LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, ci-après annexé :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 24 novembre 2016), que la société Pharmacie C..., locataire de locaux à usage de pharmacie appartenant à la SCI Cyliel, l'a assignée en indemnisation des dommages causés par des infiltrations survenues après la destruction par incendie d'un immeuble mitoyen, appartenant également à la SCI Cyliel ;
Attendu que le locataire fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes ;
Mais attendu qu'ayant relevé que la demande ne portait pas sur les travaux d'étanchéité des mur et terrasse, qui avaient été réalisés par le bailleur pour mettre fin aux infiltrations, mais sur les conséquences de ces infiltrations, lesquelles n'avaient pas empêché l'exploitation de l'activité dans les locaux, et souverainement retenu que la clause qui déchargeait la bailleresse de toute responsabilité pour les dommages causés par des infiltrations ne distinguait pas selon leur origine, la cour d'appel a pu en déduire que la bailleresse n'avait pas manqué à son obligation de délivrance et faire application de la clause d'exonération de responsabilité du bailleur ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Pharmacie C... et M. C... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Pharmacie C... et M. C... et les condamne à payer à la SCI Cyliel la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze mars deux mille dix-neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Boullez, avocat aux Conseils, pour la société Pharmacie C... et M. C...
Le pourvoi fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR écarté l'action en responsabilité que la société PHARMACIE C... avait formée contre son bailleur à raison des dommages imputables à l'incendie d'un local voisin dont il était également propriétaire ;
AUX MOTIFS QUE la locataire sollicite la prise en charge par le bailleur des conséquences financières d'un dégât des eaux constaté par procès verbal du 3 novembre 2008 dressé par Maître X... huissier et au sujet duquel Monsieur S..., expert judiciaire qui avait été désigné par ordonnance de référé du 10 septembre 2010, a rédigé un rapport ; que l'expert exclut les dégâts des eaux relatifs à une zone concentrée près de la porte d'entrée ayant pour origine l'appartement situé à l'étage supérieur et pour lesquels une indemnisation a été allouée par l'intermédiaire des compagnies d'assurance ; que l'expert a constaté des dégâts des eaux récurrents affectant le local litigieux suite à la destruction par incendie en 2006 d'un immeuble mitoyen loué à la société Schleker et des travaux de sécurisation réalisés en 2007 consistant notamment en la destruction d'un mur menaçant ruine, la bailleresse n'ayant entrepris des travaux de pose d'un enduit hydrofuge sur les murs intérieurs de la société Schleker et la réfection de la totalité de l'étanchéité de la terrasse située au-dessus qu'en 2009 ; que l'expert relève que les sinistres ont cessé suite à la réalisation des travaux ; que le bail du 23 octobre 2002 contient une clause en vertu de laquelle le bailleur est exonéré de toute responsabilité en cas "d'infiltrations ou fuites d'eau de quelque nature ou origine qu'elles soient y compris les eaux pluviales, et mêmes si elles sont dues à la nature du sol ou à un vice de construction" que les parties s'accordent pour dire que le bail du 16 mai 2005 comporte une clause similaire ; que la locataire entend limiter la portée de cette clause au seul préjudice résultant d'un trouble de jouissance causé par les infiltrations, à l'exclusion des travaux de remise en état des lieux, en invoquant le fait que cette clause se trouve sous l'intitulé "jouissance des lieux "alors que dans la partie du bail consacrée à l'entretien, l'usage et la réparation", qu'une seconde clause met à la charge du bailleur les grosses réparations de l'article 606 du code civil ; qu'il convient de noter au préalable que la société preneuse sollicite la prise en charge du coût de remplacements des dalles du faux plafond et des travaux de peinture, de sorte que la question de la nature des travaux relatifs à la pose d'une étanchéité sur un mur extérieur et sur une terrasse, effectués par la bailleresse en 2007 est sans conséquence sur le présent litige ; que la clause exonératrice de responsabilité du bailleur prévue au bail d'une portée générale vise l'ensemble des cas dans lesquelles le preneur subit un dommage en raison de la présence d'infiltrations de quelque nature que ce soit, que l'expert décrit précisément les dégâts subis dans les lieux loués en raison de présence de coulures, de salpêtre et de boursouflures des revêtements, phénomènes caractéristiques de la présence d'infiltrations d'eau ; qu'il est constant que les dégâts, dont la locataire sollicite réparations, ont été causés par des infiltrations ; que les travaux préconisés par l'expert pour remettre les lieux en l'état, à savoir la réfection des revêtements des murs et de plafonds, n'entrent nullement dans la catégorie des travaux visés par l'article 606 du code civil, qu'ainsi conformément aux clauses du bail, leur réalisation incombe au preneur ; que si le bailleur ne peut s'exonérer de son obligation de délivrance, il peut néanmoins la restreindre ou la limiter, qu'en s'exonérant de toute responsabilité en cas d'infiltrations d'eau dans le local donné à bail durant l'occupation, la société Cyliel ne s'est nullement affranchie de son obligation de délivrance, le local restant exploitable par la locataire ; que la responsabilité de la bailleresse ne peut être mise en cause par la locataire en raison de la clause dérogatoire contenue dans les deux baux conclus entre les parties et ce quel qu'en soit le fondement juridique de sa demande, la clause dérogatoire faisant également obstacle à sa demande basée sur l'abstention fautive de la bailleresse à faire réaliser en temps utile, les travaux sur l'immeuble mitoyen, de nature à mettre fin aux sinistres ;
1. ALORS QU'il n'est pas au pouvoir des parties de s'exonérer de l'obligation de procéder aux réparations rendues nécessaires par la destruction d'un immeuble voisin, en raison d'un incendie ; qu'il était convenu par deux baux rédigés en des termes identiques, que « le bailleur n'est pas responsable du service des eaux, chômage, accident ou défaut de pression, ou des infiltrations ou fuites d'eau de quelque nature ou origine qu'elles soient, y compris les eaux pluviales antérieures ou postérieures au présent bail, et même si elles sont dues à la nature du sol ou à un vice de construction » ; qu'en permettant au bailleur de restreindre ou de limiter son obligation de délivrance, en s'exonérant de toute responsabilité en cas d'infiltrations d'eau dans le local donné à bail durant l'occupation, quand la clause litigieuse décharge la bailleresse de son obligation de délivrance en le privant du droit de demander l'indemnisation de son trouble de jouissance, la cour d'appel a violé les articles 1719 et 1720 du code civil, ensemble l'article 1134 du code civil, dans leur rédaction antérieure applicable au litige ;
2. ALORS si tel n'est pas le cas QU'une clause exonératoire de responsabilité est d'interprétation restrictive ; qu'en affirmant que la clause exonératrice de responsabilité du bailleur, prévue au bail d'une portée générale, vise l'ensemble des cas dans lesquels le preneur subit un dommage en raison de la présence d'infiltrations de quelque nature que ce soit, et qu'elle s'applique aux dégâts causés par des infiltrations dont la locataire sollicite réparation, quand elle ne visait pas les travaux destinés à mettre fin aux infiltrations imputables à la destruction des locaux mitoyens à la suite d'un incendie, la cour d'appel a violé les articles 1719 et 1720 du code civil, ensemble l'article 1134 du code civil, dans leur rédaction antérieure applicable au litige.