oeuvre de la disposition législative abrogée, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que la parcelle [...] située au lieudit le « trou des rosses » est devenue la propriété de la commune de Villesèquelande et rejette la demande de dommages-intérêts pour préjudice moral présentée par M. et Mme S..., l'arrêt rendu le 23 novembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi, sauf en ce qui concerne la demande de dommages-intérêts pour préjudice moral formée par M. et Mme S... ;
renvoie sur ce point la cause et les parties devant la cour d'appel de Toulouse ;

Rejette la demande de la commune de Villesèquelande tendant à voir dire que la parcelle [...] est devenue sa propriété ;

Condamne la commune de Villesèquelande aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la commune de Villesèquelande à payer à M. et Mme S... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize juin deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. et Mme S....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté les époux S... de leurs demandes tendant à voir rejeter l'ensemble des demandes de la commune de Villesequelande et d'AVOIR dit que la parcelle [...] , lieu-dit « [...] », commune de Villesequelande, est devenue la propriété de la commune de Villesequelande ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE, aux termes de l'arrêt attaqué, « les époux S... sont devenus propriétaires de la parcelle cadastrée [...] , commune de Villesequelande, lieu-dit "[...]", par acte authentique du 12 juillet 1993.
Le 15 avril 1993 la commune a délivré aux époux S... un permis de construire assorti notamment des prescriptions suivantes :
- la convention jointe en annexe sera respectée dans son intégralité.
- le pétitionnaire devra céder gratuitement à la commune, dans la limite de 10 % de la surface du terrain sur lequel doit être édifiée la construction, une bande de terrain le long du chemin communal en vue de l'élargissement de la voie.
- le nouvel alignement sera demandé aux services municipaux.
Le 7 mai 1993 un permis de construire modificatif a été accordé aux époux S... avec la précision que les prescriptions et observations émises lors de la délivrance du permis de construire d'origine restaient maintenues.
La bande de terrain devant être cédée gratuitement à la commune correspond à la parcelle [...] .
L'ancien article R. 332-15 du code de l'urbanisme en vigueur jusqu'au 1er octobre 2007 stipulait que l'autorité administrative ne peut exiger une cession gratuite de terrain que pour, notamment, l'élargissement des voies publiques et à la condition que les surfaces cédées ne représentent pas plus que 10 % de la surface du terrain sur lequel doit être édifiée la construction projetée.
Ainsi la cession gratuite de terrain prévue dans le permis de construire accordé aux époux S... correspondait parfaitement aux prescriptions de cet article tant dans sa surface que dans sa finalité, soit l'élargissement du chemin communal.
Les époux S..., dans une convention du 7 janvier 1993, préalable à l'obtention du permis de construire, s'étaient engagés à consentir à la commune cette cession gratuite de terrain et à déposer une demande d'alignement avant de réaliser leur clôture.
C'est la raison pour laquelle la commune a délivré le permis de construire sous les prescriptions du respect de cette convention et de la cession gratuite de la bande de terrain.
L'absence de régularisation de cette cession par acte authentique ne prive pas d'effet l'accord ferme et définitif des parties pour la cession gratuite par les époux S... à la commune de Villesequelande de la parcelle [...] .
[
]
Il convient donc de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté les époux S... de leurs demandes et en ce qu'il a dit que la parcelle [...] est devenue la propriété de la commune de Villesequelande » ;

ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTÉS QUE, aux termes du jugement entrepris, « il résulte de l'article 1134 du Code civil, que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et doivent être exécutées de bonne foi.
En l'espèce, aux termes d'une convention signée le 07 janvier 1993 T... S... et X... R... (désormais épouse S...) se sont engagés à céder gratuitement à la commune de VILLESEQUELANDE dans la limite de 10 % de la surface de leur terrain le long du chemin communal en vue de l'élargissement de la voie.
Il n'est pas contesté que dès le 7 janvier 1993, les défendeurs ont accepté de supporter une telle obligation laquelle a été reprise dans le permis de construire qui leur a été délivrée le 15 avril 1993 et n'a pas exécutée à ce jour.
Certes, il n'est justifié qu'entre les années 1993 et 2009 les époux S... auraient refusé de régulariser devant un notaire l'acte constatant la cession au profit de la commune de la surface de terrain convenue.
Cependant, le seul fait que la commune de VILLESEQUELANDE ait attendu le 25 octobre 2010 pour faire délivrer une assignation en justice aux époux S... concernant cette cession à titre gratuit ne suffit pas à faire échec à la demande de déclaration judiciaire de cette cession.
En vertu de l'article 1156 du Code civil, on doit dans les conventions rechercher quelle a été la commune intention des parties contractantes, plutôt que de s'arrêter au sens littéral des termes.
En l'espèce, la commune de VILLESEQUELANDE demande de dire que la parcelle [...] située lieu-dit "[...]" sur le territoire communal et d'une contenance de 90 m2 est devenue sa propriété par application de la convention signée le 07 janvier 1993.
Cette convention stipule justement que la cession à titre gratuit vise à permettre l'élargissement de l'emprise de la voie, avant de réaliser la clôture en bordure du chemin communal.
Il n'est pas contesté que la parcelle [...] que les parties revendiquent chacune est située dans un endroit tel qu'il permettra à la commune de VILLESEQUELANDE d'atteindre l'objectif fixée dans la convention du 07 janvier 1993 et de participer à la desserte du lotissement conçu depuis cette date.

Il apparaît enfin, que la parcelle litigieuse est inférieure au seuil contractuel de 10 % convenu entre les parties puisque la surface totale du terrain achetée par les époux S... le 12 juillet 19932 s'élève à 1707 m2.
Au vu de l'ensemble de ces éléments, il apparaît donc justifié de :
- dire que la parcelle [...] [...] d'une contenance de 90 m 2 est devenue la propriété de cette commune.
- dire que le présent jugement tient lieu d'acte authentique de propriété et sera publié à la conservation des hypothèques de CARCASSONNE.
- débouter les époux S... de leur demande tendant à dire que la parcelle [...] [...] d'une contenance de 90 m2 est leur propriété » ;

ALORS en premier lieu QUE les articles 61-1 et 62 de la Constitution énoncent qu'une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 précité est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision ; qu'en l'espèce, le 22 septembre 2010 (n° 2010-33 QPC), le Conseil constitutionnel a déclaré contraire à la Constitution l'article L. 332-6-1, 2° e) du Code de l'urbanisme et que la déclaration d'inconstitutionnalité prend effet à compter de la publication de la décision, intervenue le 23 septembre 2010 ; qu'il a précisé que sa décision peut être invoquée dans les instances en cours à cette date et dont l'issue dépend de l'application des dispositions déclarées inconstitutionnelles ; qu'en retenant pourtant, le 23 novembre 2017, que « l'ancien article R. 332-15 du code de l'urbanisme en vigueur jusqu'au 1er octobre 2007 stipulait que l'autorité administrative ne peut exiger une cession gratuite de terrain que pour, notamment, l'élargissement des voies publiques et à la condition que les surfaces cédées ne représentent pas plus que 10 % de la surface du terrain sur lequel doit être édifiée la construction projetée » et que « les époux S..., dans une convention du 7 janvier 1993, préalable à l'obtention du permis de construire, s'étaient engagés à consentir à la commune cette cession gratuite de terrain et à déposer une demande d'alignement avant de réaliser leur clôture » (arrêt, p. 4, § 10 et pénultième), pour en déduire qu'il « convient donc de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté les époux S... de leurs demandes et en ce qu'il a dit que la parcelle [...] est devenue la propriété de la commune de Villesequelande » (ibid., p. 5, § 5), la Cour d'appel, qui a méconnu l'autorité de la décision n° 2010-33 QPC du Conseil constitutionnel du 22 septembre 2010, a violé les articles 61-1 et 62 de la Constitution du 4 octobre 1958 dans leur rédaction issue de la loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008, ensemble de la loi organique du 10 décembre 2009 prise pour son application ;

ALORS en second lieu QUE, subsidiairement, si les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites, elles peuvent être révoquées de leur consentement mutuel ; qu'en décidant uniquement que « les époux S..., dans une convention du 7 janvier 1993, préalable à l'obtention du permis de construire, s'étaient engagés à consentir à la commune cette cession gratuite de terrain et à déposer une demande d'alignement avant de réaliser leur clôture » (arrêt, p. 4, pénultième §), pour en conclure qu'il « convient donc de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté les époux S... de leurs demandes et en ce qu'il a dit que la parcelle [...] est devenue la propriété de la commune de Villesequelande » (ibid., p. 5, § 5), sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée (conclusions des exposants, p. 4, § 2 à dernier, et p. 5, § 1, 3 et 5), si le fait que la commune valide postérieurement diverses constructions sur la parcelle litigieuse ne témoignait pas d'un accord unanime des parties de renoncer au projet de cession gratuite initialement envisagée au profit de la commune, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil, dans sa version alors applicable ;

DEUXIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté les époux S... de leur demande de fin de non-recevoir tirée de la prescription acquisitive immobilière abrégée à leur profit concernant la parcelle cadastrée [...] et d'AVOIR dit que la parcelle [...] , lieu-dit « [...] », commune de Villesequelande, est devenue la propriété de la commune de Villesequelande ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE, aux termes de l'arrêt attaqué, « c'est à tort que les appelants revendiquent le bénéfice de la prescription acquisitive abrégée.
S'ils sont titulaires d'un juste titre pour avoir acquis par acte authentique la parcelle litigieuse le 12 juillet 1993, ils sont mal fondés à soutenir en être demeurés en possession de bonne foi, de manière non équivoque et à titre de propriétaires.
En effet ils ne pouvaient pas continuer à posséder sans équivoque et à titre de propriétaires alors qu'ils s'étaient engagés par convention à céder cette parcelle et que le permis de construire leur avait été accordé sous cette prescription à laquelle ils avaient souscrit préalablement.
Il convient donc de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté les époux S... de leurs demandes et en ce qu'il a dit que la parcelle [...] est devenue la propriété de la commune de Villesequelande » ;

ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTÉS QUE, aux termes du jugement entrepris, « à titre liminaire, il convient de rappeler que par application de l'article 12 du Code de procédure civile, le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables.

Selon le nouvel article 2272 du Code civil (anciennement connu sous l'article 2279 avant l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008), le délai de prescription requis pour acquérir la propriété immobilière est de trente ans.
Toutefois, celui qui acquiert de bonne foi et par juste titre un immeuble en prescrit la propriété par dix ans.
Les articles 2274 et 2275 du même Code disposent que la bonne foi est toujours présumée et qu'il suffit que celle-ci ait existé au moment de l'acquisition.
En l'espèce, les défendeurs se prévalent de la prescription acquisitive sur l'intégralité de la parcelle cadastrée [...] au lieudit "[...]" située sur la commune de VILLESEQUELANDE d'une contenance de 90 m2 et ils versent aux débats, plusieurs pièces dont un acte authentique de vente en date du 12 juillet 1993.
Il ressort de ce document qu'André M... et Michèle M... ont vendu à X... R... et à T... S... "une parcelle de terrain à bâtir avec chemin attenant sise sur le territoire de la commune de VILLESEQUELANDE et figurant au cadastre rénové de ladite commune sous les relations suivantes, à savoir :
A : 1111 "[...]" 16 : 17
A : 1112 "[...]" 00 : 90".
A la lecture de ce document, il apparaît donc que les époux S... bénéficient d'un titre de propriété sur la parcelle litigieuse depuis le 12 juillet 1993 et répondent donc à la première condition légale pour invoquer la prescription acquisitive immobilière abrégée.
Il résulte par ailleurs, des pièces produites par la commune de VILLESEQUELANDE, qu'aux termes d'une convention signée le 7 janvier 1993 par le maire et les défendeurs à la présente instance, il a été convenu que "le pétitionnaire devra consentir à la commune une cession gratuite de terrain dans la limite des 10 % de la superficie totale de sa parcelle [...] afin de permettre l'élargissement de l'emprise de la voie, avant de réaliser la clôture en bordure du chemin communal, il déposera à la mairie une demande d'alignement".
Il est enfin, versé aux débats le permis de construire délivré par le maire le 15 avril 1993 aux époux S... et il s'avère, que celui-ci a été assorti de diverses prescriptions parmi lesquelles figure l'obligation pour le pétitionnaire de céder gratuitement à la commune, dans la limite de 10 % de la surface du terrain le long du chemin communal en vue de l'élargissement de la voie.
L'analyse de ces différents documents démontre que les époux S... ont expressément accepté de céder à titre gratuit une partie des biens immobiliers dont ils ont fait par la suite l'acquisition, le 12 juillet 1993.
Dans ces conditions, il convient de considérer qu'à la date du 12 juillet 1993 les défendeurs avaient précisément connaissance de l'engagement contractuel pris auprès de la commune de VILLESEQUELANDE et de la nécessité pour eux de céder à cette dernière 10 % de la surface de leur terrain.

Compte tenu du fait que les époux S... n'ignoraient pas qu'ils ne pouvaient pas rester propriétaires de 10 % maximum de la surface de leur terrain en application de la convention signée le 7 janvier 1993, ils ne peuvent donc invoquer utilement la bonne foi et de nature à faire naître à leur profit une prescription acquisitive immobilière abrégée.
En conséquence, il convient de débouter les époux S... de la fin de non-recevoir tirée de la prescription acquisitive immobilière abrégée à leur profit concernant la parcelle cadastrée [...] » ;

ALORS en premier lieu QUE pour pouvoir prescrire, il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaire ; que le vice d'équivoque est toutefois sans relation avec la mauvaise foi, l'équivoque supposant le doute dans l'esprit des tiers, mais non dans celui du possesseur ; qu'en l'espèce, les juges du fond ont admis que les époux S... bénéficient d'un titre de propriété sur la parcelle litigieuse depuis l'acte authentique de vente en date du 12 juillet 1993 (jugement confirmé, p. 3, antépénultième et pénultième § ; arrêt, p. 4, § 3), c'est-à-dire qu'à l'égard des tiers, les époux S... sont les seuls propriétaires de la parcelle litigieuse, une prescription de cession n'emportant pas, par elle-même, cession effective ; qu'en décidant pourtant que les époux S... « ne pouvaient pas continuer à posséder sans équivoque et à titre de propriétaires alors qu'ils s'étaient engagés par convention à céder cette parcelle et que le permis de construire leur avait été accordé sous cette prescription à laquelle ils avaient souscrit préalablement » (arrêt, p. 5, § 4), la cour d'appel a violé les articles 2261 et 2272 du Code civil ;

ALORS en deuxième lieu QUE le délai de prescription requis pour acquérir la propriété immobilière est de trente ans ; que, toutefois, celui qui acquiert de bonne foi et par juste titre un immeuble en prescrit la propriété par dix ans ; que la bonne foi consiste en la croyance de l'acquéreur en sa légitime propriété ; qu'en décidant que les époux S... « sont mal fondés à soutenir en être demeurés en possession de bonne foi, de manière non équivoque et à titre de propriétaires » (arrêt, p. 5, § 3), car « compte tenu du fait que les époux S... n'ignoraient pas qu'ils ne pouvaient pas rester propriétaires de 10 % maximum de la surface de leur terrain en application de la convention signée le 7 janvier 1993, ils ne peuvent donc invoquer utilement la bonne foi et de nature à faire naître à leur profit une prescription acquisitive immobilière abrégée » (jugement confirmé, p. 4, § 5), sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée (conclusions des exposants, p. 4, § 2 à dernier, et p. 5, § 1 et 3 à 5), si le fait que la commune valide diverses constructions sur la parcelle litigieuse ne pouvait pas légitimement faire croire aux époux S... que celle-ci renonçait à en solliciter ultérieurement la cession gratuite à son profit, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2272 du Code civil ;

ALORS en troisième lieu QUE le délai de prescription requis pour acquérir la propriété immobilière est de trente ans ; que, toutefois, celui qui acquiert de bonne foi et par juste titre un immeuble en prescrit la propriété par dix ans ; que la bonne foi consiste en la croyance de l'acquéreur en sa légitime propriété ; qu'en décidant que les époux S... « sont mal fondés à soutenir en être demeurés en possession de bonne foi, de manière non équivoque et à titre de propriétaires » (arrêt, p. 5, § 3), car « compte tenu du fait que les époux S... n'ignoraient pas qu'ils ne pouvaient pas rester propriétaires de 10 % maximum de la surface de leur terrain en application de la convention signée le 7 janvier 1993, ils ne peuvent donc invoquer utilement la bonne foi et de nature à faire naître à leur profit une prescription acquisitive immobilière abrégée » (jugement confirmé, p. 4, § 5), sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée (conclusions des exposants, p. 5, § 6 à 10), si le fait que la commune ne donne pas suite, durant plus de 17 ans, au projet de cession gratuite ne pouvait pas légitimement faire croire aux époux S... que celle-ci renonçait à son projet, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2272 du Code civil ;

TROISIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Le moyen fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté les époux S... de leur demande de dommages et intérêts au titre de leur préjudice moral ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE, aux termes de l'arrêt attaqué, « en l'état les demandes de dommages et intérêts formulées par les époux S... sont infondées et il convient de les rejeter » ;

ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTÉS QUE, aux termes du jugement entrepris, « selon l'article 1382 du Code civil, tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
Eu égard au fait que la demande principale de la commune de VILLESEQUELANDE concernant la propriété de la parcelle [...] lieu-dit "[...]" a été accueillie par la juridiction, il convient de débouter les époux S... de leur demande d'indemnisation à hauteur de 15 000 € au titre du préjudice moral » ;

ALORS QUE tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ; qu'en décidant uniquement que, « eu égard au fait que la demande principale de la commune de VILLESEQUELANDE concernant la propriété de la parcelle [...] lieu-dit "[...]" a été accueillie par la juridiction, il convient de débouter les époux S... de leur demande d'indemnisation à hauteur de 15 000 € au titre du préjudice moral » (jugement confirmé, p. 5, pénultième §), sans rechercher, comme ils y étaient pourtant invités (conclusions d'appel des exposants, p. 5, § 8 à 10, et p. 9, trois derniers §), si, par-delà le droit éventuel de la commune à solliciter la cession gratuite de la parcelle litigieuse, le fait d'avoir attendu 17 années pour assigner les époux S..., sans jamais les avoir sommés de régulariser l'acte authentique dans l'étude d'un notaire, ne constituait pas une faute leur ayant causé un préjudice, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil, désormais l'article 1240 du même code ;


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 18-15293
Date de la décision : 13/06/2019
Sens de l'arrêt : Cassation partielle partiellement sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 23 novembre 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 13 jui. 2019, pourvoi n°18-15293


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.15293
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