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03/05/2018 | FRANCE | N°17-17798

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 03 mai 2018, 17-17798


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 873, alinéa 2, du code de procédure civile, ensemble l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bastia, 8 mars 2017), rendu en référé, que la société Les Voyageurs a confié des travaux à la société SML BTP ; que, des désordres étant apparus en cours de chantier, les parties ont cessé toute relation après avoir dressé un procès-verbal de réception et les travaux ont été poursui

vis par une tierce entreprise, la société Giovellina ; que, de nouveaux désordres étant sur...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 873, alinéa 2, du code de procédure civile, ensemble l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bastia, 8 mars 2017), rendu en référé, que la société Les Voyageurs a confié des travaux à la société SML BTP ; que, des désordres étant apparus en cours de chantier, les parties ont cessé toute relation après avoir dressé un procès-verbal de réception et les travaux ont été poursuivis par une tierce entreprise, la société Giovellina ; que, de nouveaux désordres étant survenus sur la dalle de l'aire de stationnement, la société Les Voyageurs a assigné en référé la société SML BTP en désignation d'un expert pour les désordres de cette dalle et en paiement d'une provision au titre des désordres affectant le carrelage de la salle de restaurant et la réalisation d'une cage d'ascenseur présentés comme ayant été repris par la société Giovellina ;

Attendu que, pour condamner la société SML BTP à payer une certaine somme à titre de provision à la société Les Voyageurs pour les désordres affectant le carrelage de la salle de restaurant et la cage d'ascenseur, l'arrêt retient qu'à l'inverse de ce qui est soutenu par l'entreprise, le dallage pour le parking de la cour intérieure a été facturé et « qu'ainsi en est-il du carrelage », que, si le procès-verbal ne comporte aucune remarque sur l'ascenseur, il faisait partie du devis et des factures qui ont été intégralement payées et que, eu égard au délai écoulé entre le procès-verbal de réception du 7 novembre 2013 et les factures de l'entreprise Giovellina des 3 et 17 décembre 2013 pour la reprise des travaux de carrelage et la réalisation d'une cage d'ascenseur, il est démontré que les travaux ont été réalisés pour reprendre ceux effectués par la société SML BTP ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la facture récapitulative du 25 septembre 2013 ne mentionnait pas de travaux de carrelage et sans relever l'existence de désordres de nature décennale quant aux travaux relatifs à la cage d'ascenseur après avoir retenu que le procès-verbal de réception ne comportait aucune réserve sur ceux-ci, la cour d'appel, qui a dénaturé la facture et n'a pas caractérisé l'existence d'une obligation non sérieusement contestable de la société SML BTP pour les travaux de la cage d'ascenseur, a violé le texte et le principe susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 mars 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Bastia ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Condamne la société Les Voyageurs aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Les Voyageurs à payer la somme de 3 000 euros à la société SML BTP ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois mai deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour la société SML BTP.

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société SML BTP à payer à la société Les Voyageurs, maître de l'ouvrage, une provision de 25 234,31 euros,

AUX MOTIFS QU'en application des dispositions de l'article 873 alinéa 2 du code de procédure civile, le président du tribunal de commerce peut, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire. Le procès-verbal de réception comporte des mentions contradictoires : il fait état d'un refus de réception en raison du "non-respect des plans de l'ingénieur béton établis pour l'agrandissement d'une ouverture en façade, absence d'étais au début des travaux et absence d'IPN définitif pour ces mêmes travaux, pose du carrelage défectueuse le rendant impropre à sa destination (becs à tous les carreaux, joints anarchiques) ayant nécessité d'enlèvement complet occasionnant un retard considérable dans l'aménagement de l'hôtel et son classement quatre étoiles. Il est précisé que les travaux effectués ont été intégralement réglés". Il indique aussi que les garanties découlant des articles 1792 et suivants du code civil commencent à courir compter de la signature du procès verbal et que la signature du procès-verbal de réception et le règlement des travaux autorisent le client à prendre possession d'ouvrage. Ce procès-verbal constituerait donc un procès-verbal de refus de réception ayant les effets d'un procès-verbal de réception. En tout état de cause, à l'inverse de ce qui est soutenu par l'entreprise, le dallage béton armé pour le parking de la cour intérieure fait partie du devis du 29 août 2013, il a d'ailleurs été facturé 22.800 euros sur les 137.401,12 euros du marché, ainsi en est-il du carrelage. Le fait que les travaux aient été effectués en deux phases n'est pas de nature à contredire son propre aveu, porté sur le procès verbal de "non-réception", suivant lequel l'ensemble des travaux a été payé. Si ce même procès-verbal ne comporte aucune remarque sur l'ascenseur, il faisait, suivant les propres pièces de l'entreprise, partie du devis et des factures, qui ont été, suivant ses déclarations, intégralement payées. Eu égard au délai écoulé entre le procès-verbal date du 7 novembre 2013 et les factures de l'entreprise Giovellina des 3 et 17 décembre 2013 pour la reprise des travaux de carrelage et la réalisation d'une cage d'ascenseur, avec notamment mise en place d'IPN, il est démontré que les travaux ont été réalisés pour reprendre ceux effectués par la SAS SML BTP. Il en résulte qu'il n'existe aucune contestation sérieuse et que l'ordonnance de référé doit être infirmée en sa seule disposition critiquée. Une provision de 40 000 euros est réclamée ; toutefois, sans autre pièce et avant toute décision au fond, la demande est fondée à hauteur de 25.234,31 euros, que la S.A.R.L. Les Voyageurs, justifie avoir engagés. Elle sera déboutée du surplus de ses demandes ;

1) ALORS QUE tout jugement doit être motivé ; que des motifs inintelligibles équivalent à un défaut de motifs ; qu'en retenant en l'espèce, pour allouer à la société Les Voyageurs une provision de 25 234,31 euros, que le procès verbal de réception comportait des mentions contradictoires et « constituerait donc un procès-verbal de refus de réception ayant les effets d'un procès-verbal de réception », la cour d'appel, qui s'est prononcée par des motifs ne permettant pas de comprendre si les travaux litigieux avaient ou non été réceptionnés, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2) ALORS QUE le juge des référés ne peut accorder une provision au créancier que si l'obligation n'est pas sérieusement contestable ; qu'en l'espèce, pour allouer à la société Les Voyageurs une provision de 25 234,31 euros, la cour d'appel a relevé que le procès-verbal de réception comportait des mentions contradictoires, qu'il faisait état d'un refus de réception tout en indiquant que les garanties des articles 1792 et suivants du code civil commençaient à courir à compter de la signature du procès-verbal de réception, et a constaté que ce procès-verbal « constituerait donc un procès-verbal de refus de réception ayant les effets d'un procès-verbal de réception » ; qu'en statuant ainsi la cour d'appel, qui s'est livrée à l'interprétation du procès-verbal dont elle a elle-même constaté qu'il comportait des mentions contradictoires, a tranché une contestation sérieuse et a violé l'article 873 alinéa 2 du code de procédure civile ;

3) ALORS QUE le juge des référés ne peut accorder une provision au créancier que si l'obligation n'est pas sérieusement contestable ; qu'en l'espèce, en relevant, pour allouer à la société Les Voyageurs une provision de 25 234,31 euros, que les travaux avaient été intégralement payés et qu'en égard au délai écoulé entre le procès-verbal daté du 7 novembre 2013 et les factures de l'entreprise Giovellina des 3 et 17 décembre 2013 pour la reprise des travaux de carrelage et la réalisation d'une cage d'ascenseur, il était démontré que les travaux avaient été réalisés pour reprendre ceux effectués par la société SML BTP, la cour d'appel, qui n'a pas constaté l'existence de désordres affectant les travaux réalisés par cette société ni précisé le fondement juridique de son obligation, n'a pas caractérisé l'existence d'une obligation non sérieusement contestable à la charge de la société SML BTP et a violé l'article 873 alinéa 2 du code de procédure civile ;

4) ALORS QUE le juge des référés ne peut accorder une provision au créancier que si l'obligation n'est pas sérieusement contestable ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le procès-verbal du 7 novembre 2013 avait les effets d'un procès-verbal de réception, qu'il ne comportait aucune remarque sur l'ascenseur et que les travaux concernant l'ascenseur avaient été intégralement payés ; qu'en se bornant à relever, pour condamner la société SML BTP à payer à la société Les Voyageurs une provision de 25 243,31 euros, qu'en égard au délai écoulé entre le procès-verbal du 7 novembre 2013 et les travaux réalisés par la société Giovellina les 3 et 17 décembre 2013 portant notamment sur la réalisation d'une cage d'ascenseur avec notamment mise en place d'IPN, il était démontré que ces travaux avaient été réalisés pour reprendre ceux effectués par la société SML BTP, sans constater l'existence de désordres de nature décennale affectant les travaux d'ascenseur, contestés par la société SML BTP, et qui étaient seuls susceptibles d'engager sa responsabilité en l'état d'une réception sans réserves, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 873 alinéa 2 du code de procédure civile ;

5) ALORS QUE le juge ne peut dénaturer les termes clairs et précis des écrits qui lui sont soumis ; qu'en l'espèce, la facture de la société SML BTP du 25 septembre 2013, d'un montant total de 57 891,66 euros HT soit 62 523 euros TTC, payée par la société Les Voyageurs, ne comportait pas de travaux de carrelage ; qu'en énonçant qu'à l'inverse de ce qui était soutenu par la société SML BTP, les travaux de carrelage avaient été facturés et payés, la cour d'appel a dénaturé cette facture et violé l'article 1134 du code civil en sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 applicable en l'espèce.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 17-17798
Date de la décision : 03/05/2018
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bastia, 08 mars 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 03 mai. 2018, pourvoi n°17-17798


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Bouzidi et Bouhanna, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.17798
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