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05/09/2018 | FRANCE | N°17-11351

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 05 septembre 2018, 17-11351


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :

Vu l'article 16 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par un acte du 15 juillet 2008, la société BNP Paribas (la banque) a consenti à la SCI Liccioni-Fabre (la SCI) un prêt destiné à financer l'acquisition de biens ; que la SCI ayant procédé au remboursement anticipé de celui-ci, la banque lui a réclamé le paiement de la somme prévue par la clause de remboursement anticipé stipulée dans l'acte ; que la SCI a assigné la banque en annula

tion de cette clause et en restitution de la somme versée ;

Attendu que pour annule...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :

Vu l'article 16 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par un acte du 15 juillet 2008, la société BNP Paribas (la banque) a consenti à la SCI Liccioni-Fabre (la SCI) un prêt destiné à financer l'acquisition de biens ; que la SCI ayant procédé au remboursement anticipé de celui-ci, la banque lui a réclamé le paiement de la somme prévue par la clause de remboursement anticipé stipulée dans l'acte ; que la SCI a assigné la banque en annulation de cette clause et en restitution de la somme versée ;

Attendu que pour annuler la clause de remboursement anticipé de l'acte de prêt en raison d'une erreur sur la substance viciant le consentement de la SCI, l'arrêt retient que le libellé de la formule mathématique employée par cette clause, qui peut laisser croire au versement d'une somme modique en cas de remboursement anticipé du prêt, est de nature à entraîner une confusion dans l'esprit de l'emprunteuse ;

Qu'en statuant ainsi, sans inviter les parties, qui n'avaient discuté que de la qualification de clause abusive ou subsidiairement de clause pénale, à présenter leurs observations sur le moyen qu'elle relevait d'office, tiré d'un vice du consentement, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, infirmant le jugement de ce chef, il annule pour vice de consentement la clause de remboursement anticipé stipulée dans l'acte de prêt conclu par la société BNP Paribas et la SCI Liccioni-Fabre, et condamne la société BNP Paribas à payer à la SCI la somme de 30 260,50 euros au titre de la restitution de l'indemnité de remboursement anticipé, outre intérêts au taux légal à compter du 7 novembre 2013, et en ce qu'il statue sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 24 novembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée ;

Condamne la SCI Liccioni-Fabre aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la SCI Liccioni-Fabre à payer à la société BNP Paribas la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du cinq septembre deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour la société BNP Paribas.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR annulé pour vice du consentement la clause de remboursement anticipé contenue dans l'acte de prêt consenti le 15 juillet 2008 par la société BNP Paribas à la SCI Liccioni-Fabre et d'AVOIR condamné la société BNP Paribas à payer à la SCI Liccioni-Fabre, au titre de la restitution de l'indemnité de remboursement anticipé, la somme de 30.260,50 € outre intérêts au taux légal à compter du 7 novembre 2013 ;

AUX MOTIFS QUE sur la validité de la clause de remboursement anticipé : que selon l'article 1131 du code civil, en sa version antérieure à l'ordonnance du 16 février 2016, applicable à l'espèce, le contrat litigieux ayant été conclu avant le 1er octobre 2016 : « L'obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite ne peut avoir aucun effet » ; qu'au cas présent, la clause de remboursement anticipé a pour cause la perte résultant pour le préteur d'une partie des intérêts conventionnels résultant du remboursement du prêt octroyé avant le terme prévu lors de la signature du contrat ; que la variabilité des sommes alors dues au titre de la clause tient au nombre de mois restant à courir jusqu'au terme du prêt et s'explique par le fait que plus le remboursement anticipé est fait alors que le terme du prêt est proche moins la perte des intérêts conventionnels est importante pour le banquier ; qu'ainsi et contrairement à ce que soutient la SCI Liccioni-Fabre, la clause est causée ; que la lecture des conclusions de la SCI Liccioni-Fabre met en exergue les difficultés rencontrées par l'emprunteur pour comprendre la portée de la clause de remboursement anticipé ; qu'il fait état de l'ambiguïté de la clause et de son caractère abscons ; qu'il appartient au juge, en application de l'article 12 du code de procédure civile, de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables, de donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée ; qu'il convient dès lors de rappeler, conformément aux dispositions de l'article 1109 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance du 16 février 2016 et applicable à l'espèce, l'acte litigieux ayant été conclu avant le 1er novembre 2016 : « Il n'y a point de consentement valable si le consentement n'a été donné que par erreur ou s'il a été extorqué par violence ou surpris par dol » ; que, s'agissant spécialement de la clause de remboursement anticipé litigieuse, celle-ci indique « L'emprunteur pourra à tout moment procéder au remboursement anticipé du prêt en tout ou partie. Il sera alors perçu par la banque une somme payable le jour de la prise d'effet du remboursement anticipé, correspondant à deux mois d'intérêt par année restant à courir sur le prêt à la date du remboursement anticipé, calculés au taux du contrat d'origine sur le montant dudit remboursement. D'un commun accord cette somme sera déterminée en fonction de la formule de calcul suivante : (m/12 x i/12) x 2 x RA, avec m = le nombre de mois restant à courir à la date de remboursement anticipé, i = taux d'intérêt annuel du prêt à l'origine, RA = le capital restant dû à la date de remboursement anticipé s'il s'agit d'un remboursement anticipé total ou le montant remboursé par anticipation s'il s'agit d'un remboursement anticipé partiel. Un montant minimum de perception est fixé à 369 euros. Tout remboursement anticipé aura un caractère définitif et ne pourra donner lieu à de nouvelles utilisations. En outre, tout remboursement anticipé partiel s'imputera sur les échéances les plus éloignées » ; que l'utilisation, en l'espèce, d'une formule mathématique qui n'est illustrée que par l'exemple d'une somme modique de 369 euros indiquée comme correspondant au minima fixé est de nature à induire en erreur l'emprunteur ; que l'erreur faite porte alors sur la substance même de la clause ainsi rédigée en ce que l'emprunteur ne peut mesurer la portée de l'engagement qu'il s'engage à respecter ; qu'en effet, aucun exemple ne vient illustrer le montant de l'indemnité lorsque le remboursement est souhaité après d'autres périodes d'amortissement ; que cette absence d'illustrations concrètes de la variabilité des sommes pouvant devoir être payées au regard du montant de l'emprunt et la seule indication, à titre d'exemple, d'une somme de 369 euros pouvant laisser croire à la modicité, en toutes hypothèses, de l'indemnité de remboursement anticipé est de nature à entraîner une confusion dans l'esprit de l'emprunteur et partant, une erreur déterminante sur la portée de son engagement dans la mesure où il n'est pas mis en capacité de s'approprier réellement – à partir de différents cas de figure – ce qu'il peut avoir à payer en cas de remboursement anticipé ; qu'il n'appartient pas au juge de réputer non écrite et d'annuler en conséquence comme abusive une clause contractuelle relevant des dispositions de droit commun ; que toutefois la clause de remboursement anticipé litigieuse, en ce qu'elle a vicié en l'espèce le consentement de l'emprunteur, doit être annulée pour erreur sur la substance de l'engagement souscrit en application des dispositions des anciens articles 1109 et 1110 du code civil, en leur version applicable à l'espèce ; qu'il en résulte que la BNP Paribas doit rembourser à la SCI Liccioni-Fabre la somme de 30.260,50 euros indûment perçue au titre de la clause de remboursement anticipé ; qu'il convient en conséquence d'infirmer le jugement en ce qu'il a débouté la SCI de ses demandes d'annulation de clause et de paiement de la somme de 30.260,50 euros, et statuant à nouveau, d'annuler pour vice du consentement la clause contractuelle de remboursement anticipé, réputée non écrite, et de condamner la société BNP Paribas à verser à la SCI Liccioni-Fabre 30.260,50 euros au titre de la restitution de l'indemnité de remboursement anticipé assorti des intérêts de droit au taux légal à compter de l'assignation devant le tribunal de grande instance de Versailles du 7 novembre 2013 ;

ALORS QUE le juge doit faire respecter et respecter lui-même le principe de la contradiction en toutes circonstances ; que s'il lui appartient de donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée, et s'il a la faculté de soulever d'office un moyen de fait ou de droit, c'est à la condition de respecter le principe de la contradiction ; qu'au cas d'espèce, en relevant d'office, sous couvert de l'article 12 du code de procédure civile, le moyen pris de la nullité de la clause de remboursement anticipé sur le fondement de la nullité pour erreur sur la substance, sans permettre aux parties de s'en expliquer, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile, ensemble l'article 12 du même code.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR annulé pour vice du consentement la clause de remboursement anticipé contenue dans l'acte de prêt consenti le 15 juillet 2008 par la société BNP Paribas à la SCI Liccioni-Fabre et d'AVOIR condamné la société BNP Paribas à payer à la SCI Liccioni-Fabre, au titre de la restitution de l'indemnité de remboursement anticipé, la somme de 30.260,50 € outre intérêts au taux légal à compter du 7 novembre 2013 ;

AUX MOTIFS QUE sur la validité de la clause de remboursement anticipé : que selon l'article 1131 du code civil, en sa version antérieure à l'ordonnance du 16 février 2016, applicable à l'espèce, le contrat litigieux ayant été conclu avant le 1er octobre 2016 : « L'obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite ne peut avoir aucun effet » ; qu'au cas présent, la clause de remboursement anticipé a pour cause la perte résultant pour le préteur d'une partie des intérêts conventionnels résultant du remboursement du prêt octroyé avant le terme prévu lors de la signature du contrat ; que la variabilité des sommes alors dues au titre de la clause tient au nombre de mois restant à courir jusqu'au terme du prêt et s'explique par le fait que plus le remboursement anticipé est fait alors que le terme du prêt est proche moins la perte des intérêts conventionnels est importante pour le banquier ; qu'ainsi et contrairement à ce que soutient la SCI Liccioni-Fabre, la clause est causée ; que la lecture des conclusions de la SCI Liccioni-Fabre met en exergue les difficultés rencontrées par l'emprunteur pour comprendre la portée de la clause de remboursement anticipé ; qu'il fait état de l'ambiguïté de la clause et de son caractère abscons ; qu'il appartient au juge, en application de l'article 12 du code de procédure civile, de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables, de donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée ; qu'il convient dès lors de rappeler, conformément aux dispositions de l'article 1109 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance du 16 février 2016 et applicable à l'espèce, l'acte litigieux ayant été conclu avant le 1er novembre 2016 : « Il n'y a point de consentement valable si le consentement n'a été donné que par erreur ou s'il a été extorqué par violence ou surpris par dol » ; que, s'agissant spécialement de la clause de remboursement anticipé litigieuse, celle-ci indique « L'emprunteur pourra à tout moment procéder au remboursement anticipé du prêt en tout ou partie. Il sera alors perçu par la banque une somme payable le jour de la prise d'effet du remboursement anticipé, correspondant à deux mois d'intérêt par année restant à courir sur le prêt à la date du remboursement anticipé, calculés au taux du contrat d'origine sur le montant dudit remboursement. D'un commun accord cette somme sera déterminée en fonction de la formule de calcul suivante : (m/12 x i/12) x 2 x RA, avec m = le nombre de mois restant à courir à la date de remboursement anticipé, i = taux d'intérêt annuel du prêt à l'origine, RA = le capital restant dû à la date de remboursement anticipé s'il s'agit d'un remboursement anticipé total ou le montant remboursé par anticipation s'il s'agit d'un remboursement anticipé partiel. Un montant minimum de perception est fixé à 369 euros. Tout remboursement anticipé aura un caractère définitif et ne pourra donner lieu à de nouvelles utilisations. En outre, tout remboursement anticipé partiel s'imputera sur les échéances les plus éloignées » ; que l'utilisation, en l'espèce, d'une formule mathématique qui n'est illustrée que par l'exemple d'une somme modique de 369 euros indiquée comme correspondant au minima fixé est de nature à induire en erreur l'emprunteur ; que l'erreur faite porte alors sur la substance même de la clause ainsi rédigée en ce que l'emprunteur ne peut mesurer la portée de l'engagement qu'il s'engage à respecter ; qu'en effet, aucun exemple ne vient illustrer le montant de l'indemnité lorsque le remboursement est souhaité après d'autres périodes d'amortissement ; que cette absence d'illustrations concrètes de la variabilité des sommes pouvant devoir être payées au regard du montant de l'emprunt et la seule indication, à titre d'exemple, d'une somme de 369 euros pouvant laisser croire à la modicité, en toutes hypothèses, de l'indemnité de remboursement anticipé est de nature à entraîner une confusion dans l'esprit de l'emprunteur et partant, une erreur déterminante sur la portée de son engagement dans la mesure où il n'est pas mis en capacité de s'approprier réellement – à partir de différents cas de figure – ce qu'il peut avoir à payer en cas de remboursement anticipé ; qu'il n'appartient pas au juge de réputer non écrite et d'annuler en conséquence comme abusive une clause contractuelle relevant des dispositions de droit commun ; que toutefois la clause de remboursement anticipé litigieuse, en ce qu'elle a vicié en l'espèce le consentement de l'emprunteur, doit être annulée pour erreur sur la substance de l'engagement souscrit en application des dispositions des anciens articles 1109 et 1110 du code civil, en leur version applicable à l'espèce ; qu'il en résulte que la BNP Paribas doit rembourser à la SCI Liccioni-Fabre la somme de 30.260,50 euros indûment perçue au titre de la clause de remboursement anticipé ; qu'il convient en conséquence d'infirmer le jugement en ce qu'il a débouté la SCI de ses demandes d'annulation de clause et de paiement de la somme de 30.260,50 euros, et statuant à nouveau, d'annuler pour vice du consentement la clause contractuelle de remboursement anticipé, réputée non écrite, et de condamner la société BNP Paribas à verser à la SCI Liccioni-Fabre 30.260,50 euros au titre de la restitution de l'indemnité de remboursement anticipé assorti des intérêts de droit au taux légal à compter de l'assignation devant le tribunal de grande instance de Versailles du 7 novembre 2013 ;

ALORS QUE la nullité d'une convention contractée par erreur ne peut être demandée que par la partie dont le consentement a été vicié et ne peut être relevée d'office par le juge ; qu'au cas d'espèce, en relevant d'office la nullité de la clause de remboursement anticipé sur le fondement de l'erreur sur la substance, quand la société Liccioni-Fabre n'avait pas invoqué d'erreur sur la substance, la cour d'appel a violé les articles 1110 et 1117 anciens du code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR annulé pour vice du consentement la clause de remboursement anticipé contenue dans l'acte de prêt consenti le 15 juillet 2008 par la société BNP Paribas à la SCI Liccioni-Fabre et d'AVOIR condamné la société BNP Paribas à payer à la SCI Liccioni-Fabre, au titre de la restitution de l'indemnité de remboursement anticipé, la somme de 30.260,50 € outre intérêts au taux légal à compter du 7 novembre 2013 ;

AUX MOTIFS QUE sur la validité de la clause de remboursement anticipé : que selon l'article 1131 du code civil, en sa version antérieure à l'ordonnance du 16 février 2016, applicable à l'espèce, le contrat litigieux ayant été conclu avant le 1er octobre 2016 : « L'obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite ne peut avoir aucun effet » ; qu'au cas présent, la clause de remboursement anticipé a pour cause la perte résultant pour le préteur d'une partie des intérêts conventionnels résultant du remboursement du prêt octroyé avant le terme prévu lors de la signature du contrat ; que la variabilité des sommes alors dues au titre de la clause tient au nombre de mois restant à courir jusqu'au terme du prêt et s'explique par le fait que plus le remboursement anticipé est fait alors que le terme du prêt est proche moins la perte des intérêts conventionnels est importante pour le banquier ; qu'ainsi et contrairement à ce que soutient la SCI Liccioni-Fabre, la clause est causée ; que la lecture des conclusions de la SCI Liccioni-Fabre met en exergue les difficultés rencontrées par l'emprunteur pour comprendre la portée de la clause de remboursement anticipé ; qu'il fait état de l'ambiguïté de la clause et de son caractère abscons ; qu'il appartient au juge, en application de l'article 12 du code de procédure civile, de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables, de donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée ; qu'il convient dès lors de rappeler, conformément aux dispositions de l'article 1109 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance du 16 février 2016 et applicable à l'espèce, l'acte litigieux ayant été conclu avant le 1er novembre 2016 : « Il n'y a point de consentement valable si le consentement n'a été donné que par erreur ou s'il a été extorqué par violence ou surpris par dol » ; que, s'agissant spécialement de la clause de remboursement anticipé litigieuse, celle-ci indique « L'emprunteur pourra à tout moment procéder au remboursement anticipé du prêt en tout ou partie. Il sera alors perçu par la banque une somme payable le jour de la prise d'effet du remboursement anticipé, correspondant à deux mois d'intérêt par année restant à courir sur le prêt à la date du remboursement anticipé, calculés au taux du contrat d'origine sur le montant dudit remboursement. D'un commun accord cette somme sera déterminée en fonction de la formule de calcul suivante : (m/12 x i/12) x 2 x RA, avec m = le nombre de mois restant à courir à la date de remboursement anticipé, i = taux d'intérêt annuel du prêt à l'origine, RA = le capital restant dû à la date de remboursement anticipé s'il s'agit d'un remboursement anticipé total ou le montant remboursé par anticipation s'il s'agit d'un remboursement anticipé partiel. Un montant minimum de perception est fixé à 369 euros. Tout remboursement anticipé aura un caractère définitif et ne pourra donner lieu à de nouvelles utilisations. En outre, tout remboursement anticipé partiel s'imputera sur les échéances les plus éloignées » ; que l'utilisation, en l'espèce, d'une formule mathématique qui n'est illustrée que par l'exemple d'une somme modique de 369 euros indiquée comme correspondant au minima fixé est de nature à induire en erreur l'emprunteur ; que l'erreur faite porte alors sur la substance même de la clause ainsi rédigée en ce que l'emprunteur ne peut mesurer la portée de l'engagement qu'il s'engage à respecter ; qu'en effet, aucun exemple ne vient illustrer le montant de l'indemnité lorsque le remboursement est souhaité après d'autres périodes d'amortissement ; que cette absence d'illustrations concrètes de la variabilité des sommes pouvant devoir être payées au regard du montant de l'emprunt et la seule indication, à titre d'exemple, d'une somme de 369 euros pouvant laisser croire à la modicité, en toutes hypothèses, de l'indemnité de remboursement anticipé est de nature à entraîner une confusion dans l'esprit de l'emprunteur et partant, une erreur déterminante sur la portée de son engagement dans la mesure où il n'est pas mis en capacité de s'approprier réellement – à partir de différents cas de figure – ce qu'il peut avoir à payer en cas de remboursement anticipé ; qu'il n'appartient pas au juge de réputer non écrite et d'annuler en conséquence comme abusive une clause contractuelle relevant des dispositions de droit commun ; que toutefois la clause de remboursement anticipé litigieuse, en ce qu'elle a vicié en l'espèce le consentement de l'emprunteur, doit être annulée pour erreur sur la substance de l'engagement souscrit en application des dispositions des anciens articles 1109 et 1110 du code civil, en leur version applicable à l'espèce ; qu'il en résulte que la BNP Paribas doit rembourser à la SCI Liccioni-Fabre la somme de 30.260,50 euros indûment perçue au titre de la clause de remboursement anticipé ; qu'il convient en conséquence d'infirmer le jugement en ce qu'il a débouté la SCI de ses demandes d'annulation de clause et de paiement de la somme de 30.260,50 euros, et statuant à nouveau, d'annuler pour vice du consentement la clause contractuelle de remboursement anticipé, réputée non écrite, et de condamner la société BNP Paribas à verser à la SCI Liccioni-Fabre 30.260,50 euros au titre de la restitution de l'indemnité de remboursement anticipé assorti des intérêts de droit au taux légal à compter de l'assignation devant le tribunal de grande instance de Versailles du 7 novembre 2013 ;

1) ALORS QUE l'erreur n'est une cause de nullité de la convention que lorsqu'elle porte sur la substance même de la chose qui en est l'objet ; que ne constitue pas une erreur sur la substance celle qui ne porte que sur le coût pour une partie de la mise en oeuvre d'une prérogative qui lui est conférée par le contrat, telle qu'une faculté de résiliation avant terme, ; qu'au cas d'espèce, en retenant au contraire que la clause de remboursement anticipé était le siège d'une erreur sur la substance, motif pris de ce que la société Liccioni-Fabre avait pu se méprendre sur le coût qu'elle aurait à assumer en cas de remboursement du prêt avant terme, quand une telle erreur ne portait pas sur la substance même du mécanisme du remboursement anticipé, mais seulement sur son coût, la cour d'appel a violé l'article 1110 ancien du code civil ;

2) ALORS, subsidiairement, QUE l'erreur n'est une cause de nullité de la convention que lorsqu'elle est excusable ; qu'au cas d'espèce, la société BNP Paribas faisait valoir que la société Liccioni-Fabre était une professionnelle avertie en matière juridique, rompue à la lecture des contrats, vu que ses deux associés exerçaient la profession d'avocat (conclusions d'appel du 22 août 2016, p. 6, p. 10 et p. 13) ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur le point de savoir si la compétence juridique des associés de la société Liccioni-Fabre ne rendait pas, en tout état de cause, inexcusable la prétendue erreur commise sur les effets de la clause de remboursement anticipé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1110 ancien du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 17-11351
Date de la décision : 05/09/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 24 novembre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 05 sep. 2018, pourvoi n°17-11351


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.11351
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