LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 351-2, alinéa 1, et R. 351-11 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction applicable au litige, ensemble l'article 1315, devenu 1353 du code civil ;
Attendu qu'il résulte du premier de ces textes que les périodes d'assurance vieillesse ne peuvent être retenues, pour la détermination du droit à pension, que si elles ont donné lieu au versement d'un minimum de cotisations ; qu'en cas de force majeure ou d'impossibilité manifeste pour l'assuré d'apporter la preuve du versement de cotisations, celle-ci peut l'être à l'aide de documents probants ou de présomptions concordantes ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que M. Y... (l'assuré) est bénéficiaire, depuis le 1er novembre 2012, d'une pension de retraite servie par la caisse générale de sécurité sociale de la Réunion (la caisse), sur la base de cent quarante-cinq trimestres d'assurance ; que contestant l'absence de prise en compte, dans le calcul des trimestres cotisés, des années 1984 à 1987 au cours desquelles il a travaillé au Gabon, en qualité de salarié de la société Seteg, l'assuré a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;
Attendu que pour dire que les trimestres acquis par M. Y... au titre de son activité de salarié-cadre de la société Seteg, au cours des années 1985 et 1986, doivent être validés à hauteur de sept trimestres supplémentaires, l'arrêt retient que l'assuré verse aux débats ses bulletins de salaire pour les mois de novembre, décembre 1984, janvier, février, mars, mai, juin 1985, janvier, février, mars, avril 1986, février et mars 1987 ; que durant ces périodes il était salarié de la Seteg à Libreville (Gabon) en qualité de chef de ligne ; que ces bulletins de salaire font foi du versement de cotisations sociales, mais également de deux retenues CNBTP au titre de la retraite ; qu'il produit également une attestation du directeur général de la sécurité sociale du Gabon en date du 24 septembre 2014 indiquant qu'il a été assujetti au régime de la sécurité sociale en République gabonaise durant vingt-quatre mois, soit huit trimestres ; qu'il verse enfin une attestation de la caisse de retraite complémentaire des cadres AGIRC du 29 août 2013 qui indique que du 1er octobre 1984 au 5 mai 1987, des cotisations ont été versées par son employeur ; qu'au titre du régime général, sur les cent quarante-cinq trimestres pris en compte par la caisse pour la détermination de la pension de M. Y..., les années 1984 et 1987 ont été prises en compte pour quatre trimestres chacune ; que le "trou" concerne les années 1985 (un seul trimestre pris en compte) et 1986 (aucun trimestre pris en compte) ; que dès lors qu'il est établi par la production des bulletins de salaire conservés par l'assuré au cours de la période litigieuse que la date d'entrée, mentionnée sur l'ensemble des bulletins de salaire, est le 30 septembre 1984, et que les bulletins de salaire produits pour les années 1984 et 1985 font état du versement de cotisations au titre de la retraite, il convient d'en déduire que des cotisations vieillesse ont bien été versées pour l'ensemble de cette période par son employeur ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser, pour chacune des périodes litigieuses, le précompte des cotisations dues au titre de l'assurance vieillesse du régime général, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 février 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, autrement composée ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze juillet deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Delvolvé et Trichet, avocat aux Conseils, pour la caisse générale de sécurité sociale de la Réunion.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que les trimestres acquis par Daniel Y... au titre de son activité de salarié-cadre de la SETEG, à Libreville (Gabon), au cours des années 1985 et 1986, devaient être validés à hauteur de 7 trimestres supplémentaires
Aux motifs que selon l'article L.351-2 du code de la sécurité sociale, les périodes d'assurance ne peuvent être retenues pour la détermination du droit à pension ou rente que si elles ont donné lieu au versement d'un minimum de cotisations ; qu'en cas de force majeure ou d'impossibilité manifeste pour l'assuré d'apporter la preuve du versement de cotisations, celle-ci peut l'être à l'aide de documents probants ou de présomptions concordantes ; qu'en l'espèce, Monsieur Y... versait aux débats ses bulletins de salaires pour les mois de novembre, décembre 1984, janvier, février, mars, mai, juin 1985, janvier, février mars, avril 1986, février et mars 1987 ; que durant ces périodes il était salarié de la SETEG à Libreville (Gabon) en qualité de chef de ligne ; que ces bulletins de salaires faisaient foi du versement de cotisations sociales, mais également de 2 retenues CNBTP au titre de la retraite ; qu'il produisait également une attestation du directeur général de la sécurité sociale du Gabon en date du 24 septembre 2014 indiquant qu'il avait été assujetti au régime de la sécurité sociale en république gabonaise durant 24 mois, soit 8 trimestres ; qu'il versait enfin une attestation de la caisse de retraite complémentaire des cadres AGIRC du 29 août 2013 qui indiquait que du 1er octobre 1984 au 5 mai 1987, des cotisations avaient été versées par son employeur ; qu'au titre du régime général, sur les 145 trimestres pris en compte par la CGSSR pour la détermination de la pension de Monsieur Y..., les années 1984 et 1987 avaient été prise en compte pour 4 trimestres chacune ; que le « trou » concernait les années 1985 (un seul trimestre pris en compte) et 1986 (0 trimestre pris en compte) ; que dès lors, il était établi par la production des bulletins de salaire conservés par Monsieur Y... au cours de la période litigieuse que la date d'entrée, mentionnée sur l'ensemble des bulletins de salaire, était le 30 septembre 1984, et que les bulletins de salaires produits pour les années 1984 et 1985 faisaient état du versement de cotisations au titre de la retraite, ce dont il convenait de déduire que des cotisations vieillesse avaient bien été versées pour l'ensemble de cette période par son employeur ; qu'il convenait en conséquence da faire droit à la demande de validation formée par Daniel Y... à hauteur de 3 trimestres pour 1985 et de 4 trimestres pour l'année 1986, soit au total 7 trimestres supplémentaires
Alors que si l'article L.351-2 du Code de la sécurité sociale permet à l'assuré, en cas de force majeure ou d'impossibilité manifeste d'apporter la preuve du versement de cotisations, de l'établir à l'aide de documents probants ou de présomptions concordantes, les bulletins de salaire délivrés au salarié pendant sa période d'activité salariée au Gabon, - au cours de laquelle il n'était plus, en principe (sauf assurance volontaire), affilié au régime général de sécurité sociale français, mais au régime de sécurité sociale du Gabon -, faisant état de retenues CNBTP au titre de la retraite, - c'est-à-dire de cotisations versées au régime de prévoyance des cadres du bâtiment et des travaux publics qui sont inscrits au régime complémentaire AGIRC -, ne sauraient en tenir lieu, en l'absence de toute précision sur le montant des cotisations précomptées ou versées au titre de l'assurance vieillesse du régime général ; et qu'en validant néanmoins 7 trimestres à hauteur de 3 trimestres en 1985 et de 4 en 1986, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L.351-2, R.351-11 du Code de la sécurité sociale et 1315 du Code civil.