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15/02/2018 | FRANCE | N°17-10604

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 15 février 2018, 17-10604


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles 1315, devenu 1353, et 1376, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 30 septembre 2016), que la société Parisienne de parking, locataire de locaux à destination de garage et d'habitation personnelle appartenant à la société Saint Antoine de Béarn, a assigné Mme X..., prise en sa qualité d'administratrice provisoire de la société bailleresse, en répét

ition de l'indu ;

Attendu que, pour condamner la société Saint Antoine de Béarn à pay...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles 1315, devenu 1353, et 1376, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 30 septembre 2016), que la société Parisienne de parking, locataire de locaux à destination de garage et d'habitation personnelle appartenant à la société Saint Antoine de Béarn, a assigné Mme X..., prise en sa qualité d'administratrice provisoire de la société bailleresse, en répétition de l'indu ;

Attendu que, pour condamner la société Saint Antoine de Béarn à payer à la société Parisienne de parking une certaine somme au titre des charges indûment réglées, l'arrêt retient que, si le bail est net de charges pour la bailleresse, cela ne la dispense pas d'avoir à justifier les charges locatives réclamées à sa locataire, alors que la nature et le calcul des charges appelées ont été modifiées, sans avenant au bail, après la mise en copropriété de l'immeuble ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il incombait à la locataire, qui réclamait la répétition de l'indu, d'établir que les sommes versées ne correspondaient pas, en tout ou en partie, aux charges dues en vertu du bail, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 septembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société Parisienne de parking aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Parisienne de parking et la condamne à payer à la société Saint Antoine de Béarn représentée par Mme X..., ès qualités la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze février deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Capron, avocat aux Conseils, pour Mme X..., ès qualités.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné la société civile immobilière Saint Antoine de Béarn, représentée par son administrateur provisoire, Mme Michèle X..., à payer à la société Parisienne de parking la somme de 132 583, 51 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 29 mai 2009 et D'AVOIR dit que ces intérêts seraient capitalisés en application des dispositions de l'article 1154 du code civil ;

AUX MOTIFS QUE « l'expert désigné par la cour d'appel dans son arrêt du 9 mai 2012 avait essentiellement pour mission de fournir tous éléments utiles permettant : - de vérifier la nature et le montant des charges qui étaient remboursées par la locataire avant la mise en copropriété de l'immeuble et la nature et le montant des charges appelées auprès de la locataire après la mise en copropriété, - de dire s'il existe un solde en faveur de la société Parisienne de parking et dans l'affirmative en indiquer le montant. / Dans son rapport du 21 octobre 2014, Madame Z... rappelle : - que s'agissant du bail, il dispose " qu'en sus du loyer, la société preneuse remboursera à la société bailleresse la totalité des impôts, taxes et prestations de toute nature même foncière ou temporaires qui pourront grever les lieux loués de manière que le loyer cidessus stipulé soit absolument net pour la Société bailleresse. Au cas où un rôle spécial concernant les impositions des lieux loués ne serait pas établi, la société preneuse remboursera à forfait les 2/5 des impositions de l'immeuble dont dépendent les lieux loués. Ce remboursement s'effectuera, pour la période comprise entre le 1er juin et le 31 décembre 1963, en une seule fois le 31 décembre 1963, pour la période comprise entre le 1er janvier 1964 et le 31 décembre 1964 en deux échéances égales, la première tombant le 30 juin 1964, la 2ème le 31 décembre 1964 et ensuite par quart en même temps que chaque terme de loyer " ; - qu'avant la mise en copropriété de l'immeuble le 24 janvier 1983, la société Parisienne de parking lui a indiqué qu'aucune charge locative n'était appelée et que seules les taxes foncières étaient appelées en complément du loyer en principal et qu'à l'appui de ses déclarations, elle a versé les documents suivants, soit la quittance du 4ème trimestre 1965 sur laquelle ne figure que le montant du loyer en principal pour un montant de 20 000 francs, la quittance du 4ème trimestre 1982, échu au premier janvier 1983, sur laquelle figure exclusivement le montant du loyer en principal à hauteur de 80 000 francs et la quittance du 1er trimestre 1983, échu au 1er avril 1983, sur laquelle figure exclusivement le montant du loyer en principal à hauteur de 80 000 francs. À cet égard, l'expert précise que la cour appréciera si les trois quittances communiquées sont un élément suffisant pour établir qu'antérieurement à la mise en copropriété de l'immeuble, aucune charge locative n'avaient été appelées à la locataire ; l'expert elle-même ne se prononce pas sur ce point : - qu'à compter du 1er janvier 1983, seules les régularisations de charges locatives adressées à la société Parisienne du parking lui sont communiquées sur la période du 1er janvier 1996 au 30 juin 2012, les documents communiqués sur la période 1992-1995 étant incomplets et ceux sur la période du 1er janvier 1983 au 31 décembre 1991 inexistants. / L'expert conclut que sur la période du 1er janvier 1996 au 30 juin 2012, la locataire a payé au titre des charges locatives, hors impôt foncier et taxe d'enlèvement des ordures ménagères la somme de 132 583, 51 euros. / La cour relève que si l'expert ne se prononce pas sur le point de savoir s'il existe un solde en faveur de la société Parisienne de parking et dans l'affirmative sur l'indication de son montant et si à aucun moment elle ne relève une distorsion entre les sommes appelées, réglées et les sommes dues par la locataire de sorte que celles-ci devrait en être remboursées, elle relève toutefois que sur la période du 1er janvier 1996 au 30 juin 2012, outre l'impôt foncier et la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, les charges appelées correspondent aux charges locatives déterminées par les syndics successifs au regard de la législation applicable aux baux d'habitation. / Il doit être rappelé que la cour, dans son arrêt définitif du 9 mai 2012, a infirmé le jugement du 8 juillet 2010, souligné que le bail mettait certes à la charge de la locataire le remboursement à la bailleresse de la totalité des impôts, taxes et prestations de toute nature, ces dernières devant s'entendre non pas comme des impôts ou des taxes, mais désignant exactement toutes les charges liées à l'occupation des lieux, mais qu'ensuite, les charges afférentes aux lieux loués avaient nécessairement été modifiées dans leur nature et leur calcul, en passant du statut d'immeuble appartenant à un seul propriétaire au statut de la copropriété, avec une répartition des charges par millièmes, la cour notant dans son arrêt que si le mode de paiement des charges par le locataire avait été changé, passant du remboursement contractuellement prévu à un appel de provisions, ces modifications en cours de bail n'ont pas fait l'objet d'un avenant au bail mentionnant clairement le remboursement par la locataire des charges payées par le bailleur. / Il ne peut qu'être relevé que ni le rapport d'expertise, ni les éléments remis par les parties ne permettent au vu du bail de déterminer la liste des charges locatives dont le bailleur aurait été fondé à demander à sa locataire le remboursement en raison de son occupation des lieux, sur la période du 1er janvier 1996 au 30 juin 2012. / Il ne peut en effet être soutenu que si le bail de 1963 était net de charges pour la bailleresse, il dispenserait celle-ci d'avoir à justifier par la suite des charges locatives réclamées à sa locataire alors que la modification des charges afférentes aux lieux loués en raison de l'introduction du règlement de copropriété ne permet pas en l'absence de toute justification suffisante produite par la bailleresse de déterminer la part de charges devant être imposées à la locataire pour la période considérée. / La cour ayant en outre tranché définitivement dans son arrêt précité la non prescription en faveur de la locataire de son action en restitution du trop versé de charges depuis 1983, il sera dès lors, en l'absence de critères conventionnels permettant de déterminer clairement les charges locatives que le bailleur était fondé à réclamer à la locataire depuis l'adoption du règlement de copropriété, fait droit à la demande de la société Parisienne de parking tendant à la condamnation de la société Saint Antoine de Béarn représentée par son administrateur judiciaire, à lui verser la somme de 132 583, 51 euros à titre de remboursement des sommes trop perçues à ce titre et non justifiées. / Il y a lieu de condamner la société Saint Antoine de Béarn aux intérêts légaux sur ces sommes, depuis le 29 mai 2009 et à dire que ces intérêts porteront eux-mêmes intérêts » (cf. arrêt attaqué, p. 4 à 6) ;

ALORS QUE, de première part, la charge de la preuve du paiement indu incombe au demandeur en restitution ; qu'en énonçant, par conséquent, pour condamner la société civile immobilière Saint Antoine de Béarn, représentée par son administrateur provisoire, Mme Michèle X..., à payer à la société Parisienne de parking la somme de 132 583, 51 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 29 mai 2009, avec capitalisation de ces intérêts, qu'il ne pouvait qu'être relevé que ni le rapport d'expertise, ni les éléments remis par les parties ne permettaient au vu du bail de déterminer la liste des charges locatives dont le bailleur aurait été fondé à demander à sa locataire le remboursement en raison de son occupation des lieux, sur la période du 1er janvier 1996 au 30 juin 2012, qu'il ne pouvait en effet être soutenu que, si le bail de 1963 était net de charges pour la bailleresse, il dispenserait celle-ci d'avoir à justifier par la suite des charges locatives réclamées à sa locataire, alors que la modification des charges afférentes aux lieux loués en raison de l'introduction du règlement de copropriété ne permettait pas en l'absence de toute justification suffisante produite par la bailleresse de déterminer la part de charges devant être imposées à la locataire pour la période considérée et que, dès lors, en l'absence de critères conventionnels permettant de déterminer clairement les charges locatives que le bailleur était fondé à réclamer à la locataire depuis l'adoption du règlement de copropriété, il y avait lieu de faire droit à la demande de la société Parisienne de parking tendant à la condamnation de la société Saint Antoine de Béarn représentée par son administrateur judiciaire, à lui verser la somme de 132 583, 51 euros à titre de remboursement des sommes trop perçues à ce titre et non justifiées, quand, en se déterminant de la sorte, elle retenait qu'il incombait à Mme Michèle X..., prise en sa qualité d'administrateur provisoire de la société civile immobilière Saint Antoine de Béarn, d'apporter la preuve de la part des charges locatives que la société civile immobilière Saint Antoine de Béarn était fondée à réclamer, pendant la période considérée, à la société Parisienne de parking et quand il appartenait, tout au contraire, à la société Parisienne de parking, demanderesse en restitution, d'apporter la preuve qu'elle n'avait pas l'obligation de payer, pendant la période considérée, à la société civile immobilière Saint Antoine de Béarn, tout ou partie des charges locatives qu'elle avait versées à cette dernière pendant cette même période, la cour d'appel a violé les dispositions des articles 1315 et 1376 du code civil, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;

ALORS QUE, de seconde part et en tout état de cause, le juge ne peut refuser de statuer en se fondant sur l'insuffisance des preuves qui lui sont fournies par les parties ; qu'en énonçant, par conséquent, pour condamner la société civile immobilière Saint Antoine de Béarn, représentée par son administrateur provisoire, Mme Michèle X..., à payer à la société Parisienne de parking la somme de 132 583, 51 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 29 mai 2009, avec capitalisation de ces intérêts, qu'il ne pouvait qu'être relevé que ni le rapport d'expertise, ni les éléments remis par les parties ne permettaient au vu du bail de déterminer la liste des charges locatives dont le bailleur aurait été fondé à demander à sa locataire le remboursement en raison de son occupation des lieux, sur la période du 1er janvier 1996 au 30 juin 2012, qu'il ne pouvait en effet être soutenu que, si le bail de 1963 était net de charges pour la bailleresse, il dispenserait celle-ci d'avoir à justifier par la suite des charges locatives réclamées à sa locataire, alors que la modification des charges afférentes aux lieux loués en raison de l'introduction du règlement de copropriété ne permettait pas en l'absence de toute justification suffisante produite par la bailleresse de déterminer la part de charges devant être imposées à la locataire pour la période considérée et que, dès lors, en l'absence de critères conventionnels permettant de déterminer clairement les charges locatives que le bailleur était fondé à réclamer à la locataire depuis l'adoption du règlement de copropriété, il y avait lieu de faire droit à la demande de la société Parisienne de parking tendant à la condamnation de la société Saint Antoine de Béarn représentée par son administrateur judiciaire, à lui verser la somme de 132 583, 51 euros à titre de remboursement des sommes trop perçues à ce titre et non justifiées, quand, en se déterminant de la sorte, elle se fondait, pour retenir que la société Parisienne de parking était en droit d'obtenir le remboursement de toutes les sommes qu'elle avait versées au titre des charges locatives à la société civile immobilière Saint Antoine de Béarn pendant la période considérée hors impôt foncier et taxe d'enlèvement des ordures ménagères, non pas sur le fait qu'aux termes du contrat de bail liant les parties, la société Parisienne de parking n'avait pas l'obligation, hors impôt foncier et taxe d'enlèvement des ordures ménagères, de payer une quelconque somme à la société civile immobilière Saint Antoine de Béarn au titre des charges locatives, mais sur l'insuffisance des preuves qui lui étaient fournies par les parties au sujet de la part des charges locatives que la société civile immobilière Saint Antoine de Béarn était fondée à réclamer, pendant la période considérée, à la société Parisienne de parking, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 4 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 17-10604
Date de la décision : 15/02/2018
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 30 septembre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 15 fév. 2018, pourvoi n°17-10604


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Marc Lévis, SCP Yves et Blaise Capron

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.10604
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