LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :
Vu l'article L. 311-31, alinéa 1er, devenu L. 312-48 du code de la consommation ;
Attendu qu'aux termes de ce texte, les obligations de l'emprunteur ne prennent effet qu'à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 7 mai 2012, M. et Mme X... (les emprunteurs) ont souscrit auprès de la société Banque Solféa, aux droits de laquelle vient la société BNP Paribas Personal Finance (la banque), un prêt d'un montant de 44 100 euros destiné à financer un ensemble photovoltaïque acquis auprès de la société Green Power Solutions (le vendeur) ; que les emprunteurs ont assigné la banque et la société civile professionnelle Philippe Angel - Denis Z..., prise en qualité de liquidateur judiciaire du vendeur, en annulation des contrats de vente et de crédit ;
Attendu que, pour condamner solidairement les emprunteurs
à restituer une partie du capital prêté à la suite de l'annulation du contrat de crédit, l'arrêt retient que le vendeur a exécuté la prestation convenue, à l'exception de la mise en service de l'installation ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que le contrat, dont les stipulations indivisibles prévoyaient le raccordement au réseau, n'avait pas été totalement exécuté, de sorte que les obligations des emprunteurs n'avaient pu prendre effet, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer les deux premières branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne solidairement M. et Mme X... à payer à la société Banque Solféa, aux droits de laquelle vient la société BNP Paribas Personal Finance, la somme de 40 650 euros avec intérêts au taux légal à compter de la signification de l'arrêt au titre de la restitution du capital prêté, l'arrêt rendu le 23 mars 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne la société BNP Paribas Personal Finance aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer la somme globale de 3 000 euros à M. et Mme X... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois janvier deux mille dix-neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Boullez, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X...
Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné M. et Mme X... à payer à la société BANQUE SOLFEA la somme de 40.650 € représentant la quasi-totalité du crédit qu'ils avaient souscrits pour l'acquisition d'un kit photovoltaïque auprès de la société GREEN POWER SOLUTIONS ;
AUX MOTIFS QUE l'annulation de ce crédit se traduit normalement par la restitution par les emprunteurs du capital prêté déduction faite des sommes versées à l'organisme prêteur, sauf à démontrer une faute de celui-ci dans l'exécution des ses obligations de nature à le priver de sa créance de restitution ; que la BANQUE SOLFEA, spécialiste des opérations de crédit affecté dans le cadre du démarchage à domicile, ne peut contester qu'elle a été amenée à financer de nombreux contrats proposés par des société spécialisées en matières d'énergie photovoltaïque ; que, s'agissant d'une offre de crédit destiné à financer une installation de matériel et pour laquelle elle donne mandat au vendeur de faire signer à l'acheteur/emprunteur l'offre préalable de crédit, elle se doit de vérifier, à tout le moins, la régularité de l'opération financée au regard des dispositions d'ordre public de l'article L. 121-23 du code de la consommation afin d'avertir, en tant que professionnel avisé, ses clients qu'ils s'engagent dans une relation pouvant leur être préjudiciable ; qu'en raison de l'indivisibilité des contrats la BANQUE SOLFEA, en ne se mettant pas en mesure de vérifier la régularité formelle du contrat financé au regard des dispositions sur la vente par démarchage afin d'informer les emprunteurs d'une éventuelle irrégularité de celui-ci et de ses conséquences, a ainsi commis une négligence fautive de nature contractuelle qui se rattache à la formation du contrat de vente et qui peut donc être constatée quand le juge prononce l'annulation de la vente et celle subséquente du contrat de crédit affecté ; que le manquement de la banque à son obligation de conseil sur la régularité du contrat au regard des dispositions du code de la consommation qui, si elle avait été effectuée, aurait permis aux clients soit de poursuivre le contrat, s'agissant de règles uniquement destinées à protéger le consommateur, soit de ne pas contracter, leur a causé un préjudice qui s'analyse une perte de chance de ne pas contracter qui ne peut être réparée que par l'allocation de dommages-intérêts dont le montant ne peut, en toute hypothèse, être équivalent à celui des sommes prêtées, étant observé que la nullité du contrat de crédit les dispense d'ores et déjà de toute rémunération sur le prêt ; que, par ailleurs, si en raison de la liquidation judiciaire du vendeur, il est certain que les époux X... ne pourront récupérer le prix de vente malgré l'annulation de celle-ci, il est également certain que le vendeur ne récupérera pas le matériel puisqu'il n'en n'a pas sollicité la restitution et qu'aucune condamnation n'est prononcée en ce sens et que les époux X... auront dès lors, la possibilité de finaliser la mise en service de l'installation et d'en tirer bénéfice ; que force est de constater que les époux X... ne sollicitent pas l'allocation de dommages-intérêts mais uniquement la dispense de restitution du capital prêté ; que c'est seulement sur le fondement de l'article L. 311-31 du code de la consommation qui dispose que les obligations de l'emprunteur ne prennent effet qu'à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation, que les époux X... peuvent être dispensés de restituer le capital prêté s'il est caractérisé une faute de la BANQUE SOLFEA qui aurait délivré les fonds au vu d'une attestation de travaux ne caractérisant pas suffisamment l'exécution de la prestation ; qu'il résulte du bon de commande du 7 mai 2012 et de la facture établie par la société IDEOLIA le 9 août 2012 que le prix de l'opération à hauteur de 44100€ entièrement financé par le crédit affecté est ventilé ainsi que suit : 40500€ au titre du prix de vente du matériel, 150€ au titre des démarches administratives et 3450€ au titre du forfait installation et mise en service (hors frais de raccordement ERDF et éventuelles tranchées) ; qu'en l'espèce, la BANQUE SOLFEA a libéré les fonds à réception d'une attestation de fins de travaux signée par Mr X... le 27 septembre 2012 confirmant que les travaux, objets du financement sont terminés et conformes au devis et a expressément sollicité le déblocage des fonds sans réserve, étant précisé que ces travaux ne couvraient pas le raccordement au réseau et les autorisations administratives éventuelles ; que si le coût du raccordement au réseau et les frais de CONSUEL nécessaires à la mise en service de l'installation ne faisaient pas l'objet du crédit, il n'en reste pas moins que la société IDEOLIA a facturé à Mr X... un forfait installation et mise en service financé par celui-ci qui s'entend du suivi de la mise en service effective de l'appareil de production électrique après raccordement au réseau ; que c'est d'ailleurs dans ce sens que doit se lire un courrier recommandé adressé aux époux X... le 4 décembre 2012 qui précise "suite à votre commande du 7 mai 2012, nous avons procédé à l'installation des panneaux photovoltaïques et de l'onduleur correspondant...) afin de mettre en place votre raccordement, nous vous adressons votre dossier ERDF ; (....). Nous attirons votre attention sur le paragraphe 4 de la proposition de raccordement "Conditions préalables à la réalisation des travaux " qui vous indiquera si vous avez ou non des travaux à réaliser avant l'intervention des agents ERDF. Les travaux sont à réaliser par vous même ou un installateur de votre choix ; (...) Une fois qu'ERDF aura reçu votre règlement, un agent prendra contact avec vous afin de vous communiquer une date de rendez vous pour la pose de votre compteur de production. Il est indispensable de nous informer (...) afin d'organiser le raccordement de l'onduleur au nouveau compteur. Vous devez téléphonez à ERDF pour solliciter un rendez vous de mise en service ; de même, il est indispensable de nous communiquer l'heure et la date de ce rendez vous" ; qu'il est également produit un courrier adressé par ERDF à IDEOLIA le 21 décembre 2012 l'informant de la date prévue pour les travaux de raccordement et des démarches à effectuer postérieurement à ces travaux afin de terminer l'installation de production ; qu'un courrier a été adressé par les époux X... au CONSUEL le 29 avril 2013 qui, s'il atteste du passage de ce dernier le 31 janvier précédent à leur domicile et de l'envoi du dossier à la société AVENIR ENERGIE, précise néanmoins "qu'à ce jour après de nombreux échanges téléphoniques et mail avec cette entreprise pendant deux mois, nous n'avons pu obtenir les renseignements du non raccordement à ERDF" et la réponse du CONSUEL du 13 mai 2013 est ainsi rédigée "nous avons adressé ce jour un courrier recommandé à cette entreprise pour lui demander si elle abandonnait la responsabilité de la demande de formulaire d'attestation de conformité CONSUEL pour l'ensemble du dossier ; sans nouvelles de l'entreprise à l'issue du délai qui lui a été donné soit le 28 mai 2013, vous aurez la possibilité de désigner une nouvel installateur" ; qu'il apparaît ainsi au vu de ces éléments que la société IDEOLIA, même si elle n'était pas chargée des travaux à réaliser avant l'intervention des agents ERDF, n'a pas terminé l'intégralité de la prestation concernant la mise en service de l'installation financée par le crédit à hauteur de 3450€ et que la BANQUE SOLFEA a débloqué prématurément les fonds mais uniquement en ce qui concerne le forfait incluant la mise en service ; qu'en conséquence, par infirmation du jugement en ce qu'il a dispensé les époux X... de restituer la totalité du capital prêté, les emprunteurs seront dispensés de restituer à la BANQUE SOLFEA uniquement la somme de 3450€ correspondant au financement du forfait installation et mise en service ; que les époux X... seront donc condamnés solidairement à payer à la BANQUE SOLFEA la somme de 40650€ avec intérêts au taux légal à compter de la signification de l'arrêt au titre du remboursement du capital prêté ;
1. ALORS QUE l'établissement de crédit qui verse les fonds empruntés, sans vérifier la validité du contrat principal au regard des dispositions régissant le démarchage à domicile, commet une faute qui le prive de sa créance de remboursement du capital emprunté, en cas d'annulation du contrat de prêt ; qu'il résulte de l'arrêt attaqué que la société BANQUE SOLFEA a manqué à son obligation d'information en débloquant les fonds sans vérifier que le contrat principal respectait les dispositions de l'article L. 121-23 du code de la consommation régissant le démarchage à domicile ; qu'en décidant que M. et Mme X... pouvaient seulement prétendre au paiement de dommages et intérêts indemnisant leur perte de chance de ne pas contracter, sans qu'ils soient dispensés de rembourser le capital emprunté, quand la société BANQUE SOLFEA était privée de sa créance de restitution du capital emprunté par cela seul qu'elle avait débloqué le capital emprunté sans vérifier la validité du contrat principal, la cour d'appel a violé l'article L. 311-31 devenu l'article L. 312-48, alinéa 1er, du code de la consommation, ensemble l'article 1147 du code civil dans sa rédaction applicable en l'espèce ;
2. ALORS QUE l'établissement de crédit qui verse les fonds empruntés, sans vérifier la validité du contrat principal au regard des dispositions régissant le démarchage à domicile, commet une faute qui le prive de sa créance de remboursement du capital emprunté, en cas d'annulation du contrat de prêt, peu important que l'emprunteur ne restitue pas le matériel vendu au fournisseur ; qu'en relevant que M. et Mme X... conservaient l'usage du matériel photovoltaïque qu'ils pourraient mettre en service pour en tirer des revenus, quand la société BANQUE SOLFEA était privée de sa créance de restitution du capital emprunté par cela seul qu'elle avait débloqué le capital emprunté sans vérifier la validité du contrat principal, la cour d'appel a déduit un motif inopérant, en violation de l'article L. 311-31 devenu l'article L. 312-48, alinéa 1er, du code de la consommation, ensemble l'article 1147 du code civil dans sa rédaction applicable au litige ;
3. ALORS QU'en cas d'annulation d'un contrat de prêt consécutive à celle du contrat principal, l'établissement de crédit est privé du droit d'obtenir le remboursement du capital emprunté dès lors qu'il a remis les fonds sans s'assurer de l'exécution complète du contrat principal ; qu'il ressort des constatations auxquelles la juridiction du second degré a procédé que la société BANQUE SOLFEA avait débloqué prématurément les fonds au vu d'une attestation de fins de travaux, sans attendre que la société GREEN POWER SOLUTIONS ait terminé l'intégralité de la prestation concernant la mise en service de l'installation financée dont la charge était financée par l'emprunt à hauteur de 3.450 € ; qu'en condamnant les époux X... à restituer le capital emprunté à la société BANQUE SOLFEA, à concurrence de la part représentant le prix de vente du matériel et des démarches administratives, quand ces prestations étaient indivisibles de la mise en service des panneaux photovoltaïques prévue au contrat, la cour d'appel a violé l'article L. 311-31 devenu l'article L. 312-48 du code de la consommation.