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20/02/2019 | FRANCE | N°17-21861

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 20 février 2019, 17-21861


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 24 mai 2017), qu'assignées par la société Stradale automobile (la société Stradale) en responsabilité contractuelle sur le fondement des articles 1134,1147 et 1184 du code civil, devant le tribunal de commerce de Nanterre, les sociétés Ferrari South West Europe et Ferrari Spa (les sociétés Ferrari) ont conclu au vu des articles 1134 du code civil et L. 442-6 du code de commerce ; que la cour d'appel de Versailles ayant déclaré irrecevab

le l'appel formé par la société Stradale, cette dernière, Mme Q..., en qua...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 24 mai 2017), qu'assignées par la société Stradale automobile (la société Stradale) en responsabilité contractuelle sur le fondement des articles 1134,1147 et 1184 du code civil, devant le tribunal de commerce de Nanterre, les sociétés Ferrari South West Europe et Ferrari Spa (les sociétés Ferrari) ont conclu au vu des articles 1134 du code civil et L. 442-6 du code de commerce ; que la cour d'appel de Versailles ayant déclaré irrecevable l'appel formé par la société Stradale, cette dernière, Mme Q..., en qualité de mandataire judiciaire de cette société, et la Selarl N..., en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de cette même société, ont relevé appel devant la cour d'appel de Paris le 15 octobre 2015 ; que les sociétés Ferrari ayant contesté la recevabilité de l'appel, le conseiller de la mise en état a dit l'appel recevable ;

Attendu que les sociétés Ferrari font grief à l'arrêt, statuant sur déféré, de déclarer l'appel recevable alors, selon le moyen :

1°/ qu'en application des articles L. 442-6 et D. 442-3 du code de commerce, seuls les recours formés contre les décisions rendues par les juridictions du premier degré spécialement désignées sont portés devant la cour d'appel de Paris ; qu'en déclarant recevable l'appel interjeté devant la cour d'appel de Paris le 15 octobre 2015, par la société Stradale automobile, M. F... Q... et la société N...-H..., contre le jugement rendu le 8 février 2012 par le tribunal de commerce de Nanterre, alors que ce dernier ne figure pas parmi les juridictions du premier degré spécialement désignées par l'article D. 442-3, la cour d'appel a violé les articles L. 442-6 et D. 442-3 du code de commerce, ensemble l'article R. 311-3 du code de l'organisation judiciaire ;

2°/ que tout jugement doit être motivé et que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que dans leurs conclusions d'appel, les sociétés Ferrari South West Europe et Ferrari Spa soutenaient que constituait un comportement contraire au principe de l'Estoppel le fait, pour la société Stradale automobile, de soutenir devant la cour d'appel de Paris que son appel était recevable, alors même qu'elle avait soutenu exactement l'inverse devant la cour d'appel de Versailles, sans qu'aucune circonstance de fait ou de droit ne vienne expliquer ce changement de position ; qu'en écartant la méconnaissance du principe selon lequel nul ne peut se contredire au détriment d'autrui, sans répondre à ces conclusions, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure, ensemble l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu que par plusieurs arrêts rendus le 29 mars 2017 (pourvois n° 15-17.659, 15 24.241 et 15-15.337), la chambre commerciale, financière et économique, amendant sa jurisprudence selon laquelle la cour d'appel de Paris était seule investie du pouvoir juridictionnel de statuer sur les recours formés contre les décisions rendues dans les litiges relatifs à l'application de l'article L. 442-6 du code de commerce, même lorsqu'elles émanaient de juridictions non spécialement désignées par l'article D. 442-3 du même code, a jugé qu'en application des articles L. 442-6, III et D. 442-3 du code de commerce, seuls les recours formés contre les décisions rendues par les juridictions du premier degré spécialement désignées relevaient de la cour d'appel de Paris ;

Que l'arrêt attaqué, se conformant à la jurisprudence ancienne, retient la recevabilité de l'appel, formé le 15 octobre 2015 par la société Stradale, Mme Q..., ès qualités, et la Selarl N..., ès qualités ;

Que l'application, à la présente instance, de la règle issue du revirement de jurisprudence, qui conduirait à retenir l'irrecevabilité de l'appel formé devant la cour d'appel de Paris, aboutirait à priver la société Stradale, qui ne pouvait ni connaître, ni prévoir, à la date à laquelle elle a exercé son recours, la nouvelle règle jurisprudentielle limitant le pouvoir juridictionnel de la cour d'appel de Paris, d'un procès équitable, au sens de l'article 6, paragraphe 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la censure de l'arrêt n'est, dès lors, pas encourue ; que le moyen ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne les sociétés Ferrari South West Europe et Ferrari Spa aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne à payer à Mme Q..., en qualité de liquidateur de la société Stradale automobile, la somme globale de 3 000 euros et rejette les autres demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt février deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

.

Moyen produit par Me Rémy-Corlay, avocat aux Conseils, pour les sociétés Ferrari South West Europe et Ferrari Spa.

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré recevable l'appel interjeté devant la cour d'appel de Paris le 15 octobre 2015, par la société Stradale Automobile, Maître F... Q... et la société N... – H..., contre le jugement rendu le 8 février 2012 par le tribunal de commerce de Nanterre ;

AUX MOTIFS QUE : « L'article D 442-3 du code de commerce prévoit que "Pour l'application de l'article L. 442-6, le siège et le ressort des juridictions commerciales compétentes en métropole et dans les départements d'outre-mer sont fixés conformément au tableau de l'annexe 4-2-1 du présent livre. La cour d'appel compétente pour connaître des décisions rendues par ces juridictions est celle de Paris." ; que le tribunal de commerce de Nanterre, qui ne figure pas dans le tableau de l'annexe en question, a été saisi par la société Stradale sur le fondement des articles 1134, 1147 et 1184 du code civil, et les sociétés Ferrari ont conclu au vu du même article 1134, mais en visant également l'article L. 442-6 du code de commerce ; qu'ainsi, l'application de l'article L. 442-6 était soulevée devant le tribunal de commerce de Nanterre, et les sociétés Ferrari l'ont à nouveau invoquée devant la cour d'appel de Versailles ; que la cour d'appel de Versailles a alors, par arrêt du 6 octobre 2015, déclaré irrecevable l'appel interjeté par la société Stradale ; qu'il résulte de la combinaison des articles L. 442-6, III, alinéa 5, et D. 442-3 du code de commerce que la cour d'appel de Paris est seule investie du pouvoir de statuer sur les appels formés contre les décisions rendues dans les litiges relatifs à l'application de l'article L. 442-6 ; que même si les sociétés Ferrari relèvent que le tribunal de commerce de Nanterre n'a pas fondé sa décision sur l'application de l'article L. 442-6, ce texte était dans les débats tant devant cette juridiction que devant la cour d'appel de Versailles, de sorte que celle-ci n'avait pas le pouvoir de connaître de cet appel, s'agissant d'un texte dérogatoire au droit commun prévoyant une règle de compétence spécifique au profit de la cour d'appel de Paris ; qu'il sera au surplus relevé qu'aucune des parties n'a soutenu avoir demandé à la cour d'appel de Versailles de procéder à une disjonction de l'instance dont elle était saisie, l'article L. 442-6 étant invoqué en moyen de défense par les sociétés Ferrari ; que par ailleurs, les sociétés Ferrari ne peuvent soutenir que la position de la société Stradale, qui a invoqué au soutien de ses demandes devant le tribunal de commerce de Nanterre et la cour d'appel de Versailles les articles de droit commun en excluant expressément l'article L. 442-6 et qui vise désormais cet article devant la cour d'appel de Paris, révèle un estoppel, alors que ce soit les sociétés Ferrari elles-mêmes qui l'ont invoqué devant le tribunal de commerce de Nanterre et la cour d'appel de Versailles, et que c'est au vu de cet article que cette cour d'appel a constaté l'irrecevabilité de l'appel ; qu'ainsi, les sociétés Ferrari ne peuvent avoir été induites en erreur par l'argumentaire de la société Stradale devant la cour d'appel de Paris quant à l'article L. 442-6, qui tire les conclusions de l'arrêt de la cour d'appel de Versailles en visant désormais cet article » ;

ALORS QUE 1°) en application des articles L. 442-6 et D. 442-3 du code de commerce, seuls les recours formés contre les décisions rendues par les juridictions du premier degré spécialement désignées sont portés devant la cour d'appel de Paris ; qu'en déclarant recevable l'appel interjeté devant la cour d'appel de Paris le 15 octobre 2015, par la société Stradale Automobile, Maître F... Q... et la société N... – H..., contre le jugement rendu le 8 février 2012 par le tribunal de commerce de Nanterre, alors que ce dernier ne figure pas parmi les juridictions du premier degré spécialement désignées par l'article D. 442-3, la cour d'appel a violé les articles L. 442-6 et D. 442-3 du code de commerce, ensemble l'article R. 311-3 du code de l'organisation judiciaire ;

ALORS QUE 2°) tout jugement doit être motivé et que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que dans leurs conclusions d'appel, les sociétés Ferrari South West Europe et Ferrari Spa soutenaient que constituait un comportement contraire au principe de l'Estoppel le fait, pour la société Stradale Automobile, de soutenir devant la cour d'appel de Paris que son appel était recevable, alors même qu'elle avait soutenu exactement l'inverse devant la cour d'appel de Versailles, sans qu'aucune circonstance de fait ou de droit ne vienne expliquer ce changement de position (conclusions pp. 20 à 22) ; qu'en écartant la méconnaissance du principe selon lequel nul ne peut se contredire au détriment d'autrui, sans répondre à ces conclusions, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure, ensemble l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 17-21861
Date de la décision : 20/02/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 24 mai 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 20 fév. 2019, pourvoi n°17-21861


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : Me Rémy-Corlay, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:17.21861
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