LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, ci-après annexé :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 2 juin 2016), que la société civile d'exploitation agricole Val d'Or a repris l'activité de maraîchage de la société par actions simplifiée Val d'Or Plants, devenue société par actions simplifiée Yves X..., avec laquelle elle a, le 12 juillet 2007, conclu cinq conventions portant sur l'acquisition des éléments constituant le fonds, la location des serres et de leurs équipements pour une durée de quarante-huit mois prorogée jusqu'au 31 août 2014 par avenants du 4 décembre 2013 et un prêt à usage de parcelles appartenant à la SCI X...Y... , ainsi qu'à M. et Mme X... pour une durée de quatre ans prorogée jusqu'au 31 août 2014 par avenants du 4 décembre 2013 ; que la SCEA Les Serres Orvaltaises lui a consenti, dans le même ensemble, la location de serres ; que, par déclaration du 16 décembre 2013, la SCEA Val d'Or a saisi le tribunal paritaire des baux ruraux en reconnaissance d'un bail statutaire ;
Attendu que M. et Mme X..., la SCI X...- Y... , la SAS X... et la SCEA Les Serres Orvaltaises font grief à l'arrêt de constater l'absence de volonté manifeste de la SCEA Val d'Or de donner congé des deux baux conclus à son profit ;
Mais attendu qu'ayant retenu, exactement, que la durée d'un bail statutaire ne pouvait être inférieure à neuf ans, nonobstant toute clause ou convention contraire, et que le preneur ne pouvait y renoncer qu'à la condition que cette renonciation soit certaine et explicite, et, souverainement, que la volonté de la SCEA Val d'Or, en raison de ses tergiversations sur la prorogation des locations et le montant des loyers, n'était pas manifeste, la cour d'appel, qui a procédé à la recherche prétendument omise, a pu en déduire, sans dénaturation, que les conditions d'une résiliation amiable n'était pas réunies ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme X..., la A... , la C... X... et la SCEA Les Serres Orvaltaises aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. et Mme X..., de la A... , de la C... X... et de la SCEA Les Serres Orvaltaises et les condamne à payer à la SCEA Val d'Or la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq avril deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X..., la A... , la C... X... et la SCEA Les Serres Orvaltaises
Le moyen reproche à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir constaté l'absence de volonté manifeste de la SCEA Val d'Or de donner congé des deux baux conclus à son profit sur les sites de Tourneuve et de Sainte Anne et d'avoir dit, en conséquence, que ces baux sont d'une durée de neuf années consécutives, qu'ils courent jusqu'au 31 janvier 2016 et qu'ils ont été reconduits pour une nouvelle période de neuf ans à compter du 1er février 2016 ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « 5. Les appelants soutiennent que la SCEA Val d'Or a résilié à la date du 31 août 2014 les conventions de location ; que par application de l'article L. 411-5 du code rural et de la pêche maritime, la durée d'un bail rural ne peut être inférieure à neuf ans, nonobstant toute clause ou convention contraire ; que cependant le preneur peut renoncer valablement à un bail à la condition que cette renonciation soit certaine et explicite ; que comme l'a relevé le premier juge, les échanges de courrier entre les parties démontrent des tergiversations de la part de la SCEA Val d'Or, celle-ci attendant même une prorogation des locations au-delà du 30 septembre 2014 comme cela ressort d'un courrier du 29 octobre 2013 ; que dans ces conditions, le tribunal paritaire a justement retenu qu'il n'y avait pas eu de résiliation amiable des conventions à la date du 31 août 2014 et qu'il y avait lieu de fixer la durée des baux du 1er février 2007 au 31 janvier 2016 ; que le jugement déféré sera confirmé sur ce point ; qu'en l'absence de congé pour cette dernière date, les baux ont été reconduits pour une nouvelle période de neuf ans » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « Sur la résiliation des conventions à l'initiative du preneur : que les conventions, requalifiées de baux ruraux portant sur les parcelles des sites de Tourneuve et de Sainte-Anne, prennent effet au 1er février 2007 pour se terminer au 1er février 2016 ; que rien ne s'oppose a priori à une résiliation amiable entre les parties où à l'initiative du preneur que les dispositions d'ordre public du fermage sont destinées à protéger ; que par courrier recommandé du 7 février 2013, M. B... a indiqué : « Ainsi que je l'ai indiqué, j'ai besoin d'avoir une visibilité à bref délai sur le devenir des conventions. Aussi, sauf signature avant le 28 février 2013 d'avenants aux conventions susvisées dans les termes suivants : - prorogation des prêts à usage à titre gratuit et conventions de location de serres de SAINTE-ANNE et TOURNEUVE et ce, au-delà du 31 janvier 2014, pour une nouvelle durée de trois années, soit jusqu'au 31 janvier 2017 ; - loyer global des serres de SAINTE-ANNE et TOURNEUVE soit 300 000 € hors taxes annuels, et ce à effet du 1er février 2014, - durée de préavis portée de 6 mois à 12 mois, Je vous notifie par les présentes la résiliation des quatre conventions de prêt à usage et location de serres avec effet au 31 janvier 2014 » ; que par courrier recommandé du 25 mars 2014, la SAS X... répondait « c'est donc à votre demande expresse que cette convention a été résiliée, ce que nous avons accepté (
) Toutefois à votre demande un délai supplémentaire vous a été accordé jusqu'au 31/08/2014 date à laquelle la convention se terminera de plein droit » ; que Monsieur B... indique qu'en réalité, il ne voulait pas donner congé, mais seulement obliger à négocier les conditions financières de la poursuite des conventions ; que par un nouveau courrier du 29 octobre 2013, il est revenu sur sa demande de résiliation en mentionnant « J'ai bien noté que nous étions d'accord pour considérer que les quatre conventions de prêt à usage et de locations de serres de Sainte-Anne et de la Tourneuve ne prendront pas fin le 31 janvier 2014 mais se poursuivront jusqu'au 30 septembre 2014 (
) J'ai bien noté également que vous étiez disposés à proroger les locations au-delà du 30 septembre 2014 et que vous deviez me proposer des avenants en ce sens » ; qu'il en ressort que la volonté de Monsieur B... de donner congé des deux baux conclus à son profit n'est pas manifeste ; qu'il sera donc fait application des dispositions de l'article L 411-5 du code rural et de la pêche maritime qui fixent la durée des baux ruraux à 9 ans, nonobstant toute clause ou convention contraire ; que les baux conclus au profit de la SCEA Val d'Or courront donc jusqu'au 31 janvier 2016 » ;
1°) ALORS QUE la résiliation amiable d'un bail rural est toujours possible ; que par deux avenants conclus le 4 décembre 2013 entre la SCEA Val d'or et, d'une part, la SCEA les Serres Orvaltaises s'agissant des serres installées à Sainte-Anne, et, d'autre part, la SAS X... s'agissant de celles situées à La Tourneuve, les parties ont décidé que la résiliation des conventions de location de serres prendrait effet au 31 janvier 2014, une prorogation exceptionnelle jusqu'au 31 août 2014 étant néanmoins prévue pour permettre à la SCEA Val d'Or de se réorganiser en redéployant ses activités ; que par deux autres avenants conclus le même jour, la SCEA Val d'Or et, d'une part, les époux X... (s'agissant des parcelles ZB 0051, ZB 0052 et ZB 0053), d'autre part, la SCI X...-Y... (s'agissant des parcelles ZE 0015, ZE 0016, ZE0017 et ZE 0018), ont décidé que la résiliation des prêts à usage prendrait effet au 31 janvier 2014 avec une prorogation exceptionnelle jusqu'au 31 août 2014 ; qu'en constatant l'absence de volonté manifeste de la SCEA Val d'or de donner congé des baux conclus à son profit, la cour d'appel a dénaturé par omission les quatre avenants du 4 décembre 2013 en violation de l'article 1134 du code civil, désormais article 1103 du même code ;
2°) ALORS, A TITRE SUBSIDIAIRE, QUE la résiliation amiable d'un bail rural est toujours possible ; qu'en se bornant, pour constater l'absence de volonté manifeste de la SCEA Val d'Or de donner congé des baux conclus à son profit, à examiner les courriers de la SCEA Val d'Or des 7 février et 29 octobre 2013, sans rechercher si cette volonté ne résultait pas des quatre avenants que cette société avait régularisés le 4 décembre 2013 et aux termes desquels les parties ont décidé que la résiliation des conventions de location de serres et de prêt à usage prendrait effet au 31 janvier 2014, une prorogation exceptionnelle étant néanmoins prévue jusqu'au 31 août 2014, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 411-5 du code rural et de la pêche maritime.