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03/10/2018 | FRANCE | N°17-27232

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 03 octobre 2018, 17-27232


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 18 décembre 2015), que M. Y..., engagé en 1973 en qualité d'ouvrier mineur de fond par les houillères du Bassin Nord Pas-de-Calais, a saisi la juridiction prud'homale afin d'obtenir la condamnation de l'agence nationale pour la garantie des droits des mineurs (l'ANGDM), qui assure le service des prestations et avantages dûs aux anciens agents retraités de mines et à leurs ayants droit, au paiement de diverses sommes au titre d'un capital représ

entant les prestations de logement, d'un capital représentant les pres...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 18 décembre 2015), que M. Y..., engagé en 1973 en qualité d'ouvrier mineur de fond par les houillères du Bassin Nord Pas-de-Calais, a saisi la juridiction prud'homale afin d'obtenir la condamnation de l'agence nationale pour la garantie des droits des mineurs (l'ANGDM), qui assure le service des prestations et avantages dûs aux anciens agents retraités de mines et à leurs ayants droit, au paiement de diverses sommes au titre d'un capital représentant les prestations de logement, d'un capital représentant les prestations de chauffage et de dommages-intérêts pour perte de chance résultant d'une discrimination fondée sur son origine et son âge ;

Attendu que le mineur retraité fait grief à l'arrêt de le débouter de l'intégralité de ses demandes alors, selon le moyen :

1°/ que d'une part, il résulte de la circulaire n° 88/092 de l'EPIC Charbonnages de France que pour prétendre au bénéfice du rachat, le demandeur au rachat de l'indemnité de logement doit être âgé de moins de 65 ans, ce qui institue entre les mineurs retraités une différence de traitement, dans l'attribution du droit au rachat des prestations, qui repose sur la seule circonstance que les mineurs aient atteint l'âge limite de 65 ans ; et qu'en s'abstenant de vérifier si la condition d'âge fixée par la circulaire du 9 février 1988 n'était pas discriminatoire en tant que telle, et n'avait pas causé à M. Y..., qui est parti à la retraite à 66 ans, un préjudice en le privant de la possibilité de postuler au rachat des prestations, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1132-1 et 1134-1 du code du travail ;

2°/ que, d'autre part, la perte d'une chance d'obtenir un avantage peut résulter de l'impossibilité dans laquelle se trouve le bénéficiaire potentiel d'en remplir les conditions d'attribution, ce qui le dissuade d'en faire la demande ; et qu'en s'abstenant de rechercher si la condition d'âge de nature discriminatoire fixée par la circulaire du 9 février 1988 n'avait pas constitué un obstacle dirimant à la formulation d'une demande de rachat par M. Y... qui était âgé de plus de 65 ans lorsqu'il a pris sa retraite, à l'origine d'une perte de chance de bénéficier du rachat des prestations logement et chauffage, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1231-1 du code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui a retenu que le mineur retraité ne justifiait pas avoir formé auprès de l'ANGDM une demande de rachat sous forme de capital des indemnités de logement et de chauffage, ni avoir reçu de l'ANGDM une décision de refus, a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois octobre deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Delvolvé et Trichet, avocat aux Conseils, pour M. Y...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur Y... de toutes ses demandes

Aux motifs que , selon les articles 22c et 23d du décret n° 46-1433 du 14 juin 1946, relatif au statut du personnel des exploitations minières et assimilées, les anciens membres du personnel et leur conjoint survivant, bénéficiaires de prestations à la charge de la caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les mines ou du régime général de sécurité sociale, au titre des risques vieillesse, invalidité et décès (pension de survivant) ou titulaires de rentes prévues par la législation sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, peuvent recevoir une indemnité de chauffage ainsi que des prestations de logements en nature ou en espèces, dont les montants et les conditions d'attribution sont fixés par arrêté du ministre chargé des mines et du ministre chargé du budget ; que dans le but de favoriser l'accession à la propriété des mineurs, l'établissement public industriel et commercial Charbonnages de France, aux droits duquel se trouve l'ANGDM, a offert à ses salariés la possibilité de demander contractuellement à percevoir les avantages en nature de logement et de chauffage sous la forme d'un capital versé en une fois et calculé à partir d'un coefficient de capitalisation déterminé en fonction de l'âge auquel l'ayant-droit contracte et de la valeur de l'indemnité annuelle de logement en vigueur à cette date ; que les conditions et modalités de cette faculté de rachat sont énoncées dans une circulaire n° 88/092 de l'EPIC Charbonnages de France du 9 février 1988 ; que pour prétendre au bénéfice du rachat, « le demandeur doit avoir acquis à titre définitif le droit à la prestation {de logement ou de chauffage} au moment de son départ, qu'il s'agisse d'un départ à la retraite normale ou en retraite anticipée » ; que par ailleurs, les membres du personnel retraités n'ont accès a rachat de l'indemnité de logement que s'ils sont âgés au moment de leur demande, de moins de 65 ans et s'ils s'engagent à acheter un logement attribué par les Houillères ; que le rachat des avantages en nature suppose donc que le salarié qui en sollicite le bénéfice ait formulé une demande en ce sens ; qu'en l'espèce, Monsieur Y..., se fondant sur une série de dix arrêts rendus par la présente cour d'appel le 31 mars 2011, soutient qu'il s'est vu opposer par l'ANGDM un refus de rachat qui revêt un caractère discriminatoire, au motif que « depuis plus de dix ans » le bénéfice du versement d'un capital a été conditionné au fait d'être ressortissant de la CEE et d'être âgé de moins de 65 ans ; mais qu'il doit être relevé qu'il n'est produit par Monsieur Y... aucune demande tendant au bénéfice du rachat sous forme de capital des indemnités de logement et de chauffage, ni surtout aucun refus formalisé par l'ANGDM pour les motifs allégués de nationalité et d'âge, de nature à laisser supposer une discrimination, tant au regard des dispositions de droit international applicables dans l'ordre juridique interne qu'au sens des dispositions de l'article 1132-1 du code du travail, étant ici observé qu'outre l'absence de demande et de décision négative de l'ANGDM fondée sur des motifs de nature discriminatoire, il n'est produit aucun élément de fait de nature à étayer la demande ;qu'à ce titre, et outre la prohibition des arrêts de règlement telle qu'elle résulte des dispositions de l'article 5 du code civil, les décisions rendues le 31 mars 2011 par la présente cour d'appel, dans des espèces distinctes dans lesquelles des échanges de courriers formalisaient systématiquement une demande de l'ancien mineur et un refus réitéré de l'ANGDM d'accéder à cette demande rachat sous forme de versement d'un capital, notamment en raison de la non appartenance des intéressés à la CEE, ne sauraient dispenser Monsieur Y... d'établir l'existence de faits de nature à laisser supposer une discrimination ; que l'ANGDM établit en outre que la formulation d'une demande de rachat n'a aucun caractère systématique, puisqu'il résulte d'un courrier de la direction du service aux bénéficiaires et de la réglementation en date du 10 juillet 2013, que depuis le 1er janvier 2000, seulement 13,26 % des agents ayant la possibilité de capitaliser leur prestation logement avaient formulé une demande en ce sens ; qu'en l'absence de toute justification d'une demande de rachat des avantages en nature sous forme de capital et d'un refus discriminatoire opposé par l'ANGDM à Monsieur Y... celui-ci doit être débouté de l'intégralité de ses demandes fondées sur une discrimination qui n'est pas établie

Alors que, d'une part, il résulte de la circulaire n° 88/092 de l'EPIC Charbonnages de France que pour prétendre au bénéfice du rachat, le demandeur au rachat de l'indemnité de logement doit être âgé de moins de 65 ans , ce qui institue entre les mineurs retraités une différence de traitement, dans l'attribution du droit au rachat des prestations, qui repose sur la seule circonstance que les mineurs aient atteint l'âge limite de 65 ans ; et qu'en s'abstenant de vérifier si la condition d'âge fixée par la circulaire du 9 février 1988 n'était pas discriminatoire en tant que telle, et n'avait pas causé à Monsieur Y..., qui est parti à la retraite à 66 ans, un préjudice en le privant de la possibilité de postuler au rachat des prestations, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1132-1 et 1134-1 du code du travail

Alors que, d'autre part, la perte d'une chance d'obtenir un avantage peut résulter de l'impossibilité dans laquelle se trouve le bénéficiaire potentiel d'en remplir les conditions d'attribution, ce qui le dissuade d'en faire la demande ; et qu'en s'abstenant de rechercher si la condition d'âge de nature discriminatoire fixée par la circulaire du 9 février 1988 n'avait pas constitué un obstacle dirimant à la formulation d'une demande de rachat par Monsieur Y... qui était âgé de plus de 65 ans lorsqu'il a pris sa retraite, à l'origine d'une perte de chance de bénéficier du rachat des prestations logement et chauffage, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1231-1 du code civil


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17-27232
Date de la décision : 03/10/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 18 décembre 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 03 oct. 2018, pourvoi n°17-27232


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Delvolvé et Trichet, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.27232
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