LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
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M. Jean-Claude Z...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS , chambre 2-9, en date du 5 avril 2018, qui, dans la procédure suivie contre lui du chef de violences aggravées, détention frauduleuse de faux document administratif, a prononcé sur sa demande en nullité du jugement et rejeté la demande de mise en liberté ;
Vu le mémoire produit ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure, que M.Jean-Claude Z... a été renvoyé devant le tribunal correctionnel des chefs de violences ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à huit jours sur les personnes de MM. Lionel A... et Aboubakar B... en réunion, avec préméditation et usage d'une arme, violences n'ayant pas entraîné d'incapacité supérieure à huit jours sur la personne de M. Laurent C... en réunion, avec usage d'une arme et sur personne dépositaire de l'autorité publique et détention frauduleuse de faux document administratif ; que le tribunal l'a déclaré coupable et condamné à dix ans d'emprisonnement; qu'il a formé appel ainsi que le procureur de la République ; que dans l'attente de sa comparution devant la cour d'appel, M. Z... a formé une demande de mise en liberté ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l'article 406 du code de procédure pénale, 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande en nullité du jugement de première instance du 14 août 2017 et la demande de mise en liberté de M. Jean-Claude Z... ;
"aux motifs qu'à l'audience publique du vendredi 30 mars 2018, Mme la présidente a constaté l'identité du requérant, détenu ;
"alors que l'arrêt attaqué ne mentionne nulle part que le prévenu a été, conformément à l'article 406 du code de procédure pénale, informé de son droit de faire des déclarations ou de se taire ; que l'article 406, applicable devant la cour d'appel, ne prévoit aucune exception, lorsque la cour d'appel est saisie d'une demande de mise en liberté ; ainsi, l'arrêt attaqué ne satisfait pas en la forme aux conditions essentielles de son existence légale ; que l'arrêt attaqué se borne à mentionner que l'identité du prévenu a été constatée lors de l'audience du 30 mars 2018, et qu'il a eu la parole en dernier ; qu'en revanche, il ne comporte pas la mention que M. Z... a été informé de son droit de faire des déclarations ou de se taire conformément aux prescriptions de l'article 406 du code de procédure pénale ; que si la chambre criminelle de la Cour de cassation a déjà eu l'occasion d'affirmer que les prescriptions de l'article 406 du code de procédure pénale n'étaient pas applicables devant la chambre de l'instruction (cf. en dernier -lieu : 29 mars 2017, pourvoi n° 17-80.308) ; que cette solution n'est pas transposable lorsqu'une chambre correctionnelle de la cour d'appel statue sur la détention, après une condamnation prononcée en première instance ; qu'aucun texte spécifique ne déroge en matière de détention devant la chambre correctionnelle de la cour d'appel à l'article 406 du code de procédure pénale ; qu'en conséquence, en l'espèce, l'arrêt qui ne mentionne pas que M. Z... a été informé de son droit de faire des déclarations ou de se faire ne satisfait pas en la forme aux conditions essentielles de son existence légale, et est conséquence voué à une annulation certaine" ;
Attendu que la cour d'appel, en n'informant pas la personne concernée comparant devant elle du droit de se taire, n'a pas méconnu l'article 406 du code de procédure pénale, dès lors que cette disposition ne trouve pas à s'appliquer lorsque la juridiction correctionnelle est saisie, en application des articles 148-1 et suivants dudit code, d'une demande de mise en liberté ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles préliminaire, 116, 409, 410 et 593 du code de procédure pénale, ensemble de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande en nullité du jugement de première instance du 14 août 2017 ;
"aux motifs que la cour a compétence pour statuer sur l'éventuelle irrégularité du jugement (
) ; que la cour rappelle qu'aux termes de l'article 116 du code de procédure pénale la personne mise en examen doit, à l'issue de la première comparution, déclarer au juge d'instruction son adresse personnelle ; que la personne est avisée qu'elle doit signaler au juge d'instruction, jusqu'au règlement de l'information par nouvelle déclaration ou par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, tout changement d'adresse déclaré ; qu'elle est également avisé que toute notification ou signification faite à la dernière adresse déclarée sera réputée faite à sa personne ; que mention de cet avis, ainsi que de la déclaration d'adresse, est portée au procès-verbal ; qu'en l'espèce M. Z... a indiqué au juge d'instruction lors de l'interrogatoire de première comparution du 15 novembre 2006 que son adresse était [...] ; qu'il n'a pas signalé au juge d'instruction dans les formes prévues par l'article 116 du code de procédure pénale, une nouvelle adresse, alors que le procès-verbal de première comparution mentionne une règle de changement d'adresse prévue à l'article 116 du code de procédure pénale ; qu'à supposer, comme l'indique le fax du 27 octobre 2015, qu'une nouvelle adresse [...] ait été communiquée au juge d'instruction par l'avocat, cette information ne répondait pas aux règles fixées par l'article 116 précité ; que M. Z... a donc été valablement cité par acte d'huissier délivré le 19 août 2017 pour l'audience du 30 août 2017 à l'adresse déclarée au juge d'instruction [...] ; que par ailleurs, les articles 409 et 410 du code de procédure pénale faisant obligation à l'autorité judiciaire d'extraire les prévenus détenus, y compris pour autre cause, pour pouvoir qualifier la décision rendue de contradictoire à signifier, ne sont pas susceptibles de tenir en échec les règles de déclaration d'adresse ci-dessus rappelées ; qu'il en résulte que le jugement du tribunal n'a pas été rendu en violation des droits de la défense ;
"1°) alors que l'article 116 du code de procédure pénale ne prévoit aucune forme particulière pour la déclaration faite au juge d'instruction par la personne mise en examen de son changement d'adresse ; qu'en l'espèce, la nouvelle adresse [...] communiquée au juge d'instruction par un fax du 27 octobre 2015 était donc régulière, en sorte que M. Z... ne pouvait être valablement cité à l'adresse antérieurement déclarée [...] ; que l'arrêt attaqué a ainsi violé l'article 116 du code de procédure pénale et ensemble les droits de la défense ;
"2°) alors que bien que régulièrement cité à personne, le prévenu détenu qui ne comparaît pas, ne peut être condamné contradictoirement par application des dispositions des articles 409 et 410 du code de procédure pénale dès lors que la décision ne constate pas que l'intéressé, détenu pour autre cause, a manifesté sa volonté de ne pas être présent aux débats ; que dès lors l'arrêt attaqué qui ne constate nulle part que M. Z..., détenu pour autre cause, aurait avant l'audience devant le tribunal, manifesté sa volonté de ne pas être présent aux débats, a violé les articles 409 et 410 du code de procédure pénale, ensemble les droits de la défense" ;
Attendu que pour rejeter la demande d'annulation du jugement faisant valoir que M. Z..., détenu pour autre cause, n'avait pas renoncé à comparaître à l'audience, l'arrêt attaqué relève que celui-ci a été valablement cité, par acte d'huissier délivré le 19 mai 2017 pour l'audience du 30 août 2017, à l'adresse déclarée au juge d'instruction [...] ; que les juges ajoutent que les articles 409 et 410 du code de procédure pénale faisant obligation à l'autorité judiciaire d'extraire les prévenus détenus, y compris pour autre cause, pour pouvoir qualifier la décision rendue de contradictoire à signifier ne sont pas susceptibles de tenir en échec les règles de déclaration d'adresse ci-dessus rappelées ; que les juges en déduisent que le jugement du tribunal n'a pas été rendu en violation des droits de la défense, et que le mandat d'arrêt contenu dans cette décision a été valablement décerné par cette juridiction ;
Attendu qu'en statuant ainsi et dès lors qu'il ne résulte pas de la procédure que le prévenu ait notifié, conformément aux dispositions de l'article 116 du code de procédure pénale, son changement d'adresse par lettre recommandée avec accusé de réception, ni que les juges du premier degré aient été informés de ce que M. Z... avait été placé sous mandat de dépôt le 10 juin 2016 et ait fait connaître qu'il était empêché de comparaître pour une cause indépendante de sa volonté, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme Schneider, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.