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05/06/2019 | FRANCE | N°18-13226

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 05 juin 2019, 18-13226


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 11 janvier 2018), que, suivant offre acceptée le 11 mai 2006, la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Alpes-Provence (la banque) a consenti à Mme P... (l'emprunteur) un prêt immobilier de 141 739 euros, réaménagé par avenant du 26 juin 2008 ; que, suivant acte notarié du 5 décembre 2008, la banque a consenti à l'emprunteur un prêt relais d'un montant de 200 000 euros ; qu'une ordonnance de référé du 22 avril 2010, signifiée le 6 mai 2010, a

ordonné la suspension des échéances du prêt pour une durée de vingt-quat...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 11 janvier 2018), que, suivant offre acceptée le 11 mai 2006, la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Alpes-Provence (la banque) a consenti à Mme P... (l'emprunteur) un prêt immobilier de 141 739 euros, réaménagé par avenant du 26 juin 2008 ; que, suivant acte notarié du 5 décembre 2008, la banque a consenti à l'emprunteur un prêt relais d'un montant de 200 000 euros ; qu'une ordonnance de référé du 22 avril 2010, signifiée le 6 mai 2010, a ordonné la suspension des échéances du prêt pour une durée de vingt-quatre mois à compter de la signification, et reporté le remboursement du prêt relais au 1er octobre 2010 ; que, par acte du 3 janvier 2014, la banque a assigné l'emprunteur en paiement ;

Sur le premier moyen :

Attendu que l'emprunteur fait grief à l'arrêt de dire que l'action de la banque n'est pas prescrite et de le condamner à lui payer la somme de 157 304,96 euros avec intérêts au taux de 3,53 % à compter du 6 octobre 2014, alors, selon le moyen :

1°/ que des pourparlers transactionnels ne sont pas constitutifs d'une reconnaissance de dette interruptive du délai de prescription ; qu'en retenant que les courriers du 26 janvier 2011 et du 28 février 2012 avaient eu un effet interruptif de prescription tout en constatant qu'ils avaient uniquement pour objet de trouver une solution amiable au différend opposant la banque et l'emprunteur, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a ainsi violé l'article 2240 du code civil ;

2°/ qu'en toute hypothèse, la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait suppose un aveu non équivoque ; qu'en retenant que les courriers du 26 janvier 2011 et du 28 février 2012 avaient eu un effet interruptif de prescription, sans constater l'existence d'un aveu clair et non équivoque de l'existence de la créance de la banque, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2240 du code civil ;

3°/ que la suspension des échéances d'un prêt à compter de la signification de la décision de justice la prononçant ne fait pas obstacle à ce que le créancier poursuive le paiement des mensualités échues avant ladite signification ; qu'en retenant, pour exclure la prescription de la créance de la banque, que la banque n'avait pu agir en paiement contre l'emprunteur pendant tout le temps de la suspension de ces échéances, sans rechercher si des mensualités échues antérieurement, et par conséquent non suspendues, n'étaient pas demeurées impayées, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 313-12 ancien du code de la consommation, ensemble l'article 2234 du code civil ;

4°/ qu'en toute hypothèse, par l'ordonnance en date du 22 avril 2010, le président du tribunal d'instance de Marseille a ordonné « la suspension des échéances du contrat du prêt immobiliers n° [...] souscrit le 29 avril 2006 auprès du Crédit agricole, pendant une durée de 24 mois et ce à compter de la signification de la présente ordonnance » ; qu'en retenant, pour exclure la prescription de la créance de la banque, que, par ladite ordonnance, l'emprunteur avait obtenu un « report du paiement du prêt », quand il résultait des termes de l'ordonnance que n'avaient été suspendues que les échéances postérieures à sa signification, la cour d'appel a dénaturé ladite ordonnance, en violation du principe selon lequel le juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause ;

Mais attendu que l'arrêt relève, d'abord, que la décision du juge des référés, ayant ordonné la suspension du prêt amortissable pendant vingt-quatre mois à compter de la signification de l'ordonnance et reporté le remboursement du prêt relais au 1er octobre 2010, a un effet interruptif à la date de signification de l'ordonnance, intervenue le 6 mai 2010 ; qu'il retient, ensuite, que, par lettre du 26 janvier 2011, l'emprunteur a manifesté sa volonté d'aboutir à une résolution amiable de réaménagement de la créance avec effet au mois de juillet 2012 et qu'il a réitéré cette volonté par courrier électronique le 28 février 2012, dans lequel il exprimait son interrogation sur l'intégration du prêt amortissable dans l'acte d'accord ; qu'ayant ainsi fait ressortir que l'emprunteur avait, dans ces actes, reconnu clairement et sans équivoque la créance de la banque, la cour d'appel a pu en déduire, sans avoir à procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, et sans dénaturation, que lesdits actes avaient interrompu la prescription, de sorte que l'action en paiement de la banque était recevable ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que l'emprunteur fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable, comme prescrite, sa demande, alors, selon le moyen :

1°/ que le moyen tiré de la responsabilité d'une banque pour manquement à ses devoirs d'information et de mise en garde ne tend qu'au rejet de la demande en paiement formulée contre le débiteur et constitue un moyen de défense au fond, sur lequel la prescription est sans incidence ; qu'en déclarant l'emprunteur irrecevable, en raison de la prescription, en sa demande tendant à voir constater le manquement de la banque à ses devoirs d'information et de mise en garde, quand la prescription devait être sans incidence sur un tel moyen, la cour d'appel a violé, ensemble, les articles 71 du code de procédure civile et 2224 du code civil ;

2°/ que le juge doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée ; qu'en retenant, pour déclarer l'emprunteur irrecevable, en raison de la prescription, en sa demande tendant à voir constater le manquement de la banque à ses devoirs d'information et de mise en garde, que l'emprunteur avait formulé une demande reconventionnelle, de sorte que la règle selon laquelle la prescription ne s'applique pas aux exceptions opposées à la demande principale ne pouvait jouer en sa faveur, quand il revenait au juge de restituer au moyen tiré de la responsabilité de la banque sa qualification de défense au fond, la cour d'appel a violé l'article 12 du code de procédure civile, ensemble les articles 71 du même code et 2224 du code civil, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu que l'action en responsabilité contre la banque pour manquement à son devoir de mise en garde, formée en réponse à l'action en paiement engagée par celle-ci, constitue une demande reconventionnelle aux fins d'allocation d'une indemnité pour perte de chance, dont la prescription court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il s'est révélé à la victime ; que la cour d'appel a retenu, à bon droit, que la demande litigieuse était une demande reconventionnelle dont elle a fixé le point de départ du délai de prescription au 12 mai 2010, date de la vente d'un immeuble de l'emprunteur au prix de 140 000 euros, alors qu'il avait été évalué en 2008 par la banque à 200 000 euros, caractérisant ainsi la connaissance du dommage ; qu'elle en a déduit exactement que, formée par conclusions du 26 mai 2015, une telle demande était atteinte par la prescription ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme P... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq juin deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour Mme P...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que l'action de la CRCAM Alpes Provence n'était pas prescrite, et d'avoir condamné Mme C... P... à verser à la CRCAM Alpes Provence la somme de 157 304,96 euros avec intérêts au taux de 3,53 % à compter du 6 octobre 2014 ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE Mme P... soutient que l'action en paiement de la banque au titre du prêt [...] est prescrite depuis le 6 septembre 2013 ; qu'elle se prévaut des dispositions de l'article L. 137-2 du code de la consommation ; qu'elle soutient que le délai de deux ans a pris naissance à compter de la première échéance impayée, soit celle du mois d'octobre 2009, et que l'ordonnance de référé du 22 avril 2010 a suspendu, et non interrompu le délai de la prescription, de sorte qu'il tient lieu de décompter sept mois du 1er octobre 2009 au 6 mai 2010 ; qu'elle fait valoir que l'assignation du 3 janvier 2014 a été délivrée alors que la prescription était acquise depuis le 6 septembre 2013 ; qu'elle conteste toute reconnaissance de dette et se prévaut des échanges de mails entre les parties ; qu'elle soutient qu'elle n'a jamais été d'accord sur le montant des sommes à rembourser, notamment sur celle de 147 873,73 euros, et que les pourparlers transactionnels n'ont pas interrompu la prescription ; que le Crédit agricole expose que le premier incident de paiement a eu lieu en octobre 2009 et que l'assignation en référé du 10 février 2010 a interrompu le délai de prescription ; qu'il indique que l'ordonnance a accordé à l'emprunteuse une suspension des échéances pendant 24 mois à compter de la signification de ladite ordonnance ; qu'il affirme qu'aucune mesure de poursuite ou d'exécution ne pouvait avoir lieu durant la suspension des échéances et que la prescription n'a commencé à courir que le 6 mai 2012 de sorte que la dette n'était pas prescrite lors de l'assignation du 3 janvier 2014 ; qu'il se prévaut de la prescription au fur et à mesure de l'exigibilité des échéances et non de manière indivisible à compter du premier incident surtout lorsqu'un moratoire a été accordé ; qu'il fait valoir, à titre subsidiaire, que la débitrice a reconnu à plusieurs reprises l'existence et l'ampleur de la dette, et que cette reconnaissance a interrompu la prescription pour la dernière fois le 23 août 2012 ; qu'il rappelle que Mme P... souhaitait payer sa dette à l'amiable sous réserve d'aménagement divers ; que la demande en justice n'interrompt la prescription qu'au profit de son auteur ; que l'assignation en référé qui n'émanait pas de la banque n'a pu avoir d'effet interruptif au profit de cette dernière ; mais qu'aux termes de l'article 2240 du code civil, la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait interrompt le délai de prescription ; que l'acte interruptif résultant d'une reconnaissance par le débiteur du droit du créancier fait courir à compter de sa date un nouveau délai de prescription ; que Mme P... a saisi le juge des référés notamment aux fins de suspension, d'une part, des mensualités du prêt immobilier amortissable ainsi que de la déchéance du terme, et d'autre part, des mensualités du prêt relais ; qu'elle a, en outre, demandé que les échéances reportées ne produisent pas d'intérêts et que les paiements effectués s'imputent d'abord sur le capital ; que ce faisant, Mme P... a reconnu le principe de sa dette ; que par ordonnance du 22 avril 2010, le président du tribunal d'instance de Marseille statuant en référé a ordonné la suspension du prêt amortissable pendant une durée de 24 mois à compter de la signification de l'ordonnance et dit que le remboursement du prêt relais sera reporté au 1er octobre 2010 ; qu'ainsi, l'action de la banque a été interrompue tandis qu'un nouveau délai de deux ans a couru à compter de la notification de l'ordonnance en date du 6 mai 2010 ; que par courrier du 26 janvier 2011, Mme P... a manifesté sa volonté d'aboutir à une résolution amiable du réaménagement de la créance à effet au mois de juillet 2012 et a réitéré sa volonté par courriel du 28 février 2012 aux termes duquel elle a seulement exprimé son interrogation sur l'intégration du prêt amortissable au protocole ; qu'elle a honoré les échéances des mois de juillet et août 2012 du prêt amortissable, reconnaissant à nouveau le droit du créancier ; que l'éventuelle discussion sur le montant exact des sommes dues est dès lors sans incidence ; qu'il s'infère de ces développements que la prescription n'était pas acquise au moment de la délivrance de l'assignation du 3 janvier 2014 ; que le moyen est rejeté ;

ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTÉS QU'aux termes de l'article 2241 du Code civil, la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion ; que l'article 2240 du Code civil dispose que la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait interrompt le délai de prescription ; que Mme P..., qui a saisi elle-même le tribunal d'instance d'une demande de report du paiement du prêt dans l'attente de la vente de son appartement, a obtenu ce report par ordonnance du 22 avril 2010 ; que contrairement à ce qu'elle argue, cette décision lui a été signifiée le 6 mai 2010 ; que durant le temps où la suspension du paiement lui a bénéficié, la prescription a été suspendue et n'a recommencé à courir qu'à compter du 6 mai 2012 ; que contrairement à ce qu'argue Mme P..., la banque n'avait pas, durant ce temps, à l'assigner en paiement, dès lors qu'une décision de justice suspendait le cours d'exécution du contrat ; qu'il en découle que lorsque la banque a délivré son assignation en paiement le 3 janvier 2014, sa dette n'était nullement prescrite ; que de plus, Mme P... a donné par courrier et courriel, en date du 29 juin 2011, son accord afin d'engager le protocole transactionnel, ce qui permet de considérer qu'à ces deux reprises, l'emprunteur a reconnu le droit du CREDIT AGRICOLE à son encontre, ce qui a également pour effet d'interrompre le délai de prescription ; que qui plus est, Mme P... par le paiement effectué te 23 aout 2012, par chèque de 1.655,44 euros au titre de deux mensualités de retard sur les échéances de remboursement du prêt référencé CO4QRZ012PR, atteste de le reconnaissance de l'existence de la créance du CREDIT AGRICOLE en vertu dudit prêt ; qu'il résulte de ces éléments que l'action engagée par le CREDIT AGRICOLE n'est pas prescrite ;

1° ALORS QUE des pourparlers transactionnels ne sont pas constitutifs d'une reconnaissance de dette interruptive du délai de prescription ; qu'en retenant que les courriers du 26 janvier 2011 et du 28 février 2012 avaient eu un effet interruptif de prescription tout en constatant qu'ils avaient uniquement pour objet de trouver une solution amiable au différend opposant la CRCAM Alpes Provence et Mme P..., la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a ainsi violé l'article 2240 du code civil ;

2° ALORS QU'en toute hypothèse, la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait suppose un aveu non équivoque ; qu'en retenant que les courriers du 26 janvier 2011 et du 28 février 2012 avaient eu un effet interruptif de prescription, sans constater l'existence d'un aveu clair et non équivoque de l'existence de la créance de la banque, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2240 du code civil ;

3° ALORS QUE la suspension des échéances d'un prêt à compter de la signification de la décision de justice la prononçant ne fait pas obstacle à ce que le créancier poursuive le paiement des mensualités échues avant ladite signification ; qu'en retenant, pour exclure la prescription de la créance de la banque, que la banque n'avait pu agir en paiement contre Mme P... pendant tout le temps de la suspension de ces échéances, sans rechercher si des mensualités échues antérieurement, et par conséquent non suspendues, n'étaient pas demeurées impayées, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 313-12 ancien du code de la consommation, ensemble l'article 2234 du code civil ;

4° ALORS QU'en toute hypothèse, par l'ordonnance en date du 22 avril 2010, le président du tribunal d'instance de Marseille a ordonné « la suspension des échéances du contrat du prêt immobiliers n° [...] souscrit le 29 avril 2006 auprès du Crédit Agricole, pendant une durée de 24 mois et ce à compter de la signification de la présente ordonnance » ; qu'en retenant, pour exclure la prescription de la créance de la banque, que, par ladite ordonnance, Mme P... avait obtenu un « report du paiement du prêt », quand il résultait des termes de l'ordonnance que n'avaient été suspendues que les échéances postérieures à sa signification, la cour d'appel a dénaturé ladite ordonnance, en violation du principe selon lequel le juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré Mme P... irrecevable en sa demande reconventionnelle au titre du non-respect, par la Caisse régionale Alpes Provence Crédit Agricole de son devoir d'information et de conseil ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE la prescription d'une action en responsabilité court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance ; que le dommage résultant d'un manquement à l'obligation de mise en garde consistant en une perte de chance de ne pas contracter se manifeste envers l'emprunteur dès l'octroi des crédits ; que Mme P... ne conteste pas avoir formé pour la première fois par voie de conclusions du 26 mai 2015 une demande reconventionnelles de dommages et intérêts à l'encontre du Crédit agricole ; qu'elle invoque vainement l'interruption de la prescription par l'effet de l'inscription d'hypothèque judiciaire conservatoire réalisée par le banquier et qui ne peut lui profiter ; que son action en responsabilité est prescrite compte tenu de la date de l'emprunt ; qu'en toute hypothèse, elle a eu en sa possession plusieurs évaluations et a eu connaissance du dommage lors de la vente du bien immobilier au premier trimestre 2010 en sorte que la prescription a été acquise du fait de l'expiration du délai quinquennal ; qu'il y a lieu de confirmer le jugement de ce chef ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'aux termes de l'article 2224 du Code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; il est constant que si la prescription de droit commun ne s'applique pas aux exceptions opposées à la demande principale, cette règle ne joue pas en cas de demande reconventionnelle ; qu'en l'espèce, dans la mesure où Mme P... reproche à la banque d'avoir surévaluée le montant de sa maison, à une valeur de 200.000 euros alors qu'elle n'est parvenu à vendre ladite maison qu'au cours du 1er trimestre 2010 pour un montant de 140.000 euros, l'emprunteur a nécessairement eu connaissance de la surévaluation litigieuse au plus tard au 31 mars 2010 ; qu'or Mme P... a formulé pour la première fois dans des conclusions notifiées le 26 mai 2015, sa demande en responsabilité du banquier pour manquement à son devoir d'information et de conseil ; que son droit se trouvait prescrit depuis le 31 mars 2015 et elle sera déclarée irrecevable de ce chef ;

1° ALORS QUE le moyen tiré de la responsabilité d'une banque pour manquement à ses devoirs d'information et de mise en garde ne tend qu'au rejet de la demande en paiement formulée contre le débiteur et constitue un moyen de défense au fond, sur lequel la prescription est sans incidence ; qu'en déclarant Mme P... irrecevable, en raison de la prescription, en sa demande tendant à voir constater le manquement de la banque à ses devoirs d'information et de mise en garde, quand la prescription devait être sans incidence sur un tel moyen, la cour d'appel a violé, ensemble, les articles 71 du code de procédure civile et 2224 du code civil ;

2° ALORS QUE le juge doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée ; qu'en retenant, pour déclarer Mme P... irrecevable, en raison de la prescription, en sa demande tendant à voir constater le manquement de la banque à ses devoirs d'information et de mise en garde, que Mme P... avait formulé une demande reconventionnelle, de sorte que la règle selon laquelle la prescription ne s'applique pas aux exceptions opposées à la demande principale ne pouvait jouer en sa faveur (jugement, p. 9, al. 10 et pén. al.), quand il revenait au juge de restituer au moyen tiré de la responsabilité de la banque sa qualification de défense au fond, la cour d'appel a violé l'articles 12 du code de procédure civile, ensemble, les articles 71 du même code et 2224 du code civil, ensemble l'article 6§1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 18-13226
Date de la décision : 05/06/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 11 janvier 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 05 jui. 2019, pourvoi n°18-13226


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Bouzidi et Bouhanna

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.13226
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