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05/09/2018 | FRANCE | N°17-10975

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 05 septembre 2018, 17-10975


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche :

Vu l'article R. 662-3 du code de commerce ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Fabrix a été mise en redressement judiciaire le 2 décembre 2015 par le tribunal de commerce de Niort, la société Frédéric B..., mandataire judiciaire de l'Ouest MJO et la société Administrateurs judiciaires partenaires étant désignés respectivement mandataire et administrateur judiciaires ; que l'administrateur ayant opté pour la poursuite du cont

rat d'affacturage à durée indéterminée que la société Fabrix avait conclu avec la s...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche :

Vu l'article R. 662-3 du code de commerce ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Fabrix a été mise en redressement judiciaire le 2 décembre 2015 par le tribunal de commerce de Niort, la société Frédéric B..., mandataire judiciaire de l'Ouest MJO et la société Administrateurs judiciaires partenaires étant désignés respectivement mandataire et administrateur judiciaires ; que l'administrateur ayant opté pour la poursuite du contrat d'affacturage à durée indéterminée que la société Fabrix avait conclu avec la société Compagnie générale d'affacturage (l'affactureur), cette dernière a fait savoir, au cours de la période d'observation, qu'elle entendait résilier le contrat à compter du 29 juillet 2016 ; que, pour s'opposer à la résiliation, la société Fabrix et son administrateur ont assigné l'affactureur en référé devant le juge du tribunal de la procédure collective ; que l'affactureur a soulevé l'incompétence territoriale du tribunal au profit de celui de Bobigny en application des articles 42 et 46 du code de commerce ;

Attendu que pour rejeter l'exception d'incompétence, après avoir énoncé que l'article R. 662-3 du code de commerce étend la compétence de la juridiction saisie de la procédure collective à tout ce qui concerne la sauvegarde, le redressement et la liquidation judiciaires et s'être référé à l'article L. 622-13 du même code qui régit le sort des contrats en cours lors de l'ouverture d'une procédure collective, l'arrêt relève que le contrat d'affacturage a été continué, pendant la période d'observation, sur décision de l'administrateur et en déduit que la saisine du juge des référés aux fins d'obtenir des mesures conservatoires est justifiée par un péril imminent en rapport avec la procédure collective en cours ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la contestation, au seul motif qu'elle serait susceptible de constituer un dommage imminent, de la résiliation unilatérale par le cocontractant du débiteur d'un contrat à durée indéterminée régulièrement poursuivi après le jugement d'ouverture d'une procédure collective ne subit pas l'influence juridique de cette procédure, dès lors que ne sont pas en cause les règles propres à la résiliation des contrats en cours continués, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 25 novembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans ;

Condamne la société Fabrix et les sociétés Frédéric B... - MJO - mandataire judiciaire, et la société AJ UP, en leur qualité respective de mandataire judiciaire et de commissaire à l'exécution du plan de la société Fabrix, aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à la société Compagnie générale d'affacturage la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du cinq septembre deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Compagnie générale d'affacturage.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

(sur la compétence)

Il est fait grief à la Cour d'appel d'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait déclaré compétent le Tribunal de commerce de NIORT statuant en matière de référé et d'AVOIR rejeté l'exception d'incompétence soulevée au profit de la Cour d'appel de Paris ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE : « La SA CGA soutient que le débat sur la résiliation du contrat d'affacturage conclu entre les parties est autonome par rapport à la procédure collective et que c'est à tort que le juge des référés s'est déclaré compétent au motif que la poursuite du contrat d'affacturage était indispensable à la procédure collective ajoutant que les contestations ne sont pas nées de la procédure collective et qu'il n'est pas établi que la procédure collective ait exercé une influence sur lesdites contestations. Il résulte de l'article R. 662-3 du code de commerce que "Sans préjudice des pouvoirs attribués en premier ressort au juge-commissaire, le tribunal saisi d'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire connaît de tout ce qui concerne la sauvegarde, le redressement et la liquidation judiciaires, l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif, la faillite personnelle ou l'interdiction prévue à l'article L. 653-8, à l'exception des actions en responsabilité civile exercées à l'encontre de l'administrateur, du mandataire judiciaire, du commissaire à l'exécution du plan ou du liquidateur qui sont de la compétence du tribunal de grande instance". L'article R. 662-4 ajoute que "Les exceptions d'incompétence sont réglées par les articles 75 à 99 du code de procédure civile sous réserve des dispositions des articles R. 662- 5, R. 662- 6 et R. 662- 7." Il convient de tenir compte par ailleurs que l'action a été engagée devant le juge des référés qui dispose en vertu de l'article 873 du code de procédure civile qui prévoit que "Le président peut, dans les mêmes limites, et même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite. Dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire". L'article L. 622-13 du code de commerce énonce enfin que : 7. - Nonobstant toute disposition légale ou toute clause contractuelle, aucune indivisibilité, résiliation ou résolution d'un contrat en cours ne peut résulter du seul fait de l'ouverture d'une procédure de sauvegarde. Le cocontractant doit remplir ses obligations malgré le défaut d'exécution par le débiteur d'engagements antérieurs au jugement d'ouverture. Le défaut d'exécution de ces engagements n'ouvre droit au profit des créanciers qu'à déclaration au passif. - L'administrateur a seul la faculté d'exiger l'exécution des contrats en cours en fournissant la prestation promise au cocontractant du débiteur. Au vu des documents prévisionnels dont il dispose, l'administrateur s'assure, au moment où il demande l'exécution du contrat, qu'il disposera des fonds nécessaires pour assurer le paiement en résultant. S'il s'agit d'un contrat à exécution ou paiement échelonnés dans le temps, l'administrateur y met fin s'il lui apparaît qu'il ne disposera pas des fonds nécessaires pour remplir les obligations du terme suivant ( ...)" Il s'agit donc d'apprécier en premier lieu si l'action engagée, relative d'un litige concernant la résiliation à l'initiative du factor d'un contrat d'affacturage alors que la société cocontractante a été mise en redressement judiciaire, relève des dispositions de l'article R. 662-3 du code de commerce étendant les règles de compétences à la juridiction saisie de la procédure collective étant rappelé que : - le contrat d'affacturage a été conclu entre la société CGA et la société FABRIX le 15/04/2015 avec un plafonnement de financement de 500.000 euros et a été conclu à durée indéterminée - la SARL FABRIX a été déclarée en redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce de NIORT du 02/12/2015 - l'administrateur désigné a fait connaître sa décision de poursuivre le contrat d'affacturage conclu, par LRAR du 03/12/2015 et par application de l'article L. 622-13 du code de commerce - la période d'observation a été renouvelée deux fois par jugements des 03/02/2016 et 25/05/2016 par lettre recommandée directement adressée à la SARL FABRIX et en date du 29/04/2016, la société CGA a invoqué une résiliation à effet du 29/07/2016 - plusieurs échanges ont suivi entre Me X... administrateur et la société CGA (mai et 12 juillet 2016), l'administrateur soulignant que l'affacturage s'est bien passé pendant la période écoulée depuis le redressement judiciaire - l'action a été alors engagée par la société FABRIX en référé d'heure à heure Il résulte des éléments de la cause que la saisine du juge des référés aux fins d'obtenir des mesures conservatoires en raison d'un péril imminent en rapport avec la procédure collective en cours est une action bénéficiant de la prorogation de compétence prévue par l'article R. 662-3 du code de commerce étant relevé que : - sur le fondement de l'article 873 du code de procédure civile, les mesures conservatoires nécessitées par un péril imminent peuvent être prises même en présence d'une contestation sérieuse - le contrat liant les parties a été conclu avant la procédure collective et est un contrat continué par levée de l'option par l'administrateur judiciaire désigné lors de l'ouverture de la procédure collective - le contrat d'affacturage est par nature un contrat relevant de l'article L. 131-12 du code monétaire et financier qui a des liens manifestes avec la période d'observation -en l'espèce judiciairement prononcée puis prolongée par des décisions prises dans le cadre de la procédure collective- et qui permet un financement de trésorerie. L'article 14 du contrat, nonobstant le débat soulevé sur son interprétation ne peut écarter les règles ainsi applicables résultant de l'article R. 662-3 du code de commerce. Il sera observé enfin que l'article R. 662-5 du code de commerce prévoit que "Le tribunal, lorsqu'il se déclare incompétent, peut ordonner les mesures conservatoires ou provisoires mentionnées au dernier alinéa de l'article R. 662-7" dont notamment la possibilité pour " l'administrateur est tenu de requérir du débiteur ou, selon le cas, de faire lui-même tous actes nécessaires à la conservation des droits de l'entreprise contre les débiteurs de celle-ci et à la préservation des capacités de production". Ces dispositions démontrent la priorité donnée aux mesures nécessaires à la conservation des droits de l'entreprise lorsque la juridiction qui serait incompétente est saisie initialement au fond. Aucun élément ne permet d'écarter cette logique, lorsque la demande est présentée par l'administrateur et la société concernée, en présence du mandataire judiciaire dans le cadre d'un référé sur le fondement de l'article 873 alinéa 1 du code de procédure civile. En conséquence, l'ordonnance de référé sera confirmée en ce qu'elle a rejeté l'exception d'incompétence soulevée » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE : « l'absence de réponse par la société CGA aux courriers de Maître Vincent X... rappelant clairement que la SARL FABRIX, malgré la procédure de redressement judiciaire, respecte ses engagements et que la poursuite du contrat est impératif pour celle-ci apparaît démontrer que la résiliation du contrat d'affacturage est liée à la procédure collective ; Qu'il est indiqué dans le contrat d'affacturage en son article 14 que « pour l'exécution des présentes et de leurs suites, domicile est élu pour CGA au lieu sus indiqué et pour l'Adhérent en son siège social » Qu'il apparaîtra de déclarer compétent le Tribunal de Commerce de NIORT statuant en matière de référé » ;

1°) ALORS QUE la compétence exclusive du tribunal de la procédure collective prévue par l'article R. 662-3 du Code de commerce ne concerne que les litiges nés de cette procédure ainsi que les litiges sur lesquels la procédure exerce une influence juridique ; qu'en déclarant le Tribunal de commerce de Niort, tribunal de la procédure collective de la société FABRIX, compétent pour connaître du litige qui lui était déféré sans même rechercher, comme elle y était pourtant expressément invitée, si le litige dont elle était saisie, lequel avait pour objet de prévenir la survenance d'un prétendu « dommage imminent » lié à la rupture par la société CGA du contrat à durée indéterminée qu'elle avait conclu avec la société FABRIX et d'obtenir en référé la condamnation de l'affactureur à maintenir ledit contrat, était né de la procédure collective ou si la procédure collective exerçait une influence juridique sur celle-ci, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article R. 662-3 du code de commerce ;

2°) ALORS EN TOUTE HYPOTHESE QUE la compétence exclusive du tribunal de la procédure collective, prévue par l'article R. 662-3 du Code de commerce, ne concerne que les litiges nés de cette procédure ainsi que les litiges sur lesquels la procédure exerce une influence juridique ; qu'en l'espèce, l'action dont le Tribunal de commerce de NIORT était saisi avait pour objet d'obtenir, sur le fondement des dispositions de droit commun de l'article 873 du code de procédure civile, une mesure destinée à prévenir la survenance d'un prétendu « dommage imminent » lié à la rupture d'un contrat d'affacturage à durée indéterminé ; qu'une telle action n'était pas née de la procédure collective en ce qu'elle aurait pu naître sans l'ouverture d'une telle procédure, et n'était pas davantage soumise à son « influence juridique » dès lors qu'elle relevait fondamentalement de l'application de règles de droit commun conduisant le juge à apprécier l'existence d'un dommage imminent et, le cas échéant, la licéité de la rupture d'un contrat à durée indéterminée laquelle peut intervenir en toutes circonstances ; qu'en décidant toutefois que le Tribunal de la procédure collective était compétent sur le fondement de l'article R. 662-3 du code de commerce, la Cour d'appel a violé ces dispositions.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)

(sur l'octroi de mesures conservatoires)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a dit recevables et bien fondées les demandes présentées par la SARL FABRIX, la SELARL FREDERIC B... – MANDATAIRE JUDICIAIRE DE l'OUEST – MJO ès-qualités et la SELARL AJ PARTENAIRES ès-qualités, en ce qu'il a dit qu'il y avait urgence et absence de contestation sérieuse, et en ce qu'il a dit que la société CGA était tenue de rétablir le contrat d'affacturage au profit de la SARL FABRIX et ce jusqu'au 2 décembre 2016, date de la fin de la période d'observation, sous astreinte provisoire de 1.000 euros par jour de retard à compter de la décision de première instance ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE : « Il est constant que la société CGA soulève une contestation relative à la possibilité pour le juge des référés de voir prolonger le délai de trois mois contractuellement fixé et auquel renvoie l'article L. 313-12 du code monétaire et financier en cas de résiliation décidée par le factor au seul motif allégué de ce que le contrat est à durée indéterminée. Pour sa part, les intimés soutiennent que l'exercice de cette faculté serait en lien avec la seule ouverture de la procédure collective dès lors que depuis la levée de l'option par l'administrateur, l'exécution du contrat se déroule sans incident. Confronté aux dispositions de l'article L. 622-13 I premier paragraphe du code de commerce, le droit d'utiliser la clause contractuelle de résiliation d'un contrat à durée indéterminée avec respect du préavis sans que cette résiliation soit fondée sur des manquements ou inexécution postérieurs à la levée de l'option par l'administrateur, soulève sans nul doute une contestation sérieuse. Cependant, sur le fondement de l'article 873 alinéa 1 du code de procédure civile, l'existence de cette contestation sérieuse n'est pas déterminante puisque le juge des référés peut statuer même en présence d'une contestation sérieuse. L'article 873 alinéa 1 du code de procédure civile n'exige pas que soit caractérisée une urgence au sens général. Il suffit pour le juge des référés de caractériser un péril imminent. En l'espèce, le premier juge a parfaitement caractérisé le péril imminent en indiquant que l'arrêt des crédits d'exploitation conduirait à la réduction de la trésorerie et pourrait à terme conduire à la liquidation judiciaire alors que la société FABRIX, toujours en période d'observation, a engagé un programme de restructuration. Il a également relevé que la société CGA n'avait pas nié expressément que la résiliation du contrat d'affacturage était due à la procédure de redressement judiciaire ouverte à l'encontre de la société FABRIX. Il est constant par ailleurs que la société CGA a procédé à une résiliation qu'elle ne fonde que sur son droit à résilier tel que contractuellement prévu sans tenir compte de la limite posée par l'article L. 622-13 I premier paragraphe du code de commerce et sans répondre aux courriers de l'administrateur ou du mandataire judiciaire qui soulignait notamment, au vu du tableau de bord arrêté au 30/06/2016, un "indéniable redressement de la rentabilité de l'entreprise". La société CGA ne peut pas plus utilement arguer qu'il n'y a pas de dommage imminent, faute pour la société FABRIX d'avoir recherché un nouveau partenaire en temps utile. En effet, ce moyen suppose préalablement qu'il soit considéré que la société CGA pouvait mettre en oeuvre, comme elle l'a fait, la résiliation, en particulier au regard de l'interdiction posée par l'article L. 622-13 I premier paragraphe du code de commerce. Or, il résulte des motifs qui précèdent que si cette question préalable est sérieuse, elle n'a pas sa place dans le cadre d'un référé fondé sur l'article 873 alinéa 1 du code de procédure civile. L'ordonnance de référé sera donc confirmée sur ce point ».

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « la société CGA soulève l'absence d'urgence et/ou de dommage imminent ainsi que l'existence de contestation sérieuse ; Qu'il apparaît que la SARL FABRIX a engagé un important programme de réorganisation et ce dès le début de son redressement judiciaire ; Que la résiliation du contrat d'affacturage a pour conséquence de mettre en péril la SARL FABRIX qui se trouve en période d'observation jusqu'au 02.12.2016 ; Que l'arrêt des crédits d'exploitation conduirait à la réduction de la trésorerie et pourrait à terme entraîner la liquidation judiciaire ; Que la société CGA n'a pas nié expressément que la résiliation du contrat d'affacturage était dû à la procédure de redressement judiciaire ouverte à l'encontre de la SARL FABRIX ; Que dans ces conditions, il y aura lieu de dire qu'il y a urgence et absence de contestation sérieuse ; Attendu qu'il conviendra donc de faire droit à la demande de la SARL FABRIX, la SELARL FREDERIC B... et la SELARL AJ PARTENAIRES de rétablissement du contrat d'affacturage et ce jusqu'au 02.12.2016, date de la fin de la période d'observation, sous astreinte provisoire de 1.000 € par jour de retard à compter de la décision ».

1°) ALORS QUE si le Tribunal de la procédure collective peut prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent à l'effet de prévenir un dommage imminent, il ne peut le faire qu'en présence d'un fait probablement ou à tout le moins potentiellement illicite ; qu'en jugeant que la question de la licéité de la rupture n'était en aucun cas opérante s'agissant d'apprécier si les conditions posées à l'article 873 du code de procédure civile étaient satisfaites, la Cour d'appel a violé cette disposition ;

2°) ALORS EN TOUTE HYPOTHESE QUE si le Tribunal de la procédure collective peut prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent à l'effet de prévenir un dommage imminent, de telles mesures ne peuvent être prises qu'en présence d'une illicéité potentielle ; que, sous réserve de respecter le préavis prévu à l'article L. 313-12 du code monétaire et financier, le banquier a toujours la possibilité de rompre de façon purement discrétionnaire un crédit à durée indéterminée sans jamais avoir à se justifier et sans que puisse lui être opposé le fait qu'il aurait prétendument résilié le contrat du seul fait de l'ouverture d'une procédure collective à l'encontre de son cocontractant ; qu'en jugeant, pour condamner la société CGA à « rétablir le contrat d'affacturage au profit de la SARL FABRIX et ce jusqu'au 2 décembre 2016, date de la fin de la période d'observation, sous astreinte provisoire de 1.000 euros par jour de retard à compter de la décision [de première instance] » que la rupture de ce contrat exposait la société FABRIX à un péril imminent et que celle-ci n'avait pas expressément nié que la résiliation du contrat d'affacturage était due à la procédure de redressement judiciaire ouverte à l'encontre de la société FABRIX, cependant qu'en annonçant la résiliation dudit contrat, la société CGA n'avait fait qu'exercer son droit discrétionnaire de rompre un contrat conclu à durée indéterminée, ce dont il résultait qu'il n'existait aucune illicéité probable ou potentielle justifiant le prononcé d'une mesure conservatoire sur le fondement de l'article 873 du code de procédure civile, la Cour d'appel a violé l'article 1103 du code civil, ensemble les articles L. 622-13 du code de commerce et 873 du code de procédure civile ;

3°) ALORS EN OUTRE QU'en retenant que la société CGA n'avait pas nié expressément que la résiliation du contrat d'affacturage était due à la procédure de redressement judiciaire ouverte à l'encontre de la société FABRIX, cependant que celle-ci contestait ouvertement dans ses écritures d'appel avoir rompu le contrat pour ce motif et faisait valoir qu'il n'était nullement justifié de ce que la rupture aurait eu lieu pour ce seul motif, la Cour d'appel a dénaturé les écritures de la société CGA en date du 21 octobre 2016 et violé l'article 1103 du code civil ;

4°) ALORS QUE le tribunal de la procédure collective peut prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent à l'effet de prévenir un dommage imminent ; qu'en jugeant que la rupture du contrat était de nature à créer un dommage imminent, sans rechercher, comme elle y était invitée (conclusions, p. 13), si l'octroi d'un préavis n'était pas incompatible avec le caractère « imminent » du dommage allégué, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 873 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 17-10975
Date de la décision : 05/09/2018
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 26 juillet 2005) - Procédure (dispositions générales) - Organes de la procédure - Tribunal - Compétence matérielle - Exclusion - Actions ne concernant pas la procédure collective - Cas - Contestation de la résiliation d'un contrat à durée indéterminée par le cocontractant du débiteur ne mettant pas en cause les règles de résiliation des contrats en cours continués

TRIBUNAL DE COMMERCE - Compétence - Compétence matérielle - Redressement ou liquidation judiciaire - Contestation née de la procédure collective - Exclusion - Cas - Contestation de la résiliation d'un contrat à durée indéterminée par le cocontractant du débiteur ne mettant pas en cause les règles de résiliation des contrats en cours continués

La contestation, au seul motif qu'elle serait susceptible de constituer un dommage imminent, de la résiliation unilatérale par le cocontractant du débiteur d'un contrat à durée indéterminée régulièrement poursuivi après le jugement d'ouverture d'une procédure collective ne subit pas l'influence juridique de cette procédure, au sens de l'article R. 662-3 du code de commerce, dès lors que ne sont pas en cause les règles propres à la résiliation des contrats en cours continués


Références :

article R. 662-3 du code de commerce

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 25 novembre 2016

Sur l'incompétence du tribunal saisi d'une procédure collective pour les actions ne concernant pas cette dernière, à rapprocher : Com., 16 juin 2015, pourvoi n° 14-13970, Bull. 2015, IV, n° 106 (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 05 sep. 2018, pourvoi n°17-10975, Bull. civ.Bull. 2018, IV, n° 92.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Bull. 2018, IV, n° 92.

Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, Me Rémy-Corlay

Origine de la décision
Date de l'import : 12/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.10975
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