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01/02/2018 | FRANCE | N°16-27322

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 01 février 2018, 16-27322


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon les arrêts attaqués, que l'Association française contre les myopathies (l'AFM) a été condamnée à payer diverses sommes à la société Atexo par un jugement d'un tribunal de grande instance contre lequel elle a interjeté appel le 6 mai 2014 ; qu'elle a fait signifier ses conclusions le 26 juin 2014 à la société Atexo qui a constitué avocat le 9 juillet 2014 et conclu au fond le 21 mars 2016 ; que l'AFM ayant saisi le conseiller de la mise en état d'un incident tendant à voir déclare

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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon les arrêts attaqués, que l'Association française contre les myopathies (l'AFM) a été condamnée à payer diverses sommes à la société Atexo par un jugement d'un tribunal de grande instance contre lequel elle a interjeté appel le 6 mai 2014 ; qu'elle a fait signifier ses conclusions le 26 juin 2014 à la société Atexo qui a constitué avocat le 9 juillet 2014 et conclu au fond le 21 mars 2016 ; que l'AFM ayant saisi le conseiller de la mise en état d'un incident tendant à voir déclarer ces conclusions comme tardives au regard de l'article 909 du code de procédure civile, la société Atexo a conclu en réponse à l'incident le 8 avril 2016 soulevant la nullité de la signification des conclusions de l'appelante ;

Sur le premier moyen, dirigé contre l'arrêt du 29 juin 2016 :

Vu les articles 74 et 112 du code de procédure civile ;

Attendu que, pour dire que la signification des conclusions de l'AFM était nulle et déclarer recevables les conclusions de la société Atexo du 21 mars 2016, l'arrêt constate que la société Atexo, à qui la déclaration d'appel et les conclusions de l'appelant ont été signifiées respectivement le 6 mai 2014 et le 26 juin 2014, a conclu pour la première fois au fond le 21 mars 2016, qu'elle a, à la suite de l'incident porté devant le conseiller de la mise en état par l'AFM, répliqué par des conclusions du 8 avril 2016 dans lesquelles elle a fait valoir la nullité de la signification des conclusions du 26 juin 2014 et relève que, selon les articles 654, 655 et 693 du code de procédure civile, un acte ne peut être délivré à peine de nullité à domicile que si la signification à personne s'avère impossible, cette impossibilité devant être constatée dans l'acte lui-même et qu'en l'espèce, force est de constater que l'acte du 26 juin 2014 ne mentionne aucune des diligences accomplies pour parvenir à la signification à personne et aucune mention relative à l'impossibilité de procéder à une telle signification, que par conséquent, l'acte irrégulier n'a pas fait courir le délai de l'article 909 du code de procédure civile et les conclusions de l'intimée du 21 mars 2016 sont recevables ;

Qu'en accueillant l'exception de nullité de la signification des conclusions de l'appelant alors qu'elle avait constaté que l'intimée avait préalablement fait valoir sa défense au fond, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Sur le quatrième moyen, dirigé contre l'arrêt du 21 septembre 2016 :

Vu l'article 625 du code de procédure civile ;

Attendu que l'arrêt attaqué est la suite, l'application ou l'exécution de l'arrêt du 29 juin 2016 et s‘y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; que la cassation de ce dernier arrêt entraîne par voie de conséquence l'annulation de l'arrêt attaqué ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deuxième et troisième moyens :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a ordonné la jonction des requêtes et déclaré irrecevable la demande de nullité de la déclaration d'appel présentée par la société Atexo, l'arrêt rendu le 29 juin 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sauf sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

CONSTATE l'annulation par voie de conséquence de l'arrêt du 21 septembre 2016 rendu par la cour d'appel de Paris  ;

Condamne les sociétés Atexo SAS et Atexo SA aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne in solidum à payer à l'Association française contre les myopathies la somme globale de 3 000 euros et rejette l'autre demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé et de l'arrêt annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier février deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour l'Association française contre les myopathies (AFM)

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué du 29 juin 2016 encourt la censure ;

EN CE QU'il a décidé que la signification des conclusions de l'AFM du 24 juin 2014 [26 juin 2014] à la société ATEXO était nulle, puis a déclaré recevables les conclusions de la société ATEXO du 21 mars 2016 ;

AUX MOTIFS QUE « l'acte de signification des conclusions de l'appelant en date du 26 juin 2014 a été délivré à domicile ; qu'il y est précisé :
« Signification de l'acte à tiers présent au domicile »
« le 26 juin 2014,
« Pour la S.A.S. Atexo, [...]                           , « L'acte a été délivré par clerc assermenté à Monsieur X... Clément, consultant ainsi déclaré présent au domicile qui a accepté de recevoir l'enveloppe contenant copie de l'acte, enveloppe fermée ne comportant d'autres indications que d'un côté le nom et l'adresse du destinataire de l'acte et de l'autre mon sceau apposé sur la fermeture du plus.
« Un avis de passage daté avertissant le signifié de la remise de la copie en mentionnant la nature de l'acte, le nom du requérant ainsi que les indications relatives à la personne à laquelle la copie a été remise a été laissé ce jour au domicile.
La lettre prévue par l'article 658 du CPC comportant les mêmes mentions que l'avis de passage et copie de l'acte de signification a été adressée dans le délai prévu par la loi.

Les mentions relatives à la signification sont visées par l'huissier de justice » ;
que selon les articles 65, 655 et 693 du Code de procédure civile, un acte ne peut être délivré à peine de nullité à domicile que si la signification à personne s'avère impossible, cette impossibilité devant être constaté dans l'acte lui-même ; qu'en l'espèce, force est de constater que l'acte du 26 juin 2014 ne mentionne aucune des diligences accomplies pour parvenir à la signification à personne et aucune mention relative à l'impossibilité de procédure à une telle signification ; que par conséquent l'acte irrégularité n'a pas fait courir le délai de l'article 909 du Code de procédure civile ; que les conclusions de l'intimée du 21 mars 2016 sont recevables » (arrêt, p. 4-5) ;

ALORS QUE, premièrement, à peine d'irrecevabilité, la partie qui entend soulever une exception de nullité tirée d'une irrégularité de forme affectant un acte de procédure doit le faire avant de formuler une fin de non-recevoir ou un moyen au fond ; qu'ayant conclu sur le fond le 21 mars 2016, la société ATEXO était irrecevable à se prévaloir ultérieurement de l'irrégularité de l'acte de signification du 26 juin 2014 ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé les articles 74 et 112 du code de procédure civile ;

ALORS QUE, deuxièmement, à supposer que la société ATEXO ait été autorisée, bien qu'ayant conclu sur le fond, à se prévaloir de la nullité de la signification du 26 juin 2014 pour défendre à l'irrecevabilité de ses conclusions signifiées le 21 mars 2016 au-delà du délai de deux mois prévu par l'article 909 du code de procédure civile, ce moyen de défense ne lui permettait pas d'exciper de la nullité de la signification du 26 juin 2014 pour faire juger que les conclusions de l'appelant n'avaient pas été signifiées dans les délais requis ; qu'à cet égard également, l'arrêt doit être censuré pour violation des articles 74 et 112 du code de procédure civile ;

ET ALORS QUE, troisièmement, l'irrecevabilité des exceptions de procédure soulevées tardivement est d'ordre public ; qu'à ce titre, dès lors que les juges constatent que les parties ont conclu sur le fond, ils ont l'obligation de vérifier si l'intimé qui se prévaut de la nullité de la signification des conclusions d'appelant à raison d'une irrégularité de forme n'avait pas été mis en mesure de soulever plus tôt cette exception ; qu'en s'abstenant en l'espèce de toute recherche en ce sens, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle ; qu'à cet égard, la cour d'appel a à tout le moins privé sa décision de base légale au regard des articles 74 et 112 du code de procédure civile.

DEUXIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué du 29 juin 2016 encourt la censure ;

EN CE QU'il a décidé que la signification des conclusions de l'AFM du 24 juin 2014 [en fait 26 juin 2014] à la société ATEXO est nulle, puis déclaré recevables les conclusions de la société ATEXO du 21 mars2016 ;

AUX MOTIFS QUE « l'acte de signification des conclusions de l'appelant en date du 26 juin 2014 a été délivré à domicile ; qu'il y est précisé :
« Signification de l'acte à tiers présent au domicile »
« le 26 juin 2014,
« Pour la S.A.S. Atexo, [...]                         ,
« L'acte a été délivré par clerc assermenté à Monsieur X... Clément, consultant ainsi déclaré présent au domicile qui a accepté de recevoir l'enveloppe contenant copie de l'acte, enveloppe fermée ne comportant d'autres indications que d'un côté le nom et l'adresse du destinataire de l'acte et de l'autre mon sceau apposé sur la fermeture du plus.
« Un avis de passage daté avertissant le signifié de la remise de la copie en mentionnant la nature de l'acte, le nom du requérant ainsi que les indications relatives à la personne à laquelle la copie a été remise a été laissé ce jour au domicile.
La lettre prévue par l'article 658 du CPC comportant les mêmes mentions que l'avis de passage et copie de l'acte de signification a été adressée dans le délai prévu par la loi.

Les mentions relatives à la signification sont visées par l'huissier de justice » ;
que selon les articles 65, 655 et 693 du Code de procédure civile, un acte ne peut être délivré à peine de nullité à domicile que si la signification à personne s'avère impossible, cette impossibilité devant être constaté dans l'acte lui-même ; qu'en l'espèce, force est de constater que l'acte du 26 juin 2014 ne mentionne aucune des diligences accomplies pour parvenir à la signification à personne et aucune mention relative à l'impossibilité de procédure à une telle signification ; que par conséquent l'acte irrégularité n'a pas fait courir le délai de l'article 909 du Code de procédure civile ; que les conclusions de l'intimée du 21 mars 2016 sont recevables » (arrêt, p. 4-5) ;

ALORS QUE, l'irrégularité éventuelle d'un acte de signification liée à l'absence de mention des diligences accomplies par l'huissier de justice pour délivrer l'acte à la personne du représentant légal d'une personne morale constitue une irrégularité de forme ; qu'à ce titre, elle n'emporte nullité que pour autant que la partie qui se prévaut de la nullité, qui supporte la charge de la preuve, établit l'existence du grief que lui a causé l'irrégularité qu'elle invoque ; que le juge ne peut lui-même prononcer l'annulation de l'acte que s'il constate que l'existence du grief est effectivement établi ; qu'en énonçant en l'espèce que la nullité de la signification du 26 juin 2014 découlait de ce que l'huissier de justice n'avait pas consigné les diligences accomplies pour relater l'impossibilité de remettre l'acte au représentant légal de la société ATEXO, sans constater l'existence du grief que cette irrégularité aurait causé à la société ATEXO, les juges du fond ont violé les articles 114, 655 et 656 du code de procédure civile.

TROISIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

L'arrêt attaqué du 29 juin 2016 encourt la censure ;

EN CE QU'il a décidé que la signification des conclusions de l'AFM du 24 juin 2014 [26 juin 2014] à la société ATEXO est nulle, puis déclaré recevables les conclusions de la société ATEXO du 21 mars 2016 ;

AUX MOTIFS QUE « l'acte de signification des conclusions de l'appelant en date du 26 juin 2014 a été délivré à domicile ; qu'il y est précisé :
« Signification de l'acte à tiers présent au domicile »
« le 26 juin 2014,
« Pour la S.A.S. Atexo, [...]                           ,
« L'acte a été délivré par clerc assermenté à Monsieur X... Clément, consultant ainsi déclaré présent au domicile qui a accepté de recevoir l'enveloppe contenant copie de l'acte, enveloppe fermée ne comportant d'autres indications que d'un côté le nom et l'adresse du destinataire de l'acte et de l'autre mon sceau apposé sur la fermeture du plus.
« Un avis de passage daté avertissant le signifié de la remise de la copie en mentionnant la nature de l'acte, le nom du requérant ainsi que les indications relatives à la personne à laquelle la copie a été remise a été laissé ce jour au domicile.
La lettre prévue par l'article 658 du CPC comportant les mêmes mentions que l'avis de passage et copie de l'acte de signification a été adressée dans le délai prévu par la loi.

Les mentions relatives à la signification sont visées par l'huissier de justice » ;
que selon les articles 65, 655 et 693 du Code de procédure civile, un acte ne peut être délivré à peine de nullité à domicile que si la signification à personne s'avère impossible, cette impossibilité devant être constaté dans l'acte lui-même ; qu'en l'espèce, force est de constater que l'acte du 26 juin 2014 ne mentionne aucune des diligences accomplies pour parvenir à la signification à personne et aucune mention relative à l'impossibilité de procédure à une telle signification ; que par conséquent l'acte irrégularité n'a pas fait courir le délai de l'article 909 du Code de procédure civile ; que les conclusions de l'intimée du 21 mars 2016 sont recevables » (arrêt, p. 4-5) ;

ALORS QUE la signification des conclusions d'appelant, même affectée d'un vice de forme faisant grief à l'intimé, interrompt le délai de l'article 911 du code de procédure civile ; qu'en décidant en l'espèce que la nullité entachant la signification faite le 26 juin 2014 des premières conclusions d'appelant n'avait pas permis à l'AFM d'interrompre le délai qui lui était imparti pour signifier ses conclusions à la société ATEXO, les juges du fond ont violé les articles 908 et 911 du code de procédure civile.

QUATRIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué du 21 septembre 2016 encourt la censure ;

EN CE QU'il a constaté la caducité de l'appel interjeté par l'AFM ;

AUX MOTIFS QUE « l'article 908 du Code de procédure civile dispose qu'« à peine de caducité de la déclaration d'appel, relevée d'office, l'appelant dispose d'un délai de trois mois à compter de la déclaration d'appel pour conclure » ; qu'il résulte des constatations et motifs développés dans l'arrêt du 29 juin 2016, auquel il convient de se reporter, que les conclusion de l'AFM du 26 juin 2014, faute de signification régulière à l'intimée, sont réputées ne pas avoir été signifiées, de sorte que les conclusions au fond de l'appelant n'ont pas été notifiées dans le délai imparti par la loi à l'intimée ; que le délai de trois mois édictée par l'article 908 précité est un délai préfix, dont l'expiration fait encourir la caducité de la déclaration d'appel, sans que le juge dispose à cet égard d'un pourvoi de modération ; que l'article 2241 du Code civil, qui dispose que « la demande en justice (...) interrompt le délai de prescription (...). Il en est de même lorsque l'acte de saisine de la juridiction est annulé, par l'effet d'un vice de procédure », applicable à la prescription de l'action, n'est pas invocable en l'espèce » ;

ALORS QUE, en application de l'article 625 du code de procédure civile, la cassation à intervenir de l'arrêt du 29 juin 2016 ne peut manquer d'entraîner l'annulation par voie de conséquence de l'arrêt du 21 septembre 2016 dès lors que la caducité de l'appel prononcée par cette seconde décision est fondée sur la nullité de la signification constatée par la précédente décision du 29 juin 2016.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 16-27322
Date de la décision : 01/02/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

PROCEDURE CIVILE - Moyens de défense - Exceptions de procédure - Recevabilité - Conditions - Invocation avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir - Défaut - Cas - Exception de nullité prise de l'irrégularité de la signification de conclusions

En application des articles 74 et 112 du code de procédure civile doit être censuré l'arrêt qui accueille l'exception de nullité de signification des écritures de l'appelant soulevée, après le dépôt des conclusions au fond de l'intimé, en réponse à un incident formé par l'appelant pour voir déclarer ces conclusions irrecevables comme tardives


Références :

articles 74 et 112 du code de procédure civile

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 21 septembre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 01 fév. 2018, pourvoi n°16-27322, Bull. civ.Bull. 2018, II, n° 21
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Bull. 2018, II, n° 21

Composition du Tribunal
Président : Mme Flise
Avocat(s) : SCP Foussard et Froger, SCP Caston

Origine de la décision
Date de l'import : 20/08/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.27322
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