La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/12/2018 | FRANCE | N°17-18571

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 06 décembre 2018, 17-18571


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, (Aix-en-Provence, 23 mars 2017), que M. et Mme Y... ont acquis, en l'état futur d'achèvement, auprès de la société civile immobilière Les Hauts de Septèmes (la SCI), une maison d'habitation ; que, se plaignant de l'absence de travaux de reprise des désordres réservés et de préjudices de jouissance, M. et Mme Y... ont assigné la SCI en indemnisation ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt de rejeter la fin d

e non-recevoir tirée de la forclusion pour agir et de la condamner à payer à M. et Mm...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, (Aix-en-Provence, 23 mars 2017), que M. et Mme Y... ont acquis, en l'état futur d'achèvement, auprès de la société civile immobilière Les Hauts de Septèmes (la SCI), une maison d'habitation ; que, se plaignant de l'absence de travaux de reprise des désordres réservés et de préjudices de jouissance, M. et Mme Y... ont assigné la SCI en indemnisation ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt de rejeter la fin de non-recevoir tirée de la forclusion pour agir et de la condamner à payer à M. et Mme Y... la somme de 1 554, 81 euros au titre des travaux de levée des réserves ;

Mais attendu qu'ayant retenu que la SCI ne démontrait pas l'existence d'une réception, la cour d'appel, qui en a exactement déduit que le délai de forclusion prévu par l'article 1648, alinéa 2, du code civil n'avait pas commencé à courir, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;

Sur le second moyen, ci-après annexé :

Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à M. et Mme Y... la somme de 6 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

Mais attendu qu'ayant souverainement retenu que les griefs des acquéreurs étaient clairement établis depuis plusieurs années, notamment par les différents courriers, constats d'huissier de justice et expertises judiciaires produits, que le premier juge avait statué de façon précise et motivée sur chacune des demandes, que les acquéreurs avaient subi une procédure qui s'était prolongée en appel jusqu'en 2017, soit près de dix ans après le procès-verbal de livraison de leur villa, qu'en interjetant appel, la SCI avait cherché à retarder la solution du litige pour échapper à ses obligations, la cour d'appel, qui a pu retenir que la faute de la SCI était caractérisée, a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la SCI Les Hauts de Septèmes aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la SCI Les Hauts de Septèmes et la condamne à payer à M. et Mme Y... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six décembre deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils, pour la société Les Hauts de Septèmes.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR rejeté la fin de non-recevoir tirée de la forclusion pour agir, D'AVOIR condamné la SCI LES HAUTS DE SEPTEMES à payer aux époux Y... la somme de 1.554,81 € TTC au titre des travaux de levées de réserves, avec actualisation sur l'évolution de l'indice BT 01 entre le 10 février 2010 et le jugement, et D'AVOIR dit que cette somme porterait intérêts au taux légal à compter du 6 mars 2014 avec capitalisation sur le fondement de l'article 1154 du code civil ;

AUX MOTIFS QUE « sur les désordres, inachèvements et retards et la responsabilité du vendeur : en vertu de l'article 1648 alinéa 2 du code civil, dans sa version antérieure à la loi du 25 mars 2009 applicable au litige, l'acquéreur est recevable pendant un an à compter de la réception des travaux ou de la prise de possession des ouvrages à intenter contre le vendeur l'action en garantie des vices apparents même dénoncés postérieurement à l`écoulement du délai d`un mois après la prise de possession prévue par l'article l642-l du même code ; si le vendeur n'établit pas l'existence d'une réception, le moyen tiré de la tardiveté de l'action doit être écarté ; lorsque le vendeur s'est engagé à remédier aux désordres postérieurement au procès-verbal formulant des réserves, l'action visant à obtenir l'exécution de cet engagement ou des dommages et intérêts pour violation de cette obligation contractuelle n'est pas soumise au délai d`un an de l'article 1648 précité, mais à la prescription de droit commun ; et, en application de l'article 1646-l du code civil, le vendeur d'un immeuble à construire est tenu, à compter de la réception des travaux, des obligations légales des constructeurs telles qu'elles résultent des articles 1792 et suivants du code civil, ces garanties bénéficiant aux propriétaires successifs de l'immeuble ; enfin, la responsabilité de droit commun peut également être engagée à l'égard du vendeur pour des fautes contractuelles ne conditionnant pas la qualité de l'ouvrage lui-même, comme le dépassement du délai ou du prix convenu ; en l'espèce, il n'est pas contesté que les désordres et inachèvements invoqués dans la présente instance par les acquéreurs sont apparents et ressortent donc d'abord de la responsabilité du vendeur d'immeuble résultant des articles 1642-1 et 1648 du code civil, dans leur rédaction applicable au 20 mars 2006, date de signature du contrat de vente en l'état futur d'achèvement ; en effet, les griefs relatifs à l'absence de levée des réserves concernent le complément d'isolation en sous face du plancher du garage, la peinture manquante des volets de la chambre à l'étage, la reprise d'une partie de la cloison trouvée du WC et la reprise de planches de rive ; si, dans ses écritures (page 2), la SCI soulève la forclusion de l`action engagée contre le vendeur pour non-respect du délai légal et fait état d'un « PV de réception » du « 14/12/07 », date correspondant d'ailleurs à celle du procès-verbal de livraison, elle ne produit nullement ce document et ne démontre pas l`existence d`une réception intervenue entre le maître de l'ouvrage et les constructeurs ; en conséquence, le délai de forclusion n'a pas commencé à courir ; en outre, il résulte clairement des lettres adressées au BERIM, maître d'oeuvre, par le maître de l'ouvrage, promoteur vendeur, les 17 décembre 2007 et 9 juin 2008 et à la société CEC les 17 décembre 2007 et 10 janvier 2008, qu'en demandant de procéder à la levée des réserves sans formuler aucune contestation sur leur teneur et leur portée, réserves reconnues par lui lors de la signature du procès-verbal de livraison avec réserves, le vendeur a entendu s'engager à solutionner les points objet de réserves, engagement dont la violation engage sa responsabilité contractuelle de droit commun ; et, si la SCI conteste devoir indemniser les acquéreurs au titre d'un retard de livraison, elle ne peut sérieusement contester qu'une telle demande, résultant de l'application de clauses contractuelles, ne peut être fondée que sur la responsabilité contractuelle de droit commun des articles 1147 et suivants du code civil, dans leur version antérieure à l'ordonnance du 10.2.2016, applicable au litige ; enfin, si la SCI conclut également à l'irrecevabilité de demandes fondées sur les dispositions des articles 1792 et suivants du code civil, il convient de lui rappeler que les acquéreurs ne formulent aucune demande fondée sur ces textes ; dès lors qu'en application des articles 1648 alinéa 2 et 1642-1 du code civil, le délai de forclusion n'a pas commencé à courir, la fin de non-recevoir tirée de la forclusion pour agir soulevée par la SCI en appel doit être rejetée, étant précisé en outre que le vendeur doit également être déclaré responsable sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun, pour avoir manqué à ses obligations, notamment celle de livrer un ouvrage exempt de désordres et inachèvements dans les délais contractuellement fixés ; ainsi, la responsabilité du promoteur vendeur étant engagée, il doit être condamné à indemniser les acquéreurs des conséquences des désordres ou inachèvements précédemment relevés » (arrêt pp. 6 et 7) ;

1/ ALORS QUE le vendeur d'un immeuble à construire ne peut être déchargé, ni avant la réception des travaux, ni avant l'expiration d'un délai d'un mois après la prise de possession par l'acquéreur, des vices de construction alors apparents ; que, dans ce cas, l'action doit être introduite, à peine de forclusion, dans l'année qui suit la date à laquelle le vendeur peut être déchargé des vices apparents, soit dans l'année qui suit la réception de l'ouvrage intervenue entre le vendeur et les entrepreneurs, ou dans l'année qui suit l'expiration d'un délai d'un mois après la prise de possession par l'acquéreur ; que, les partie s'accordant sur le fait que les époux Y... avaient pris possession de l'ouvrage le 14 décembre 2007, la SCI LES HAUTS DE SEPTEMES exposait, dans ses conclusions (p. 2), que, si les assignations en référé des époux Y... avaient pu interrompre le délai de forclusion débuté à compter de la livraison de l'ouvrage, un nouveau délai d'un an avait commencé à courir à compter de la désignation de l'expert judiciaire par l'ordonnance du 20 février 2009, de sorte que l'action formée au fond par les époux Y... le 24 mars 2011 était forclose ; qu'en se bornant à affirmer que la SCI ne démontrait pas l'existence d'une réception, sans rechercher si, compte tenu de la prise de possession de l'ouvrage le 14 décembre 2007, l'action au fond introduite le 24 mars 2011 par les époux Y... était forclose comme postérieure de largement plus d'un an à l'ordonnance du 20 février 2009, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1642-1 et 1648 du code civil, dans leur version antérieure à la loi du 25 mars 2009 ;

2/ ALORS QUE, lorsque le vendeur d'immeuble à construire s'est engagé à l'égard des acquéreurs à remédier aux désordres, l'action visant l'exécution de cet engagement n'est pas soumise au délai fixé par l'article 1648, alinéa 2, du code civil ; que, dans ses conclusions (p. 4), la SCI LES HAUTS DE SEPTEMES soutenait qu'elle ne s'était jamais engagée auprès des époux Y... à reprendre les désordres faisant l'objet des réserves émises lors de la livraison de l'ouvrage ; que, pour retenir l'existence d'un engagement de la SCI à l'égard des acquéreurs à solutionner les points faisant l'objet des réserves, la cour d'appel se fonde exclusivement sur des courriers adressés par la SCI à la société BERIM, maître d'oeuvre, et à la société CEC, entreprise chargée d'une mission d'ordonnancement, pilotage et coordination ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la SCI s'était jamais engagée auprès des acquéreurs à reprendre les désordres réservés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1648 du code civil, dans sa version antérieure à la loi du 25 mars 2009 ;

3/ ALORS SUBSIDIAIREMENT QUE lorsque le vendeur d'immeuble à construire s'est engagé à l'égard des acquéreurs à remédier aux désordres, l'action visant l'exécution de cet engagement n'est pas soumise au délai fixé par l'article 1648, alinéa 2, du code civil ; que la SCI LES HAUTS DE SEPTEMES faisait valoir, dans ses conclusions (p. 4), que ce n'est qu'à raison de sa mise en cause en référé, qu'elle avait informé les intervenants à l'acte de construire des contestations émises par les époux Y..., puis qu'elle les avait mis en demeure d'exécuter leurs obligations, de sorte qu'il ne pouvait être déduit un acquiescement de sa part aux prétentions des acquéreurs, ni a fortiori un quelconque engagement de sa part à faire procéder à la levée des réserves ; qu'en se fondant sur différents courriers adressés par la SCI à la société BERIM et à la société CEC dans ces circonstances, pour en déduire qu'elle avait entendu s'engager à solutionner les points faisant l'objet des réserves, sans rechercher, comme elle y était invitée, si ces courriers n'étaient pas impropres, compte tenu des procédures en cours, à caractériser la volonté non équivoque de la SCI de s'engager auprès des acquéreurs à procéder à la levée des réserves, la cour d'appel a derechef privé sa décision de base légale au regard de l'article 1648 du code civil, dans sa version antérieure à la loi du 25 mars 2009.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné la SCI à payer aux époux Y... une somme de 6.000 € à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

AUX MOTIFS QU'« alors que les griefs des acquéreurs sont clairement établis depuis plusieurs années, notamment par les différents courriers, constats d'huissier et expertises judiciaires produits, qu'en première instance, le vendeur a été condamné à verser des provisions à valoir sur l'indemnisation des époux Y... par une ordonnance du juge de la mise en état dont il n'est pas justifié qu'elle ait pu être frappée d'appel, que le premier juge a statué de façon précise et motivée sur chacune des demandes, que les acquéreurs ont donc subi une procédure au fond qui s'est prolongée en appel jusqu'en 2017, soit près de 10 ans après le procès-verbal de livraison de leur villa, il est établi qu'en interjetant appel et en cherchant ainsi à retarder la solution du litige pour échapper à ses obligations, le vendeur a eu un comportement fautif qui a directement généré pour les époux Y... un préjudice, qu'il convient d`indemniser par l'allocation d'une somme de 6.000 € à titre de dommages-intérêts » (arrêt p. 8) ;

ALORS QUE pour condamner la SCI LES HAUTS DE SEPTEMES au titre d'une procédure prétendument abusive, la cour d'appel se borne à affirmer que les griefs des époux Y... auraient été établis depuis plusieurs années, que la SCI avait été condamnée à verser des provisions en première instance par une décision du juge de la mise en état, qui n'avait pas été frappée d'appel, et que le premier juge avait statué de manière précise et motivée ; qu'en statuant ainsi, par des motifs qui ne suffisent pas à caractériser une faute faisant dégénérer en abus le droit de la SCI d'interjeter appel, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1382 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 17-18571
Date de la décision : 06/12/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 23 mars 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 06 déc. 2018, pourvoi n°17-18571


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Gadiou et Chevallier, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.18571
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award