La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/01/2018 | FRANCE | N°16-81295

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 17 janvier 2018, 16-81295


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

-
M. Michel X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 5-12, en date du 2 février 2016, qui, pour escroquerie, l'a condamné à trois ans d'emprisonnement et a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 22 novembre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme Y..., conseiller rapporteur, Mme de la La

nce, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Zita ;

Sur le rapport de Mme le c...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

-
M. Michel X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 5-12, en date du 2 février 2016, qui, pour escroquerie, l'a condamné à trois ans d'emprisonnement et a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 22 novembre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme Y..., conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Zita ;

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire Y..., les observations de la société civile professionnelle DELVOLVÉ et TRICHET, de la société civile professionnelle BORÉ, SALVE DE BRUNETON et MÉGRET, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général Z... ;

Vu les mémoires en demande, en défense et les observations complémentaires produits ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des droits de la défense, des articles 25 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, 313-1 du code pénal, 6, §1, et 6, §3 c, de la Convention européenne des droits de l'homme, 410, 513, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motif et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande de renvoi et a déclaré M. X... coupable du chef d'escroquerie et l'a condamné à trois ans d'emprisonnement après avoir refusé d'entendre l'avocat présent à l'audience pour le représenter ;

"aux motifs qu'à l'audience publique du 19 octobre 2015, l'affaire avait été renvoyée à l'audience publique du 5 janvier 2016 ; qu'à l'audience publique du 5 janvier 2016, le président avait constaté l'absence du prévenu ; que, sur les demandes de renvoi, Maître A... s'était présenté à l'audience sans désignation, ni pouvoir et sollicitait le renvoi de l'affaire afin de pouvoir régulariser cette situation ; qu'après en avoir délibéré, la cour, du fait de l'absence du prévenu, avait décidé de retenir l'affaire ; que n'ayant ni désignation, ni de pouvoir, Maître A... n'avait pas plaidé ni présenté d'observations pour le prévenu ; qu'au préalable il ressortait des pièces de procédure que suite à la demande qu'en avait faite M. X..., le bâtonnier du conseil de l'ordre avait, le 28 mai 2015, commis d'office Maître A... pour assurer la défense des intérêts de ce prévenu ; que M. X... avait ensuite désigné et révoqué plusieurs avocats ; qu'ainsi lors de l'audience de demande de mise en liberté du 14 avril 2015, Maître B... et Maître C... avaient été convoqués mais ne s'étaient pas présentés ; que lors de l'audience de demande de mise en liberté du 1er juin 2015, il avait été assisté par son avocat Maître D...                , qui seul désigné avait été convoqué ; qu'il avait encore été assisté par le même avocat lors de l'audience de mise en liberté du 29 juin 2015 ; que par courrier du 4 novembre 2015, Maître D...                 avait avisé la cour de ce qu'il n'était plus le conseil de M. X... ; que lors de l'audience de mainlevée du contrôle judiciaire du 9 novembre 2015, M. X... n'avait pas comparu ni aucun avocat pour lui ; qu'il ressortait des pièces obtenues par l'avocat général du bureau d'aide juridictionnel que ce prévenu avait déposé le 14 décembre 2015 une demande d'aide juridictionnelle ; qu'il ressortait de ce qui précédait qu'à la suite de la désignation de Maître D...                 comme étant son seul avocat, la désignation au titre de la commission d'office de Maître A... était devenu caduque ; que depuis le courrier du 4 novembre 2015 de Maître D...                , ce prévenu n'avait plus d'avocat ; que la demande de renvoi formulée par Maître A... pour régulariser la situation n'était pas recevable, faute de pouvoir pour le faire ; que, le prévenu ne s'étant pas présenté à l'audience, rien ne justifiait que le renvoi fût ordonné le concernant ;

"1°) alors que le droit au procès équitable et le droit de tout accusé à l'assistance d'un défenseur s'opposent à ce que la juridiction juge un prévenu non comparant et non excusé sans entendre l'avocat présent à l'audience pour assurer sa défense ; qu'il résulte des pièces de procédure et des mentions de l'arrêt que Maître A..., qui s'est présenté comme avocat de M. X..., s'est vu refuser le droit de représenter ce dernier et de solliciter le renvoi de l'affaire faute de désignation et de pouvoir ; que la cour d'appel ne pouvait régulièrement statuer comme elle l'a fait sans violer les textes et principes rappelés ci-dessus ; que la cassation est encourue de ce chef ;

"2°) alors que, selon l'article 410 du code de procédure pénale, l'avocat qui se présente pour assurer la défense du prévenu absent, doit être entendu s'il en fait la demande même lorsqu'il est démuni du mandat de représentation prévu par l'article 411 du même code ; qu'en application de l'article 513 du même code, le prévenu ou son avocat doit toujours avoir la parole le dernier ; que cette règle s'applique à tout incident dès lors qu'il n'est pas joint au fond ; qu'en l'espèce, ainsi qu'il résulte des mentions de l'arrêt et des pièces de procédure, M. X..., qui a relevé appel d'un jugement qui l'a condamné pour escroquerie, n'a pas comparu à l'audience ; qu'un avocat s'est présenté pour assurer sa défense et a demandé le renvoi de l'affaire ; que la cour d'appel, après avoir décidé de retenir l'affaire, a statué au fond sans entendre l'avocat du prévenu faute pour celui-ci de disposer d'un pouvoir de représentation ; que cependant l'avocat du prévenu aurait dû être entendu et avoir la parole le dernier tant sur la demande de renvoi que sur le fond ; que la cour d'appel a donc méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus énoncés, d'où il suit que la cassation est encourue ;

"3°) alors que le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle a droit à l'assistance d'un avocat concrète et effective ; qu'une cour d'appel ne peut statuer sans attendre que la partie, qui a sollicité le bénéfice de l'aide juridictionnelle, ait bénéficié de la désignation d'un avocat et du concours effectif de celui-ci ; qu'en l'espèce, ainsi que la cour d'appel l'a elle-même relevé, M. X..., qui n'avait plus d'avocat, avait sollicité le bénéfice de l'aide juridictionnelle le 14 décembre 2015 pour soutenir l'appel formé contre le jugement de première instance ; qu'elle devait donc impérativement attendre qu'un avocat soit désigné au titre de l'aide juridictionnelle ; que par suite elle ne pouvait régulièrement statuer sans attendre la désignation d'un avocat à ce titre et le concours effectif de celui-ci dans le cadre de la procédure d'appel" ;

Vu l'article 513 , alinéa 4, du code de procédure pénale ;

Attendu que, selon ce texte, le prévenu ou son avocat auront toujours la parole les derniers ; que cette règle s'applique aussi à tout incident dès lors qu'il n'est pas joint au fond ;

Attendu qu'il résulte des mentions de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que le prévenu, condamné par le tribunal correctionnel pour escroquerie, a interjeté appel de cette décision et n'a pas comparu devant la cour d'appel ; qu'un avocat s'est présenté à l'audience sans désignation ni pouvoir de la part du prévenu et a sollicité le renvoi aux fins de régularisation ; qu'il a été statué, au cours des débats, sur cette demande pour la rejeter sans que cet avocat ait eu la parole le dernier ;

Mais attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;

D'où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris, en date du 2 février 2016, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 37, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1991 relative à l' aide juridictionnelle et de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix-sept janvier deux mille dix-huit ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 16-81295
Date de la décision : 17/01/2018
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 02 février 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 17 jan. 2018, pourvoi n°16-81295


Composition du Tribunal
Président : M. Soulard (président)
Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Delvolvé et Trichet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.81295
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award