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07/12/2017 | FRANCE | N°16-15148

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 07 décembre 2017, 16-15148


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 11 février 2016), que la société Target system, aux droits de laquelle vient la société Objectware information system, a engagé M. X... le 18 mars 2011 en qualité d'ingénieur, ce contrat prenant effet le 28 mars suivant et comportant une période d'essai de trois mois ; que le salarié, qui n'a fourni aucun travail ni obtenu de salaire, a saisi la juridiction prud'homale pour demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail et le paiement par l'employeur de d

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 11 février 2016), que la société Target system, aux droits de laquelle vient la société Objectware information system, a engagé M. X... le 18 mars 2011 en qualité d'ingénieur, ce contrat prenant effet le 28 mars suivant et comportant une période d'essai de trois mois ; que le salarié, qui n'a fourni aucun travail ni obtenu de salaire, a saisi la juridiction prud'homale pour demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail et le paiement par l'employeur de diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture de ce contrat ;

Sur le premier moyen pris en ses première, deuxième, troisième et cinquième branches et sur le second moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les moyens annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le premier moyen, pris en sa quatrième branche, ci-après annexé :

Attendu que le salarié ayant contesté la rupture du contrat de travail par l'employeur et seulement demandé l'indemnisation de préjudices résultant de la résiliation judiciaire de ce contrat, le moyen est irrecevable car incompatible avec l'argumentation développée devant les juges du fond ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé et signé par Mme Guyot, conseiller doyen faisant fonction de président, et par Mme Piquot, greffier de chambre présente lors de la mise à disposition de l'arrêt le sept décembre deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR débouté M. X... de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur, de ses demandes en paiement de sommes à titre de rappels de salaire et de congés payés afférents, de rappels de RTT, de prime de vacances, de dommages et intérêts pour non-paiement du salaire, d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité compensatrice de préavis, d'indemnité légale de licenciement, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité pour perte du droit individuel à la formation ainsi que de sa demande subsidiaire de dommages et intérêts pour rupture du contrat,

AUX MOTIFS QU'il résulte clairement des pièces du dossier que :

- la SARL Target a signé avec M. X... le 18 mars 2011 un contrat de travail à durée indéterminée qui, selon les stipulations contractuelles, devait prendre effet le 28 mars suivant, et qui comporte une période d'essai de trois mois ;

- dans un échange de mail du 28 mars, M. X... interroge M. Y... qui appartient à la société employeur, en ces termes : « Pouvez-vous me confirmer par retour de mail le report du début du contrat au 18 avril ? Ceci pour me justifier vis-à-vis de pôle emploi », M. Y... répondant le jour même « Nous faisons partir un avenant sur votre contrat de travail votre date d'embauche sera le 18 avril 2011 » ;

- dans un mail du 14 avril, soit antérieurement la date de prise d'effet du contrat, M. Y... informe le demandeur en ces termes : « Monsieur, je fais suite à notre entretien téléphonique, pour votre information la mission n'est pas perdue, j'ai reçu ce matin la nouvelle organisation de Silca. Ce qui nous concerne le 18 avril, je ne peux pas vous recruter sans mission, vous m'envoyer [sic] désolé de ce contretemps, je prends le risque de vous voir partir au sein d'une autre SSII. Vous- même n'accepteriez pas d'être en inter contrat. Je m'engage à vous informer pour la suite » ;

- par un mail du 26 avril 201, la SARL Target sollicite M. X... pour qu'il remplisse son compte-rendu d'activité du mois d'avril,

- par mail du 2 mai 2011, M. Y... écrit notamment « le fait de donner aucune nouvelle de ma part, cela ne veut pas dire que nous avons écarté votre embauche, notre démarche de recrutement a toujours été dans le respect des collaborateurs mais nous subissons ce jour la nouvelle réorganisation » ;

que pour infirmation de la décision, M. X... soutient, au vu de cette situation, que son contrat de travail a pris effet le 18 mars 2011, que son mail invoquant le report du contrat au 18 avril 2011, ne porte que sur la relation commerciale entre la société Target et la Banque Crédit Agricole, comme le démontre son objet « report de mission », que le mail du 14 avril 2011 ne fait aucune référence à la rupture de la période d'essai, en tout état de cause, ne respecte pas les exigences de la convention collective nationale Syntec en la matière et n'a été suivi d'aucune remise de documents légaux de rupture et qu'il n'y a pas eu par la suite aucun licenciement verbal alors que lui-même s'est toujours tenu à la disposition de l'employeur ; que les sociétés Objectware Information System et Objectware soutiennent à titre principal que le contrat de travail de M. X... n'a jamais pris effet au 18 avril 2011 puisqu'il y a été mis fin avant cette date par le mail du 14 avril 2011 et que M. X... avait parfaitement conscience de cette situation puisqu'il n'a plus contacté la société par la suite et qu'il ne peut affirmer s'être tenu à la disposition de l'employeur, ayant monté sa propre entreprise dès le mois d'octobre 2011 ; qu'à titre subsidiaire, elles font valoir que le contrat a été rompu en période d'essai le 14 avril 2011 ; que cela étant, il résulte des éléments factuels non contestés rappelés ci-dessus que le contrat de travail liant M. X... à la société Target a été valablement conclu entre les parties le 18 mars 2011 et que malgré l'absence d'avenant, ses effets ont été reportés d'un commun accord au 18 avril 2011 ; qu'en effet, dans son mail du 28 mars 2011, M. X... demande confirmation de cette date sans protestation et uniquement pour actualiser sa situation au regard de l'assurance chômage ; que les termes employés par M. X... (« pour me justifier au regard de pôle emploi »), démontrent bien que celui-ci évoquait sa situation d'emploi, c'est à dire son engagement par la société Target, non les relations commerciales entre la société Target et le Crédit Agricole qui n'avaient aucun effet sur ses droits à l'égard de l'assurance chômage ; que par ailleurs, le mail du 14 avril 2011 a informé sans ambiguïté M. X... de la volonté de l'employeur de renoncer à son recrutement c'est à dire de ne pas donner suite aux relations contractuelles entre les parties ; que le mail du 26 avril 2011 n'a été suivi d'aucun effet ni d'aucune réaction de la part de la société Target comme de M. X... ; qu'il est donc sans portée ; que, comme le rappellent les sociétés Objectware Information System et Objectware, la rupture du contrat de travail en cours de période d'essai n'est légalement soumise à aucune exigence de motivation et le non-respect des dispositions de l'article 13 de la convention collective nationale Syntec prévoyant l'envoi d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception pour toute résiliation du contrat de travail n'entraîne pas la nullité de la rupture ; qu'il s'ensuit que le contrat de travail de M. X... a bien été valablement formé et a été rompu en période d'essai à l'initiative de l'employeur ; que M. X... ne peut sérieusement contester cette situation alors qu'il n'a pris aucun contact avec la société entre fin avril 2011 et la saisine du conseil de prud'hommes le 12 septembre 2012, qu'il indique lui-même avoir trouvé un emploi en contrat à durée déterminée de deux mois, six mois après les échanges de mail avec M. Y..., qu'il exerce une activité en indépendant depuis janvier 2012, ce qui implique qu'il a effectué des démarches à la fin de l'année 2011 et qu'il n'est pas en mesure de répondre à une proposition de rendez-vous de la société Objectware Information System, ce qui démontre qu'il ne se tient pas à la disposition de son prétendu employeur comme l'établit l'échange de mails suivants en date des 11, 12 et 21 octobre 2012 :

• 11 octobre :

- Jeff Z... : « Monsieur, je vous propose de vous rencontrer pour discuter de la situation. Pourriez-vous venir à mon bureau la semaine prochaine ? Cordialement » ;

- M. X... : « Monsieur, je ne suis pas à Paris en ce moment. Il ne m'est donc pas possible de me déplacer dans vos locaux » ;

• 12 octobre :

- Jeff Z... : « Bonjour, quand pourrez-vous venir ? » ;

• 21 octobre :

- Jeff Z... : « Monsieur, je n'ai pas de retour de votre part. Je fais une démarche vers vous pour tenter de régler cette solution en dehors des tribunaux. Je souhaite étudier en particulier la possibilité de vous proposer un emploi. Mais pour cela nous devons nous rencontrer. Dans quel état d'esprit êtes-vous ? Voulez-vous tirer un bénéfice d'une erreur commise par mon responsable commercial ou voulez-vous retrouver un emploi ? » ;

qu'en application de l'article L.1221-20 du code du travail « la période d'essai permet à l'employeur d'évaluer les compétences du salarié dans son travail, notamment au regard de son expérience et au salarié d'apprécier si les fonctions occupées lui conviennent » ; que si en principe chaque partie au contrat de travail est libre de le rompre au cours de la période d'essai, sans donner de motif, cette rupture est abusive et est sanctionnée par des dommages et intérêts lorsque les véritables motifs de la rupture ne sont pas inhérents à l'aptitude du salarié à assumer les fonctions qui lui sont dévolues ou lorsque la rupture est mise en oeuvre dans des conditions qui révèlent l'intention de nuire ou la légèreté blâmable de l'employeur ; que toutefois, la cour ne peut se fonder sur d'autres moyens que ceux soulevés par les parties et contradictoirement débattus et ne doit statuer que sur les seuls chefs de demande dont elle est saisie ; que M. X... forme toutes ses demandes sur la conséquence de la résiliation judiciaire, sans représenter en cause d'appel sa demande subsidiaire de dommages et intérêts pour rupture abusive de pourparlers formée devant le conseil de prud'hommes ni formuler de prétention au titre de la rupture du contrat de travail en période d'essai ; que le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a accordé des dommages et intérêts à M. X... pour rupture abusive de pourparlers ;

1°) ALORS D'UNE PART QUE les salaires sont dus dès la prise d'effet du contrat de travail, que le report de la date de prise d'effet du contrat de travail ne peut résulter que d'un accord exprès du salarié ; qu'ayant constaté que le contrat signé par la société Target System avec M. X... le 18 mars 2011 avait fixé une date de prise d'effet au 28 mars 2011 et en jugeant cependant que les effets du contrat ont été reportés d'un commun accord au 18 avril 2011 motif pris de l'absence de contestation de cette date dans un mail adressé par M. X... le 28 mars 2011 à la société Target System pour actualiser sa situation au regard de l'assurance chômage, la cour d'appel qui s'est fondée sur le silence du salarié sans constater son accord exprès à la modification de la prise d'effet du contrat au 18 avril 2011, a violé l'article L.1221-1 du code du travail ;

2°) ALORS D'AUTRE PART QUE lorsque le salarié conteste la rupture de son contrat de travail par l'employeur, seule une manifestation claire et non équivoque de ce dernier de rompre le contrat lui est opposable ; qu'en décidant, pour débouter M. X... de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, que ce contrat valablement formé le 18 mars 2011 avait été rompu à l'initiative de l'employeur le 14 avril 2011, au motif que par mail daté de ce jour, M. Y..., directeur commercial de la société Target System avait indiqué à M. X... que la mission au sein de la société Crédit Agricole était reportée et qu'il ne pouvait pas le recruter sans mission, sans constater ni la notification d'une lettre de rupture, ni le respect des dispositions conventionnelles afférentes, ni la remise de documents légaux de rupture, la cour d'appel qui n'a pas caractérisé la manifestation dépourvue d'ambiguïté de la société Targe de rompre le contrat, a violé l'article L.1231-1 du code du travail ;

3°) ALORS DE PLUS QUE la cour d'appel qui constate que par mail du 2 mai 2011, M. Y..., directeur commercial de la société Target a écrit à M. X... que son silence depuis plusieurs semaines ne valait pas renonciation à son embauche, ne peut sans se contredire décider que l'employeur a rompu le contrat de travail le 14 avril 2011 et débouter ainsi l'exposant de sa demande de résiliation de son contrat et de ses demandes subséquentes; que la cour a violé l'article L.1231-1 du code du travail ;

4°) ALORS QU'à titre subsidiaire, en tout état de cause, la rupture du contrat de travail par l'employeur avant le commencement d'exécution du contrat s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, peu important l'existence d'une période d'essai ; qu'ayant constaté que le contrat de travail du 18 mars 2011 n'avait jamais reçu de début d'exécution du fait du report de la mission au sein du Crédit Agricole où devait être affecté M. X... et en considérant cependant, pour rejeter les demandes de ce dernier au titre d'un licenciement injustifié, que la rupture du contrat par la société Target le 14 avril 2011 avait été valablement prononcée pendant la période d'essai et n'avait pas à être motivée, la cour d'appel a violé les articles L.1231-1, L.1232-1, L.1232-6, L.1234-5, L.1235-2, L.1235-3 du code du travail ;

5°) ALORS DE SUCROÎT QUE M. X..., dans ses conclusions d'appel (p.32, § 6.2) a sollicité à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la cour d'appel considérerait que le contrat de travail n'avait pas commencé à être exécuté, le paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de préavis, outre les congés payés y afférents ; qu'en déboutant M. X... de toute demande d'indemnités au motif qu'il n'aurait formé ses demandes que sur le fondement d'une résiliation judiciaire, la cour d'appel a dénaturé les conclusions précitées et a violé l'article 4 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté M. X... de sa demande en paiement d'une somme de 27.500 € à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé,

AUX MOTIFS QU'il doit être rappelé que les dommages et intérêts pour travail dissimulé ne peuvent être alloués que si l'intention frauduleuse de l'employeur est établie ; que tel n'est pas le cas en l'espèce dès lors que la société Target a rompu le contrat de travail avant la date fixée pour l'entrée en fonction de M. X... qui n'a donc réalisé aucune prestation de travail pour le compte de la société ;

ALORS QUE l'employeur a l'obligation de procéder à la déclaration préalable à l'embauche dans les 8 jours précédant la signature du contrat de travail et qu'est réputé travail dissimulé, par dissimulation d'emploi salarié, le fait pour l'employeur de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de cette formalité ; qu'en se fondant sur l'absence de prestation de travail de M. X... pour en déduire l'absence d'intention frauduleuse de l'employeur, la cour d'appel qui a statué par un motif totalement inopérant, a violé l'article L 8221-5 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-15148
Date de la décision : 07/12/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 11 février 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 07 déc. 2017, pourvoi n°16-15148


Composition du Tribunal
Président : Mme Guyot (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.15148
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