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18/01/2018 | FRANCE | N°16-28781

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 18 janvier 2018, 16-28781


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses trois premières branches, tel que reproduit en annexe :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 16 juin 2016), qu'à la suite d'une collision entre le cyclomoteur appartenant à M. Y..., assuré auprès de la société Generali Belgium, sur lequel avait pris place un passager, et le véhicule automobile conduit par Mme Z..., assuré auprès de la société Covea Fleet aux droits de laquelle se trouve la société Mutuelles du Mans assurances (la société MMA),

ce passager est décédé ; qu'ayant réglé aux ayants droit de la victime les ind...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses trois premières branches, tel que reproduit en annexe :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 16 juin 2016), qu'à la suite d'une collision entre le cyclomoteur appartenant à M. Y..., assuré auprès de la société Generali Belgium, sur lequel avait pris place un passager, et le véhicule automobile conduit par Mme Z..., assuré auprès de la société Covea Fleet aux droits de laquelle se trouve la société Mutuelles du Mans assurances (la société MMA), ce passager est décédé ; qu'ayant réglé aux ayants droit de la victime les indemnisations au paiement desquelles le conducteur du cyclomoteur avait été condamné, l'assureur de M. Y... a assigné avec son assuré la société MMA et Mme Z... pour faire déclarer cette dernière entièrement responsable de l'accident et obtenir leur condamnation à les garantir du paiement des sommes versées ;

Attendu que la société MMA fait grief à l'arrêt de dire qu'elle devra relever et garantir avec Mme Z... à hauteur d'un tiers M. Y... et son assureur du paiement des condamnations prononcées, de les condamner in solidum au paiement de diverses sommes et de les débouter de leurs propres demandes ;

Mais attendu qu'ayant relevé que l'automobile de Mme Z... était sortie d'un terrain, sans être prioritaire, pour s'engager sur un boulevard, qu'elle avait ainsi contraint à s'arrêter un véhicule venant sur sa gauche précédant le cyclomoteur de M. Y... et que c'était au moment où elle avait effectué un virage à gauche au milieu de la chaussée pour rejoindre l'autre voie qu'elle avait été percutée par ce cyclomoteur, la cour d'appel, procédant aux recherches prétendument omises, a pu, par décision motivée, retenir que Mme Z... avait commis une faute en pénétrant sur le boulevard sans s'assurer qu'elle pouvait, conformément à l'article R. 415-9 du code de la route, le faire sans danger, justifiant ainsi légalement sa décision ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur la quatrième branche du moyen unique annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Mutuelles du Mans assurances aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Generali Belgium la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit janvier deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils, pour la société Mutuelles du Mans assurances

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR dit que Monsieur Y... et la société GENERALI BELGIUM devaient être relevés et garantis à hauteur d'un tiers par Madame Z... et la société COVERA FLEET des condamnations prononcées à leur encontre au profit des consorts E... au titre de l'accident du [...]           au cours duquel Monsieur E... est décédé, D'AVOIR condamné in solidum Madame Z...  et la société COVEA FLEET à payer à la société GENERALI BELGIUM la somme de 27.866,66 € au titre des sommes versées aux ayant-droits de Monsieur E... , et D'AVOIR débouté Madame Z... et la société COVEA FLEET de leur demande de dommages-intérêts pour procédure abusive, et de leur demande au titre de leurs propres frais irrépétibles exposés, les condamnant au surplus aux entiers dépens de première instance et d'appel

AUX MOTIFS QU'« il ressort du procès-verbal de police que Madame Z... qui circulait sur le boulevard [...]             et qui avait dépassé l'endroit où elle voulait se rendre, s'est engagée sur sa droite sur un terrain de la SNCF pour faire demi-tour et en est ressortie en s'avançant sur le boulevard, qu'elle a ainsi contraint une voiture à s'arrêter pour la laisser passer et qu'au moment où elle effectuait son virage à gauche elle a été heurtée par la motocyclette pilotée par Monsieur C... ; or, en sortant du terrain de la SNCF, Madame Z... n'était pas prioritaire et devait, conformément à l'article R. 415-9 du code de la route, ne s'engager sur le boulevard qu'après s'être assurée qu'elle pouvait le faire sans danger ; elle a donc commis une faute qui a concouru à la réalisation de l'accident dommageable ; Monsieur C... pour sa part roulait, d'après les témoins, à une vitesse folle, ce qui a été confirmé par l'expertise ordonnée dans le cadre de l'enquête de police qui a estimé la vitesse de la moto à 143 km/h ; il résulte du procès-verbal de police qu'il a remonté toute la file de véhicules qui le précédait ; il a ainsi eu un comportement particulièrement imprudent qui a contribué à la survenue de l'accident dommageable ; au vu de l'ensemble de ces données, un partage à hauteur de 1/3 pour Madame Z... et de 2/3 pour Monsieur C... apparaît proportionnel à la nature et à la gravité des fautes commises et à leur rôle causal respectif dans la survenance des dommages subis ; Madame Z... et la société COVEA FLEET doivent donc indemniser la société GENERALI BELGIUM de 1/3 des sommes qu'elle a versées aux proches de Monsieur E... , soit 27.866,66 € (83.600 € / 3) » (arrêt pp. 5 et 6) ;

1/ ALORS QUE tout jugement doit être motivé ; que la cour d'appel se borne à affirmer que, circulant sur le boulevard [...]         et ayant dépassé l'endroit où elle voulait se rendre, elle s'était engagée sur sa droite sur un terrain de la SNCF pour faire demi-tour et en était ressortie en s'avançant sur le boulevard, contraignant ainsi une voiture à s'arrêter pour la laisser passer et qu'au moment où elle effectuait son virage à gauche, elle avait été heurtée par la motocyclette pilotée par Monsieur C... ; que la cour d'appel rappelle que, sortant du terrain de la SNCF, Madame Z... n'était pas prioritaire et devait, conformément à l'article R. 415-9 du code de la route, ne s'engager sur le boulevard qu'après s'être assurée qu'elle pouvait le faire sans danger, et elle affirme que Madame Z... avait « donc » commis une faute ayant concouru à la réalisation de l'accident dommageable ; qu'en statuant par ces affirmations péremptoires, qui ne caractérisent pas le fait que Madame Z... aurait omis de s'assurer qu'elle pouvait réaliser sa manoeuvre sans danger, la cour d'appel se limitant à constater qu'elle était légalement tenue de le faire, et sans indiquer sur quels éléments de preuve régulièrement versés aux débats elle se fondait pour procéder à de telles allégations, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, et n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

2/ ALORS QUE le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur impliqué dans un accident de la circulation assigné par la victime ne peut pas, lorsqu'il a commis une faute qui a contribué à l'accident, exercer un recours contre un autre conducteur qui n'a pas commis de faute ; que la société COVEA FLEET faisait valoir, dans ses conclusions (pp. 6 à 9), qu'il résultait des procès-verbaux de police que Madame Z... s'était engagée [...] dans le sens [...]            après avoir effectué un demi-tour dans l'enceinte du [...]             et « que les usagers se soient immobilisés pour lui céder le passage » ; qu'elle rappelait les déclarations de Madame Z... selon lesquelles, après avoir effectué un demi-tour afin de pouvoir reprendre le [...]             dans le bon sens, elle s'était avancée en bordure de route et s'était assurée que la voie était libre, déclarant : « j'ai regardé à gauche et à droite. A droite la voie était libre, à gauche une première voiture est passée puis au loin j'ai vu une seconde voiture qui lorsque je me suis légèrement avancée après avoir actionné mon clignotant a ralenti comme pour me laisser passer. J'ai vérifié de nouveau à droite puis à gauche, la voiture venant de ma gauche s'est immobilisée à une vingtaine de mètres je pense. J'ai alors entamé ma manoeuvre et ai viré de gauche. Soudain une moto près de moi me percute » ; que la société COVEA FLEET rappelait encore le témoignage de Madame D... qui affirmait : « Nous allions direction [...]    , il faisait encore jour et d'un seul coup, nous sommes arrivés à proximité d'une voiture qui stoppait sa progression pour apparemment laisser sortir un véhicule qui venait de notre droite – certainement d'un parking –, nous avons ralenti, à ce moment une grosse moto nous a doublé par la gauche, sans précaution et à une vitesse folle et immédiatement, a percuté l'avant gauche de la voiture qui était à l'arrêt en attente de s'engager en direction de [...] , je me souviens avec certitude que cette voiture n'était pas en mouvement quand la moto l'a percutée. La conductrice marquait son temps d'arrêt. L'avant du véhicule sur l'axe médian de la chaussée – pour apparemment vérifier que personne n'arrivait sur sa droite, c'est-à-dire de [...]     ; le choc a été violent » ; qu'il résultait de ces différents éléments régulièrement produits aux débats que Madame Z... ne s'était engagée sur le [...]            qu'après s'être assurée qu'elle pouvait le faire sans danger, le véhicule à sa gauche s'étant immobilisé pour la laisser passer, et qu'une fois qu'elle était effectivement engagée sur la voie menant à [...]    , soit à hauteur de la ligne médiane du boulevard, elle avait marqué un temps d'arrêt pour s'assurer que sa manoeuvre était possible, et qu'elle avait alors été percutée par la motocyclette conduite par Monsieur C... ; qu'en se bornant à affirmer qu'en sortant du terrain de la SNCF, Madame Z... n'était pas prioritaire et devait ne s'engager sur le boulevard qu'après s'être assurée qu'elle pouvait le faire sans danger, pour en déduire qu'elle avait « donc » commis une faute ayant concouru à la réalisation de l'accident, sans rechercher, ainsi qu'elle y était expressément invitée, si Madame Z... ne s'était pas engagée sur le Boulevard du Midi qu'après s'être assurée qu'elle pouvait le faire sans danger, et qu'elle n'avait été percutée par la motocyclette conduite par Monsieur C... qu'une fois qu'elle était effectivement engagée sur la voie en direction de [...]      , soit à hauteur de la ligne médiane du boulevard, et avait marqué un temps d'arrêt pour s'assurer qu'aucun véhicule ne venait de la droite et de la gauche, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1251 et 1382 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

3/ ALORS QUE le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur impliqué dans un accident de la circulation assigné par la victime ne peut pas, lorsqu'il a commis une faute qui a contribué à l'accident, exercer un recours contre un autre conducteur qui n'a pas commis de faute ; que la société COVEA FLEET faisait valoir, dans ses conclusions (p. 9), qu'il ne pouvait être retenu à faute pour Madame Z... de n'avoir pas pu anticiper un comportement routier aussi dangereux et violent que celui de Monsieur C... doublant, sur une motocyclette, sur la même voie et par la gauche, toute une file de voitures qui s'étaient immobilisées pour laisser Madame Z... effectuer sa manoeuvre de virage à gauche, à une vitesse très excessive de 143 km/h ; que, si la cour d'appel a constaté que la motocyclette conduite par Monsieur C... roulait effectivement à 143 km/h, en longeant, sur la même file, toutes les voitures qui le précédaient (arrêt p. 5), elle s'est néanmoins bornée à affirmer qu'il appartenait légalement à Madame Z... de ne s'engager sur le boulevard qu'après s'être assurée qu'elle pouvait le faire sans danger, pour en déduire qu'elle avait « donc » commis une faute ayant concouru à la réalisation de l'accident ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme l'y invitait l'exposante, s'il était possible à Madame Z... de s'assurer normalement et prudemment de sa manoeuvre, en l'état du comportement routier particulièrement excessif et violent du conducteur de la motocyclette, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1251 et 1382 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

4/ ALORS SUBSIDIAIREMENT QUE, pour évaluer la part de responsabilité imputable à Madame Z... et Monsieur C... dans la survenance de l'accident, la cour d'appel s'est bornée à caractériser le comportement imprudent de ce dernier qui roulait à la « vitesse folle » de 143 km/h, en remontant toute la file de véhicules qui le précédait (arrêt p. 5) ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme l'y invitaient les conclusions de la société COVEA FLEET (pp. 5 à 9), si la faute causale de Monsieur C... ne consistait pas également dans le fait qu'il ne regardait pas la route, puisqu'il cherchait à voir des amis sur la plage située à gauche de la route, et qu'il conduisait, de surcroît, sous l'effet de stupéfiants, la présence de cocaïne et de cannabis ayant été constatée à un taux important, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1251 et 1382 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 16-28781
Date de la décision : 18/01/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 16 juin 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 18 jan. 2018, pourvoi n°16-28781


Composition du Tribunal
Président : M. Savatier (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gadiou et Chevallier, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.28781
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