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09/05/2018 | FRANCE | N°16-22263;16-22589

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 09 mai 2018, 16-22263 et suivant


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° E 16-22.263 et J 16-22.589 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Y..., engagé par la société Business objects (aux droits de laquelle vient la société SAP France), en qualité d'ingénieur support technique le 21 juillet 1997, statut cadre, position 2.1 coefficient 110, a été promu, le 1er janvier 2000, « Quality Assurance Engineer" position 2.2 coefficient 130 et, le 1er janvier 2001 « ingénieur contrôle qualité » position 2.3 coefficient 150, sa rémun

ération étant régulièrement augmentée pour atteindre au 1er juillet 2005 un sala...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° E 16-22.263 et J 16-22.589 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Y..., engagé par la société Business objects (aux droits de laquelle vient la société SAP France), en qualité d'ingénieur support technique le 21 juillet 1997, statut cadre, position 2.1 coefficient 110, a été promu, le 1er janvier 2000, « Quality Assurance Engineer" position 2.2 coefficient 130 et, le 1er janvier 2001 « ingénieur contrôle qualité » position 2.3 coefficient 150, sa rémunération étant régulièrement augmentée pour atteindre au 1er juillet 2005 un salaire annuel brut de base de 46 748 euros ; qu'il a exercé depuis le 12 avril 2006 les fonctions de délégué syndical, représentant du personnel et de conseiller du salarié et, estimant être victime de discrimination syndicale quant à l'évolution de son salaire et de sa carrière, a saisi le 14 décembre 2009 la juridiction prud'homale ; que la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils (Syntec) du 15 décembre 1987 est applicable ;

Sur le moyen unique du pourvoi n° E 16-22.263 de l'employeur, pris en ses six premières branches :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt d'inviter les parties à chiffrer le rattrapage salarial, au titre des années 2008 et 2009, et ce sur la base de la moyenne des augmentations des salariés du panel des neuf salariés susvisés dans les motifs de l'arrêt, de dire que sur ces bases, il devra indemniser le salarié et que les parties en cas de difficulté pourront saisir la cour sur simple requête et de le condamner à payer au salarié une somme à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral lié à une discrimination syndicale, alors, selon le moyen :

1°/ qu'en affirmant que M. Y... avait été victime d'une discrimination syndicale sans constater que l'insuffisance de rémunération qu'il aurait subie était en lien avec son engagement syndical, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1132-1 du code du travail ;

2°/ qu'en renvoyant aux parties le soin de déterminer la réalité et le montant du préjudice économique prétendument subi par le salarié, la cour d'appel a méconnu son office et violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

3°/ que la constatation de l'existence d'une discrimination suppose que soit caractérisée une différence de traitement au préjudice du salarié qui s'en prévaut ; qu'en l'espèce, M. Y... se prétendait victime d'une discrimination salariale en 2008 et 2009 en raison de ses fonctions syndicales, ce que la société SAP contestait expressément ; qu'en accueillant cependant l'action du salarié, aux motifs inopérants que la société SAP avait reconnu l'existence d'inégalités salariales au détriment des représentants du personnel, motifs dont il ne résulte pas que M. Y... aurait été personnellement victime d'une différence de traitement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1132-1 du code du travail ;

4°/ que dans ses conclusions d'appel, la société SAP s'était expressément prévalue d'une politique salariale de nature à prévenir toute différence de traitement au préjudice des représentants du personnel, consistant à aligner automatiquement les augmentations de ces derniers sur les augmentations médianes de leur catégorie ; qu'en en déduisant l'aveu d'une discrimination syndicale, la cour d'appel, qui a dénaturé ces conclusions, a violé l'article 1134 devenu 1103 du code civil ;

5°/ en toute hypothèse, qu'une cour d'appel, après avoir jugé que le salarié a bénéficié de mesures de rattrapage salarial décidées par la direction, ne peut se borner à affirmer que ce rattrapage n'a pas pris complètement en compte l'absence d'augmentation de 2008/2009, sans donner la moindre précision sur les éléments sur lesquels elle fonde une telle affirmation, tout en constatant qu'au cours de la plupart des mois compris dans la période considérée, le salarié n'a subi aucune discrimination et tout en reconnaissant ne disposer d'aucun élément chiffré lui permettant de caractériser et d'évaluer le préjudice ainsi reconnu ; qu'en statuant sur le principe d'un préjudice dont elle ne caractérise pas l'existence et qu'elle laisse aux parties elles-mêmes le soin d'évaluer, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

6°/ de surcroît, qu'après avoir jugé que, sur la plupart des périodes considérées, l'absence d'augmentation du salaire de base était justifiée et que, pour les quelques mois où cette absence d'augmentation pouvait paraître anormale, le salarié avait bénéficié de mesures de rattrapage salarial décidées par la direction elle-même, la cour d'appel ne pouvait se borner à affirmer que ce rattrapage n'avait pas pris complètement en compte l'absence d'augmentation de 2008/2009, sans donner la moindre précision sur les éléments sur lesquels elle fonde une telle affirmation et tout en reconnaissant ne disposer d'aucun élément chiffré lui permettant de caractériser et d'évaluer le préjudice ainsi reconnu ; qu'en statuant ainsi par des motifs hypothétiques, contradictoires et imprécis, la cour d'appel a assurément violé les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu, d'abord, qu'ayant constaté que le salarié, délégué syndical à compter de 2006, n'avait bénéficié, malgré de bonnes évaluations, d'aucune augmentation de son salaire de base en 2008 et 2009 et que ce n'était qu'à la suite de la saisine du conseil de prud'hommes en décembre 2009 qu'un rattrapage seulement partiel des différences salariales avait été effectué par l'employeur, la cour d'appel a pu en déduire l'existence d'éléments laissant supposer une discrimination syndicale et a estimé que l'employeur ne démontrait pas que cette différence de traitement était justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ;

Attendu ensuite que le moyen qui, en ses deuxième et cinquième branches, s'attaque à un chef du dispositif par lequel la cour d'appel a invité les parties à chiffrer les demandes en application des éléments qu'elle retenait et à lui en référer, lequel ne met pas fin à l'instance, est irrecevable comme visant un chef de dispositif qui, à lui seul, ne serait pas susceptible de pourvoi en cassation ;

D'où il suit que le moyen, irrecevable en ses deuxième et cinquième branches, n'est pas fondé pour le surplus ;

Mais sur le premier moyen du pourvoi n° J 16-22.589 du salarié, pris en ses deuxième et quatrième branches :

Vu la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils (Syntec) du 15 décembre 1987 ;

Attendu que pour débouter le salarié de sa demande de nouveau positionnement au niveau T3, l'arrêt retient que le profil des postes T2 correspond à un salarié qui exécute son travail selon une stratégie qui lui est donnée, qui possède des connaissances de base du domaine du produit et des langages de programmation, que, selon le profil des postes T3, le salarié qui peut accéder à ce niveau doit savoir définir les stratégies qualité et test pour les produits, être un expert pour les équipes, proposer des améliorations de processus ou d'outils, posséder des connaissances approfondies du domaine du produit et des langages de programmation, qu'en 2007 le salarié a souhaité évoluer en position T3 mais qu'il lui a été indiqué qu'il ne possédait pas les compétences requises par les standards internes, que son supérieur hiérarchique indique en mars 2016 que le salarié, malgré ses progrès, n'est toujours pas en capacité d'obtenir cette promotion, car il a une compréhension de base du domaine de sa compétence, mais a besoin d'orientations et de consignes pour mettre en oeuvre ses compétences ou connaissances, qu'il est débutant dans la programmation, et après plusieurs années dans l'équipe automation il n'est pas en mesure d'être autonome, ce qui démontre qu'il a pas les compétences requises pour accéder à la position T3 ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher comme il lui était demandé si le salarié remplissait les critères exigées pour l'accès au niveau T3 et s'il n'exécutait pas des tâches identiques à celles de salariés classés à ce même niveau, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Et attendu que la cassation sur le premier moyen entraîne la cassation par voie de conséquence des chefs du dispositif visés par les deuxième et troisième moyens du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la septième branche du moyen unique du pourvoi de l'employeur :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. Y... de sa demande de nouveau positionnement au niveau T 3, dit y avoir lieu de chiffrer le rattrapage salarial au titre des seules années 2008 et 2009 sur la base d'un panel composé de salariés ayant évolué de la position 2.1 à la position 2.3 et condamne la société SAP France à lui payer la somme de 5 000 euros nette de CSG-CRDS, à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral lié à une discrimination syndicale, l'arrêt rendu le 21 juin 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;

Condamne la société SAP France aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société SAP France à payer à M. Y... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf mai deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.

Moyen produit au pourvoi n° E 16-22.263 par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société SAP France.

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR invité les parties à chiffrer le rattrapage salarial, au titre des années 2008 et 2009, et ce sur la base de la moyenne des augmentations des salariés du panel des 9 salariés susvisés dans les motifs de l'arrêt, d'AVOIR dit que sur ces bases, la société SAP France devra indemniser M. Y... et que les parties en cas de difficulté pourront saisir la cour sur simple requête et d'AVOIR condamné la société SAP France à payer à M. Y... la somme de 5 000 euros, nette de CSG-CRDS, à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral lié à une discrimination syndicale outre celle de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE « Sur la discrimination syndicale : qu'en l'espèce, il convient de vérifier si M. Y..., qui a été embauché en 1997, à niveau d'ancienneté, de poste et de qualification professionnelle comparables avec ses collègues embauchés à la même époque au même niveau de classification (position 2.1 coefficient 110) a subi une différence de traitement tant au niveau de sa rémunération que de son évolution de carrière entre 2006 et 2016 et si l'évolution de ses compétences et l'appréciation de sa hiérarchie sur son travail peuvent expliquer une différence de carrière et de salaire ; que pour apprécier dans un premier temps l'existence de cette différence de traitement, il convient de déterminer, entre les panels proposés par les parties, lequel correspond à des salariés qui se trouvent dans une situation comparable à celle de M. Y... ; Sur l'évolution de carrière et de position : que le panel le plus adapté proposé par M. Y... est celui des 28 salariés (M. Y... inclus) parmi les 36 listés embauchés (entre 1996 et 1999) en ne prenant que les salariés embauchés à la même position Syntec que lui et en comparant leur évolution de position entre leur embauche et 2014, ce qui est retracé dans la pièce 88 de M. Y..., qui se résume ainsi : 2 salariés, dont un délégué syndical, M. A..., ont peu progressé, de 2.1 à 2.1, 9 salariés, outre M. Y..., ont progressé de 2.1 à 2.3, 16 salariés ont bien progressé de 2.1 à 3.1 ou 3.2 ; qu'en effectuant une comparaison sur la base de la classification interne de la société, qui diffère de celle de la convention collective Syntec, l'on constate aussi une différence plus marquée encore, car, parmi les 9 salariés qui ont la même progression de position Syntec que M. Y..., tous ont plus progressé que lui dans la classification interne de la société : 3 à 3.1, 4 à 3.2, 1 à 3.1 et 1 à 4.1 alors que M. Y... est resté à 2.3 comme dans sa classification Syntec ; que cette différence d'évolution de classification (tant Syntec qu'interne à la société) en défaveur de M. Y... a pour corollaire un salaire plus bas que la moyenne des salaires de ces 28 salariés du panel entre 2006 et 2015, comme l'illustre le graphique produit par la société ; que toutefois la société justifie cette différence de traitement par le manque de compétence, d'investissement et de capacité d'encadrement de M. Y..., les augmentations de salaire et la progression des salariés d'une position à l'autre dépendant de leurs mérites propres, pondérés par le salaire médian ; que le profil des postes T2 correspond à un salarié qui exécute son travail selon une stratégie qui lui est donnée, qui possède des connaissances de base du domaine du produit et des langages de programmation ; que selon le profil des postes T3 le salarié qui peut accéder à ce niveau doit savoir définir les stratégies qualité et test pour les produits, être un expert pour les équipes, proposer des améliorations de processus ou d'outils, posséder des connaissances approfondies du domaine du produit et des langages de programmation ; qu'en 2007, M. Y... a souhaité évoluer en position T3, mais il lui a été indiqué qu'il ne possédait pas les compétences requises par les standards internes ; que son supérieur hiérarchique indique en mars 2016 que M. Y... malgré ses progrès n'est toujours pas en capacité d'obtenir cette promotion car il a une compréhension de base du domaine de sa compétence, mais a besoin d'orientation et de consignes pour mettre en oeuvre ses compétences ou connaissances, qu'il est débutant dans la programmation et, après plusieurs années dans l'équipe automation, il n'est pas en mesure d'être autonome, ce qui démontre qu'il n'a pas les compétences requises pour accéder à la position T3 par manque d'autonomie et de connaissances approfondies et ce même indépendamment de sa capacité à encadrer une équipe (
) ; que par ailleurs il apparait, au vu de son entretien d'évaluation en avril/mai 2008, que M. Y... a refusé des formations en 2007, ce qu'il ne conteste pas, et ce qui aurait pu lui permettre de plus évoluer dans ses compétences ; qu'en conséquence, ces éléments n'établissent pas une différence de traitement injustifiée quant à l'évolution de carrière de M. Y..., lequel sera donc débouté de ses demandes de nouveau positionnement en T3 avec rappels de salaires afférents ; Sur les évolutions salariales : que les évaluations de M. Y..., qui est e position T2, font état d'augmentations de salaire mais seulement certaines années après la saisine du conseil en décembre 2009 ; qu'en effet, pour la période d'avril 2006 à mars 2007, M. Y... n'a pas rempli ses objectifs (« needs improvements », ce qui signifie qu'il a besoin de s'améliorer) étant peu impliqué, ce qui justifie son absence d'augmentation ; que cette évaluation n'est pas contredite par M. Y... ; que pour la période d'avril 2007 à mars 2008, son évaluation était bonne (« generally achieves » ce qui signifie que ses objectifs sont atteints) mais il n'a pas bénéficié d'augmentation car son salaire était, selon la société, déjà positionné haut dans la matrice salariale, ce qui est contredit par la société en 2009 puisqu'elle va reconnaître l'existence d'inégalités salariales à l'égard des représentants du personnel ; que pour la période d'avril à décembre 2008, il a aussi atteint ses objectifs, mais cette année-là, en raison des difficultés économiques, l'ensemble de la masse salariale n'a pas augmenté ; qu'il n'a donc pas reçu d'augmentation de son salaire de base, mais a bénéficié d'une augmentation de la part variable de son salaire ; que dans cette évaluation, la société fait mention de son mandat syndical, mais c'est pour indiquer que malgré ce mandat, qui engendre un planning chargé et difficile, M. Y... est très impliqué dans l'équipe et a atteint ses objectifs de performance, tout en s'auto formant, car le budget e lui a pas permis d'effectuer des formations ; que cette mention sur le mandat syndical n'est donc pas négative, ni stigmatisant, tout au contraire ; qu'en 2010, il a bénéficié d'une augmentation de son salaire brut de 3, 41 % vu sa performance de 2009 et des mesures unilatérales destinées à réduire les inégalités salariales notamment à l'égard des représentants du personnel (selon les propres termes de la société dans ses conclusions) ; qu'en 2011, il en a été de même, avec une augmentation de son salaire brut de 8,09 % ainsi qu'en 2013 et 2014 avec une augmentation de 3, 06 % chacune de ces deux années ; qu'il résulte de ces éléments qu'en 2008 et 2009, M. Y... n'a pas bénéficié d'augmentation de son salaire de base, malgré de bonnes évaluations, puisqu'à partir de 2010, il a bénéficié d'augmentations régulières de son salaire, tant en raison d'une meilleure atteinte de ses objectifs que de la volonté de la société d'effectuer un rattrapage de salaire pour réduire les inégalités salariales, notamment à l'égard des représentants du personnel, ce qui établit par là même la preuve de la conscience par la société de l'existence de cette inégalité, qu'elle s'est efforcée toutefois de réduire entre 2010 et 2014, sans que le rattrapage prenne complètement en compte l'absence d'augmentation de 2008/2009 ; que M. Y... a donc été victime de discrimination syndicale entre 2008 et 2014 en raison de son engagement syndical au sein de la société ; que faute d'éléments chiffrés permettant d'évaluer le préjudice économique de M. Y... lié à cette évolution salariale discriminatoire, la cour invite les parties à chiffrer ce rattrapage salarial afin de rétablir le salaire que M. Y... aurait dû percevoir s'il avait bénéficié d'augmentations salariales en 2008 et 2009, et ce sur la base de la moyenne des augmentations des salariés du panel retreint des 9 salariés qui, à l'instar de M. Y..., ont progressé de coefficient Syntec 2.1 à 2.3 ; que ces 9 salariés sont : M. ou Mme B..., X..., Z..., C..., D..., E..., F..., G... et H... ; que le préjudice moral d'ors et déjà établi puisqu'il est lié à une absence d'augmentation de son salaire de base pendant deux ans (2008/2009) avec une répercussion sur le salaire des années suivantes et en lien avec une discrimination syndicale, que la cour fixera à la somme de 5 000 € nette de CSG-CRDS à titre de dommages et intérêts ; Sur les demandes accessoires : que la somme de 5.000 euros sera allouée à M. Y... sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile » ;

1. ALORS QU'en affirmant que Monsieur Y... avait été victime d'une discrimination syndicale sans constater que l'insuffisance de rémunération qu'il aurait subie était en lien avec son engagement syndical, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1132-1 du code du travail ;

2. ALORS QU'en renvoyant aux parties le soin de déterminer la réalité et le montant du préjudice économique prétendument subi par le salarié, la cour d'appel a méconnu son office et violé les articles 4 et 5 du Code de procédure civile ;

3. ET ALORS QUE la constatation de l'existence d'une discrimination suppose que soit caractérisée une différence de traitement au préjudice du salarié qui s'en prévaut ; qu'en l'espèce, Monsieur Y... se prétendait victime d'une discrimination salariale en 2008 et 2009 en raison de ses fonctions syndicales, ce que la Société SAP contestait expressément ; qu'en accueillant cependant l'action du salarié, aux motifs inopérants que la Société SAP avait reconnu l'existence d'inégalités salariales au détriment des représentants du personnel, motifs dont il ne résulte pas que Monsieur Y... aurait été personnellement victime d'une différence de traitement, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1132-1 du Code du travail ;

4. ALORS, en outre, QUE dans ses conclusions d'appel, la Société SAP s'était expressément prévalue d'une politique salariale de nature à prévenir toute différence de traitement au préjudice des représentants du personnel, consistant à aligner automatiquement les augmentations de ces derniers sur les augmentations médianes de leur catégorie ; qu'en en déduisant l'aveu d'une discrimination syndicale, la Cour d'appel, qui a dénaturé ces conclusions, a violé l'article 1134 devenu 1103 du Code civil.

5. ALORS, en toute hypothèse, QU'une cour d'appel, après avoir jugé que le salarié a bénéficié de mesures de rattrapage salarial décidées par la direction, ne peut se borner à affirmer que ce rattrapage n'a pas pris complètement en compte l'absence d'augmentation de 2008/2009, sans donner la moindre précision sur les éléments sur lesquels elle fonde une telle affirmation, tout en constatant qu'au cours de la plupart des mois compris dans la période considérée, le salarié n'a subi aucune discrimination et tout en reconnaissant ne disposer d'aucun élément chiffré lui permettant de caractériser et d'évaluer le préjudice ainsi reconnu ; qu'en statuant sur le principe d'un préjudice dont elle ne caractérise pas l'existence et qu'elle laisse aux parties elles-mêmes le soin d'évaluer, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

6. ALORS, DE SURCROIT, QU'après avoir jugé que, sur la plupart des périodes considérées, l'absence d'augmentation du salaire de base était justifiée et que, pour les quelques mois où cette absence d'augmentation pouvait paraître anormale, le salarié avait bénéficié de mesures de rattrapage salarial décidées par la direction elle-même, la cour d'appel ne pouvait se borner à affirmer que ce rattrapage n'avait pas pris complètement en compte l'absence d'augmentation de 2008/2009, sans donner la moindre précision sur les éléments sur lesquels elle fonde une telle affirmation et tout en reconnaissant ne disposer d'aucun élément chiffré lui permettant de caractériser et d'évaluer le préjudice ainsi reconnu ; qu'en statuant ainsi par des motifs hypothétiques, contradictoires et imprécis, la cour d'appel a assurément violé les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ;

7. ALORS, ENFIN, QUE si le juge du fond est souverain dans la constatation de l'existence d'un préjudice et dans son évaluation, c'est à la condition que sa décision soit suffisamment et correctement motivée ; que la cour d'appel ne pouvait pas affirmer que le préjudice moral était établi, lié à l'absence d'augmentation de salaire et à ses répercussion, et l'évaluer à un montant de 5.000 euros, sans avoir caractérisé la réalité et l'importance du manque salarial subi par le salarié et après avoir jugé qu'il avait bénéficié de mesures de rattrapages de salaires ; qu'ainsi elle n'a pas justifié de l'existence du préjudice moral, pas plus qu'elle n'a justifié son évaluation ; que par une telle insuffisance de motivation, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. Moyens produits au pourvoi n° J 16-22.589 par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour M. Y....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. Y... de ses demandes tendant au repositionnement dans la grille de classification conventionnelle et à l'indemnisation de son préjudice économique.

AUX MOTIFS QUE le panel de comparaison le plus adapté proposé par M. Y... est celui des 28 salariés (M. Y... inclus) parmi les 36 listés embauchés (entre 1996 et 1999), en ne prenant que les salariés embauchés à la même position Syntec que lui (2.1), et en comparant leur évolution de position entre leur embauche et 2014, ce qui est retracé dans la pièce 88 de M. Y..., qui se résume ainsi : - 2 salariés, dont un délégué syndical M. A..., ont peu progressé, de 2.1 à 2.2, - 9 salariés*, outre M. Y..., ont progressé de 2.1 à 2.3, - 16 salariés ont bien progressé, de 2.1 à 3.1 ou 3.2 ; qu'en effectuant une comparaison sur la base de la classification interne de la société, qui diffère de celle de la convention collective Syntec, l'on constate aussi une différence plus marquée encore, car parmi les 9 salariés* qui ont la même progression de position Syntec que M. Y..., tous ont plus progressé que lui dans la classification interne de la société : 3 à 3.1, 4 à 3.2, 1 à 3.3 et 1 à 4.1, alors que M. Y... est resté à 2.3, comme dans sa classification Syntec ; que cette différence d'évolution de classification (tant Syntec qu'interne à la société) en défaveur de M. Y... a pour corollaire un salaire plus bas que la moyenne des salaires de ces 28 salariés du panel, entre 2006 et 2015, comme l'illustre le graphique produit par la société en pièce 5 bis ; que toutefois, la société justifie cette différence de traitement par le manque de compétences, d'investissement, et de capacité d'encadrement de M. Y..., les augmentations de salaire et la progression des salariés d'une position à l'autre dépendant de leurs mérites propres, pondérés par le salaire médian ; que le profil des postes T2 (pièce 18 de la société) correspond à un salarié qui exécute son travail selon une stratégie qui lui est donnée, qui possède des connaissances de base du domaine du produit et des langages de programmation ; que selon le profil des postes T3 (pièce 19 de la société), le salarié qui peut accéder à ce niveau doit savoir définir les stratégies qualité et test pour les produits, être un expert pour les équipes, proposer des améliorations de processus ou d'outils, posséder des connaissances approfondies du domaine du produit et des langages de programmation ; qu'en 2007 M. Y... a souhaité évoluer en position T3, mais il lui a été indiqué qu'il ne possédait pas les compétences requises par les standards internes exposés plus haut ; qu'en pièce 10, son supérieur hiérarchique indique en mars 2016 que M. Y..., malgré ses progrès, n'est toujours pas en capacité d'obtenir cette promotion, car il a une compréhension de base du domaine de sa compétence, mais a besoin d'orientations et de consignes pour mettre en oeuvre ses compétences ou connaissances, qu'il est débutant dans la programmation, et après plusieurs années dans l'équipe automation il n'est pas en mesure d'être autonome, ce qui démontre qu'il a pas les compétences requises pour accéder à la position T3, par manque d'autonomie et de connaissances approfondies, et ce même indépendamment de sa capacité à encadrer une équipe (pour répondre à l'argument de M. Y... selon lequel des salariés T3 n'ont pas de responsabilité d'encadrement) ; que par ailleurs, il apparaît, au vu de son entretien d'évaluation en avril/mai 2008, que M. Y... a refusé des formations en 2007, ce qu'il ne conteste pas, et ce qui aurait pu lui permettre de plus évoluer dans ses compétences ; qu'en conséquence, ces éléments n'établissent pas une différence de traitement injustifiée quant à l'évolution de carrière de M. Y..., lequel sera donc débouté de ses demandes de nouveau positionnement en T3, avec rappels de salaire afférents.

ET AUX MOTIFS éventuellement adoptés QUE le conseil constate que le demandeur depuis le 1er janvier 2000 occupe son poste actuel de « quality specialist » qu'il affirme qu'il aurait du au minimum depuis le 1er juillet 2006 être promu "senior quality specialist » et depuis le 1er avril 2011 « expert quality specialist » que même en l'absence de comparaison il appartient à l'employeur de justifier par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination l'absence d'avancement professionnel depuis plusieurs années ; qu'il constate qu'il affirme qu'il s'est régulièrement plaint de cette situation mais qu'aucune réponse ne lui a jamais été apportée, que ses évaluations sont toujours bonnes, qu'aucun grief ne peut lui être opposé, qu'il n'existe aucune description de poste entre les différents échelons, que son absence de promotion est donc totalement inexplicable ; qu'il constate que le défendeur y répond qu'en terme d'évolution de carrière, aucun salarié du panel n'est devenu "quality expert", que sur 8 salariés classé T 2,1 est au coefficient 170,3 dont le demandeur sont classés coefficient 150, 4 sont classés coefficient 130 ; qu'il constate que la convention collective est respectée puisque chaque salarié se voit attribuer une position et un coefficient qui sont ceux prévus par ta convention collective ; qu'il constate que le défendeur affirme que le demandeur ne peut prétendre à lu classification de « senior quality specialist » ni d'expert car il n'a jamais démontré ni l'expérience, ni les compétence pour y accéder ; qu'il constate que la comparaison avec les autres salariés ne démontre pas une véritable discrimination,, que les changements de classification dans le cadre particulier du défendeur n'ont rien d'automatique et restent qu'ont le veuille ou non du pouvoir discrétionnaire de l'employeur ; que faute d'éléments permettant de démontrer le contraire le conseil ne pourra faire droit aux prétentions du demandeur à ce titre.

ALORS QUE sauf application d'un accord collectif visant à en assurer la neutralité ou à le valoriser, l'exercice d'activités syndicales ne peut être pris en considération dans l'évaluation professionnelle d'un salarié ; qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué d'une part une « différence d'évolution de classification [
] en défaveur de M. Y... », d'autre part la mention dans les évaluations sur lesquelles a fondé sa décision pour écarter la discrimination « de son mandat syndical [
] qui engendre un planning chargé et difficile » ; qu'en écartant la discrimination syndicale en l'état de ces constatations dont il résultait que le salarié avait subi un blocage de son évolution de carrière en raison de l'exercice de son mandat syndical, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard des articles L.1132-1, L.1134-1 et L.2141-5 du code du travail.

ALORS en outre QUE le principe d'égalité de traitement oblige l'employeur à traiter de manière identique les salariés se trouvant dans une situation identique ; que seuls des critères objectifs et pertinents peuvent justifier une différence de traitement ; que la cour d'appel, qui a constaté une « différence d'évolution de classification [
] en défaveur de M. Y... », notamment en ce que ce dernier n'avait pas accédé à la position 3 de la convention collective, a dit cette différence de traitement justifiée par un « manque de compétences, d'investissement et de capacité d'encadrement » mais également « d'autonomie et de connaissances approfondies » du salarié ; qu'en se prononçant au regard de ces éléments dénués de toute pertinence au regard de la définition donnée par la convention collective de la position 3, la cour d'appel a violé les articles L.1132-1, L.1134-1 et L.2141-5 du code du travail.

QUE de surcroît tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; qu'en affirmant que l'employeur « justifie cette différence de traitement par le manque de compétences, d'investissement et de capacité d'encadrement » de M. Y..., sans préciser les éléments dont elle entendait déduire que l'employeur justifiait ces assertions d'incompétence, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile.

ET ALORS à tout le moins QUE M. Y... soutenait effectuer rigoureusement les mêmes tâches que ses collègues classés en position 3 ; qu'en se bornant à faire état d'un « manque de compétences, d'investissement et de capacité d'encadrement » mais également « d'autonomie et de connaissances approfondies » du salarié sans rechercher si en dépit des compétences que lui déniaient son employeur il n'effectuait pas rigoureusement les mêmes tâches que ceux de ses collègues qui se voyaient reconnaître l'échelon revendiqué, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1132-1, L.1134-1 et L.2141-5 du code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR limité à 5 000 euros la somme devant être allouée à M. Y... à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral lié à une discrimination syndicale.

AUX MOTIFS PRECITES ET AUX MOTIFS QUE les évaluations de M. Y..., qui est en position T2, font état d'augmentations de salaire mais seulement certaines années après la saisine du conseil en décembre 2009 : - En effet, pour la période d'avril 2006 à mars 2007, M. Y... n'a pas rempli ses objectifs (« needs improvements », ce qui signifie qu'il a besoin de s'améliorer), étant peu impliqué, ce qui justifie son absence d'augmentation ; cette évaluation n'est pas contredite par M. Y..., - pour la période d'avril 2007 à mars 2008, son évaluation était bonne (« generally achieves », ce qui signifie que ses objectifs sont atteints), mais il n'a pas bénéficié d'augmentation car son salaire était, selon la société, déjà positionné haut dans la matrice salariale, ce qui est contredit par la société en 2009, puisqu'elle va reconnaître l'existence d'inégalités salariales à l'égard des représentants du personnel, - pour la période d'avril à décembre 2008, il a aussi atteint ses objectifs, mais cette année-là, en raison des difficultés économiques, l'ensemble de la masse salariale n'a pas augmenté ; qu'il n'a donc pas reçu d'augmentation de son salaire de base, mais a bénéficié d'une augmentation de la part variable de son salaire ; que dans cette évaluation, la société fait mention de son mandat syndical, mais c'est pour indiquer que malgré ce mandat, qui engendre un planning chargé et difficile, M. Y... est très impliqué dans l'équipe et a atteint ses objectifs de performance, tout en s'autoformant, car le budget ne lui a pas permis d'effectuer des formations ; que cette mention sur le mandat syndical n'est donc pas négative, ni stigmatisante, tout au contraire ; - en 2010, il a bénéficié d'une augmentation de son salaire brut de 3,41 %, vu sa performance de 2009 et des mesures unilatérales destinées à réduire les inégalités salariales, notamment à l'égard des représentants du personnel (selon les propres termes de la société dans ses conclusions) ; - en 2011, il en a été de même, avec une augmentation de son salaire brut de 8,09 %, ainsi qu'en 2013 et 2014 avec une augmentation de 3,06% chacun de ces deux années ; qu'il résulte de ces éléments qu'en 2008 et 2009 M. Y... n'a pas bénéficié d'augmentation de son salaire de base, malgré de bonnes évaluations, puis qu'à partir de 2010, il a bénéficié d'augmentations régulières de salaire, tant en raison d'une meilleure atteinte de ses objectifs que de la volonté de la société d'effectuer un rattrapage de salaire pour réduire les inégalités salariales, notamment à l'égard des représentants du personnel, ce qui établit par là même la preuve de la conscience par la société de l'existence de cette inégalité, qu'elle s'est efforcée toutefois de réduire entre 2010 et 2014, sans que le rattrapage prenne complètement en compte l'absence d'augmentation de 2008/2009 ; que M. Y... a donc été victime de discrimination salariale, entre 2008 et 2014 en raison de son engagement syndical au sein de la société ; que faute d'éléments chiffrés permettant d'évaluer le préjudice économique de M. Y... lié à cette évolution salariale discriminatoire, la cour invite les parties à chiffrer ce rattrapage salarial, afin de rétablir le salaire que M. Y... aurait dû percevoir, s'il avait bénéficié d'augmentations salariales en 2008 et 2009, et ce sur la base de la moyenne des augmentations des salariés du panel restreint des 9 salariés* (cf plus haut), qui à l'instar de M. Y..., ont progressé de coefficient Syntec 2.1 à 2.3 ; que ces 9 salariés sont : M. ou Mme B..., X..., Z..., C..., D..., E..., F..., G... et H... ; que le préjudice moral, d'ores et déjà établi, puisqu'il est lié à une absence d'augmentation de son salaire de base pendant 2 ans (2008/2009), avec une répercussion sur les salaires des années suivantes et en lien avec une discrimination syndicale, que la cour fixera à la somme de 5 000 € nette de CSG CRDS à titre de dommages et intérêts.

ALORS QUE la cour d'appel a évalué le préjudice résultant pour M. Y... de la discrimination syndicale dont il a été la victime au seul regard de l'absence d'évolution de son salaire ; que la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation, relatif au repositionnement de M. Y... en position 3 emportera la cassation par voie de conséquence du chef du dispositif par lequel la cour d'appel a limité à 5 000 euros la somme due à M. Y... à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral résultant de la discrimination syndicale dont il a été la victime, en application des dispositions de l'article 624 du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit y avoir lieu de chiffrer le rattrapage salarial au titre des seules années 2008 et 2009 sur la base d'un panel composé de salariés ayant évolué de la position 2.1 à la position 2.3.

AUX MOTIFS PRECITES ET AUX MOTIFS QUE les évaluations de M. Y..., qui est en position T2, font état d'augmentations de salaire mais seulement certaines années après la saisine du conseil en décembre 2009 : - En effet, pour la période d'avril 2006 à mars 2007, M. Y... n'a pas rempli ses objectifs (« needs improvements », ce qui signifie qu'il a besoin de s'améliorer), étant peu impliqué, ce qui justifie son absence d'augmentation ; cette évaluation n'est pas contredite par M. Y..., - pour la période d'avril 2007 à mars 2008, son évaluation était bonne (« generally achieves », ce qui signifie que ses objectifs sont atteints), mais il n'a pas bénéficié d'augmentation car son salaire était, selon la société, déjà positionné haut dans la matrice salariale, ce qui est contredit par la société en 2009, puisqu'elle va reconnaître l'existence d'inégalités salariales à l'égard des représentants du personnel, - pour la période d'avril à décembre 2008, il a aussi atteint ses objectifs, mais cette année-là, en raison des difficultés économiques, l'ensemble de la masse salariale n'a pas augmenté ; qu'il n'a donc pas reçu d'augmentation de son salaire de base, mais a bénéficié d'une augmentation de la part variable de son salaire ; que dans cette évaluation, la société fait mention de son mandat syndical, mais c'est pour indiquer que malgré ce mandat, qui engendre un planning chargé et difficile, M. Y... est très impliqué dans l'équipe et a atteint ses objectifs de performance, tout en s'autoformant, car le budget ne lui a pas permis d'effectuer des formations ; que cette mention sur le mandat syndical n'est donc pas négative, ni stigmatisante, tout au contraire ; - en 2010, il a bénéficié d'une augmentation de son salaire brut de 3,41 %, vu sa performance de 2009 et des mesures unilatérales destinées à réduire les inégalités salariales, notamment à l'égard des représentants du personnel (selon les propres termes de la société dans ses conclusions) ; - en 2011, il en a été de même, avec une augmentation de son salaire brut de 8,09 %, ainsi qu'en 2013 et 2014 avec une augmentation de 3,06% chacun de ces deux années ; qu'il résulte de ces éléments qu'en 2008 et 2009 M. Y... n'a pas bénéficié d'augmentation de son salaire de base, malgré de bonnes évaluations, puis qu'à partir de 2010, il a bénéficié d'augmentations régulières de salaire, tant en raison d'une meilleure atteinte de ses objectifs que de la volonté de la société d'effectuer un rattrapage de salaire pour réduire les inégalités salariales, notamment à l'égard des représentants du personnel, ce qui établit par là même la preuve de la conscience par la société de l'existence de cette inégalité, qu'elle s'est efforcée toutefois de réduire entre 2010 et 2014, sans que le rattrapage prenne complètement en compte l'absence d'augmentation de 2008/2009 ; que M. Y... a donc été victime de discrimination salariale, entre 2008 et 2014 en raison de son engagement syndical au sein de la société ; que faute d'éléments chiffrés permettant d'évaluer le préjudice économique de M. Y... lié à cette évolution salariale discriminatoire, la cour invite les parties à chiffrer ce rattrapage salarial, afin de rétablir le salaire que M. Y... aurait dû percevoir, s'il avait bénéficié d'augmentations salariales en 2008 et 2009, et ce sur la base de la moyenne des augmentations des salariés du panel restreint des 9 salariés* (cf plus haut), qui à l'instar de M. Y..., ont progressé de coefficient Syntec 2.1 à 2.3 ; que ces 9 salariés sont : M. ou Mme B..., X..., Z..., C..., D..., E..., F..., G... et H... ; que le préjudice moral, d'ores et déjà établi, puisqu'il est lié à une absence d'augmentation de son salaire de base pendant 2 ans (2008/2009), avec une répercussion sur les salaires des années suivantes et en lien avec une discrimination syndicale, que la cour fixera à la somme de 5 000 € nette de CSG'CRDS à titre de dommages et intérêts.

ALORS QU'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que M. Y... a fait l'objet d'une discrimination syndicale dans son évolution salariale, par absence de toute évolution de salaire en 2008 et 2009 avec une répercussion sur les salaires des années suivantes ; qu'en invitant les parties à chiffrer le rattrapage des seuls années 2008 et 2009 sans tenir compte de la répercussion constatée sur les années suivantes, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard des articles L.1132-1, L.1134-1 et L.2141-5 du code du travail et 1134 alors en vigueur du code civil.

ET ALORS en tout cas QUE la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation relatif au repositionnement de M. Y... en position 3 emportera la cassation par voie de conséquence du chef du dispositif par lequel la cour d'appel a dit y avoir lieu de chiffrer le rattrapage salarial sur la base d'un panel composé de salariés ayant évolué de la position 2.1 à la position 2.3, en application des dispositions de l'article 624 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-22263;16-22589
Date de la décision : 09/05/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 21 juin 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 09 mai. 2018, pourvoi n°16-22263;16-22589


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.22263
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