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08/02/2018 | FRANCE | N°17-10039

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 08 février 2018, 17-10039


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 3 novembre 2016), que la société civile immobilière Les Massuguettes (la SCI) a confié l'exécution de travaux à la société SRM étanchéité ; que des travaux supplémentaires ont été réalisés ; que, soutenant qu'il résultait du décompte général définitif, adressé par lettre du 4 mai 2012 et n

on contesté dans le délai de trente jours prévu par la norme AFNOR P.03.001, applicable, un tro...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 3 novembre 2016), que la société civile immobilière Les Massuguettes (la SCI) a confié l'exécution de travaux à la société SRM étanchéité ; que des travaux supplémentaires ont été réalisés ; que, soutenant qu'il résultait du décompte général définitif, adressé par lettre du 4 mai 2012 et non contesté dans le délai de trente jours prévu par la norme AFNOR P.03.001, applicable, un trop-perçu que la société SRM étanchéité avait refusé de rembourser, la SCI l'a assignée en paiement de cette somme ; que la société SRM étanchéité a sollicité reconventionnellement le paiement du solde des travaux ;

Attendu que, pour accueillir cette demande et rejeter celle en remboursement du trop-perçu, l'arrêt retient qu'alors qu'elle sollicite l'application de la norme AFNOR P 03.001, la SCI ne démontre pas qu'une réception est intervenue, faisant seule commencer à courir les délais imposés à chacune des parties, qu'elle ne justifie pas de la date de notification, par le maître d'oeuvre, de son mémoire définitif et que le document dont elle soutient qu'il s'agit du décompte général définitif établi par le maître d'oeuvre et signifié à la société SRM étanchéité le 30 mai 2012, ne porte aucun entête, ni aucune signature permettant de vérifier qu'il émane du maître d'oeuvre et revêt un caractère probant et que, dès lors, il ne peut être retenu que ce document constitue le décompte définitif s'imposant à la société SRM étanchéité ;

Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si l'entrepreneur avait contesté le décompte dans le délai de trente jours qui lui était imparti, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 novembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne la société SRM étanchéité aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société SRM étanchéité à payer à la SCI Les Massuguettes la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit février deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Haas, avocat aux Conseils, pour la société Les Massuguettes

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR fixé le montant de la créance de la société SRM Etanchéité à la somme de 19 993,85 euros TTC, D'AVOIR débouté la SCI Les Massuguettes de sa demande en remboursement du trop-perçu allégué et D'AVOIR condamné la SCI Les Massuguettes à payer à la société SRM Etanchéité la somme de 19 993,85 euros au titre de ses prestations ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE, un marché de travaux privés "sur la base de la norme AFNOR P.03.001 Edition avril 1989" a été signé, le 4 mars 2010, entre la SCI "Les Massuguettes" et la SARL SRM Etanchéité ; qu'aux termes de ce document, dans le délai de 60 jours à dater de la réception, l'entrepreneur remet au maître d'oeuvre le mémoire définitif des sommes qu'il estime lui être dues en application du marché ; que le maître d'oeuvre examine le mémoire définitif et établit le décompte définitif des sommes dues, qu'il remet au maître de l'ouvrage ; que le maître de l'ouvrage notifie à l'entrepreneur ce décompte définitif dans les 45 jours à dater de la réception du mémoire définitif par le maître d'oeuvre ; que l'entrepreneur dispose d'un délai de 30 jours à compter de la notification pour présenter, par écrit, ses observations ; que passé ce délai, il est réputé avoir accepté le décompte définitif ; qu'en l'espèce, alors qu'elle sollicite l'application de la norme AFNOR P.03.001, la SCI Les Massuguettes ne démontre pas qu'une réception est intervenue, faisant seule commencer à courir les délais imposés à chacune des parties ; que, de même, elle ne justifie pas de la date de notification, par le maître d'oeuvre, de son mémoire définitif ; qu'enfin, le document dont la SCI Les Massuguettes soutient qu'il s'agit du « DGD établi par le maître d'oeuvre » et signifié à la SARL SRM Etanchéité le 30 mai 2012, ne porte aucun en-tête, ni aucune signature permettant de vérifier qu'il émane du maître d'oeuvre et revêt un caractère probant ; que, dès lors, il ne peut être retenu que ce document constitue le décompte définitif s'imposant à la SARL SRM Etanchéité et notifié selon la norme AFNOR P.03.001, dont il n'est pas justifié que les prescriptions aient été intégralement respectées ; qu'en l'état de ces éléments, il y a lieu de confirmer la décision du premier juge en ce qu'il a retenu, aux fins d'établir le compte définitif des parties : le montant du devis accepté: 181 559,37 euros TTC auquel s'ajoute 14 529 euros au titre de factures non contestées par la SCI Les Massuguettes sur lequel elle a réglé une somme de 176 094,52 euros, soit un solde dû de 19 993,85 euros TTC au profit de la SARL SRM Etanchéité ;

ET AUX MOTIFS REPUTES ADOPTES QUE, pour quantifier les obligations pécuniaires des parties, il convient de se reporter au devis E.2010.6083 à hauteur de 151 805,50 euros HT, soit 181 559,37 euros TTC validé par l'ordre de service du 4 mars 2010, signé par les parties et par M. D..., architecte, pour un montant correspondant ; qu'à ce montant, il convient d'ajouter les prestations à hauteur de 3 480 euros HT, soit 3 803,28 euros TTC, et de 9 440 euros HT, soit 10 725,72 euros TTC, résultant des factures E.2010.32 et E.2011.81, que la SCI Les Massuguettes admet comme s'ajoutant au décompte initial du marché ; que les sommes réclamées par la SCI Les Massuguettes au titre de son décompte général définitif ne sont pas démontrées dès lors qu'elles résultent d'un document à en-tête SRME non authentifiable et de mentions manuscrites ajoutées sur les devis de la société SRME dont la valeur probante est nulle ; qu'il convient donc de fixer le montant global des prestations de la société SRME à la charge de la SCI Les Massuguettes à la somme de 164.425,50 euros HT (151 805,50 + 3 180 + 9 440), soit 196 088,37 euros TTC (181 559,37 + 3 803,28 + 10 725,72) ; qu'il est établi par les relevés bancaires produits par la société SRME que la SCI Les Massuguettes a déjà payé la somme globale de 141 579,99 euros HT, soit 176 094,52 euros TTC ; qu'il en résulte que la SCI Les Massuguettes reste redevable de la somme de 19 993,85 euros TTC (196 088,37 - 176 094,52) ;

ALORS, 1°), QUE, selon l'article 19.6.3 de la norme AFNOR P.03.001 applicable au marché de travaux liant la SCI Les Massuguettes à la société SRM Etanchéité, l'entrepreneur dispose de trente jours à compter de la notification du décompte définitif pour présenter, par écrit, ses observations éventuelles au maître d'oeuvre et pour en aviser simultanément le maître de l'ouvrage et, passé ce délai, il est réputé avoir accepté le décompte définitif ; que par un acte d'huissier de justice du 30 mai 2012, la SCI Les Massuguettes a fait signifier à la société SRM Etanchéité un document, présenté comme un décompte définitif établi par le maître d'oeuvre et faisant apparaître un trop-perçu par l'entrepreneur dont elle a réclamé le paiement ; qu'en considérant, par des motifs inopérants, que ce document ne pouvait pas être regardé comme un véritable décompte définitif dès lors que les prescriptions prévues par la norme AFNOR n'avaient pas été intégralement respectées, sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'entrepreneur avait contesté ce décompte dans le délai de trente jours qui lui était imparti, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

ALORS, 2°), QUE, dans ses conclusions d'appel (p. 7), la SCI Les Massuguettes faisait valoir, à titre subsidiaire, que l'application de pénalités de retard était justifiée par le retard avec lequel l'entrepreneur avait exécuté ses prestations ; qu'en laissant sans réponse ce moyen, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS, 3°), QUE les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'à l'appui de sa demande formulée au titre des pénalités de retard, la SCI Les Massuguettes produisait divers courriels et procès-verbaux de réunions de chantiers ainsi qu'une lettre adressée par l'architecte à l'entrepreneur ; qu'en considérant, par motifs réputés adoptés, que les sommes réclamées par la SCI Les Massuguettes n'étaient pas démontrées dès lors qu'elle résultaient d'un document à entête de la société SMRE non authentifiable et de mentions manuscrites ajoutées sur les devis de l'entrepreneur et dépourvues de force probante, la cour d'appel, qui n'a pas examiné les éléments de preuve que le maître de l'ouvrage versait aux débats pour établir son droit au paiement de pénalités de retard, n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS, 4°), QUE, dans ses conclusions d'appel (p. 7), la SCI Les Massuguettes faisait valoir que l'entrepreneur ne justifiait pas de son droit à obtenir le paiement de factures « qui ne traduisent pas la réalité de travaux supplémentaires et, a fortiori, l'acceptation de prestations supplémentaires, par rapport au marché à forfait, qui doit être préalable et expresse » ; que le maître d'ouvrage contestait donc tant la réalité que l'acceptation de travaux supplémentaires ; qu'en considérant, pour condamner le maître de l'ouvrage au paiement des factures correspondantes, que celles-ci n'étaient pas contestées, la cour d'appel, qui a méconnu les termes du litige, a violé l'article 4 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 17-10039
Date de la décision : 08/02/2018
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

CONTRAT D'ENTREPRISE - Coût des travaux - Montant - Décompte définitif - Norme AFNOR P 03-001 - Application - Effets - Contestation dans le délai de trente jours - Recherche nécessaire - Défaut - Portée

Ne donne pas de base légale à sa décision la cour d'appel qui, pour écarter l'application de la norme AFNOR P 03-001, retient que le maître de l'ouvrage ne démontre pas qu'une réception est intervenue, faisant seule commencer à courir les délais imposés à chacune des parties, et qu'il ne peut être retenu que le document établi par le maître d'oeuvre et signifié à l'entrepreneur constitue le décompte définitif s'imposant à ce dernier, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si l'entrepreneur avait contesté le décompte dans le délai de trente jours qui lui était imparti


Références :

article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016

norme AFNOR P 03-001

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 03 novembre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 08 fév. 2018, pourvoi n°17-10039, Bull. civ.Bull. 2018, III, n° 17
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Bull. 2018, III, n° 17

Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin
Avocat(s) : Me Haas

Origine de la décision
Date de l'import : 20/08/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.10039
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