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11/07/2018 | FRANCE | N°17-21587

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 11 juillet 2018, 17-21587


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 21 mars 2017), que, suivant actes authentiques reçus par M. F... , notaire associé au sein de la SCP L... - M... - N... - F... - O... - I... - Y... (le notaire), M. X... a vendu trois appartements dont il était propriétaire ; qu'une demande de subvention pour travaux ayant été refusée en raison de ce que les biens vendus ne répondaient pas aux conditions minimales de superficie et de volume permettant leur mise en location, les acquéreurs ont manifesté leur int

ention de faire annuler les ventes ; qu'après avoir racheté certain...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 21 mars 2017), que, suivant actes authentiques reçus par M. F... , notaire associé au sein de la SCP L... - M... - N... - F... - O... - I... - Y... (le notaire), M. X... a vendu trois appartements dont il était propriétaire ; qu'une demande de subvention pour travaux ayant été refusée en raison de ce que les biens vendus ne répondaient pas aux conditions minimales de superficie et de volume permettant leur mise en location, les acquéreurs ont manifesté leur intention de faire annuler les ventes ; qu'après avoir racheté certains des biens en vue de leur réunion et de leur revente, M. X... et la SCI Tizé ont assigné le notaire en responsabilité et indemnisation, soutenant qu'il avait commis une faute pour n'avoir pas appelé l'attention des parties sur l'impossibilité de les louer au regard de la réglementation en vigueur ;

Sur le moyen unique, pris en ses première, troisième, quatrième et cinquième branches, ci-après annexé :

Attendu que ces griefs ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur la deuxième branche du moyen, ci-après annexé :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande ;

Attendu que la cour d'appel a relevé, à bon droit, qu'il appartenait au notaire d'appeler l'attention des parties à l'acte sur le défaut de conformité des biens qui ne permettait pas de les donner en location et que, faute de l'avoir fait, il avait engagé sa responsabilité à l'égard de M. X..., au profit duquel, même si celui-ci, professionnel de l'immobilier, disposait des compétences personnelles lui permettant de connaître la réglementation applicable, il devait néanmoins remplir son devoir de conseil ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze juillet deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Richard, avocat aux Conseils, pour M. X... et la société Tizé I

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur Gilles X... et la Société TIZE I de leur demande tendant à voir condamner la Société P..., Y..., Z..., J..., K..., A..., G... à leur payer respectivement les sommes de 103.647 euros et 10.838 euros à titre de dommages-intérêts ;

AUX MOTIFS QUE, sur la faute du notaire, s'agissant des ventes initiales, Maître F... a reçu les actes de vente des 5 septembre 2007 (vente X.../époux C... : lots n°s 62 et 51p), 13 octobre 2007 (vente X.../consorts H... : lots n°s 103 et 106), et 12 décembre 2007 (vente X.../D...: lots n°s 48 et 51p) ; que chacun des actes de vente contient une mention relative au logement décent, selon laquelle le notaire averti l'acquéreur des caractéristiques du logement dit "décent", soit une pièce principale d'au moins 9 m² et une hauteur sous plafond au moins égale à 2,20 m, soit un volume habitable de 20 m3 au minimum ; que selon l'article 4 du décret 2002-120 du 30 janvier 2002 relatif aux caractéristiques du logement décent pris pour l'application de l'article 187 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, qui s'applique aux logements donnés en location, le logement doit en effet disposer au moins d'une pièce principale ayant soit une surface habitable au moins égale à 9 mètres carrés et une hauteur sous plafond au moins égale à 2,20 mètres, soit un volume habitable au moins égal à 20 mètres cubes ; que le règlement sanitaire départemental de l'Ille-et-Vilaine applicable précise, s'agissant de la superficie des pièces, que l'une au moins des pièces principales du logement doit avoir une surface supérieure à 9 m², mais que, dans le cas d'un logement comportant une seule pièce principale, la surface de ladite pièce doit être au moins égale à 9 m² ; qu'en l'occurrence, il résulte de l'acte de la vente X.../époux C... du 5 septembre 2007, portant sur les lots n°s 62 et 51p, qui n'est contredit par aucun élément, que le lot n° 62, constitué d'une chambre, avec salle de bains avec wc, et mezzanine, est d'une superficie de 9 m² ; que le bien ainsi vendu était conforme aux exigences précitées, et aucune faute ne peut en conséquence, être reprochée au notaire ; qu'en revanche, les lots n° 103, une chambre, avec salle d'eau avec wc, et mezzanine, d'une superficie indiquée de 7,68 m², objet de la vente X.../consorts H... du 13 octobre 2007, et n° 48, une chambre d'une superficie indiquée de 8,80 m², objet de la vente X.../D... du 12 décembre 2007, n'étaient pas conformes ; qu'il appartenait en effet au notaire d'attirer l'attention des parties à l'acte sur ce défaut de conformité qui ne permettait pas de donner les biens en location ; que faute de l'avoir fait, le notaire a engagé sa responsabilité à l'égard de Monsieur X..., au profit duquel, même si celui-ci, professionnel de l'immobilier, disposait des compétences personnelles lui permettant de connaître la réglementation applicable, il devait néanmoins remplir son devoir de conseil, ce qu'il ne conteste d'ailleurs pas ; que cependant, cette compétence particulière devait permettre à Monsieur X..., lisant les actes qui contenaient et la mention de la superficie des biens vendus et le rappel express des dispositions de l'article 4 du décret 2002-120 du 30 janvier 2002, de constater que les lots n°s 103 et 48 ne répondaient pas aux exigences du logement décent susceptible d'être donné en location ; qu'il a en cela lui-même commis une faute qui a concouru à la production du préjudice qu'il invoque ; qu'en revanche, à aucun de ces actes n'a été partie la Société TIZE I ; que le notaire, tenu d'un devoir de conseil à l'égard de toutes les parties à l'acte, n'est pas tenu d'un tel devoir à l'égard de tiers ; que la responsabilité encourue par le notaire rédacteur d'acte étant de nature délictuelle à l'égard des parties à cet acte, la Société TIZE I ne peut se prévaloir d'un manquement du notaire dans l'exécution de ses obligations contractuelles à l'égard de ces parties en tant que cause d'un dommage subi par elle ; qu'elle ne peut rechercher la responsabilité du notaire à son égard, sur le fondement de l'article 1382 (ancien) du Code civil, qu'en démontrant qu'il a commis une faute lui ayant certainement et directement causé un préjudice personnel ; que cependant, la Société TIZE I ne fait pas cette preuve ; [
] ; que, sur le préjudice et le lien de causalité, il a été dit que seul peut être imputé à faute à Maître F... , le manquement à l'obligation de conseil qu'il devait à Monsieur X..., non à la Société TIZE I, dans les ventes des lots n°s 103 et 48 ; que c'est en raison de la réglementation applicable, non d'une faute du notaire, que les lots en question ne pouvaient, comme tels, être donnés en location ; que le préjudice causé par le manquement reproché à Monsieur X... ne peut être qu'une perte de la chance pour celui-ci d'avoir pu, avant de vendre, faire en sorte que les biens vendus soient conformes à la réglementation applicable en matière de logements locatifs ; que s'agissant du lot n° 103, l'examen du plan d'architecte produit par Monsieur X... montre que celui-ci est séparé du lot n° 105 lui appartenant, dont rien ne permet de penser qu'il eût envisagé de l'y réunir, par un mur porteur rendant très vraisemblablement plus complexe et coûteuse la réalisation d'une ouverture intérieure dispensant de passer, pour aller de l'un à l'autre, par le couloir commun ; qu' il en est de même en ce qui concerne la jonction entre le lot n° 103 et le lot n° 100, qui au surplus, n'appartenait pas à Monsieur X..., mais à la Société TIZE, dont celui-ci était le gérant ; que Monsieur X... produit une facture d'architecte en date du 21 février 2013, pour une étude de fusion d'appartements et établissement d'un dossier de permis de construire, ainsi qu'une facture pour travaux de démolition, de 240 € seulement, en date du 19 novembre 2012, soit antérieure au permis de construire et démolir qui a été accordé le 18 avril 2013, sans d'ailleurs préciser les lots concernés par le permis, étant observé que Monsieur X... est propriétaire de plusieurs autres lots au même étage de l'immeuble ; qu'il ne résulte pas de ces documents, ni d'aucun autre, que des travaux permettant l'établissement d'une communication intérieure entre les lots n° 103 et n° 100 ont été réalisés ; que si l'ensemble a été finalement acquis par Monsieur E..., pour un prix total de 41 001 €, l'acte de vente précise au contraire que le vendeur déclarait n'avoir pas modifié la configuration des lieux depuis les mesurages des lots ; que rien ne permet, dans ces circonstances, de considérer comme acquis que Monsieur E... aurait accepté, eu égard aux contraintes spécifiques sus évoquées, de payer un prix plus élevé ; que les observations sont identiques en ce qui concerne le lot n° 48, dont il n'est pas non plus établi qu'il a été physiquement réuni par une communication intérieure avec le lot n° 62 ; que de même, il est purement hypothétique d'envisager que Mademoiselle D... aurait acheté l'ensemble à un prix supérieur à celui de 57 001 € auquel Monsieur X... le lui a vendu ; que ce dernier ne démontre pas qu'il a certainement perdu, par la faute du notaire, une chance raisonnable de vendre les lots n°s 103 et 48 dans des conditions plus avantageuses que celles auxquelles il les a en définitive cédés ; que le jugement déféré doit être confirmé ;

1°) ALORS QUE le notaire est tenu d'éclairer les parties et d'appeler leur attention, de manière complète et circonstanciée, sur la portée, les effets et les risques des actes auxquels il est requis de donner la forme authentique ; qu'en se bornant à affirmer, pour décider que Maître Didier F... n'avait pas manqué à son obligation de conseil à l'égard de Monsieur X... en s'abstenant de l'informer de l'impossibilité de louer le lot n° 62, que celui-ci était constitué d'une chambre d'une surface habitable au moins égale à 9 mètres carrés, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la hauteur sous plafond étant inférieure à 2,20 mètres, le logement ne satisfaisait pas, de ce point de vue, aux critères des logements décents pouvant être loués, de sorte que le notaire avait manqué à son obligation d'information de conseil à l'égard de Monsieur X..., la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

2°) ALORS QUE le notaire est tenu d'éclairer les parties et d'appeler leur attention, de manière complète et circonstanciée, sur la portée, les effets et les risques des actes auxquels il est requis de donner la forme authentique ; que les compétences et connaissances personnelles du client ne libérant pas le notaire de son devoir de conseil, celui-ci ne peut s'exonérer en tout ou partie de sa responsabilité en opposant à son client un manquement tiré de ce qu'il n'a pas recherché lui-même les éléments faisant l'objet de l'obligation de conseil et d'information dont il est tenu ; qu'en décidant néanmoins que Maître F... était fondé à se prévaloir, pour s'exonérer partiellement de sa responsabilité, de ce que Monsieur X... était un professionnel de l'immobilier et disposait de compétences personnelles lui permettant de connaître la réglementation applicable, de sorte qu'il était en mesure de lire les actes qui comportaient la mention des superficies des biens vendus et le rappel des dispositions relatives au logement décent, et ainsi, de constater que les lots n° 103 et 48 ne satisfaisaient pas à ces dispositions, la Cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

3°) ALORS QUE les notaires sont responsables envers les tiers de toute faute préjudiciable commise pas eux dans l'exercice de leurs fonctions ; qu'en se bornant à affirmer, pour écarter la demande d'indemnisation de la Société TIZE I en raison du manquement de Maître F... à son obligation d'information, que celle-ci ne démontrait pas que le notaire avait commis une faute lui ayant certainement et directement causé un préjudice personnel, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le préjudice de la Société TIZE I résultait du fait qu'en raison du manquement du notaire à son obligation d'information, Monsieur X..., qui était son gérant, avait vendu un appartement insusceptible d'être loué en raison de ses dimensions insuffisantes (lot n° 103) et n'avait pas procédé à la réunion de son lot avec le lot adjacent qu'elle possédait elle-même (n° 100) et, qui était également constitué d'un appartement insusceptible d'être loué, afin que l'appartement ainsi constitué puisse faire l'objet d'une location, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

4°) ALORS QUE le manquement du notaire à son obligation d'information qui cause à autrui un dommage oblige celui-ci à le réparer ; qu'en se bornant néanmoins, pour écarter la responsabilité de Maître F..., à constater que Monsieur X... ne démontrait pas qu'il avait perdu, par la faute du notaire, une chance raisonnable de vendre le lot n° 103 dans des conditions plus avantageuses que celles auxquelles il les avait cédées, dès lors que le coût des travaux de réunion des deux lots était élevé, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le manquement du notaire à son obligation d'informer Monsieur X... sur le fait que l'appartement composant le lot n° 103 ne pouvait être loué, avait conduit ce dernier à vendre un appartement insusceptible d'être loué et à l'exposer à un recours de la part de l'acquéreur, au lieu de procéder à la réunion préalable de ce lot avec le lot n° 100 adjacent, appartenant à la Société TIZE I, afin que l'appartement constitué par les deux lots réunis soit susceptible d'être loué, et si le coût des travaux était compensé par l'augmentation de la valeur du lot, résultant du fait qu'il pouvait désormais faire l'objet d'une location, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

5°) ALORS QUE le manquement du notaire à son obligation d'information qui cause à autrui un dommage oblige celui-ci à le réparer ; qu'en se bornant néanmoins, pour écarter la responsabilité de Maître F... , à constater que Monsieur X... ne démontrait pas qu'il avait perdu, par la faute du notaire, une chance raisonnable de vendre le lot n° 48 dans des conditions plus avantageuses que celles auxquelles il les avait cédées, sans rechercher, comme elle y était invitée, si en raison du manquement du notaire à son obligation d'attirer l'attention de Monsieur X... sur le fait que les appartements adjacents constituant les lots n° 48 et 62 étaient insusceptibles d'être loués en raison de l'insuffisance de leur surface ou de leur hauteur, celui-ci avait été conduit à vendre séparément deux appartements insusceptible d'être loués puis, après avoir racheté le lot n° 62 afin d'éviter une condamnation à indemnité, à le revendre à Madame D..., propriétaire du lot n° 48, à un prix dérisoire, afin qu'elle puisse réunir les deux lots et ainsi être en possession d'un appartement susceptible d'être loué, sous réserve de la réalisation de travaux, au lieu de procéder à une telle réunion préalablement à la vente initiale, de sorte que Monsieur X... aurait pu vendre ces lots à un prix supérieur à celui auquel il les a vendus séparément, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 17-21587
Date de la décision : 11/07/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 21 mars 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 11 jui. 2018, pourvoi n°17-21587


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Richard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.21587
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