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24/05/2018 | FRANCE | N°16-22460

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 24 mai 2018, 16-22460


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 25 mai 2016), que la société Azur technique services (société ATS), depuis en liquidation judiciaire, a été chargée par la société Bois francs cottages de la réalisation de plusieurs lots à l'occasion de la construction de cottages ; qu'elle a sous-traité l'exécution d'une partie des lots à la société Peinture Normandie (société PNSA) ; que ce sous-traitant, placé depuis en redressement judiciaire, n'ayant pas été intégralement réglé de ses travau

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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 25 mai 2016), que la société Azur technique services (société ATS), depuis en liquidation judiciaire, a été chargée par la société Bois francs cottages de la réalisation de plusieurs lots à l'occasion de la construction de cottages ; qu'elle a sous-traité l'exécution d'une partie des lots à la société Peinture Normandie (société PNSA) ; que ce sous-traitant, placé depuis en redressement judiciaire, n'ayant pas été intégralement réglé de ses travaux par l'entrepreneur principal, a assigné en paiement le maître de l'ouvrage ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu que la société PV-CP immobilier holding, venant aux droits de la société Bois francs cottages, fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société PNSA certaines sommes au titre de l'indemnisation du coût des travaux exécutés et de frais accessoires, et en réparation d'un préjudice financier spécifique ;

Mais attendu qu'ayant exactement retenu que le maître de l'ouvrage, qui avait accepté et agréé le sous-traitant, avait commis une faute délictuelle en s'abstenant d'exiger de l'entrepreneur principal, en l'absence de délégation de paiement, la caution garantissant le paiement des sommes dues en application du sous-traité, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de répondre à des conclusions que ses constatations rendaient inopérantes, en a déduit à bon droit que le sous-traitant était fondé à demander au maître de l'ouvrage le paiement de dommages-intérêts équivalents au juste coût des travaux exécutés et au préjudice causé par le défaut de paiement, peu important que le sous-traitant ait invoqué la nullité du sous-traité dans une lettre de mise en demeure adressée avant son acceptation et son agrément et que le montant des travaux fût supérieur à celui qui aurait été dû en exécution de l'action directe ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen, ci-après annexé :

Attendu que la société PV-CP immobilier holding, venant aux droits de la société Bois francs cottages, fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société PNSA une certaine somme en réparation de frais accessoires ;

Mais attendu qu'ayant relevé que, dans un contexte de chantier difficile en raison des conditions météorologiques et d'une mauvaise organisation par la société ATS de l'exécution de ses propres lots, l'initiative de la société PNSA avait contribué à une exécution de qualité de ses prestations et évité la prise de retard, la cour d'appel, qui a, abstraction faite de motifs surabondants, souverainement apprécié le juste coût des travaux exécutés utilement par le sous-traitant, a pu mettre à la charge du maître de l'ouvrage une somme correspondant au coût de location des déshumidificateurs ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen, ci-après annexé :

Attendu que la société PV-CP immobilier holding, venant aux droits de la société Bois francs cottages, fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société PNSA une certaine somme en réparation d'un préjudice financier spécifique ;

Mais attendu qu'ayant retenu que la société PNSA avait été exposée à des charges financières, dont celle résultant du défaut de paiement de ses travaux, et que le manquement de la société Bois francs cottages, sans être la cause directe de sa mise en redressement judiciaire, avait contribué directement à lui causer un préjudice financier spécifique, la cour d'appel a, sans violer le principe de la contradiction ni modifier l'objet du litige, souverainement apprécié l'existence de ce préjudice ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société PV-CP immobilier holding, venant aux droits de la société Bois francs cottages, aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société PV-CP immobilier holding et la condamne à payer la somme globale de 3 000 euros à la société Peinture Normandie et à M. X..., ès qualités ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre mai deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société PV-CP immobilier holding.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la société Bois Francs Cottages à payer à la société Peinture de Normandie entre les mains de son mandataire judiciaire, Maître X..., les sommes de 216.696,60 euros au titre de l'indemnisation du coût des travaux exécutés, 5.800 euros en réparation des frais accessoires au coût des travaux et de 10.000 euros en réparation du préjudice financier spécifique et d'avoir déclaré justifiée la demande de mainlevée par la société Peinture Normandie de la caution bancaire par elle constituée le 9 novembre 2010 auprès de la Banque du Bâtiment et des Travaux Publics sous la référence n° 31058586 ;

Aux motifs que pour rejeter la demande en paiement formée par PNSA à l'encontre de la SNC Bois Francs Cottage maitre d'ouvrage, les premiers juges ont relevé d'une part que la sous-traitante ne pouvait plus se prévaloir du non-respect des dispositions de la loi du 31 décembre 1975 puisque la nullité du sous-traité avait été invoquée dès la réception ; que d'autre part, la demande en paiement formée par ailleurs au visa de l'article 1382 du code civil ne pouvait être accueillie car à la suite de la prise de position hâtive par lettre recommandée avec AR du 24/12/2010 sur la nullité du sous-traité, il n'était pas justifié d'une faute du maître d'ouvrage dans le cadre de cette sous-traitance annulée rétroactivement ; qu'à défaut de tout lien contractuel entre le maître d'ouvrage et le sous-traitant la recherche de responsabilité du maitre d'ouvrage ne peut être recherchée que sur le plan délictuel ; qu'il sera rappelé que les dispositions de la loi du 31 décembre 1975 sont d'ordre public et visent à garantir le sous-traitant du paiement de ses prestations ; que selon l'article 14 de cette loi :
« A peine de nullité du sous-traité les paiements de toutes les sommes dues par l'entrepreneur au sous-traitant, en application de ce soustraité, sont garantis par une caution personnelle et solidaire obtenue par l'entrepreneur d'un établissement qualifié, agréé dans des conditions fixées par décret. Cependant la caution n'aura pas lieu d'être fournie si l'entrepreneur délègue le maître de l'ouvrage au sous-traitant dans les termes de l'article 1275 du code civil, à concurrence du montant des prestations exécutées par le sous-traitant » ; que cette nullité ne peut être invoquée que par le sous-traitant qui en est le seul bénéficiaire et elle ne peut être acquise par le seul fait que celui-ci l'évoque en l'absence de décision la constatant ; qu'en conséquence la cour retiendra que l'argument de cette nullité invoqué dans la lettre de mise en demeure adressée le 24 décembre 2010 par PNSA ne saurait avoir privé PNSA de l'exercice de ses recours ; que contrairement à ce que soutient le maître d'ouvrage (page 3 de ses conclusions), il n'est pas démontré qu'il ait agréé PNSA comme sous-traitant le 28 octobre 2010, la pièce 5 visée étant la demande d'agrément du sous-traitant adressée par ATS à cette date, mentionnée au-dessus de la signature de celle-ci sans qu'il ne soit justifié de la date d'acceptation de la demande par la SNC dont seul a été apposé le cachet et la signature sans date ; que cette pièce est en effet mentionnée par PNSA constituer l'acte d'acceptation et d'agrément du 6 janvier 2011 (cf. bordereau pièce 5) ; qu'il demeure que PNSA avait été présentée à la SNC qui connaissait donc son existence sur le chantier et était tenue aux obligations d'ordre public du maitre d'ouvrage définies en ces termes par l'article 14 de la loi :
- le maître de l'ouvrage doit, s'il a connaissance de la présence sur le chantier d'un sous-traitant n'ayant pas fait l'objet des obligations définies à l'article 3 [agrément] ou à l'article 6 ainsi que celles définies à l'article 5 [paiement direct], mettre l'entrepreneur principal ou le sous-traitant en demeure de s'acquitter de ces obligations. Ces dispositions s'appliquent aux marchés publics et privés ;
- si le sous-traitant accepté, et dont les conditions de paiement ont été agréées par le maître de l'ouvrage dans les conditions définies par décret en Conseil d'Etat, ne bénéficie pas de la délégation de paiement, le maître de l'ouvrage doit exiger de l'entrepreneur principal qu'il justifie avoir fourni la caution ;
Que force est de constater que l'entreprise ATS n'a pas satisfait à ses obligations contractuelles d'ordre public envers sa sous-traitante, en ne lui fournissant pas de caution de paiement ; que la cour constate en conséquence ]a nullité du sous- traité ; qu'en conséquence PNSA est fondée à agir en paiement contre la SNC sur le terrain délictuel sous réserve de la démonstration d'un préjudice, d'une faute en lien de causalité directe avec ce préjudice ; qu'il est certain que PNSA a subi un préjudice en ne percevant pas le prix de ses prestations ; qu'à cet égard la contestation qu'a pu opposer ATS lors de la présentation des situations de travaux des 10 décembre et 22 décembre 2010 était inopérante dès lors que l'expertise judiciaire a permis de mettre en évidence la qualité des prestations réalisées par PNSA en ces termes (Pages 10 et Il du rapport de M. A...) :
Les travaux réalisés par PNSA ont été techniques, bien exécutés techniquement et que cette entreprise a respecté toutes les règles de l'art de son métier ainsi que les normes qui la régissent à savoir la NF DTU 59.1 revêtement de peinture en feuilles minces, semi épais ou épais et la NF DTU 52.3 pose collée des revêtements céramiques et assimilés pierres naturelles ;
que les conditions de chantier sur le plan technique et de travail pour les salariés de PNSA ont été particulièrement délicates et très difficiles; que malgré cela PNSA a exécuté ses prestations dans des conditions au bord du tolérable et de façon hors norme des usages de la construction en France ; que les prestations techniques réalisées par PNSA relèvent plus de la performance technique que d'une carence de la part de cette entreprise ; que ATS entreprise donneur d'ordre qui était le titulaire de plusieurs lots peinture, sol, plaquistes, n' a pas bien géré son chantier contraignant PNSA à prendre parfois du retard dans ses travaux notamment les peintures, par absence de subjectiles mise en oeuvre par le corps d'état précédant le peintre. Comme par exemple l'impossibilité pour PNSA de peindre certains plafonds et murs car le plaquiste n'avait pas encore posé les plaques de BA 13. » ; que l'expert conclut en validant ainsi la qualité technique des prestations exécutées, ce constat rendant exigible sans équivoque le paiement du prix et la libération de la retenue de garantie que PNSA était en droit de recevoir soit par la caution de garantie soit encore par délégation de paiement ; que force est de constater que la SNC n'a pas mis l'entreprise ATS en demeure d'avoir à satisfaire à ses obligations contractuelles d'ordre public envers sa sous-traitante, ce qui a constitué de la part de la SNC un manquement légal envers PNSA, en l'absence de tout lien contractuel direct avec cette sous-traitante, qui a privé celle-ci d'une caution bancaire pour paiement du prix de ses prestations, puisqu'aucune délégation de paiement n'était intervenue ; que le lien de causalité entre le préjudice de PNSA et le manquement de la SNC est ainsi direct de sorte que sa responsabilité doit être retenue ; que la SNC conteste l'évaluation du paiement sollicité par PNSA sur la base de l'évaluation Batifix appliquée par l'expert judiciaire en valeur 2009 ; que pour autant le constat de nullité de la sous-traitance ne permet plus de fonder l'évaluation sur les données du contrat passé ; que cependant la cour retient que l'évaluation expertale effectuée contradictoirement a précisément détaillé (page 13 à 17) bungalow par bungalow la nature des tâches effectuées par PNSA (passes de peinture, ragréage, carrelage, faïence) dont la qualité a été reconnue pour un montant de 278 949.30 euros TTC soit déduction faite de l'acompte de ATS versé début janvier 2011, pour un solde de 2l6 696,60 euros TTC, de sorte qu'il convient par infirmation du jugement entrepris, de condamner la SNC à payer cette somme à PNSA ; que sur la demande en paiement des frais de déshumidificateur, l'entreprise PNSA a eu recours à la location de déshumidificateurs afin de rendre les conditions hygrométriques adaptées à la poursuite des travaux de peinture dans les règles de l'art ; qu'elle réclame 11.605,98 euros à ce titre ; que PNSA expose qu'un accord était intervenu avec le représentant d'ATS, qui le conteste formellement, pour une location d'appareils à raison de 20 euros l'unité, mais que face au déni d'ATS de l'engagement pris, elle portait sa réclamation à 4O euros par appareil, n'étant plus tenue à un geste commercial ; que l'expert judiciaire (page 11)
tout en retenant qu'il s'agissait d'une mesure nécessaire au respect des règles de l'art, et en rappelant que selon la norme NF P 03-001 de septembre 2000 faisait peser sur le maître d'ouvrage le chauffage ou le préchauffage nécessaire pour la bonne marche des travaux, a écarté ce poste de demande en faisant valoir qu'il appartenait à PNSA d'obtenir préalablement un ordre de service pour la location des appareils ; que la cour retiendra cependant que dans un contexte de chantier difficile en raison des conditions météorologiques mais aussi d'une mauvaise organisation par ATS (rapport d'expertise page 10) de l'exécution de ses propres lots, l'initiative de PNSA a contribué à une exécution de qualité de ses prestations, en évitant de la prise de retard ; qu'en présence d'une norme faisant la loi des parties que ATS ne pouvait méconnaitre, la cour retiendra l'existence d'un accord non écrit sur le principe de la location de sorte que le non -paiement de ce poste de réclamation qui sera admis pour le montant de 5800 euros (base de 20 euros négociée) devra être indemnisé par la SNC, à titre de préjudice accessoire directement lié au défaut de paiement d'ATS ; que la sur la demande de mainlevée de la caution bancaire constituée par PNSA pour garantie des 5%, dans la mesure où PNSA a satisfait à ses obligations la caution bancaire qu'elle avait constituée le 9 novembre 2010 (pièce 31) devient sans objet et sera levée ; que sur la demande de condamnation du liquidateur d'ATS à paiement de 2000 euros pour opposition abusive à la mainlevée, comme rappelé précédemment, la demande est irrecevable en raison de la liquidation judiciaire intervenue ; qu'à titre superfétatoire le caractère abusif de l'opposition n'est pas démontré ; que sur la demande d'indemnisation du préjudice financier par perte de fonds de roulement, PNSA souligne l'important préjudice financier causé par le défaut de paiement qui a généré une perte de trésorerie ; qu'elle demande en réparation à la SNC le versement d'une indemnité annuelle de 22830,10 euros TIC à compter du 7 janvier jusqu'à parfait paiement ; qu'elle produit au soutien de cette demande une attestation du cabinet d'expert-comptable KPMG du 10 décembre 2013 (pièce 33) ; que cette demande appelle les observations suivantes au regard de l'exigence de lien direct entre la faute de la SNC et ce poste de dommage allégué :
KPMG rappelle que l'évaluation de la créance impayée de PNSA était chiffrée par l'expert judiciaire à 216 696.60 euros et que :
- PNSA avait procédé à la cession de son fonds de commerce le 20 décembre 2011 à la société SIPDEG qui avait été mise en liquidation judiciaire le 24 octobre 2012 sans avoir réglé le prix de cession ;
- dans le cadre d'un litige avec la CCI du Havre PNSA s'est vu réclamer fin 2012 le remboursement d'une somme de 81 291,12 euros ;
- que ne disposant pas de cette somme PNSA avait été mise en redressement judiciaire le 4 décembre 2012 alors qu'elle était en mesure de solder sa dette de manière amiable si elle avait perçu le paiement de ses travaux en 2011 ou 2012 ;
- cependant ce rappel de circonstances atteste de ce que PNSA s'est trouvée exposée à différentes charges financières, dont celle résultant du défaut de paiement de ATS, mais sans cependant que le manquement de la SNC ait été la cause directe de la mise en redressement judiciaire ;
-il demeure que ce manquement a contribué directement à générer un préjudice financier spécifique à PNSA dont la SNC doit réparation et a contribué à la perte de chance pour PNSA de se retrouver en cessation de paiement ;
que dès lors que les travaux sous-traités étaient achevés fin décembre et les réserves levées en janvier 2011, il s'est ainsi écoulé une période de plus de cinq années entre l'exigibilité du paiement et ce jour, que la cour fixera l'indemnisation de cette perte de chance à la somme de 10.000 euros que la SNC devra verser à PNSA , que s'agissant de dommages-intérêt la condamnation n'a pas à être retenue en valeur « TTC» ;

1°- ALORS QUE, l'annulation du contrat de sous-traitance a pour effet d'anéantir rétroactivement celui-ci en son entier ; que le sous-traitant dont le contrat de sous-traitance rétroactivement annulé est censé n'avoir jamais existé, ne peut plus se prévaloir de l'obligation faite au maître de l'ouvrage d'exiger la fourniture d'une caution en garantie des sommes dues au titre de ce contrat; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé l'article 14-1 de la loi du 31 décembre 1975 et le principe selon lequel ce qui est nul est réputé n'avoir jamais existé ;

2°- ALORS QUE le maitre de l'ouvrage n'est tenu d'exiger la fourniture d'une caution qu'une fois qu'il a accepté le sous-traitant et agréé les conditions de paiement du sous-traité ; que cette obligation ne résulte pas de la seule connaissance de la présence du sous-traitant sur le chantier ; que dès lors le comportement du maitre de l'ouvrage qui n'exige pas la justification d'une caution pour l'exécution d'un contrat de sous-traitance dont le sous-traitant avait d'ores et déjà demandé l'annulation à la date de son agrément, ne peut être constitutif d'une faute ; qu'en retenant la faute du maitre de l'ouvrage, après avoir constaté que l'agrément du sous-traitant est en date du 6 janvier 2011 et qu'à cette date, ce dernier avait d'ores et déjà invoqué la nullité du contrat de sous-traitance par un courrier du 24 décembre 2010, la Cour d'appel a violé les articles 14, 14-1 de la loi du 31 décembre 1975 et 1382 ancien du code civil ;

3°- ALORS QUE la caution a pour objet de garantir le paiement des sommes dues par l'entrepreneur principal au sous-traitant en application du sous-traité dont les conditions de paiement ont été agréées par le maitre de l'ouvrage ; que dès lors, la faute du maître de l'ouvrage qui n'a pas exigé la fourniture d'une caution ne peut avoir de lien de causalité qu'avec le préjudice résultant pour le sous-traitant de l'impossibilité d'obtenir le paiement du prix des travaux tel que fixé par le contrat de sous-traitance ; qu'en condamnant la société Bois Francs Cottages à payer une indemnité au titre du coût des travaux évalué par l'expert à une somme supérieure au prix fixé par le contrat de sous-traitance, outre une indemnité en réparation de frais accessoires au coût des travaux non prévus au contrat de sous-traitance et une indemnité en réparation d'un préjudice financier spécifique, lesquels n'auraient pas été couverts par la caution si elle avait été exigée et qui constituent dès lors des préjudices sans lien de causalité avec la faute qui lui reprochée, la Cour d'appel a violé les articles 14, 14-1 de la loi du 31 décembre 1975 et 1382 ancien du code civil ;

4°- ALORS QUE le maitre de l'ouvrage n'a pas l'obligation de mettre l'entrepreneur principal en demeure de s'acquitter de ses obligations au titre de travaux supplémentaires qu'il n'a pas expressément approuvés ou pour lesquels il ne connait pas la présence du sous-traitant sur le chantier ; qu'en ne répondant pas aux conclusions de la société Bois Francs Cottages qui faisait valoir qu'elle ne pouvait en tout état de cause être responsable au titre du préjudice résultant de l'impossibilité d'obtenir le paiement de travaux supplémentaires non prévus par le contrat de sous-traitance et dont elle n'avait pas eu connaissance, la Cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la société Bois Francs Cottages à payer à la société Peinture de Normandie entre les mains de son mandataire judiciaire, Maître X..., la somme de 5.800 euros en réparation des frais accessoires ;

AUX MOTIFS QUE sur la demande en paiement des frais de déshumidificateur, l'entreprise PNSA a eu recours à la location de déshumidificateurs afin de rendre les conditions hygrométriques adaptées à la poursuite des travaux de peinture dans les règles de l'art ; qu'elle réclame 11.605,98 euros à ce titre ; que PNSA expose qu'un accord était intervenu avec le représentant d'ATS, qui le conteste formellement, pour une location d'appareils à raison de 20 euros l'unité, mais que face au déni d'ATS de l'engagement pris, elle portait sa réclamation à 40 euros par appareil, n'étant plus tenue à un geste commercial ; que l'expert judiciaire (page 11)
tout en retenant qu'il s'agissait d'une mesure nécessaire au respect des règles de l'art, et en rappelant que selon la norme NF P 03-001 de septembre 2000 faisait peser sur le maître d'ouvrage le chauffage ou le préchauffage nécessaire pour la bonne marche des travaux, a écarté ce poste de demande en faisant valoir qu'il appartenait à PNSA d'obtenir préalablement un ordre de service pour la location des appareils ; que la cour retiendra cependant que dans un contexte de chantier difficile en raison des conditions météorologiques mais aussi d'une mauvaise organisation par ATS (rapport d'expertise page 10) de l'exécution de ses propres lots, l'initiative de PNSA a contribué à une exécution de qualité de ses prestations, en évitant de la prise de retard ; qu'en présence d'une norme faisant la loi des parties que ATS ne pouvait méconnaitre, la cour retiendra l'existence d'un accord non écrit sur le principe de la location de sorte que le non-paiement de ce poste de réclamation qui sera admis pour le montant de 5800 euros (base de 20 euros négociée) devra être indemnisé par la SNC, à titre de préjudice accessoire directement lié au défaut de paiement d'ATS ;

1°- ALORS QUE l'annulation du contrat de sous-traitance a pour effet d'anéantir rétroactivement celui-ci en son entier ; qu'en se fondant pour retenir l'existence d'une créance de la société PNSA à l'encontre de l'entrepreneur principal au titre de la location des déshumidificateurs, sur la circonstance que ce dernier ne pouvait méconnaitre la norme NF P 03-001 de septembre 2000 qui ferait peser sur le maître d'ouvrage le chauffage ou le préchauffage nécessaire pour la bonne marche des travaux et qui faisait la loi des parties au contrat de sous-traitance, la cour n'a pas tiré les conséquences de l'annulation du contrat de sous-traitance qu'elle avait constatée, et partant a violé l'article 1134 ancien du code civil et le principe selon lequel ce qui est nul est réputé n'avoir jamais existé ;

2°- ALORS QU'en retenant l'existence d'un accord non écrit sur le principe de la location d'un déshumidificateur après avoir pourtant constaté que cette location relevait de « l'initiative » de la société PNSA, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations au regard de l'article 1134 ancien du code civil qu'elle a violé ;

3°- ALORS QU'en tout état de cause, que le maitre de l'ouvrage n'a pas l'obligation de mettre l'entrepreneur principal en demeure de s'acquitter de ses obligations au titre de travaux qui ne sont pas prévus par le contrat de sous-traitance et qu'il n'a pas expressément approuvés ; qu'en retenant la responsabilité du maitre de l'ouvrage à l'origine du préjudice résultant de l'absence de remboursement de la location des déshumidificateurs par le sous-traitant, après avoir constaté que cette déshumidification n'était pas prévue au contrat, et n'avait fait l'objet d'aucun ordre de service, la Cour d'appel a violé les articles 14-1 de la loi du 31 décembre 1975 et 1382 ancien du code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la société Bois Francs Cottages à payer à la société Peinture de Normandie entre les mains de son mandataire judiciaire, Maître X..., la somme de 10.000 euros en réparation du préjudice financier spécifique ;

Aux motifs que sur la demande d'indemnisation du préjudice financier par perte de fonds de roulement, PNSA souligne l'important préjudice financier causé par le défaut de paiement qui a généré une perte de trésorerie ; qu'elle demande en réparation à la SNC le versement d'une indemnité annuelle de 22830,10 euros TIC à compter du 7 janvier jusqu'à parfait paiement ; qu'elle produit au soutien de cette demande une attestation du cabinet d'expert-comptable KPMG du 10 décembre 2013 (pièce 33) ; que cette demande appelle les observations suivantes au regard de l'exigence de lien direct entre la faute de la SNC et ce poste de dommage allégué :
KPMG rappelle que l'évaluation de la créance impayée de PNSA était chiffrée par l'expert judiciaire à 216 696.60 euros et que :
- PNSA avait procédé à la cession de son fonds de commerce le 20 décembre 2011 à la société SIPDEG qui avait été mise en liquidation judiciaire le 24 octobre 2012 sans avoir réglé le prix de cession ;
- dans le cadre d'un litige avec la CCI du Havre PNSA s'est vu réclamer fin 2012 le remboursement d'une somme de 81 291,12 euros ;
- que ne disposant pas de cette somme PNSA avait été mise en redressement judiciaire le 4 décembre 2012 alors qu'elle était en mesure de solder sa dette de manière amiable si elle avait perçu le paiement de ses travaux en 2011 ou 2012 ;
- cependant ce rappel de circonstances atteste de ce que PNSA s'est trouvée exposée à différentes charges financières, dont celle résultant du défaut de paiement de ATS, mais sans cependant que le manquement de la SNC ait été la cause directe de la mise en redressement judiciaire ;
-il demeure que ce manquement a contribué directement à générer un préjudice financier spécifique à PNSA dont la SNC doit réparation et a contribué à la perte de chance pour PNSA de se retrouver en cessation de paiement ;
que dès lors que les travaux sous-traités étaient achevés fin décembre et les réserves levées en janvier 2011, il s'est ainsi écoulé une période de plus de cinq années entre l'exigibilité du paiement et ce jour, que la cour fixera l'indemnisation de cette perte de chance à la somme de 10.000 euros que la SNC devra verser à PNSA, que s'agissant de dommages-intérêt la condamnation n'a pas à être retenue en valeur « TTC» ;

1°- Alors que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; que le juge doit se prononcer sur tout ce qui lui est demandé et seulement sur ce qui est demandé ; qu'en l'espèce, la société PNSA demandait la condamnation de la société Francs Bois Cottages à lui payer une indemnité au titre de la privation de son fonds de roulement ; qu'elle ne formait aucune demande au titre de la perte d'une chance de ne pas se trouver en cessation des paiements ; qu'en prononçant une condamnation au titre de ce prétendu préjudice, la Cour d'appel a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

2°- Alors que le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en soulevant d'office l'existence d'un prétendu préjudice résultant de la perte d'une chance de ne pas se trouver en état de cessation des paiements, sans inviter préalablement les parties à s'en expliquer la Cour d'appel a violé le principe de la contradiction et l'article 16 du code de procédure civile ;

3°- Alors que la notion de perte d'une chance n'a pas pour objet de réparer un préjudice dépourvu de lien de causalité direct avec la faute invoquée mais de réparer la disparition actuelle et certaine d'une éventualité favorable en lien direct avec la faute invoquée ; qu'en décidant de réparer la perte d'une chance pour la société PNSA de ne pas se trouver en état de cessation des paiements, après avoir constaté que le manquement du maitre de l'ouvrage qui n'a pas exigé la fourniture d'une caution n'est pas la cause directe de la mise en redressement judiciaire de la société PNSA pour cessation des paiements, ce dont il résulte que la perte d'une chance de ne pas se trouver en état de cessation des paiements ne présentait pas non plus de lien de causalité direct avec la faute du maitre de l'ouvrage et ne pouvait être réparée, la Cour d'appel a violé l'article 1382 ancien du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 16-22460
Date de la décision : 24/05/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 25 mai 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 24 mai. 2018, pourvoi n°16-22460


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Coutard et Munier-Apaire, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.22460
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