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28/03/2018 | FRANCE | N°16-84872

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 28 mars 2018, 16-84872


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

-
M. Etienne X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 7e chambre, en date du 24 juin 2016, qui dans la procédure criminelle suivie contre lui du chef de vols aggravés, a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 7 février 2018 où étaient présents : M. Soulard, président, M. Y..., conseiller rapporteur, MM. Z..., A..., Mme B..., MM. Stephan, de Larosière de Champfeu, conseillers

de la chambre, M. Laurent, Mme Carbonaro, M. Beghin, conseillers référendaires ;

Avocat ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

-
M. Etienne X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 7e chambre, en date du 24 juin 2016, qui dans la procédure criminelle suivie contre lui du chef de vols aggravés, a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 7 février 2018 où étaient présents : M. Soulard, président, M. Y..., conseiller rapporteur, MM. Z..., A..., Mme B..., MM. Stephan, de Larosière de Champfeu, conseillers de la chambre, M. Laurent, Mme Carbonaro, M. Beghin, conseillers référendaires ;

Avocat général : M. C... ;

Greffier de chambre : Mme Hervé ;

Sur le rapport de M. le conseiller Y..., les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, de la société civile professionnelle MARC LÉVIS, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général C... ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure qu'après avoir déclaré, par arrêt définitif du 19 juin 2015, M. Etienne X... coupable de quatre vols à main armée commis entre le 23 mai et le 24 juillet 1989 au préjudice de la Banque Populaire de la Côte d'Azur, la cour d'assises des Alpes-Maritimes, statuant sur les intérêts civils, le 2 novembre 2015, a débouté la partie civile de ses prétentions ; que la Banque Populaire de la Côte d'Azur a interjeté appel de cette dernière décision ;

En cet état ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 32, 371, 380-5, 464, 591, 592 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que la chambre des appels correctionnels de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, saisie de l'appel d'un arrêt de cour d'assises sur intérêts civils, a statué hors la présence du ministère public ;

"alors que le ministère public est représenté auprès de chaque juridiction répressive ; qu'il en est ainsi même lorsque la juridiction répressive se prononce en matière criminelle uniquement sur l'action civile ; que l'arrêt civil qui intervient après une condamnation criminelle ne peut être rendu qu'après un débat contradictoire, impliquant que soit entendu le ministère public ; que les dispositions de l'article 464 du code de procédure pénale, qui ne rendent pas obligatoire la présence ministère public à l'audience correctionnelle de renvoi sur intérêts civils, ne concernent que le jugement des délits et ne sont pas applicables en cas d'appel d'un arrêt de cour d'assises sur intérêts civils ; qu'en faisant une application erronée de l'article 464 du code de procédure pénale et en statuant hors la présence du ministère public, la cour d'appel a violé les textes susvisés" ;

Attendu que M. X... ne saurait se faire un grief de ce que la chambre des appels correctionnels, compétente en application de l'article 380-5 du code de procédure pénale pour prononcer sur l'appel d'un arrêt de cour d'assises statuant sur intérêts civils, a procédé et prononcé hors la présence du ministère public, dès lors qu'en application des dispositions des articles 464 et 512 dudit code, la présence du ministère public n'est pas obligatoire devant cette juridiction lorsque les débats ne portent plus que sur les intérêts civils ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation du principe de l'autorité de la chose jugée au pénal sur le civil, du principe de la réparation intégrale du préjudice, des articles 1240 (ancien article 1382) du code civil, 2, 3, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a condamné M. Etienne X... à payer à la Banque populaire de la Côte d'Azur la somme de 225 622,75 euros à titre de dommages-intérêts ;

"aux motifs que le montant du préjudice subi par la Banque populaire de la Côte d'Azur résulte de l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt criminel du 19 juin 2015 qui a déclaré M. X... coupable, notamment, d'avoir dérobé 90 000 francs le 23 mai 1989 à Cagnes-sur-Mer, 240 000 francs le 29 mai 1989 à Nice, 430 000 francs le 20 juillet 1989 à Saint-Laurent du Var, et 240 000 francs le 24 juillet 1989 à Cagnes-sur-Mer, soit une somme totale d'un million de Francs, ou 152 449,02 euros en monnaie courante ; que les demandes de la Banque populaire de la Côte d'Azur sont de 965 917,74 francs ou 147 205,86 euros en monnaie courante, et sont donc fondées ; que la cour doit apprécier le préjudice au jour où elle statue, et que la demande d'actualisation en fonction de la dépréciation monétaire est recevable est fondée; que d'après une étude de l'Insee, compte tenu de l'érosion monétaire due à l'inflation, le pouvoir d'achat de la somme de 965 917,74 francs en 1989 est donc le même que celui de 225 622,75 euros actuellement ; que l'éventuelle indemnisation de la victime par son assureur ne dispense pas l'auteur de l'infraction de réparer le dommage qui découle des faits qu'il a commis; que la demande est donc fondée ;
"1°) alors que l'autorité qui s'attache à la chose jugée au pénal sur le civil est limitée aux constatations nécessaires permettant d'établir la culpabilité de l'accusé ; que si la responsabilité de l'accusé, reconnu coupable des faits reprochés, est acquise, l'évaluation du préjudice en résultant reste en discussion dans la limite des faits constatés qui constituent le soutien nécessaire de la condamnation pénale ; que le montant des sommes volées n'est pas nécessairement le montant du préjudice à indemniser ; qu'en s'interdisant d'apprécier elle-même le montant des indemnités revenant à la Banque populaire de la Côte d'Azur, la cour d'appel a méconnu son office et violé le principe susvisé ;

"2°) alors que le préjudice résultant d'une infraction doit être réparé sans perte, ni profit pour la victime ; que doivent être déduites de l'indemnité mise à la charge du responsable toutes les indemnités provisionnelles et définitives déjà reçues par la victime en réparation de son préjudice, quand bien même il n'aurait été exercé aucune action subrogatoire à ce titre ; que l'indemnisation de la victime par son assureur doit donc être prise en compte dans l'appréciation du montant des dommages-intérêts que l'accusé est condamné à lui payer ; qu'en décidant néanmoins le contraire, la cour d'appel a violé le principe de la réparation intégrale ;

"3°) alors que le principe de la réparation intégrale du préjudice suppose de rétablir aussi exactement que possible l'équilibre détruit par le dommage et de replacer la victime dans la situation où elle se serait trouvée si l'acte dommageable ne s'était pas produit, sans qu'il en résulte pour elle ni perte ni profit ; qu'en vertu du principe du nominalisme monétaire, il n'y a pas lieu à réévaluation d'une somme dont le montant est déterminé ; qu'en cas d'indemnisation d'un préjudice, il est fait exception à ce principe dans la seule hypothèse où celle-ci se fait sous la forme d'une rente ; qu'au contraire, lorsque l'indemnisation du préjudice est réalisée par l'allocation d'un capital, celui-ci ne donne pas lieu à revalorisation à raison de la dépréciation monétaire ; qu'en retenant l'érosion monétaire due à l'inflation, pour évaluer le préjudice subi et en lui appliquant un coefficient de dépréciation monétaire, la cour d'appel a violé le principe de la réparation intégrale" ;

Attendu qu'en évaluant, comme elle l'a fait, au jour où elle a statué, la réparation du préjudice résultant pour la Banque Populaire de la Côte d'Azur des infractions dont M. X... a été déclaré définitivement coupable, la cour d'appel n'a fait qu'user de son pouvoir d'apprécier souverainement, dans la limite des conclusions des parties, l'indemnité propre à réparer les dommages nés de ces infractions, tout en relevant exactement que l'indemnisation de la victime par son assureur ne limite pas l'obligation de réparation pesant sur l'auteur de l'infraction ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

FIXE à 2 500 euros la somme que M. Etienne X... devra payer à la Banque Populaire de la Côte d'Azur au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-huit mars deux mille dix-huit ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 16-84872
Date de la décision : 28/03/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 24 juin 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 28 mar. 2018, pourvoi n°16-84872, Bull. crim.
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle

Composition du Tribunal
Président : M. Soulard (président)
Avocat(s) : SCP Marc Lévis, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 10/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.84872
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