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04/07/2018 | FRANCE | N°17-13069

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 04 juillet 2018, 17-13069


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 13 décembre 2016), rendu sur contredit, que la société de droit allemand Werner Tiernahrung GmbH (la société Werner) et les sociétés françaises Tiwy et Etablissements Laboulet (la société Laboulet) entretenaient des relations d'affaires portant sur la fourniture d'aliments pour oiseaux ; que dans le cadre d'une convention d'affacturage les sociétés Tiwy et Laboulet ont transféré à la société Banque Delubac et Cie (la banque) des fa

ctures émises sur la société Werner ; qu'à leurs échéances, ces factures sont r...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 13 décembre 2016), rendu sur contredit, que la société de droit allemand Werner Tiernahrung GmbH (la société Werner) et les sociétés françaises Tiwy et Etablissements Laboulet (la société Laboulet) entretenaient des relations d'affaires portant sur la fourniture d'aliments pour oiseaux ; que dans le cadre d'une convention d'affacturage les sociétés Tiwy et Laboulet ont transféré à la société Banque Delubac et Cie (la banque) des factures émises sur la société Werner ; qu'à leurs échéances, ces factures sont revenues impayées et que les mises en demeure délivrées par la banque sont demeurées vaines ; que la société Laboulet a fait l'objet d'un jugement de redressement judiciaire le 24 février 2012 et la société Tiwy a été mise en liquidation judiciaire le 9 mars 2012 ; que la société Werner ayant fait valoir que les factures litigieuses ne correspondaient à aucune livraison, la banque l'a assignée en paiement de dommages-intérêts pour comportement déloyal ; que la société Werner a soulevé l'incompétence du tribunal étatique en invoquant les clauses d'arbitrage prévues dans les contrats de vente ;

Attendu que la banque fait grief à l'arrêt attaqué de dire que le tribunal de commerce de Paris n'était pas compétent et de renvoyer les parties à mieux se pourvoir alors, selon le moyen :

1°/ qu'en considérant que le fait que la société Banque Delubac ait engagé une action à caractère délictuel ne suffit pas à faire regarder la convention d'arbitrage comme manifestement inapplicable, sans répondre au moyen péremptoire invoqué par la société Banque Delubac, tiré de ce que l'action engagée par elle, en qualité de factor, à l'encontre de la société Werner, débiteur cédé, était fondée non sur les contrats de vente conclus par la société Werner avec les sociétés Etablissements Laboulet et Tiwi ou leur exécution, mais sur le comportement déloyal du débiteur cédé à l'encontre du factor, en l'absence de lien entre la convention d'affacturage et les contrats de vente, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°/ qu'une convention d'arbitrage est manifestement inapplicable à une action de nature délictuelle fondée sur le comportement déloyal du débiteur cédé à l'endroit du factor, en l'absence de lien entre le contrat principal qui contient la convention d'arbitrage et la convention d'affacturage ; qu'en considérant que le fait que la société Banque Delubac ait engagé une action à caractère délictuel ne suffit pas à faire regarder la convention d'arbitrage par référence stipulée aux contrats conclus entres les sociétés Werner et les sociétés Etablissements Laboulet et Tiwi comme manifestement inapplicable, quand il résulte de ses propres constatations que l'action introduite par la société Banque Delubac était fondée, non sur les contrats de vente conclus par la société Werner avec les sociétés Etablissements Laboulet et Tiwi stipulant la clause d'arbitrage par référence, ni sur leur exécution, mais sur le comportement déloyal de la société Werner, débiteur cédé, à l'encontre de la société Banque Delubac, factor, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l'article 1448 du code de procédure civile ;

3°/ qu'une convention d'arbitrage est manifestement inapplicable à une action de nature délictuelle fondée sur le comportement déloyal du débiteur cédé à l'endroit du factor, en l'absence de lien entre le contrat principal qui contient la convention d'arbitrage et la convention d'affacturage ; qu'en considérant que le fait que la société Banque Delubac ait engagé une action à caractère délictuel ne suffit pas à faire regarder la convention d'arbitrage par référence stipulée aux contrats conclus entres les sociétés Werner et les sociétés Etablissements Laboulet et Tiwi comme manifestement inapplicable, sans caractériser de lien entre les contrats de vente conclus par les société Werner, Etablissements Laboulet et Tiwi, stipulant la clause d'arbitrage par référence, et la convention d'affacturage conclue par les sociétés Banque Delubac, Etablissements Laboulet et Tiwi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1448 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant constaté que les sociétés Laboulet et Tiwy avaient, en exécution d'une convention d'affacturage, transféré à la banque des factures émises sur la société Werner puis que, ces factures étant revenues impayées, la banque avait assigné la société Werner en paiement de dommages-intérêts pour comportement déloyal, ce dont il résultait que la demande de la banque était en lien avec les contrats de vente conclus par la société Werner et contenant les clauses compromissoires, la cour d'appel, en effectuant la recherche invoquée, a pu en déduire, répondant ainsi aux conclusions prétendument délaissées, que le caractère délictuel de l'action engagée par celle-ci ne suffisait pas à caractériser l'inapplicabilité manifeste de la convention d'arbitrage ; que le moyen n'est pas fondé ; PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Banque Delubac et Cie aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer la somme de 3 000 euros à la société Werner Tiernahrung GmbH ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre juillet deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour la société Banque Delubac et Cie.

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que le tribunal de commerce de Paris n'était pas compétent et renvoyé les parties à mieux se pourvoir ;

AUX MOTIFS QUE la société de droit allemand WERNER TIERNAHRUNG GMBH (WERNER) et les sociétés françaises TIWY et ETABLISSEMENTS LABOULET (LABOULET) entretenaient des relations d'affaires portant sur la fourniture d'aliments pour oiseaux. Dans le cadre d'une convention d'affacturage, LABOULET et TIWY ont cédé à la SCS BANQUE DELUBAC ET CIE (DELUBAC) des factures émises sur WERNER pour un montant total de 432.500 euros. A leurs échéances en août et septembre 2011 ces factures sont revenues impayées. Le 15 novembre 2011 et le 28 février 2012 DELUBAC a délivré des mises en demeure qui sont demeurées vaines. LABOULET a fait l'objet d'un jugement de redressement judiciaire le 24 février 2012 et TIWI a été placée en liquidation judiciaire le 9 mars 2012. WERNER ayant fait valoir que les factures litigieuses ne correspondaient à aucune livraison, DELUBAC, par acte du 9 décembre 2012, l'a assignée devant le tribunal de commerce de Paris en paiement de la somme de 432.500 euros à titre de dommages-intérêts pour n'avoir pas eu la loyauté de l'informer qu'elle n'entendait pas payer alors qu'elle savait que le factor avait été abusé par ses clientes ;

ET AUX MOTIFS QU'aux termes de l'alinéa 1, de l'article 1448 du code de procédure civile, applicable en matière d'arbitrage international en vertu de l'article 1506, 1° du même code : « Lorsqu'un litige relevant d'une convention d'arbitrage est porté devant une juridiction de l'Etat, celle-ci se déclare incompétente sauf si le tribunal arbitral n'est pas encore saisi et si la convention d'arbitrage est manifestement nulle ou manifestement inapplicable » ; que les contrats conclu entre Werner et Laboulet et Tiwy stipulaient une clause compromissoire par référence au contrat –type n° 27 de la FOSFA dans les termes suivants : « Tout litige naissant de ce contrat, y inclus toute question de droit naissant en relation avec celui-ci, sera soumis à l'arbitrage à Londres (ou à un autre endroit si les parties en sont convenues ainsi) conformément aux règles d'arbitrage et d'appel de la Fédération des Associations d'Huiles, de graines et des graisses, telles qu'elles sont en vigueur au jour du présent contrat et que les parties aux présentes sont réputées reconnaître applicables ») ; que ni la circonstance que la clause compromissoire soit stipulée par référence, ni le fait que Delubac ait engagé une action à caractère délictuel ne suffisent à faire regarder la convention d'arbitrage comme manifestement inapplicable ; qu'il convient, infirmant le jugement, de constater que le tribunal de commerce de Paris est incompétent et de renvoyer les parties à se mieux pourvoir ;

1°) ALORS QU' en considérant que le fait que la société Banque Delubac ait engagé une action à caractère délictuel ne suffit pas à faire regarder la convention d'arbitrage comme manifestement inapplicable, sans répondre au moyen péremptoire invoqué par la société Banque Delubac (p. 8), tiré de ce que l'action engagée par elle, en qualité de factor, à l'encontre de la société Werner, débiteur cédé, était fondée non sur les contrats de vente conclus par la société Werner avec les sociétés Etablissements Laboulet et Tiwi ou leur exécution, mais sur le comportement déloyal du débiteur cédé à l'encontre du factor, en l'absence de lien entre la convention d'affacturage et les contrats de vente, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QU' une convention d'arbitrage est manifestement inapplicable à une action de nature délictuelle fondée sur le comportement déloyal du débiteur cédé à l'endroit du factor, en l'absence de lien entre le contrat principal qui contient la convention d'arbitrage et la convention d'affacturage ; qu'en considérant que le fait que la société Banque Delubac ait engagé une action à caractère délictuel ne suffit pas à faire regarder la convention d'arbitrage par référence stipulée aux contrats conclus entres les sociétés Werner et les sociétés Etablissements Laboulet et Tiwi comme manifestement inapplicable, quand il résulte de ses propres constatations que l'action introduite par la société Banque Delubac était fondée, non sur les contrats de vente conclus par la société Werner avec les sociétés Etablissements Laboulet et Tiwi stipulant la clause d'arbitrage par référence, ni sur leur exécution, mais sur le comportement déloyal de la société Werner, débiteur cédé, à l'encontre de la société Banque Delubac, factor, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l'article 1448 du code de procédure civile ;

3°) ALORS QU'une convention d'arbitrage est manifestement inapplicable à une action de nature délictuelle fondée sur le comportement déloyal du débiteur cédé à l'endroit du factor, en l'absence de lien entre le contrat principal qui contient la convention d'arbitrage et la convention d'affacturage ; qu'en considérant que le fait que la société Banque Delubac ait engagé une action à caractère délictuel ne suffit pas à faire regarder la convention d'arbitrage par référence stipulée aux contrats conclus entres les sociétés Werner et les sociétés Etablissements Laboulet et Tiwi comme manifestement inapplicable, sans caractériser de lien entre les contrats de vente conclus par les société Werner, Etablissements Laboulet et Tiwi, stipulant la clause d'arbitrage par référence, et la convention d'affacturage conclue par les sociétés Banque Delubac, Etablissements Laboulet et Tiwi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1448 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 17-13069
Date de la décision : 04/07/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 13 décembre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 04 jui. 2018, pourvoi n°17-13069


Composition du Tribunal
Président : M. Rémery (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer, SCP Ortscheidt

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.13069
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