LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- -
M. François X...,
Mme Georgette Y..., épouse X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 4-10, en date du 28 mars 2017, qui, pour soumission de personnes vulnérables ou dépendantes dont au moins un mineur à des conditions d'hébergement incompatibles avec la dignité humaine, infractions au code de la santé publique et mise en danger de la vie d'autrui, les a condamnés chacun à huit mois d'emprisonnement avec sursis, a ordonné une mesure de confiscation, et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 6 mars 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme Harel-Dutirou, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Hervé ;
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire HAREL-DUTIROU, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIÉ, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général référendaire CABY ;
Vu le mémoire produit ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. François X... et son épouse sont propriétaires de plusieurs immeubles situés dans le département de la Seine-Saint-Denis, dans les communes de [...], [...], [...] et [...] ; qu'à la suite d'une enquête diligentée par l'inspection du service de salubrité de la municipalité de [...] relative aux conditions d'hébergement des occupants de ces logements, notamment de plusieurs familles, l'autorité administrative a édicté des arrêtés d'insalubrité avec mise en demeure d'effectuer des travaux et obligation de reloger les occupants et des arrêtés déclarant les logements impropres à l'habitation et définitivement interdits à cet usage et mettant à la charge des propriétaires l'obligation de reloger les occupants ; que M. et Mme X... ont été poursuivis notamment pour soumission de personnes vulnérables ou dépendantes dont au moins un mineur à des conditions d'hébergement incompatibles avec la dignité humaine, mise à disposition de locaux impropres à l'habitation malgré une mise en demeure de faire cesser définitivement l'occupation, refus de relogement, mise en danger de la vie d'autrui ; que la commune de [...] s'est constituée partie civile ; que le tribunal les a relaxés d'une partie des faits objet de la prévention, notamment des faits de mise en danger de la vie d'autrui, puis a déclaré M. X... coupable de mise à disposition de locaux impropres à l'habitation malgré une mise en demeure s'agissant de trois logements de [...] et de soumission de personnes vulnérables ou dépendantes dont au moins un mineur à des conditions d'hébergement incompatibles avec la dignité humaine concernant les logements situés à [...], [...] et [...] ; que Mme X... a été déclarée coupable de cette dernière infraction ; que le ministère public et les prévenus ont interjeté appel ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 225-14, 225-15 et 225-15-1 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. et Mme X... coupables du délit de soumission de personnes vulnérables dont au moins un mineur à des conditions de logement indigne, faits commis à [...] entre le 1er octobre 2010 et le 20 novembre 2013, à [...] entre le 23 juin 2012 et le 29 avril 2014 et à [...] entre le 1er septembre 2012 et le 29 avril 2014;
"aux motifs propres que c'est par des motifs pertinents, non contestés par les prévenus, que la cour fait siens, que le tribunal a considéré comme établis à l'encontre des deux prévenus les quatre infractions de soumission de personnes vulnérables, dont au moins un mineur, à des conditions de logement indigne, en application de l'article 225-14 et 225-15 du code pénal ; qu'elles sont en effet caractérisées, notamment à [...], par l'absence d'isolation thermique, les surfaces habitables inférieures aux normes en vigueur, un éclairage naturel insuffisant, et alors que chacune des trois habitations étaient occupées par un couple et deux enfants mineurs, à [...], par la configuration de l'appartement partiellement enterré, l'éclairage naturel insuffisant, l'absence d'ouvrant à l'air libre dans la salles de séjour et les chambres, et de ventilation dans les pièces humides, et alors que l'habitation avait été louée à une femme enceinte, mère de deux enfants, à [...] par l'humidité importante, l'absence d'isolation thermique, une surface habitable pour la chambre inférieure aux normes en vigueur, le logement étant loué à une mère y logeant avec ses quatre enfants mineurs ; que les éléments matériels objectifs décrits constituent des conditions d'hébergement indignes, incompatibles avec la dignité humaine, notamment de mineurs, ce que les prévenus ne pouvaient ignorer, au regard des contrats conclus et de l'habitude prise par M. et Mme X... d'aller sur place chercher le chèque de loyer et permettent de considérer les faits comme établis et les infractions constituées ;
"et aux motifs adoptés que le caractère indigne des conditions d'hébergement est établi par les différents rapports de l'inspecteur de salubrité dont les conclusions ont été rappelées ci-dessus ; que, plus particulièrement, M. Moussa A..., son épouse et leurs deux enfants mineurs occupaient un logement dont la pièce unique mesurait 4,7 m², les toilettes et la salle de bain se trouvaient dans la cour ; que M. A... est entré dans le logement en 2011 ; qu'il disposait d'une demande de titre de séjour en qualité d'étranger malade et attendait que son épouse le rejoigne en France avec leur plus jeune enfant ; qu'à cette époque, M. A... était agent d'entretien et percevait un salaire mensuel de 600 euros, le loyer mensuel de 350 euros a été augmenté à hauteur de 450 euros (quittance du mois d'avril 2011) lorsque Mme I... B... et sa fille sont venues habiter le logement, en 2013, le couple avait la charge de trois enfants mineurs et si M. A... percevait un salaire mensuel de 1 100 euros, Mme B... bénéficiait du RSA, M. Adama C..., Mme J... L... et leurs deux enfants mineurs occupaient depuis le mois d'octobre 2010, un logement dont la chambre était enterrée à plus d'un mètre cinquante du sol naturel ; que le couple avait la charge de deux jeunes enfants nés en [...] et [...] , M. D... M..., Mme K... C... et leurs deux enfants mineurs occupaient un logement dont la surface de la pièce principale était de 6,08 m² ; que Mme K... C... a expliqué lors de son audition dans le cadre de la procédure qu'elle a loué le logement en juillet 2011, afin de quitter le domicile parental et alors qu'elle vivait en concubinage et assumait la charge d'un enfant âgé de un an ; que si elle percevait un salaire lors de son entrée dans les lieux, elle a déclaré ne pas avoir travaillé plus de trois mois et avoir ultérieurement bénéficié du RSA ; que le second enfant du couple, né en [...], a été diagnostiqué drépanocytaire ; qu'il est observé que chacune des familles concernées bénéficiait des allocations familiales et de l'allocation logement qui était virée sur le compte des bailleurs ; qu'à l'audience, Mme Y..., épouse X..., ne conteste pas avoir eu connaissance de la situation personnelle et familiale des occupants ; qu'elle reconnaît que le droit à l'allocation logement de ses locataires constituait une garantie de paiement d'au moins une partie des loyers. M. François X... qui se déplaçait pour percevoir les loyers et effectuer certaines interventions dans les logements n'ignorait pas les conditions et contraintes de chacune des familles ainsi hébergées ; qu'après avoir visité le logement sis, [...] le 11 décembre 2013, le pôle habitat de la ville de [...] a, notamment, fait état des caractéristiques suivantes :
- logement partiellement enterré ;
- éclairement naturel insuffisant ;
- absence d'ouvrant donnant à l'extérieur de la salle de séjour ;
- absence de vue horizontale dans les chambres ;
- présence d'humidité près de la fenêtre de la chambre des enfants ;
- absence de système de ventilation dans la cuisine et la salle d'eau ; que les débats confirment les éléments sus-énoncés (enfouissement partiel, défaut de ventilation, absence d'ouvrant) qui démontrent le caractère indigne du logement ; qu'entendue le 16 décembre 2013, Mme Judith E... qui, a signé un bail, le 1er juillet 2012, pour un loyer de 900 euros, outre 80 euros de provisions pour charges a expliqué assumer la charge de quatre enfants mineurs, avoir occupé un emploi d'agent de service et percevoir le RSA pour un montant mensuel de 300 euros ainsi que les allocations familiales et l'allocation logement ; que les époux X... n'ignoraient pas les contraintes familiales auxquelles était soumise la locataire puisque, c'est en raison de ces mêmes contraintes que Mme E... bénéficiait d'une allocation logement substantielle garantissant le paiement du loyer ; que les logements situés à [...] (
) dans son rapport de visite du 21 octobre 2013, l'agence régionale de la santé a relevé et établi que le logement sis [...] présentait, notamment, les caractéristiques suivantes :
- humidité très importante dans l'ensemble du logement ;
- murs et planchers froids et humides dans l'ensemble du logement ;
- absence d'isolation thermique des murs dans l'ensemble du logement ; - moyen de système de chauffage très insuffisant dans l'ensemble du logement ;
- absence d'un système de ventilation suffisant et permanent dans l'ensemble du logement ;
- surface habitable inférieure à 7 m² sous 2,2 m de hauteur sous plafond dans la chambre; que les débats confirment les éléments sus-énoncés (enfouissement partiel, défaut de ventilation, absence d'ouvrant...) qui démontrent le caractère indigne des logements ; qu'il convient par ailleurs de noter que ce logement était un ancien garage aménagé par Mme X... ; que lorsque Mme Gina G... a signé le bail en date du 1er septembre 2012 pour un loyer de 880 euros, outre, 30 euros de provisions pour charges, elle assumait seule la charge de quatre enfants mineurs et ne disposait pas d'emploi ; que Mme G... a déclaré que Mme Ginette Y..., épouse X..., s'est déplacée pour vérifier que les enfants résidaient bien à son domicile ;
"1°) alors que saisis de poursuites du chef du délit de soumission de personnes vulnérables ou en état de dépendance à des conditions d'hébergement indignes, les juges du fond doivent motiver leur décision de façon suffisamment précise pour que soient caractérisés les éléments de fait établissant que les conditions d'hébergement étaient ou non compatibles avec la dignité humaine ce que la simple méconnaissance de prescriptions réglementaires de sécurité ou de confort ne peut suffire à établir ; qu'en se bornant à retenir des surfaces habitables inférieures aux normes, un éclairage insuffisant, un appartement partiellement enterré, l'absence d'ouvrant ou encore une humidité importante sans autrement caractériser l'existence d'éléments de fait graves et précis établissant que les conditions d'hébergement étaient en l'espèce incompatibles avec la dignité humaine, la cour d'appel a méconnu les dispositions susvisées ;
"2°) alors que le délit de soumission à des conditions d'hébergement indignes suppose un état de vulnérabilité ou de dépendance des personnes hébergées et la présence d'au moins un mineur, état apparent ou connu de l'auteur des faits ; qu'en l'espèce, hormis pour M. A... Moussa occupant un logement à [...] lequel disposait d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade et vivait avec ses enfants mineurs, attestant de sa vulnérabilité au sens de l'article 225-15-1 du code pénal, la cour d'appel s'est bornée, pour tous les autres logements à relever la présence d'au moins un mineur sans caractériser l'état de dépendance ou de vulnérabilité des personnes hébergées ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision" ;
Attendu que, pour déclarer les prévenus coupables de soumission de personnes vulnérables ou dépendantes dont au moins un mineur à des conditions d'hébergement incompatibles avec la dignité humaine, l'arrêt, par motifs propres et adoptés, relève que les logements situés à [...] constitués d'un ancien poulailler, d'un ancien local poubelles et d'une ancienne buanderie, et dans lesquels étaient hébergées des familles avec leurs enfants mineurs, présentaient des surfaces habitables inférieures aux normes en vigueur, un éclairage naturel insuffisant et étaient dépourvus d'isolation thermique, que le logement situé à Saint-Denis, en sous-sol, partiellement enterré, occupé par une mère et ses trois enfants pour un loyer mensuel de 980 euros, présentait un éclairage naturel insuffisant et ne disposait pas d'ouvrant à l'air libre dans la salles de séjour et les chambres et de ventilation dans les pièces humides, qu'enfin, le logement situé à [...], correspondant à un ancien garage au sous sol d'un pavillon et loué à une mère isolée avec quatre enfants mineurs pour un loyer de 910 euros, se caractérisait par une humidité importante, l'absence d'isolation thermique, une surface habitable pour la chambre inférieure aux normes en vigueur ; que les juges ajoutent que les prévenus ne pouvaient ignorer l'existence de ces éléments matériels objectifs constitutifs de conditions d'hébergement indignes, incompatibles avec la dignité humaine, notamment de mineurs, au regard des contrats conclus et de l'habitude prise par M. X... d'aller sur place chercher le chèque de loyer ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, procédant de son appréciation souveraine des éléments de preuves contradictoirement débattus, la cour d'appel a caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits dont elle a déclaré les prévenus coupables et a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, L. 521-1, L. 521-1-3-1 et L. 521-4 du code de la construction et de l'habitation, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. et Mme X... coupables du délit de refus de procéder au relogement des locataires faits commis à [...] entre le 13 juin 2012 et le 20 novembre 2013 et à [...] entre le 10 mars 2013 et le 29 avril 2014 ;
"aux motifs que l'article L. 521-1 du code de la construction dispose "Le propriétaire ou l'exploitant est tenu d'assurer le relogement ou l'hébergement des occupants ou de contribuer au coût correspondant dans les conditions prévues à l'article L. 521-3-1 dans les cas suivants : lorsqu'un immeuble fait l'objet d'une déclaration d'insalubrité, d'une mise en demeure ou d'une injonction prise en application des articles L. 1331-22, L. 1331-24, L. 1331-26-l et L. 1331-28 du code de la santé publique, si elle est assortie d'une interdiction d'habiter temporaire ou définitive ou si les travaux nécessaires pour remédier à l'insalubrité rendent temporairement le logement inhabitable" ; que les immeubles et occupants concernés sont au regard des articles L. 1331-22 et L. 1331-24 du code de la santé publique ceux visés aux deux paragraphes précédents ; que force est de constater que cette obligation de relogement s'imposant aux propriétaires, à leurs frais, à l'égard des occupants de bonne foi, d'une part des trois logements impropres à l'habitation à [...], d'autre part du logement ayant fait l'objet d'un arrêté d'insalubrité occupé par M. Adama C... et Mme J... L... , n'a pas été respecté, les collectivités locales ayant dû se substituer aux propriétaires ; que nonobstant les difficultés qu'ils pouvaient eux-mêmes rencontrer à cette période, les prévenus n'exposent pas avoir fait la moindre démarche en ce sens ;
"alors que l'article L. 521-4 du code de la construction et de l'habitation incrimine le fait de refuser de procéder à l'hébergement ou au relogement de l'occupant, bien qu'étant en mesure de le faire ; qu'en déclarant M. et Mme X... coupables du délit de refus de procéder au relogement des locataires après avoir relevé les difficultés financières du couple, au prétexte qu'ils n'auraient effectué aucune démarche en ce sens, sans relever qu'ils étaient en mesure de le faire malgré l'existence de ces difficultés, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision" ;
Attendu que, contrairement à ce que soutient le moyen, l'arrêt, qui a examiné les difficultés rencontrées par les prévenus, retient qu'ils n'exposent pas avoir fait la moindre démarche pour procéder au relogement des locataires ;
Attendu qu'en prononçant ainsi la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'ou il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le cinquième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 223-1 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. et Mme X... coupables du délit mise en danger d'autrui ;
"aux motifs que ce délit est constitué par la violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, exposant à un risque de mort immédiat, de mutilation ou d'infirmité permanente, qu'il est reproché aux époux X... d'avoir exposé Mme Gina G..., locataire à [...], et ses quatre enfants, à un risque de choc électrique et d'incendie en mettant à sa disposition un logement ne respectant pas la norme électrique NEC 15-100, référentiel technique en matière d'installation électrique, qu'il résulte des décrets du 6 mars 1987 fixant les conditions minimales d'habitabilité et du décret 2002-120 du 30 janvier 2002, relatif aux caractéristiques du logement décent que tout logement doit être équipé de réseaux et branchements en électricité en bon état d'usage et de fonctionnement et répondant aux besoins normaux des occupants, que par ailleurs les normes applicables sont celles en vigueur au moment de la construction, correspondant dans le cas présent à la transformation récente du garage en logement ; qu'en l'espèce l'absence, constatée par l'agence régionale de santé, de différentiel à 30 mA garantissant tout risque de court-circuit dans un logement présentant par ailleurs un taux d'humidité associée à une absence de branchements répondant aux besoins normaux des locataires, nonobstant l'usage non conforme par les locataires, et alors que l'aspect extérieur de l'installation électrique était à l'évidence dénuée de toute préoccupation de sécurité constitue un violation manifestement délibérée d'un obligation de sécurité par les bailleurs d'habitude qu'étaient les époux X..., qui présentait un risque de mort immédiat ;
"1°) alors que le délit de mise en danger d'autrui suppose, pour être constitué, une méconnaissance volontaire de l'obligation de sécurité imposée par la loi ou le règlement ; qu'en déclarant M. et Mme X... coupables pour avoir exposé leurs locataires à un risque de choc électrique et d'incendie faute d'avoir installé un différentiel à 30 mA garantissant tout risque de court-circuit dans un logement sans constater le caractère délibéré de l'exposition au risque par les prévenus, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;
"2°) alors que le délit de mise en danger suppose, pour être constitué, d'avoir exposé directement autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures graves ; qu'en déclarant M. et Mme X... coupables pour avoir exposé leurs locataires à un risque de choc électrique et d'incendie faute d'avoir installé un différentiel à 30 mA garantissant tout risque de court-circuit dans un logement après avoir relevé que les locataires faisaient un usage non conforme de l'installation électrique, ce dont il s'évinçait que le défaut d'installation d'un différentiel à 30 mA par les prévenus n'était pas à l'origine de la mise en danger, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l'article 223-1 du code pénal" ;
Attendu que, pour déclarer M. et Mme X... coupables de mise en danger de la vie d'autrui pour avoir exposé Mme G..., locataire d'un logement à [...], ainsi que ses quatre enfants à un risque de choc électrique et d'incendie en mettant à sa disposition un logement ne respectant pas la norme électrique NFC 15-100 référentiel technique en matière d'installation électrique, l'arrêt, après avoir rappelé les textes applicables, notamment le décret du 6 mars 1987 fixant les conditions minimales d'habitabilité et le décret 2002-120 du 30 janvier 2002 relatif aux caractéristiques du logement décent, relève l'absence, constatée par l'agence régionale de santé, de différentiel à 30 mA garantissant tout risque de court-circuit dans un logement présentant par ailleurs un taux d'humidité associée à une absence de branchements en électricité en bon état d'usage et de fonctionnement répondant aux besoins normaux des locataires ; que les juges ajoutent que l'aspect extérieur de l'installation électrique était à l'évidence dénuée de toute préoccupation de sécurité ; qu'ils en déduisent que les prévenus, bailleurs d'habitude, ont commis une violation manifestement délibérée d'une obligation de sécurité qui présentait un risque de mort immédiat ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel a justifié sa décision;
D'où il suit le moyen doit être écarté ;
Mais sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, L. 1331-22 et L. 1337-4 du code de la santé publique, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. et Mme X... coupables du délit de mise à disposition de locaux impropres à l'habitation malgré une mise en demeure de faire cesser définitivement l'occupation, faits commis à [...] entre le 13 juin 2012 et le 20 novembre 2013 et à [...] entre le 10 mars 2013 et le 29 avril 2014 ;
"aux motifs propres qu'en application de l'article L. 1331-22, les caves, sous-sols, combles, pièces dépourvues d'ouverture sur l'extérieur et autres locaux par nature impropres à l'habitation ne peuvent être mis à disposition aux fins d'habitation, à titre gratuit ou onéreux ; que le représentant de l'état dans le département met en demeure la personne qui amis les locaux à disposition de faire cesser cette situation dans un délai qu'il fixe ; que les locaux situés à [...], en fond de parcelle, anciennement buanderie, poulailler et local à poubelles, d'une superficie inférieure à 9 m² pour une hauteur de plafond de 2,20 m répondant à cette définition, ont fait chacun l'objet d'un arrêté, les 9 mai, 31 juillet et 17 octobre 2012, avec injonction de faire cesser cette situation dans le délai d'un mois de la notification ; que ces arrêtés ont été portés à la connaissance de M. X... qui déclare en avoir reçu notification et en connaître le contenu ; qu'il est constant que la situation a perduré au-delà de ce délai ; que son épouse, qui demeure avec lui, également visée dans ces arrêtés comme étant propriétaire à 90 % des biens concernés et déclare ne pas en avoir personnellement la notification ne pouvait raisonnablement en ignorer l'existence et le contenu ; que l'obligation de faire cesser la situation passé le délai imposé s'imposait donc à elle comme à son époux ; que l'infraction est donc bien constituée à leur égard ;
"et aux motifs adoptés que pour les logements situés à [...], à l'audience les époux X... ne contestent pas avoir mis les logements en cause à disposition des occupants en contrepartie d'un loyer (compris entre 300 et 460 euros) mais seulement jusqu'à la notification des arrêtés ; qu'ils disent ne pas avoir eu conscience du caractère impropre à l'habitation ou insalubre, des logements aménagés par M. X..., il n'est cependant pas contesté, ni contestable que les logements ainsi aménagés présentaient une superficie inférieure à 9 m² sous 2,20 m de hauteur et étaient impropres par nature à l'habitation ; que M. X... qui a reçu notification des arrêtés comme indiqué ci-dessus sera déclaré coupable de cette même infraction ;
"alors que, saisis de poursuites du chef du délit de mise à disposition de locaux impropres à l'habitation malgré une mise en demeure de faire cesser définitivement l'occupation portant sur plusieurs logements, il appartient aux juges de caractériser pour chacun des logements, leur caractère impropre à l'habitation et la mise en demeure faite aux bailleurs de faire cesser l'occupation ; qu'en ne retenant aucun motif pour les logements situés à [...] pour lesquels les prévenus avaient été relaxés en première instance, quand les prévenus étaient poursuivis de ce chef pour des faits commis à [...] et à [...] , la cour d'appel qui les a néanmoins retenu dans les liens de la prévention pour l'ensemble des logements, a méconnu les textes susvisés" ;
Vu l'article 593 du code de procédure pénale ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu que, pour infirmer le jugement et déclarer M. et Mme X... coupables d'avoir, à [...], mis à disposition des logements impropres à l'habitation malgré une mise en demeure de faire cesser définitivement cette occupation, l'arrêt relève que l'enquête a établi que les locaux situés à [...] , constitués de caves, étaient loués malgré un arrêté d'insalubrité pris en novembre 2012 avec un délai de deux mois fait aux propriétaires pour cessation de l'occupation par la commune de [...] ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, sans vérifier l'existence de lettres de notification des arrêtés préfectoraux et leur éventuelle méconnaissance par les prévenus, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Et sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, L. 1331-22 et L. 1337-4 du code de la santé publique, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Mme X... coupable du délit de mise à disposition de locaux impropres à l'habitation malgré une mise en demeure de faire cesser définitivement l'occupation, faits commis à [...] entre le 13 juin 2012 et le 20 novembre 2013 ;
"aux motifs qu'en application de l'article L. 1331-22, les caves, sous-sols, combles, pièces dépourvues d'ouverture sur l'extérieur et autres locaux par nature impropres à l'habitation ne peuvent être mis à disposition aux fins d'habitation, à titre gratuit ou onéreux ; que le représentant de l'état dans le département met en demeure la personne qui amis les locaux à disposition de faire cesser cette situation dans un délai qu'il fixe ; que les locaux situés à [...], en fond de parcelle, anciennement buanderie, poulailler et local à poubelles, d'une superficie inférieure à 9 m² pour une hauteur de plafond de 2.20 m répondant à cette définition, ont fait chacun l'objet d'un arrêté, les 9 mai, 31 juillet et 17 octobre 2012, avec injonction de faire cesser cette situation dans le délai d'un mois de la notification; que ces arrêtés ont été portés à la connaissance de M. X... qui déclare en avoir reçu notification et en connaître le contenu ; qu'il est constant que la situation a perduré au-delà de ce délai ; que son épouse, qui demeure avec lui, également visée dans ces arrêtés comme étant propriétaire à 90 % des biens concernés et déclare ne pas en avoir personnellement la notification ne pouvait raisonnablement en ignorer l'existence et le contenu; que l'obligation de faire cesser la situation passé le délai imposé s'imposait donc à elle comme à son époux ; que l'infraction est donc bien constituée à leur égard et que l'article L. 1331-24, dispose que lorsque l'utilisation qui est faite de locaux ou installations présente un danger pour la santé ou la sécurité de leurs occupants, le représentant de l'Etat dans le département peut enjoindre à la personne qui a mis ces locaux ou installations à disposition ou à celle qui en a l'usage de rendre leur utilisation conforme aux prescriptions qu'il édicte dans le délai qu'il fixe ; que l'immeuble concerné par un arrêté d'insalubrité est celui de [...] loué à M. Adama C... et Mme J... L... , occupé également par leurs deux enfants ; que l'arrêté, en date 15 mai 2012, enjoint les propriétaires de mettre en sécurité l'installation électrique dans un délai de sept jours et de faire cesser la mise à disposition de ce local à des fins d'habitation ; que ces prescriptions n'ont pas été exécutés ; qu'il sera répondu aux arguments de défense de la prévenue, Mme Y..., épouse X..., relatives à la notification de l'arrêté qui ne lui aurait pas été faite, dans les mêmes termes qu'au paragraphe précédent ; qu'enfin, l'absence de paiement des loyers par les locataires à compter de l'arrêté, laquelle est prévue par les textes, ne dispensait pas les propriétaires de cette obligation de mise en conformité électrique et de cessation d'habitation ;
"alors que le délit de mise à disposition de locaux impropres à l'habitation malgré mise en demeure de faire cesser définitivement l'occupation suppose, pour être constitué, que le bailleur ait été destinataire de la mise en demeure et en ait eu personnellement et effectivement connaissance ; qu'en déclarant Mme X... coupable au prétexte qu'en sa qualité de propriétaire à 90% des biens concernés et demeurant avec son époux lequel avait été destinataire de l'arrêté, celle-ci « ne pouvait raisonnablement en ignorer l'existence et le contenu » sans constater que Mme X..., qui contestait en avoir eu connaissance, avait été effectivement mise en demeure de faire cesser l'occupation des logements situés à [...], la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision" ;
Vu l'article 593 du code de procédure pénale ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu que, pour déclarer Mme X... coupable de mise à disposition de logements impropres à l'habitation malgré une mise en demeure de faire cesser définitivement cette occupation, l'arrêt retient que les locaux situés à [...] ont fait chacun l'objet d'un arrêté avec injonction de faire cesser la situation d'occupation dans le délai d'un mois à compter de la notification ; que les juges relèvent que ces arrêtés ont été portés à la connaissance de M. X... qui déclare en avoir reçu notification et en connaître le contenu et qu'il est constant que la situation a perduré au delà de ce délai ; qu'ils ajoutent que son épouse, qui demeure avec lui, également visée dans ces arrêtés comme étant propriétaire à 90% des biens concernés et déclare ne pas en avoir eu personnellement la notification, ne pouvait raisonnablement en ignorer l'existence et le contenu ; qu'ils en déduisent que l'obligation de faire cesser la situation s'imposait à elle comme à son époux ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, par des motifs n'établissant pas que Mme X... a personnellement reçu notification des arrêtés préfectoraux, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encore encourue de ce chef ;
Par ces motifs, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les sixième et septième moyens de cassation proposés ;
CASSE et ANNULE, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris, en date du 28 mars 2017, mais en ses seules dispositions relatives à la déclaration de culpabilité de M. et Mme X... du chef de mise à disposition à [...] de locaux impropres à l'habitation malgré une mise en demeure de faire cesser définitivement cette occupation, de Mme X... du chef de mise à disposition de logements impropres à l'habitation malgré une mise en demeure de faire cesser définitivement cette occupation concernant les logements situés sur la commune de [...], à la peine de confiscation prononcée à l'encontre de M. et Mme X..., à la condamnation des prévenus à payer des dommages-intérêts à la commune de [...], toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le deux mai deux mille dix-huit ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.